Dans le chaos initial, «la soupe primitive» est encore chaude. L’entrechoquement des atomes et des molécules nouvellement créés génèrent des contacts, des répulsions, des attractions, des unions, des désunions…
Tout le monde s’exprime, échange, propose, rejette, dans la plus grande anarchie !
Les retombées positives sont peu nombreuses car la sélection y est sévère. Certaines solutions ou structures de quelques molécules seulement s’édifient et persistent, car adaptées aux conditions du milieu ambiant.
Les premières Start-up se mettent en place.
Les investisseurs sont nombreux et généreux, ce sont les flux stellaires qui apportent l’Énergie, la Matière et l’Information. Ces start-up prolifèrent, les créations se multiplient donc ; certaines grossissent en se réunissant, elles passent aux unicellulaires puis à des édifices pluricellulaires plus complexes et souvent extravagants.
C’est la grande explosion de la biodiversité.
Nous sommes à la base de l’ère primaire, entre 500 et 600 millions d’années: faune d’Ediacara et Burgess.
Les premières petites puis moyennes entreprises voient le jour.
L’évolution particulièrement mouvementée du milieu dans toutes ses composantes: climatiques, géographiques, géologiques…fait un grand balayage ; de nombreuses structures auront une vie éphémère, d’autres, plus favorisées par le hasard ou nouvellement créées, plus adaptées, vont s’imposer, se multiplier, se complexifier, se diversifier. Les moyennes entreprises apparaissent, plus fortes, plus adaptées aux contraintes environnementales : ce sont, pour les animaux, l’apparition des différentes lignées d’invertébrés puis de vertébrés.
Au fur et à mesure, du temps, des évolutions environnementales, des sélections adaptatives, beaucoup de ces petites et moyennes entreprises disparaissent, d’autres apparaissent. Certaines structures se fortifient, se renforcent, se diversifient, se complexifient, les vertébrés avec les oiseaux et les mammifères en forment l’essentiel.
Ce sont les grosses entreprises.
L’une d’entre elles recueille le maximum d’investissement et prend un essor foudroyant qualitativement et quantitativement : les hominidés.
La marche en avant de la complexification a amené la synthèse, par le jeu des hasards de l’évolution, de cette entreprise hautement sophistiquée ; elle devient bientôt prisonnière de sa réussite, de sa complexité, de sa difficulté énorme de gestion, de la nécessité d’un maintien de son équilibre, de la régulation de ses apports et de ses rejets, de son immense pouvoir de prolifération….et de nuisances.
La paléontologie est riche de l’histoire de grandes lignées anciennes qui avaient atteint la limite de leur compétence : nummulites, ammonites, dinosaures…., grands mammifères de la préhistoire, l’évolution adaptative n’est plus possible car la spécialisation est trop grande, le retour en arrière non plus ; c’est le déclin, la disparition sous le poids de leur propre paralysie.
Est-ce la fin définitive ?
Absolument pas, l’histoire culturelle est calquée sur l’histoire biologique ; elle nous offre des schémas possibles d’espoir. Il suffit d’en visionner les grandes lignes car toutes les grandes civilisations ont suivi le même chemin :
- Création à partir de petits groupes minoritaires, efficaces car non sclérosés, innovateurs d’idées nouvelles, dynamiques, efficients car faciles à manœuvrer, adaptés aux besoins et technologies nouveaux : agriculteurs, éleveurs, artisans, chercheurs…(Start-up)
- Développement, accroissement, puis hypertrophie et inadaptation liée à leur propre gigantisme.
- Disparition en tant que telle mais survie de quelques groupes minoritaires, longtemps combattus, prêts avec de nouvelles idées , après sélection, à préparer un nouveau départ.
Actuellement, la civilisation occidentale semble tout à fait en être à la fin de la deuxième étape et l’amorce du nouveau départ est entrain de se faire :
- Les Start-up de quelques personnes seulement, formées aux nouvelles technologies, font de plus en plus parler d’elles quand on parle de réussites parfois étonnantes.
- Les investisseurs sont aux aguets prêts à jouer pour leurs intérêts.
- Les grosses entreprises, du CAC 40 et autres, s’effondrent progressivement.
- Les petites et moyennes entreprises, plus souples, plus maniables, attendent pour prendre le train en marche.
> Deviendront-elles par la suite de grosses entreprises à nouveau inadaptées ?
> Cette voie ouverte par la souplesse et la jeunesse des idées et des technologies est-elle aussi la voie d’une vie meilleure pour les survivants ?
On n’a guère avancé de ce côté là car la réponse, cette fois, est beaucoup plus entre les mains de l’homme lui-même, de son intelligence, de ses connaissances, de l’application des valeurs que sa société a édifiées, que des hasards de l’évolution naturelle et de la volonté divine.
Et pourtant : l’impossible est toujours possible !
– par Georges Vallet
crédits photos: raimbault.g.free.fr
La paléontologie est riche de l’histoire de grandes lignées anciennes qui avaient atteint la limite de leur compétence : nummulites, ammonites, dinosaures…., grands mammifères de la préhistoire, l’évolution adaptative n’est plus possible car la spécialisation est trop grande, le retour en arrière non plus ; c’est le déclin, la disparition sous le poids de leur propre paralysie.
L’explication de la disparition des espèces par l’impasse évolutive due à une trop grande spécialisation est une tarte à la crème servie un peu trop souvent. Les biologistes -dont vous êtes il me semble- le savent d’ailleurs bien. Les dinosaures n’ont pas disparu parce qu’ils avaient atteint les limites de leurs compétences, mais suite à des cataclysmes naturels (météorite et/ou volcanisme exceptionnellement intense) qui ont entraîné des changements environnementaux tels que la survie (d’une espèce donnée) tenait vraisemblablement plus de la chance que d’autre chose.
Une première chose sur laquelle il faut je crois insister est que la disparition des espèces et surtout des groupes aussi importants que les dinosaures, les Ammonites et autres, n’a pas une seule cause. C’est un ensemble de conditions, que les hasards de l’évolution ont réuni, qui ont fragilisé une structure génétique, anatomique, physiologique, psychologique, affaiblie par une spécialisation très poussée, irréversible, pendant une période de crise qui est celle de la fin du Crétacé. Même si vous considérez que c’est la tarte à la crème, elle ne doit pas être négligée, loin de là!
On peut admettre que le gigantisme qui a accompagné « la fin de vie » devait être assez difficile à supporter compte tenu de la différence entre le volume et la surface d’échange indispensable au fonctionnement physiologique; la quantité de nourriture à ingurgiter par jour pour les herbivores qui étaient les plus gros et les plus lourds devait être énorme; il ne fallait pas perdre de temps pour couvrir ses besoins dans une journée!!!; Il faut voir dans ce gigantisme un déséquilibre probable du système hormonal dont les causes ne sont pas connues mais dont les conséquences fragilisantes étaient probablement multiples.
La concurrence des petits mammifères prédateurs des oeufs a pu aussi limiter la reproduction. La température à la fin du Crétacé a augmenté, les climats sont devenus plus continentaux, Stephan Jay Gould évoquait une action possible sur un dysfonctionnement des testicules.
Le problème de ou des météorites n’est pas bien sur à éliminer non plus; il a pu y participer au moins dans l’espace de chute mais cela n’a pas éliminé toute la faune terrestre et aquatique de la terre, cela n’a pu qu’être limité; il en est de même du volcanisme, il n’est pas négligeable mais il n’est pas sélectif, bien de espèces ont subsisté! Leur difficulté de déplacement, du fait de leur masse, a pu limiter leur fuite mais c’est loin d’être déterminant.
De plus, il est quand même curieux et intéressant de faire un lien avec la disparition d’autres groupes, à d’autres époques, dans d’autres milieux et dans d’autres groupes zoologiques, avec un point commun, le gigantisme pour l’espèce.
En conclusion de votre participation dont je vous remercie, je pense que votre affirmation que les dinosaures n’ont pas disparu parce qu’ils avaient atteint les limites de leurs compétences, mais suite à des cataclysmes naturels (météorite et/ou volcanisme exceptionnellement intense), me semble assez hasardeuse et trop définitive!
Il est quand même assez largement admis aujourd’hui que les extinctions de masse du passé ont probablement pour cause des cataclysmes naturels induisant des changements très rapides des conditions de vie, et pour l’extinction du Crétacé c’est même de l’ordre du consensus tant les indices sont nombreux. L’impasse évolutive peut expliquer la disparition régulière d’espèces, mais pas les extinctions de masse : celle du Permien a vu la disparition de 50% des espèces de l’époque, il est alors statistiquement totalement improbable qu’il n’y ait pas une cause commune, qui ne peut être que cataclysmique.
Le gigantisme n’est en tous cas pas une explication satisfaisante : il existait des dinosaures de toutes tailles, et pourtant quasiment tous ont disparu à la même époque (à l’exception de la branche qui a aboutit aux oiseaux il me semble). Et en même qu’eux tout un tas d’autres espèces.
«les dinosaures n’ont pas disparu parce qu’ils avaient atteint les limites de leurs compétences, mais suite à des cataclysmes naturels»
«il est alors statistiquement totalement improbable qu’il n’y ait pas une cause commune, qui ne peut être que cataclysmique»
Je me demande si l’on n’est pas entrain de dire la même chose en établissant des rapports différents entre compétence et cataclysme!
La disparition des espèces est indubitablement liée aux changements, cataclysmiques, ou pas, du milieu de vie (là, nous sommes entièrement d’accord) mais la non résistance vient du fait d’une perte de compétence adaptative à ces nouveaux milieux.
« Il est quand même assez largement admis aujourd’hui que les extinctions de masse du passé ont probablement pour cause des cataclysmes naturels induisant des changements très rapides des conditions de vie, et pour l’extinction du Crétacé c’est même de l’ordre du consensus tant les indices sont nombreux. »
Tout à fait d’accord, c’est évident, mais cela prouve, car les cataclysmes naturels n’ont pas été aussi rapides que le nom le laisse supposer (le Crétacé a duré presque 100 millions d’années) , que les espèces, déjà très engagées dans la spécialisation, n’ont pas pu s’adapter; c’est le cas des espèces atteintes de gigantisme( ammonites, bélemnites, rudistes..), de celles spécialisées dans la vie aquatique alors que le niveau des mers s’abaissait, de celles spécialisées dans la vie terrestre alors que le niveau des mers s’élevait, de celles adaptées au froid ou au chaud alors que le climat évoluait…… alors que d’autres, plus polyvalentes car moins spécialisées, plus mobiles, ou de nouvelles créations, ont pu prendre le relais. On peut donc bien parler de perte de compétence adaptative.
A notre époque se produit une nouvelle extinction de masse dont les causes sont le résultat d’un «cataclysme naturel» qui résulte de l’activité humaine; celles qui disparaissent sont celles qui sont inadaptées aux nouvelles conditions imposées: destruction des espaces de vie, température, pollution…..; par contre, comme par le passé, d’autres espèces moins spécialisées, certaines pré-adaptées mais inhibées, d’autres modifiées sans doute par les relations entre le nouveau milieu et le génome (épigénèse), vont proliférer après sélection, se spécialiser à leur tour pour un sort funeste à venir.
«L’impasse évolutive peut expliquer la disparition régulière d’espèces, mais pas les extinctions de masse»
Elle peut expliquer les deux:
La disparition régulière car lorsque le milieu évolue lentement, la spécialisation atteint; à un moment donné, ses limites adaptatives.
La disparition brutale, pour les mêmes raisons au fond, mais, cette fois, plus rapidement du fait d’un changement plus rapide du milieu.
Merci pour cette discussion intéressante.
Je ne fais en fait que reprendre les thèses que Stephen J. Gould expose dans ouvrages. Il présente les extinctions de masse comme des coups de sabre donnés au hasard dans l’arbre des espèces, certains pouvant être des coups de grâce élaguant des branches déjà mal en point, mais la plupart déciment en réalité des branches bien portantes de façon totalement aléatoire.
A propos de l’extinction massive du Permien : « Si 96% ou un pourcentage plus ou moins voisin d’espèces moururent, laissant à 2000 formes seulement la responsabilité de propager la vie ultérieure, c’est que certains groupes périrent et d’autres survécurent sans raison particulière. Les organismes ne peuvent guère se protéger contre des catastrophes d’une telle ampleur, et les survivants peuvent seulement avoir fait partie des heureux 4% qui s’en tirèrent ».
(essai 26 – Les richesses du hasard, dans « Quand les poules auront des dents »)
Les simulations de chute d’un astéroïde géant tels que celui suspecté pour l’extinction du Crétacé montrent que le nuage de poussières et gaz divers projetés dans l’atmosphère peut bloquer le rayonnement solaire et arrêter la photosynthèse pendant suffisant longtemps pour entraîner la mort de la quasi totalité des plantes, avec toutes les conséquences sur la chaîne alimentaire. Ce sont des évènements instantanés à l’échelle géologique.
Je suis bien d’accord avec vous et avec votre « incontournable référence ».
1°)Le départ de notre discussion, souvenez-vous était:
«L’explication de la disparition des espèces par l’impasse évolutive due à une trop grande spécialisation est une tarte à la crème servie un peu trop souvent…. Les dinosaures n’ont pas disparu parce qu’ils avaient atteint les limites de leurs compétences, mais suite à des cataclysmes naturels (météorite et/ou volcanisme exceptionnellement intense)»
Je ne contestais pas l’importance, pour les dinosaures, au Crétacé, de la météorite et/ou d’un volcanisme intense, je contestais seulement le lien définitivement établi:«n’ont pas disparu parce qu’ils avaient atteint les limites…, mais suite à…»; d’autres hypothèses peuvent être retenues!
En admettant même cette importance, elle ne pouvait en aucune façon donner la solution des autres disparitions massives d’espèces durant les différentes ères géologiques; il n’y a pas eu à chaque fois, ou alors cela n’a pas été décelé, de choc de comètes ou de volcanisme intense avant, même, si à cette époque, ces phénomènes étaient plus nombreux que de nos jours; c’est pourquoi j’évoquais la 6ème extinction que nous vivons actuellement.
Wikipedia dont les propos ne sont pas «paroles d’évangile» c’est vrai, nous dit:
«Les causes des extinctions massives ont trois origines:
2°)«le nuage de poussières et gaz divers projetés dans l’atmosphère peut bloquer le rayonnement solaire et arrêter la photosynthèse pendant suffisant longtemps pour entraîner la mort de la quasi totalité des plantes, avec toutes les conséquences sur la chaîne alimentaire»
Bien évidemment! mais, au Crétacé, tous les êtres vivants n’ont pas disparu, or avec la disparition des plantes vertes les chaines alimentaires auraient vraiment du mal à survivre!
Affaire à suivre et combien passionnante!!!!
A+
« Et pourtant: l’impossible est toujours possible! ».