Les philosophes

blaQuelques vraies (fausses) polémiques publiées très récemment sur ce site m’ont rappelé la retranscription d’une conférence donnée au début du siècle dernier et qui avait pour titre : les philosophes. Extraits.

« Qu’est-ce que la philosophie ? Une secte, dit-on d’ordinaire : et elle en a bien en effet tous les dehors.

Orthodoxie, d’abord : « La raison, écrit Diderot dans l’Encyclopédie, est à l’égard du philosophe ce que la grâce est à l’égard du chrétien. » C’est le principe de nos Libres Penseurs : « Nous avons foi en la raison. »

(…)

Ainsi ce qu’on demande aux frères est moins de servir la raison que d’y croire ; il en est de ce culte-là comme des autres : c’est la bonne volonté qui sauve.

(…)

Tel esprit boiteux sera donc admis, s’il est bon philosophe, et tel autre, exclu, qui est bien d’aplomb, mais indépendant. Le parti pris est net, et encourage, vous le savez, un quiétisme de la raison encore plus nuisible à l’intelligence que le quiétisme de la foi à la volonté. Rien ne fait plus de tort au progrès de la raison que son culte : on ne se sert plus de ce qu’on adore.

(…)

Car on persécute ― autre pratique de secte. Avant la Terreur sanglante de 93, il y eut, de 1765 à 1780, dans la république des lettres, une terreur sèche, dont l’Encyclopédie fut le comité de salut public, et d’Alembert le Robespierre. Elle fauche les réputations comme l’autre les têtes, sa guillotine, c’est la diffamation, l’infamie, comme on dit alors ; le mot, lancé par Voltaire, s’emploie, en 1775, dans les sociétés de province, avec une précision juridique. “ Noter d’infamie ” est une opération bien définie, qui comporte toute une procédure, enquête, discussion, jugement, exécution enfin, c’est-à-dire condamnation publique au mépris, encore un de ces termes de droit philosophique, dont nous n’apprécions plus la portée.

(…)

C’est là, vous le voyez, tout l’extérieur d’une secte vigoureuse et bien armée, de quoi en imposer à l’ennemi, de quoi aussi piquer la curiosité des passants, comme nous le sommes ce soir ; car derrière de si grands murs, nous devons nous attendre à trouver une grande ville, voire une belle cathédrale : on ne conçoit point, en général, de fanatisme sans foi, de discipline sans loyalisme, d’excommunication sans communion, d’anathèmes sans puissantes et vivantes convictions ― pas plus qu’on ne conçoit un corps sans âme.

(…)

Mais voici la merveille : ici, et seulement ici, nous sommes déçus : ce puissant appareil de défense ne défend rien, rien que du vide et des négations. Il n’y a rien, là derrière, à aimer, rien à quoi se prendre et s’attacher. Cette raison dogmatique n’est que la négation de toute foi, cette liberté tyrannique, la négation de toute règle. Je n’insiste pas sur un reproche si souvent fait aux philosophes : eux-mêmes avouent et glorifient le nihilisme de leur idéal.

(…)

Ce qui me gêne, au contraire, c’est de ramener ces effrayantes et diaboliques conséquences au tout petit fait qui les explique, si banal, si menu : causer. Là pourtant est l’essentiel. La république des lettres est un monde où l’on cause, mais où l’on ne fait que causer, où l’effort de chaque intelligence cherche l’assentiment de tous, l’opinion, comme il cherche, dans la vie réelle, l’œuvre et l’effet.

(…)

C’est là, direz-vous, une bien chétive raison pour une si grosse conséquence ; c’est peser bien lourdement sur le plus innocent des jeux. Mais du moins je ne suis pas le premier coupable, et les joueurs ont commencé, ― je ne parle pas des premiers, des bons vivants de 1730, mais des encyclopédistes de l’âge suivant. Ceux-là sont graves : comment ne pas l’être quand on est sûr que l’éveil de l’esprit humain date de son siècle, de sa génération, de soi-même ? L’ironie remplace la gaieté, la politique les plaisirs. Le jeu devient une carrière, le salon un temple, la fête une cérémonie, la coterie un empire dont je vous ai montré le vaste horizon : la république des lettres.

(…)

Et que fait-on dans ce pays-là ? Rien d’autre, après tout, que dans le salon de Mme Geoffrin : on cause. On est là pour parler, non pour faire ; toute cette agitation intellectuelle, cet immense trafic de discours, d’écrits, de correspondances, ne mène pas au plus petit commencement d’œuvre, d’effort réel. »

Extraits de : « Les philosophes » (conférence faite en 1912). Les sociétés de pensée et la démocratie moderne. Augustin Cochin – Éditions Copernic – 1978.

Mehdi Jabrane

Politique à l’ancienne

pate-a-l-ancienne-avec-20-de-foie-gras-de-canardIl se dit que les prochaines élections départementales vont battre des records d’abstention. Influent localement, notre maire avait la capacité de créer les conditions d’un sursaut démocratique…Hélas ! C’est une vision rétrograde de la politique qu’on nous propose au suffrage.

En novembre dernier, j’ai rédigé un texte sur les dépenses de campagnes (ici).

Au regard des dépenses exorbitantes des principaux candidats, je fis un parallèle entre nos sportifs et nos élus : les uns dopés aux drogues et les autres au fric.

Les chiffres de 2008 devant être identiques à ceux de 2014, j’en conclus alors que la mandature de François Bayrou ne donnerait rien de bon car l’élection de sa liste était illégitime sur un plan moral.

J’aurais pu ajouter qu’elle était illégitime sur un plan comptable car les bulletins exprimés pour sa liste « Aimons Pau » ont représenté moins de 35 % des inscrits.

Certes ce faible taux était  handicapé par une abstention record. Cette abstention paloise était le signe, comme partout ailleurs, d’un rejet du citoyen vis à vis de la politique en général : politiciens menteurs, fraudeurs, politiciens cumulards et surtout impuissants…

Porteur d’un discours de renouveau au niveau national, notre maire aurait pu nous proposer un renouveau au niveau des pratiques politiques locales.

Malheureusement pour nous, en soutenant les listes Aimons Pau 1, 2, 3 et 4, François Bayrou nous replonge dans une logique de politicard du siècle passé.

Quelques chiffres.

Les 4 listes « Aimons Pau » comptent 4 binômes titulaires et 4 binômes suppléants soit 16 personnes au total.

Sur ces 16 personnes, 14 sont déjà élues donc potentiellement en situation de cumul à l’issue de ces élections.

Sur ces 14 élus, 10 appartiennent à l’actuelle majorité municipale, soit quasiment le quart !

Heureusement pour nous, la ville de Pau n’est découpée qu’en 4 secteurs pour ces élections.

Découpée en 10 secteurs, notre maire aurait trouvé le moyen de faire engager l’ensemble des 40 élus de la majorité municipale à ces élections !

On peut se poser la question du sérieux de cette affaire : existe-t-il vraiment une volonté de la part de note maire pour faire une politique différente ?

On peut aussi se remémorer les discours post élections de notre maire et des membre de la majorité : « il y a des cadavres derrière chaque placard », « le travail à faire est immense », « les attentes sont extrêmement fortes donc il y faut un engagement et une proximité de tous les instants »,…

Encore une fois cette mandature ne donnera rien de bon. Nous sommes persuadés que ce gâchis démocratique nourrit déjà la future génération.

Mehdi Jabrane

 

 

La barbe à la mode ou la sagesse des Lois

kropotkine2Un petit texte de Pierre Kropotkine de 1882 démontre les causes et les méfaits de l’inflation législative. Les dernières statistiques de l’activité parlementaire de notre Assemblée montre malheureusement que cette inflation n’est pas prête de ralentir.

Le chômage, la crise, la dette, le terrorisme, l’insécurité. Les citoyens n’attendent plus grand chose de nos politiciens. Il suffit de constater le nombre toujours plus important d’abstentionnistes.

Mais, comme pour se donner une raison d’exister, nos élus nationaux créent des tonnes de lois. Or, bien que cette perversion de notre système politique soit connue, nos représentants (?) multiplient les textes de lois comme d’autres des petits pains… Où quand nos politiciens veulent jouer aux prophètes :

  • 442 lois promulguées lors de la XIème législature (1997-2002)
  • 465 lois promulguées lors de la XIIème législature (2002-2007)
  • 500 lois promulguées lors de la XIIIème législature (2007-2012)
  • 222 lois promulguées depuis le début de la législature actuelle (2012 -)

Je dis que cette perversion de notre système politique est bien connue car elle a été caractérisée dans de nombreux rapports et études. Suite à ma récente lecture d’un texte de Kropotkine daté de 1882, je dois ajouter que cette perversion est connue et depuis longtemps.

Extraits de la page 1 de « La loi et l’autorité » :

«Quand l’ignorance est au sein des sociétés et le désordre dans les esprits, les lois deviennent nombreuses. Les hommes attendent tout de la législation, et chaque loi nouvelle étant un nouveau mécompte, ils sont portés à lui demander sans cesse ce qui ne peut venir que d’eux-mêmes, de leur éducation, de l’état de leurs mœurs.» — Ce n’est pourtant pas un révolutionnaire qui dit cela, pas même un réformateur. C’est un jurisconsulte, Dalloz, l’auteur du recueil des lois françaises, connu sous le nom de Répertoire de la Législation. Et cependant ces lignes, quoique écrites par un homme qui était lui-même un législateur et un admirateur des lois, représentent parfaitement l’état anormal de nos sociétés.

Dans les États actuels une loi nouvelle est considérée comme un remède à tous les maux. Au lieu de changer soi-même ce qui est mauvais, on commence par demander une loi qui le change. La route entre deux villages est-elle impraticable, le paysan dit qu’il faudrait une loi sur les routes vicinales. Le garde-champêtre a-t-il insulté quelqu’un, en profitant de la platitude de ceux qui l’entourent de leur respect : — «Il faudrait une loi, dit l’insulté, qui prescrivît aux gardes-champêtres d’être un peu plus polis.» Le commerce, l’agriculture ne marchent pas ? — «C’est une loi protectrice qu’il nous faut ! » ainsi raisonnent le laboureur, l’éleveur de bétail, le spéculateur en blés, il n’y a pas jusqu’au revendeur de loques qui ne demande une loi pour son petit commerce. Le patron baisse-t-il les salaires ou augmente-t-il la journée de travail : — «Il faut une loi qui mette ordre à cela ! » — s’écrient les députés en herbe, au lieu de dire aux ouvriers qu’il y a un autre moyen, bien plus efficace «de mettre ordre à cela» : reprendre au patron ce dont il a dépouillé des générations d’ouvriers. Bref, partout une loi ! une loi sur les rentes, une loi sur les modes, une loi sur les chiens enragés, une loi sur la vertu, une loi pour opposer une digue à tous les vices, à tous les maux qui ne sont que le résultat de l’indolence et de la lâcheté humaine.

En lisant ce texte toujours d’actualité donc, j’ai eu souvenance d’un verset de l’Ecclésiaste que je cite en cadeau pour les amoureux (nombreux parmi les commentateurs de ce site) des textes sacrés  : « Ce qui fut sera, Ce qui s’est fait se refera, Et il n’y a rien de nouveau sous le soleil. »

Plus sérieusement, nos élus qui ont fait du sophisme « nouveauté = progrès » leur religion, ne daignent s’inspirer de la sagesse des prophètes mais peut-être devraient-ils s’inspirer de la sagesse moins ancienne des anarchistes ?

Par Mehdi Jabrane

 

Voltaire, un apôtre de l’Islam pour la paix entre les peuples

220px-D'après_Maurice_Quentin_de_La_Tour,_Portrait_de_Voltaire,_détail_du_visage_(château_de_Ferney)Les réactions de certains pays musulmans suite à la publication du dernier Charlie Hebdo ont fait voir des images choquantes d’hostilité envers la France. Ces images nourrissent à leur tour le discours de certains militants pour un Islam des Lumières. Les uns comme les autres savent-ils pourtant que l’Islam a été un élément déterminant dans la formation de « l’esprit des Lumières » ?

Depuis la fin du 19ème siècle et l’ouvrage définitif de Gustave Le Bon sur le sujet (la civilisation des arabes), il n’est plus à démontrer l’influence de la civilisation arabo-musulmane sur l’essor de la science en Occident. On sait moins que des monuments du patrimoine littéraire occidental comme la Divine Comédie, Robinson Crusoé ou Don Quichotte sont d’inspiration musulmane.

Pourtant, ce qui est encore moins connu, c’est que de la Réforme au Romantisme en passant par les Lumières, la production philosophique occidentale sur le thème de la tolérance a souvent pris l’Islam et son prophète comme référence et source d’inspiration.

Pour le curieux désirant se former une idée plus approfondie, je donne en fin de texte une bibliographie sur ce sujet (certes non exhaustive car limitée aux seuls ouvrages de ma bibliothèque).

Cependant, afin de réconcilier le nigérien « fanatique », le français « rationaliste » et le jeune banlieusard musulman noyé sous les productions religieuses éditées en Arabie Saoudite, je me permets de retranscrire ci-dessous quelques citations de Voltaire, alias le Prince des Philosophes, sur l’Islam et son prophète.

Certes, nous avons tous entendu un jour ou l’autre, le titre de la tragédie de Voltaire écrite en 1736 « le Fanatisme ou Mahomet le Prophète » qui a nourri (et nourrit encore) notre inconscient collectif. Par contre, ce qui est moins enseigné dans nos écoles, cest que cette pièce justement est (très) loin de traduire le jugement de Voltaire sur l’Islam et son prophète. Extraits de quelques un de ces ouvrages :

LETTRES PHILOSOPHIQUES (1733) :

« Sa religion est sage, sévère, chaste et humaine: sage puisqu’elle ne tombe pas dans la démence de donner à Dieu des associés, et qu’elle n’a point de mystère; sévère puisqu’elle défend les jeux de hasard, le vin et les liqueurs fortes, et qu’elle ordonne la prière cinq fois par jour; chaste, puisqu’elle réduit à quatre femmes ce nombre prodigieux d’épouses qui partageaient le lit de tous les princes de l’Orient; humaine, puisqu’elle nous ordonne l’aumône, bien plus rigoureusement que le voyage de La Mecque. Ajoutez à tous ces caractères de vérité la tolérance ».

EXAMEN IMPORTANT DE MILORD BOLINGBROKE  OU LE TOMBEAU DU FANATISME (1736) :

« Le mahométisme était sans doute plus sensé que le christianisme. On n’y adorait point un Juif en abhorrant les Juifs; on n’y appelait point une Juive mère de Dieu; on n’y tombait point dans le blasphème extravagant de dire que trois dieux font un dieu; enfin on n’y mangeait pas ce dieu qu’on adorait, et on n’allait pas rendre à la selle son créateur. Croire un seul Dieu tout-puissant était le seul dogme, et si on n’y avait pas ajouté que Mahomet est son prophète, c’eût été une religion aussi pure, aussi belle que celle des lettrés chinois. C’était le simple théisme, la religion naturelle, et par conséquent la seule véritable. »

DICTIONNAIRE PHILOSOPHIQUE (1764)

« Je vous le dis encore, ignorants imbéciles, à qui d’autres ignorants ont fait accroire que la religion mahométane est voluptueuse et sensuelle, il n’en est rien; on vous a trompés sur ce point comme sur tant d’autres. »

« On l’admire (Mahomet) pour s’être fait, de marchand de chameaux, pontife, législateur, et monarque; pour avoir soumis l’Arabie, qui ne l’avait jamais été avant lui, pour avoir donné les premières secousses à l’empire romain d’orient et à celui des Perses. Je l’admire encore pour avoir entretenu la paix dans sa maison parmi ses femmes. Il a changé la face d’une partie de l’Europe, de la moitié de l’Asie, de presque toute l’Afrique, et il s’en est bien peu fallu que sa religion n’ait subjugué l’univers. »

PROFESSION DE FOI DES THÉISTES (1768) :

« Quand ces Arabes eurent conquis l’Espagne et la province narbonnaise, ils leur laissèrent leur religion et leurs lois. Il laissent encore vivre en paix tous les chrétiens de leur vaste empire. Vous savez, grand prince, que le sultan des Turcs nomme lui-même le patriarche des chrétiens grecs et plusieurs évêques. Vous savez que ces chrétiens portent leur Dieu en procession librement dans les rues de Constantinople, tandis que, chez les chrétiens, il est de vastes pays où l’on condamne à la potence ou à la roue tout pasteur calviniste qui prêche, et aux galères quiconque les écoute. O nations! Comparez et jugez. »

Puissent ces quelques extraits être enseignés également dans les écoles de Dakar, d’Alger et dans nos banlieues, pour réconcilier les graines de fanatiques (voire quelques rationalistes ignorants) avec la France des Lumières.

Bibliographie :

En français :

  • L’Islam et la Réforme (étude sur l’attitude des réformateurs zurichois envers l’Islam 1510-1550) de Victor Segesvary – Univerty Press of America
  • Représentation de l’Islam dans la France du 17ème siècle de Dominique Carnoy – L’Harmattan
  • L’Orient dans la littérature française au 17ème siècle et au 18ème siècle de Pierre Martino – Slatkine Reprints
  • Les relations de voyages du 17ème siècle et l’évolution des idées (contribution à l’étude de la formation de l’esprit au 18ème siècle) de Geoffroy Atkinson – Slatkine Reprints
  • Voltaire et l’Islam de Djavad Hadidi – Publications Orientalistes de France
  • L’Islam au siècle des Lumières (Image de civilisation islamique chez les philosophes français du 18ème siècle) de Sadek Neaimi – L’Harmattan
  • Arabes des lumières et Bédouins romantiques de Denise Brahimi – Le Sycomore
  • Lumières orientales et Orient des Lumières de Nicole Hatem – L’Harmattan

En anglais :

  • Thomas Jefferson’s Qur’an: Islam and the Founders de Denise Spellberg – Vintag

  • The ‘Arabick’ Interest of the Natural Philosophers de G. A. Russell – Brill

  • Henry Stubbe and the Beginnings of Islam (The Originall & Progress of Mahometanism) de Nabil Matar – Columbia University Press

  • Islam and the English Enlightenment, 1670–1840 de Humberto Garcia – Johns Hopkins University Press

Par Mehdi Jabrane

Un Charlie pour ma fille ?

Les tueries lâches et abominables de la semaine passée ont fait naître des milliers de débats sur la liberté d’expression. En tant que jeune parent c’est un débat plus intime qui me travaille  : un débat avec ma fille…où la liberté passe en second.

12-charlie-hebdo.w245.h368.2xQuand tu seras plus grande ma fille tu comprendras pourquoi aujourd’hui tes parents, ta famille, tes professeurs t’interdisent d’être irrespectueuse et vulgaire mais que majeure, tous ces gens ne pourront t’en empêcher au nom de la liberté.

Tu comprendras pourquoi en 1789, des gens sont morts pour défendre cette liberté et qu’aujourd’hui des gens, par l’irrespect et la vulgarité, ont voulu la défendre au risque de leur vie.

Tu comprendras pourquoi des gouvernants ont multiplié des lois liberticides pour défendre cette liberté.

Tu comprendras aussi pourquoi un pays peut se mobiliser comme un seul homme pour cette liberté, mais qu’il peut laisser mourir de solitude ses parents et mourir de faim son voisin.

Tu comprendras enfin pourquoi dans notre devise républicaine liberté-égalité-fraternité, ton voisin ne pourra jouir du premier concept que si tu fais du dernier ton devoir.

Les lois n’y changeront rien. Sans fraternité, pas de liberté.

Par Mehdi Jabrane

Jaurès Vs Bayrou ou la dette 2.0

POP_ART_JEAN_JAURESLors du conseil Municipal du 17 novembre, MM. Bayrou et Pérès (adjoint aux finances) ont rapidement évoqué l’adhésion de la ville de Pau à l’Agence France Locale pour 550 000 euros. Nous reviendrons dans un second texte sur l’objet de cette décision importante. Mais avant cela, un petit texte de Jaurès sur la question des finances et de la dette publique au moment de la Révolution Française me semble pertinent.

Le texte ci-dessous est un extrait du tome I de l’Histoire socialiste de la Révolution Française de Jean Jaurès (pour Oscar : édition de 1922, 6 euros TTC d’occasion libraire Chilpéric à Pau).

« En 1789, dans le tableau communiqué par Necker à la Constituante, la dette publique s’élève au chiffre de 4 milliards 467 millions. (…) Mais quelles que fussent l’origine et la forme de cette dette, elle était représentée par des billets, par des titres.

On voit quelle énorme place les créanciers du Trésor Public tenaient dès lors dans la vie de la France.

Une somme de 250 millions était consacrée au service de la dette. (…) L’intérêt annuellement servi représente le dixième du produit net total de la terre de France.

Il est aisé de comprendre combien les créancier de l’État étaient une force sociale ; par eux, la bourgeoisie était maîtresse financièrement de l’État moderne, avant de s’en emparer politiquement.

Il n’y avait pas de régime qui put résister à un soulèvement des créanciers : or la bourgeoisie créancière de la monarchie d’ancien régime ne se sentait plus en sûreté avec celle-ci. Elle avait toujours à craindre une banqueroute totale ou partielle décrétée par la volonté d’un seul homme : et son inquiétude croissait avec le montant même de la dette.

Rivarol a écrit : la Révolution a été faite par les rentiers ; et il est bien certain que si beaucoup de bourgeois ont réclamé un ordre nouveau, c’est pour mettre la dette publique sous la garantie de la nation plus solide que celle du roi. »

Étonnant non ?

Certes, cette mise en lumière d’une des causes de la Révolution Française n’est pas celle enseignée à l’école, mais ce qui est important ici c’est que la Révolution bourgeoise continue en réalité son œuvre en allant encore plus loin dans sa volonté de sécuriser ses affaires.

Comme nous le savons tous, mieux vaut avoir 1 000 clients à 1 euro que 1 client à 1 000 euros !

Or après l’Etat, ce sont les collectivités qui jouent aux apprentis sorciers en déléguant un peu plus « la planche à billets » à des institutions pas toujours soucieuses du bien commun.  « Planche à billets » dont M. Bayrou fait mine d’avoir horreur devant des élus absents (hormis Mme Castéra) alors qu’il sait pertinemment que la FED et la BCE (indirectement encore) la font tourner à plein régime.

Monsieur Bayrou donc, qui comme tout être humain n’est pas à une contradiction près, continue à imposer sa vision « lucide » des finances avec des arguments toujours spécieux (pas d’autre alternative possible sinon c’est le FN et le chaos) devant un Dartigolles toujours droit dans ses bottes (et avec raison) tout en optant pour une pseudo mutualisation des besoins d’emprunts sur le marché obligataire via cette Agence, qui bien évidemment et c’est écrit dans sa charte, ne peut pas être déclarée en faillite et ne peut pas cesser d’exister…

Je reviendrai un peu plus en détail sur ce dispositif et ce qu’en dit d’ailleurs le cabinet (Michel Klopfer) qui a audité les comptes de la CDA dans un rapport dont nous attendons qu’il soit mis à la disposition de tous.

par Mehdi Jabrane

 

Les faux débats. Encore et toujours…

medico_pesteLes propos de Nicolas Sarkozy sur Rachida Dati ont créé la polémique du jour. Figure de style oblige, chacun a fait son petit commentaire. Celui de notre maire François Bayrou me paraît tout à fait déplacé au regard de ma propre expérience vécue avec ce dernier.

Propos de Nicolas Sarkozy :
« Je m’étais dit que Rachida Dati, avec père et mère algérien et marocain, pour parler de la politique pénale, cela avait du sens » pour représenter « la France dans sa diversité ».

Réaction de François Bayrou :
« Lorsque vous parlez toujours des origines et de la couleur de la peau, d’une certaine manière, vous faites des catégories différentes de citoyens et ce n’est pas ma vision des choses (..) Je pense que ce que la France a de plus important, c’est de regarder les gens non pas en fonction de leur origine, mais de la citoyenneté qu’ils portent ».

On ne peut que saluer ici ce discours rassembleur et donc par définition républicain.
Sauf qu’en privé le discours de Monsieur Bayrou n’est pas toujours aussi tranché…

Lors du mois de décembre dernier, en plein mois de « recrutement » pour les listes aux municipales, j’ai rencontré, comme beaucoup d’autres d’ailleurs, les 3 candidats favoris MM. Habib, Bayrou et Uriéta.

Lors de ces multiples rendez-vous très enrichissantss, le seul à m’avoir demandé « combien  je pesais » sur le quartier du Hameau et la Mosquée de Pau a été M. Bayrou.

Je fus alors un peu étonné de cette approche mercantile et triplement piégeuse car triplement communautariste (communautarisme que nous devons fuir comme la peste)  :

  • communautarisme géographique car venant du quartier Hameau
  • communautarisme ethnique car mon faciès et mon nom rappellent forcément mon origine maghrébine
  • communautarisme religieux car étant d’origine marocaine par mon père je suis de facto assimilé musulman

Il me répondit alors que les élections sont les élections, comme Isidore Lechat les affaires sont les affaires.

Ce jour là, à l’étage du bar le Saint Vincent, je n’avais bien évidemment pas de dictaphone comme Patrick Buisson, je prie donc le lecteur de me croire de bonne foi.

Ces discours hypocrites ou à l’américaine (n’est-ce pas les entreprises Best In Class qui prônent dorénavant la diversité dans leur charte éthique) sur la représentativité des minorités sont stériles et masquent le vrai problème de notre République.

Car en effet, que nos élites politiques et notre Assemblée soient paritairement masculines et féminines, homo ou hétéro, blacks, blanches et beurres, le problème de fond reste inchangé…La non représentativité de la majorité des français aux fonctions électives c’est à dire les employés et les ouvriers.

Des chiffres sur le sujet pour ceux que ça indigne autant que le devenir du Béarn :
http://www.cevipof.com/fichier/p_publication/980/publication_pdf_notelucrouban.1.pdf

J’entends déjà les sophismes…

Par Mehdi Jabrane

Une campagne à 918 euros…ou la démocratie hypocrite

bob-cochonou-tourdefranceLa décision récente de M. Habib de démissionner du conseil municipal, une fois ses comptes de campagne validés, me donne l’occasion ici de revenir sur ce tandem maléfique : argent et politique.

Une campagne électorale coûte beaucoup d’argent. Depuis plus d’un siècle c’est LA condition indispensable pour être élu. Ce n’est d’ailleurs pas la dernière affaire Serge Dassault à la mairie de Corbeil-Essonnes qui prouvera le contraire.

En attendant les montants des dépenses de campagne de 2014 qui seront communiqués prochainement par la Commission des Comptes de Campagne (http://www.cnccfp.fr/), voici les chiffres de 2008 pour les municipales de Pau :

  • Dépenses François Bayrou : 114 728 euros
  • Dépenses Martine Lignères- Cassou : 93 940 euros
  • Dépenses Yves Uriéta : 85 085 euros
  • Dépenses Eric Schatz : 925 euros
  • Dépenses Liste Pau’pulaire 2014 dont j’étais tête de liste : 918 euros

A noter que ce montant officiel ne prend pas en compte les dépenses liées à la campagne dite officielle (!) comprenant bulletins de vote, affiches et professions de foi soit 3 400 euros au total pour la liste Pau’pulaire.

Quelques questions :

  • Ces dépenses exorbitantes étaient-elles connues des 343 candidats aux municipales de Pau avant le début de la campagne électorale ?
  • Si oui, n’est-ce pas alors le signe d’une compromission de ces candidats à la loi du plus fort (ici le plus riche) bien qu’ils défendaient tous dans leurs discours les valeurs républicaines de liberté, égalité et fraternité ?
  • Si non, n’est-ce pas alors le signe d’une ignorance synonyme d’incompétence quant à la gestion d’une collectivité ?

Je reconnais que mon articulation est fallacieuse, car elle ne laisse aucune issue heureuse à mes anciens concurrents, mais c’est pour mieux faire valoir mon propos : cette mandature ne donnera rien de bon !

  • En niant dès le départ par ignorance ou par calcul les principes démocratiques, nos élus au conseil s’imaginent-ils sérieusement pouvoir changer quoi que ce soit  dans cette ville ?
  • Ou bien a t-on déjà vu des sportifs dopés réussir et prospérer ?
  • Ou alors est-ce une maladie française incurable que d’aimer vivre dans l’hypocrisie ?
  • Peut-être à la manière des fanatiques du tour de France qui ne sont pas les derniers à traiter (avec raison ?) les coureurs de « tous dopés » mais qui sont les premiers à se battre pour attraper un bob Cochonou ?

Comme un symbole, le prochain Tour de France fera une escale exceptionnelle de plusieurs jours à Pau.

Comme un symbole encore, Monsieur Bayou veut commémorer les anciens et futurs vainqueurs du Tour de France avec la création de « totems » à leur effigie.

Quid alors des Delgado, Indurain, Riis, Landis, Ullrich, Contador, Amstrong comme autant de Juppé, Tibéri, Balkany, Guérini, Cahuzac, Emmanuelli,…

Monsieur Bayou, oui au pardon chrétien, non à la démocratie hypocrite.

Par Mehdi Jabrane

Le chiffre qui tue…

arton2099Le forum citoyen qui s’est déroulé vendredi soir au Pavillon des Arts a été pour moi l’occasion d’assister à un flot continu de plaintes rendant ce moment stérile sinon burlesque.

  • « ma rue n’a pas été rénovée depuis 50 ans »
  • « la vitesse des voitures devant ma rue est excessive »
  • « lors du carnaval, les lycéens jettent des œufs sur ma façade, je suis excédée »
  • « la rue Serviez n’est plus éclairée comme à l’époque »
  • « les devantures de la rue Carnot sont horribles »

Arrivé une demie heure après le commencement de la réunion, je n’ai quasiment entendu que des plaintes autocentrées et sans considération collective.

Ces plaintes sont à ce point stériles qu’elles deviennent à la longue des occasions pour notre maire d’étaler son goût pour les bons mots. Ces derniers finissent d’ailleurs systématiquement par faire se tordre de rire toute l’assemblée : du maire lui-même en passant par l’auteur des ces lignes.

Misère de la démocratie !

Au moment où le chômage augmente, au moment où la défiance envers nos politiciens n’a jamais été aussi grande, au moment où notre maire cautionne l’austérité (sauf pour effacer les tags), ces rendez-vous citoyens ne sont en réalité que des « one man show », alors qu’ils devraient permettre l’émergence de solutions ambitieuses et collectives.

Les citoyens responsables et d’âge mûr présents ce soir là (une cinquantaine environ) étaient-ils tous à ce point ignares ou égoïstes pour ne poser que des questions aussi débiles ?

Puis vint la lumière ou plutôt le chiffre qui tue : 750 000 euros !

  • 750 000 euros soit le coût annuel de la maintenance des vélos en libre service (Idecycle)
  • soit 3 500 euros environ par vélo et par an pour un taux d’utilisation le plus faible de France (dixit le nouveau DGS)

Sachant bien évidemment l’impact que l’annonce de cette somme allait avoir sur l’assemblée (ignare), j’ai senti chez notre maire à ce moment précis comme une pointe de jubilation à peine dissimulée.

Je n’exclus pas ici de faire preuve de mauvaise foi comme me l’a fait remarquer un de ses conseillers à la lecture de mon précédant article. A la place où il est, ce conseiller doit bien évidemment être tout à fait objectif quand il s’agit de critiquer le premier représentant de l’autorité municipale et accessoirement son donneur d’ordre.

Plus sérieusement, au delà de ce montant astronomique, quelques questions me viennent :

  • est-il normal que les citoyens ne peuvent être tenus informés de ce genre de chiffre exorbitant qu’à ce moment et de cette manière (5 minutes avant de finir et pour rehausser le supposé pragmatisme du maire) ?
  • quelles sont les réelles actions que vont mettre en place les élus pour nous prémunir à l’avenir de ce genre de délire ?
  • enfin et surtout, si ces informations étaient plus largement connues, ne serviraient-elles pas à nourrir plus efficacement le débat local sur des sujets hautement plus importants que le type d’éclairage de la rue Serviez ?

Car en effet, de la même façon que la méconnaissance d’éléments de langage limite la pensée, il est certain que la méconnaissance des vrais dossiers et enjeux d’une municipalité appauvrit le débat citoyen et donc la démocratie.

Espérons que le prochain équipement des élus en tablettes numériques (impliquant forcément des échanges de documents numériques) donnera l’occasion à ces derniers de mettre les dossiers, rapports, audits et autres budgets à la disposition des citoyens.

Par Mehdi Jabrane

François le Fataliste ou la course de rats

Brown mouse running in a wheel.Le bref échange qui a eu lieu entre M. Dartigolles et M. Bayrou suite au discours introductif de ce dernier lors du conseil municipal de la rentrée, a permis de reclarifier deux politiques économiques différentes, mais aussi de constater une série d’arguments fallacieux de la part du maire.

D’un côté M. Bayrou nous annonce que la réduction des dotations de l’État pour les collectivités est un mal nécessaire et une évidence qu’il avait, lui, prévue et annoncée depuis des années.

De l’autre côté M. Dartigolles rejette cette vision fataliste et irrévocable d’une politique d’austérité qui ne dit pas son nom.

Je tiens ici à saluer M. Dartigolles qui a fait honneur à ses responsabilités municipales et nationales.

Cette sortie de M. Dartigolles a bien évidemment fait réagir M. Bayrou qui nous a pondu un syllogisme fallacieux (un faux dilemme pour être précis) à savoir :

  • la relance par l’emprunt c’est la facilité
  • la rigueur budgétaire c’est le réalisme

En réalité, parler d’innovation, d’inventivité et de créativité pour atteindre des objectifs de campagne (propos de M. Bayrou) dans un cadre budgétaire illégitimement restreint, c’est enfermer les agents municipaux et les élus (souvent peu avertis des mécanismes macro-économiques) dans une course de rats.

Suite à ce premier argument fallacieux, notre maire a amalgamé les propositions économiques du Front de Gauche (en gros la relance par la dette) à celles du Front National.

La tentation était certainement très grande pour M. Bayrou de masquer son incapacité à donner réellement du crédit à une autre politique économique que la sienne en utilisant quasiment le fameux argument qui tue : le reductio ad Hitlerum.

Traduction : ta vision politico-économique est identique à celle du FN qui est un parti xénophobe donc un parti nazi donc ta vision politico-économique est hors jeu par principe.

D’ailleurs M. Dartigolles ne s’y est pas trompé puisqu’il s’est défendu d’avoir la même politique que le FN en évoquant que certains membres de sa famille (qu’ils reposent en paix) ont été tués par les nazis.

Mais encore plus fort (ou vicieux ?) que le faux dilemme et le reductio ad Hitlerum, M. Bayrou a utilisé l’argument dit d’appel aux sentiments en liant implicitement l’endettement (de la Grèce notamment) à des conflits sociaux.

Prendre exemple de la Grèce ou de l’Italie pour éliminer par principe l’endettement et donc justifier l’austérité c’est injuste et malhonnête.

Ce sont plutôt la corruption, l’évasion fiscale et le marché au noir généralisés qui ont fait chuter la Grèce par manque de rentrées fiscales et non pas l’endettement.

Evoquer les vraies causes de la faillite de la Grèce, la corruption des politiciens notamment, mettrait sûrement M. Bayrou dans une position un peu délicate. En effet, n’est-ce pas M. Bayrou qui nous parle de la nécessité d’avoir une classe politique irréprochable (cf. son livre : de la vérité en politique) alors qu’il soutient pour 2017 un élu qui a été condamné pour abus de confiance et prise illégale d’intérêt ?

Par Mehdi Jabrane