Espagne – Politique : Entre corruption et Podemos, rien ne va plus !


Capture d’écran 2016-01-28 à 19.44.24En Espagne, les blocages sont nombreux depuis que la traditionnelle opposition PP-PSOE (Parti Populaire – Parti Socialiste Ouvrier Espagnol) a éclaté, lors des élections du 20 décembre des représentants au Congrès (Parlement à Madrid). Suite à l’apparition des nouveaux partis : Ciudadanos (40 sièges) et surtout celle de Podemos (69 sièges), le PP (123 sièges) et le PSOE (90 sièges) ne sont pas suffisamment représentés pour former un gouvernement seul, comme ils le font depuis 1976, date de la nouvelle constitution mise en place à la mort de Franco. Pour simplifier le tout, il convient aussi de prendre en compte les indépendantistes, et autres « divers », qui représentent 19 sièges. A l’heure des coalitions, ces voix comptent plus que jamais.

Le Roi, Felipe VI, dans son rôle de « Jefe de Estado » (chef de l’Etat) a consulté la semaine dernière tous les partis, présents au Congrès, afin de trouver à qui proposer de former le nouveau gouvernement. Vendredi 22, il a achevé ses consultations en recevant d’abord, Pedro Sánchez, secrétaire général du PSOE, suivi du Président sortant du Gouvernement, Mariano Rajoy (PP) dont le groupe a obtenu le plus de représentants au Congrès. Naturellement, il a proposé à celui-ci de former un gouvernement ce que Mariano Rajoy a courtoisement refusé, arguant du fait qu’il n’avait pas trouvé à ce jour de majorité de coalition pour gouverner. Lors d’une conférence de presse, il demandait par la suite un délais supplémentaire.

Cette semaine, le Roi a repris ses consultations en débutant par les petits partis régionalistes avant de terminer par le PP et le PSOE vendredi 29. Tout semble se diriger vers une nouvelle situation de blocage qui devrait conduire soit à une dissolution du Congrès, soit à une prolongation de 2 mois donnée aux partis par le Roi pour former un gouvernement.

D’un côté, une partie de poker intense se joue entre le PP qui propose à Ciudadanos et au PSOE de former une coalition que refuse la gauche du PSOE. De l’autre, Pablo Iglesias de Podemos propose de former une coalition avec le PSOE pour mettre en place un gouvernement de gauche. Pedro Sanchez (PSOE) est donc tiraillé de tout les côtés mais, nombreux sont les « Barons » du PS qui craignent d’être avalé par la dynamique Podemos qui parait difficilement contrôlable. Tant sur le fond que sur la forme.

Podemos est craint par beaucoup pour les risques qu’il représente pour l’économie espagnole qui a vu le chômage baisser de 678.000 demandeurs d’emplois en 2015. L’idéologie du parti, issue du mouvement des Indignés, puise son inspiration dans les recettes de l’extrême-gauche* avec des nationalisations, la constitution de Banques Publiques, des menaces de sortir de l’OMC etc. (voir programme).

La presse a fouillé le passé de Pablo Iglesias et publié en « Une » un fait qui est tout un symbole. La figure emblématique de Podemos, théoricien universitaire madrilène, n’avait pas hésité, lors de la dernière campagne électorale d’Hugo Chavez, à aller participer à sa campagne en posant des affiches à Caracas. Et la presse, de rappeler, à quel point de délabrement économique, l’utopiste Chavez a conduit son pays : Chômage, précarité, criminalité et raréfaction des produits de première nécessité sont le lot quotidien des vénézuéliens alors que le pays jouit de réserves pétrolières très importantes. Hugo Chavez, mentor de Pablo Iglesias !

Un Pablo Iglesias qui utilise la moindre intervention publique comme un plateau télé, n’hésitant pas à mettre en scène l’entrée de ses députés, au Congrès, lors de leur installation officielle. Le « script » de la scène : pénétrer dans l’hémicycle parmi les premiers, s’installer aux places les plus télévisuelles, mettre en avant une députée portant un bébé dans ses bras, un autre à la coupe rasta ou encore une élue « noire ». Jean et T-shirts ou chemisette de rigueur. Des « coups de com » très médiatisés qui ont vite fait prendre conscience à une partie des Espagnols du risque de dérives que représente Podemos. Prise de conscience qui s’est accentuée quand Pablo Iglesias a proposé de former un gouvernement au PSOE en s’attribuant d’office le poste de « Vice-Président ». Bref, un bulldozer dans l’antre des « barons du PSOE » qui n’en mènent pas large et vont « devoir se remettre profondément en cause s’ils veulent reprendre la main à gauche ».

Plus d’un mois après les élections, tous les partis restent campés sur leur position et rien n’a réellement avancé. Seul Ciudadanos serait prêt à rejoindre une coalition, de droite ou de gauche, pourvu qu’il y ait accord sur le fond et notamment dans la lutte contre la corruption, ce qui semble difficile à obtenir du côté du PP, à nouveau, empêtré dans un important réseau de corruption. Cette fois-ci, dans la région de Valence. Un PP qui va « devoir se remettre profondément en cause s’il veut reprendre la main à… droite et au centre ».

Tout reste ouvert pour la nomination du prochain gouvernement en Espagne et, si solution il y a avec le Congrès actuel, elle ne pourra apparaître que dans la douleur.

– par Bernard Boutin

* Une affirmation qui devrait animer le forum…
** Source photo d’illustration : http://www.libertaddigital.com

13 commentaires sur « Espagne – Politique : Entre corruption et Podemos, rien ne va plus ! »

  1. Au terme de sa deuxième semaine de consultations, et devant le refus de Mariano Rajoy du Parti Populaire de tenter de mettre en place un nouveau gouvernement, le Roi a proposé à Pedro Sanchez, secrétaire général du PSOE, de le faire. Ce dernier a accepté et demandé environ un mois pour y arriver.
    A titre d’observateur, j’ai trouvé remarquable le processus de consultations entre les différents partis et la Zarzuela (Résidence du Roi). Chaque étape a été suivi de longues conférences de presse des partis permettant à l’auditeur de bien comprendre le déroulement des choses. La logique décision du Roi est arrivée.
    Si Pedro Sanchez n’arrive pas à former son gouvernement « multi-parti », il ne restera plus au Roi que de convoquer de nouvelles élections.

  2. Quelque précisions sur la Corruption rampante en Espagne :
    Le tout dernier scandale sur la corruption du PP de la région de Valence, s’il est bien prouvé car la procédure vient de démarrer, risque de faire très mal au PP alors que le pays a du mal à se trouver un gouvernement.
    Le PP local, communal et régional de Valencia aurait, sous l’ancienne présidence PP de la région, quasiment institutionnalisé, le paiement de commissions « occultes » de 3 à 5% en liquide pour des centaines de contrats publics. La presse espagnole regorge de sujets sur le thème.
    La masse d’argent aurait été telle qu’une organisation avait du être mise au point pour blanchir les sommes d’argent liquide perçues. La Police et la justice enquêtent et les chiffres définitifs sont inconnus à ce jour.
    Il faut se souvenir que, un exemple parmi d’autres, c’est l’ancien Président de la Généralitat catalane vient aussi d’être inculpé pour le même système de « rétro-commissions ».

    Sans Transparence, la corruption trace sa voie en Espagne, comme partout en Europe où Transparency International note un retrait de sa « perception » dans le public. La France est à peine dans la moyenne dans ce classement.

  3. La stratégie de Rajoy qui a passé la main est un petit coup de poker qui anticipe l’impossibilité d’un accord à gauche et la nécessité de nouvelles élections dans lesquelles il pourrait reprendre la main.
    Risqué mais finalement logique.
    Les positions de Podemos et du PSOE sont départagées par deux lignes rouges :
    le réferendum sur la Catalogne : incontournable pour Podemos (droit des citoyens à décider axe fondateur de Podemos)
    La volonté de Podemos d’obtenir de nombreux ministères importants, (opposition des barons du PSOE)
    Il faut rajouter qu’en cas d’accord de gouvernement il devra être validé par les sympathisants de Podemos.
    La volonté de négocier à gauche sera d’autant plus grande que ces partis craindront une baisse de leur influence dans de nouvelles élections.

    La partie de poker est en cours.
    Personnellement la logique voudrait que l’on aille vers de nouvelles élections.

  4. « à quel point de délabrement économique, l’utopiste Chavez a conduit son pays : Chômage, précarité, criminalité et raréfaction des produits de première nécessité sont le lot quotidien des vénézuéliens »

    Sources wikipedia :

    Chômage : passé de 11,3% à 7,8% sous Chavez (soit beaucoup moins qu’en Espagne!)
    Précarité : des chiffres ?
    Pénuries : exact, mais il faudrait ne pas oublier de mentionner que dans les années 90 il y avait encore de la maltrunition au Vénézuela, et que ce n’est plus le cas.

    Criminalité : c’est un gros point noir en effet. Il y en a bien d’autres, et il ne s’agit pas défendre aveuglément le règne de Chavez. Mais à contrario, faire un procès uniquement à charge n’est pas correct non plus.

    Sous Chavez l’analphabétisme a été éradiqué, le nombre d’étudiant à doublé, la part de PIB consacré à l’éducation a triplé, la pauvreté absolue a baissé de 72%, la mortalité infantile de 30%, etc…

    1. je suis entrain de lire « la fabrique du monstre » de Philippe Pujol ( sur les quartiers Nord de Marseille -se lit comme un polar-) Ces résultats  » positifs »(chômage, alphabétisation, pauvreté etc) peuvent être obtenus facilement avec des systèmes mafieux, qui gèrent de la femme enceinte jusqu’au diplômé et au-delà. Aucune illusion sur Chavez, pour ma part. C’est ce qui s’est passé en Palestine, bande de Gaza, et ailleurs, quand les occidentaux s’en foutaient complètement. Qui a fourni les soins, les premiers secours, l’alimentaire, la capacité de survivre aux guerres intestines ? Ceux qui maintenant menacent la planète. Aide-toi, le ciel t’aidera. Je me trompe ?

    2. Voilà ce que la plupart de ses lecteurs attendent d’AltPy !
      Des articles engagés sur des sujets qui, quoique souvent hors Béarn, intéressent et concernent les Béarnais.
      Des contributeurs ou intervenants du forum qui disent chacun leur vérité pour que le Citoyen forge la sienne. Du vrai pluralisme, du pluralisme pur et dur.
      Un journal électronique et gratuit (ce qui veut dirent distribué et non pas vendu). Un journal sans ligne éditoriale. Des articles qui peuvent sembler contradictoires et contrarient jour et après jour, grandement les adeptes d’une ligne éditoriale à finalité politicienne.

    3. Pourtant le passage de Chavez a été une catastrophe pour le Vénézuela !
      Un clientélisme érigé en institution sous couvert d’aides aux plus pauvres, très facile quand on est le pays pétrolier qui dispose de très grosses réserves (les plus importantes au monde …enfin cela dépend du prix du brut)

      Distribuer la manne pétrolière n’est pas une politique, la preuve, le Vénézuela est au plus mal.

      1. Il est évident que sans le pétrole ils n’auraient pas fait cela.

        Mais bien des pays disposant d’une manne pétrolière ne redistribuent pourtant rien du tout, ou pas grand-chose, à la population. Et distribuer dans la santé ou l’éducation ce n’est pas lancer par les fenêtres, c’est aussi un investissement.

    4. Si le Chavisme avait un bilan si brillant que cela, 2 ans après la mort de son fondateur, il n’aurait pas déjà perdu la majorité au Parlement malgré tous les moyens de pression (violents) dont il dispose.

      1. Où ai-je parlé de bilan « brillant » ?J’ai juste rappelé qu’il y avait AUSSI eu des choses positives sous Chavez, et pas uniquement des choses négatives comme tu l’as écrit. Et si il y a eu une alternance c’est aussi le signe que la démocratie n’a pas si mal fonctionné que ça. Le Venezuela est l’un des pays les plus corrompus du monde selon Transparency International, mais il l’était déjà avant Chavez.

        1. Bonsoir PierU,
          Alors si ce n’est pas « brillant » pourquoi donc est-ce un sujet d’intérêt ou de comparaison (qui n’est pas raison) pour toi? That’s really the only question…
          Serais-tu universitaire?

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