AltPy avait interviewé, en 2011, Denys de Béchillon, constitutionnaliste de renom qui enseigne à l’UPPA. Les sujets du moment : le cumul des mandats, les mandats à répétition avaient été largement dépassés pour finir par brosser un large tableau du fonctionnement de nos institutions. Nous avions, à cette occassion, découvert un « brillant conservateur de droite », fier de nos institutions et peu enclin à les changer. Une conviction inébranlable à ce moment-là.
Quand, 3 ans plus tard, l’UDI l’invite à plancher devant ses « cadres » locaux, AltPy a voulu en profiter pour entendre à nouveau le spécialiste. Depuis 2011, la France s’est dotée d’un Président « mal-aimé », d’une loi sur le non-cumul des mandats et un doute « multi-polaire » s’est généralisé parmi la population.
Le thème de la soirée était « cumul des mandats » et « élection proportionnelle ». Comme, 3 ans auparavant, nous avons eu aussi droit à une réflexion sur le fonctionnement de nos institutions. A nouveau, Denys de Béchillon ne cache pas son manque d’enthousiasme pour le non-cumul des mandats. Motif invoqué : la disparition de l’ancrage local. Le cumul dans le temps n’est pas abordé. Dommage.
Pour ce qui est de l’alignement à 5 ans des mandats présidentiels et législatifs, il regrette la disparition des possibles cohabitations qui pouvaient avoir du sens et mieux refléter l’opinion publique. Pour autant, malgré cela, nous aurions « la meilleure constitution du monde ». Depuis 2011, Denys de Bechillon ne semble pas avoir beaucoup changé.
Vient alors le moment où il aborde l’état de la France et ses blocages. Les partis traditionnels sont éclatés. Il n’y a plus de majorité dominante. « Je suis persuadé que Marine le Pen sera au deuxième tour ! » et, si Sarkozy est son opposant, tout est possible. On l’aura compris, Denys de Bechillon préférerait Alain Juppé.
Il parle avec François Bayrou. Une dose de proportionnelle ? Pourquoi pas 50% ? Il y réfléchit mais n’a pas arrêté sa position. Parmi, les participants, on ressent bien que, pour l’UDI, ce serait l’occasion de « grappiller » des postes d’élus. Pour AltPy, se serait tout simplement représenter les citoyens. On sent que le doute s’est installé dans la tête du spécialiste. En arriver à parler de proportionnelle à 50% !
Il va plus loin et imagine des hommes politiques raisonnables de droite, du centre et de gauche pour gouverner ensemble. Une grande coalition pour effacer les extrêmes qui selon lui représentent 40% de la population. Un chiffre qui parait fort. N’est-il pas trop tard ?
Le Denys de Bechillon, cuvée 2014, n’est vraiment plus celui de 2011. Il reflète, à son tour, une France qui doute de ses institutions.
Institutions justement : au moment du jeu des questions-réponses apparait le rôle du Président de la République. Et si on faisait sans ? Il ne va pas jusque là.
De son côté, le « Peterson Institute » vient de publier une analyse sur les réformes nécessaires pour la France. Il suggère de donner à la Présidence un rôle purement représentatif : « The straitjacket of the presidency prevents France from establishing a stable grand parliamentary coalition of the kind that governs most other European countries today. The mainstream center-right and center-left in France will never come together to pass commonsense economic reforms, as each will always try to undermine the others’ chance of winning the next presidential election. Cutting the French president’s term from seven to five years in 2002 and aligning it with the elected term of the parliament has ironically amplified this penchant for political sabotage, because the next election is always primarily about the winning presidency. ». Traduction : « Le carcan du mandat présidentiel empêche la France d’établir une grande coalition parlementaire stable du type de celles qui gouvernent la majorité des autres pays européens. Les courants principaux de centre-droite et de centre-gauche ne se mettront jamais d’accord pour passer des réformes économiques de bons sens, alors que chacun essayera toujours de miner les chances de l’autre de gagner l’élection présidentielle suivante. En réduisant le mandat présidentiel de 7 à 5 ans en 2002 et, en l’alignant avec celui du Parlement, la France a ironiquement amplifié cette tendance au « political sabotage », parce que l’élection suivante consiste toujours à gagner la Présidentielle. » Le blocage de la politique française est expliqué en 4 lignes.
Allant plus loin, le « think-tank » américain, suggère d’en finir avec les élections au Parlement à deux tours. Une autre façon d’introduire au Parlement de la diversité sans passer par un scrutin proportionnel qui nécessitera la mise en place de listes nationales avec le risque d’inévitable professionnalisation du personnel politique.
Bref, la boite à idée est ouverte. Qui pour faire avancer la chose avant qu’un « Bonaparte » ne nous mette tous d’accord ?
– par Bernard Boutin
Pour ma part, je n’arrive pas à comprendre les raisons qui nous empêchent, en France, de gouverner le pays avec une coalition. Nos mentalités sans doute. Ce qui fait que, à la différence de l’Allemagne, de l’Angleterre ou de l’Espagne, nos femmes ou hommes politiques ont avant tout le souci de la division, du clivage comme on dit maintenant. Se différencier des autres tendances, qui n’ont d’ailleurs rien d’idéologiques, mais seulement politiciennes, passe bien avant la recherche de l’intérêt général. Il en va ainsi d’une mentalité bien française, que de Gaulle avait comprise en mettant en place une constitution qui s’oppose à la suprématie des partis.
J’ai pas bien compris l’opinion du « Peterson Institute », comment supprimer le président supprimerait la guerre gauche-droite… Il y aurait toujours un dirigeant avec une majorité…
Si je comprend ce qu’ils disent : Il n’est guère pensable que la classe politique français puisse s’accorder sur une grande coalition dans le cadre des institutions actuelles. Le rythme politique en France est dicté par les Présidentielles qui est un moment où les politiques s’engagent derrière un candidat avec des programmes bien précis et bien divergents; programme qui sera aussitôt défendu par les députés majoritaires élus en suivant les présidentielles. Les conditions pour former une coalition ne sont pas réunies à ce moment-là : un président vient d’être élu et sa majorité en même temps. C’est parti pour 5 ans. La classe politique est divisée en deux entre les gagnants et les perdants.
M de Béchillon pense la même chose en disant que le passage de 7 ans à 5 ans pour les présidentielles fige la « politique » pour 5 ans puisque la chambre est d’office acquise au Président qui vient d’être élu.
Le Peterson institute, pour créer les conditions d’une coalition, dit de simplement procéder à une élection à un tour aux législatives. Au parlement ensuite à se mettre d’accord, par une coalition si nécessaire, sur le président du gouvernement (façon anglaise, espagnole ou allemande)… Des gardes-fous doivent pouvoir être mis en place pour éviter la IVè. Que je sache, les gouvernements anglais, allemands ou espagnols ne tombent pas tous les jours !!!
On nous bassine qu’il nous faut un Napoléon à l’Elysée mais ne peut-on faite autrement ? et surtout éviter cette France politique toujours coupée en deux…
Comme Bonaparte nous nous permettons de proposer: l’archange de Bordères juché sur son tracteur.. le nouvel Henri IV, l’ancien président du parlement de Navarre, le nouveau Fébus sur lequel le soleil ne se couche jamais…l’ennemi terrible du petit Nicolas le successeur de l’ineffable Dédé.. Le nouvel apôtre du bonheur ..
Un rôle certainement à sa démesure…
On a la meilleure constitution du monde…Peut être, mais ce sont les pays du Nord qui montrent ce que sont transparence et désintéressement en politique, c’est l’Allemagne qui montre qu’on peut réformer un pays en associant gauche et droite.
La conclusion qui s’impose sur la responsabilité de nos politiques, soi disant professionnels, élus à vie, est calamiteuse pour eux et pour notre démocratie.
Strict non cumul des mandats, deux mandats au plus dans le temps et retour à la vraie vie pour savoir ce qui se passe réellement dans le pays sont indispensables pour ne pas voir le spectacle calamiteux de ces élus prêts à tout pour garder leur siège, prêts à tous les calculs et les bassesses pour être réélus.
Quel spectacle pitoyable d’entendre ces maires prêts à tout pour conserver l’organisation moyennâgeuse dépensière et inefficace de nos 36 700 communes (la risée de toute l’Europe) ou ces Conseillers Généraux arc boutés sur ce strate du millefeuille adapté a une France qui se déplacait à cheval, ou cette horde de sénateurs ou députés plus nombreux que ceux des Etats unis dont l’absentéisme est une injure à la démocratie, …etc, etc…
Et que dire du jeu politique, fait de blabla, d’absence de vrai débat sincère (aïe ! un mot qui n’est pas politiquement francais..) et d’absence totale de vision et de programme pour notre pays.
Et il faudrait s’étonner que les français méprisent leurs élus?