Les Béarnaises de Paris

Capture d’écran 2013-06-22 à 08.55.07Elles sont deux, Aurore et Laure, et ont décidé d’animer la communauté béarnaise de Paris, dans le cadre d’une association, crée début 2012 : « Les Béarnais de Paris ».
Il leur faut plein d’énergie pour faire « monter en puissance » leur jeune association mais le succès ne s’est pas fait attendre. Après un an d’activité, déjà beaucoup de satisfactions après les premières et éclectiques animations, entre la découverte du Paris d’Henri IV, des soirées « Section », des veillées avec les Ossalois de Paris ou encore la présentation d’une pièce de théâtre : « Fantaisie à deux personnages pour apprivoiser le vaudou béarnais ». A propos, pourquoi ne pas aussi faire découvrir le « vaudou béarnais »…  aux Béarnais du Béarn ?

AltPy – Comment et quand vous est venu l’idée de lancer les « Béarnais de Paris  » ?
Aurore et Laure – L’idée nous est venue courant 2011 en discutant du Béarn qui nous manquait, ici, à Paris. Nous y vivons depuis une dizaine d’années. Nous avions toutes les deux en tête de trouver un moyen de rassembler des Béarnais lors de manifestations et aussi de faire connaître un peu plus notre région d’origine. L’idée a fait son chemin et s’est concrétisée par la création d’une association loi 1901 les Béarnais de Paris. Les associations existantes, à côté desquelles nous coexistons amicalement, ne convenaient pas réellement à ce que nous souhaitions mettre en place, à savoir proposer nombre d’événements très diversifiés. Début 2012, l’association était créée.

AltPy – Quel accueil a eu votre initiative ?
Aurore et Laure – L’accueil a été fabuleux, très enthousiaste. La presse s’est très vite intéressée à notre initiative, ce qui nous a permis de nous faire connaître rapidement. Grâce à ce coup de pouce et à notre propre communication sur les réseaux sociaux notamment, beaucoup de Béarnais de tous âges ont très vite adhéré. Ils nous ont dit qu’ils étaient heureux de se retrouver lors d’événements festifs, culturels ou sportifs ayant pour point commun le Béarn et nous remercient pour notre action. Nos adhérents sont enchantés et viennent de renouveler leurs adhésions. D’autres nous rejoignent régulièrement. Certains non-Béarnais adhèrent également, amoureux de la région ou souhaitant participer aux activités que nous proposons. Nous avons également été contactées par des institutions et des entreprises qui souhaitent participer à la dynamique créée autour du Béarn.

AltPy – Quel ont été les temps forts des derniers mois ?
Aurore et Laure – En janvier dernier, nous avons présenté la pièce de théâtre des Dames de Fumée « Fantaisie à deux personnages pour apprivoiser le vaudou béarnais », suivi d’une collation. Nous avons organisé plusieurs rassemblements dans un pub parisien pour supporter la Section Paloise. Et surtout, le plus gros temps fort, a été la visite du Paris de Henri IV avec un guide conférencier excessivement intéressant et réalisée sur mesure pour nos adhérents. La visite a affiché complet et nous la renouvellerons certainement l’année prochaine.

AltPy – Quelles animations avez-vous prévu dans les mois à venir ?
Aurore et Laure – Cette semaine, nous organisons notre pique-nique annuel, au square du Vert-Galant. Nous continuons à relayer les initiatives d’autres groupes qui ont pour point commun le Béarn et Paris. Ainsi comme l’année dernière, nous donnons rendez-vous place des Vosges pour une veillée de chansons béarnaises avec nos d’amis Ossalois de Paris : Lous Arricouquets. Actuellement, nous sommes en train de préparer pour l’automne une conférence autour de Pierre Bourdieu, avec le soutien de la Maison de l’Aquitaine.

AltPy – Quelle image a le Béarn pour les Parisiens ?
Aurore et Laure – Les Parisiens ne connaissent pas le Béarn pour la plupart. Certains connaissent Pau au moins de nom, mais ne savent pas que la ville est rattachée au Béarn. On doit leur parler du Pays Basque pour qu’ils situent un peu mieux. C’est aussi un des axes de l’association. En plus de rassembler les Béarnais exilés, nous souhaitons faire connaître la culture béarnaise et contribuer à ce que le Béarn soit plus visible.

AltPy – Les Basques et Bigourdans ont-ils aussi leur association sur Paris ? A quand des animations en commun ?
Aurore et Laure – Les Basques, les Bigourdans, les Landais, et plus largement les Gascons mais aussi les Toulousains, les Aveyronnais. Nous sommes en contact avec certains pour organiser un événement festif tous ensemble. Nous nous croisons de temps en temps lors des Apéros des régions. Les Toulousains de Paris nous ont invités à de nombreuses reprises pour leurs événements.

AltPy – le mot de la fin…
Aurore et Laure – Les Béarnais de Paris sont une formidable aventure. Cela nous demande du temps, beaucoup d’énergie mais quelle satisfaction de retrouver nos adhérents régulièrement et de les voir reconnaissants du travail accompli. Si nous continuons à croître, il nous faudra impliquer davantage de bénévoles pour fonctionner. Notre histoire ne fait que commencer…

– propos recueillis par Bernard Boutin

Contact : Association Les Béarnais de Paris
76 boulevard de la Villette
75019 Paris
Renseignements :
06 20 28 16 24 / 06 64 34 16 11

http://www.bearnaisdeparis.org/

bearnaisdeparis@gmail.com

Le château de Viven : Patrimoine caché à découvrir sans faute

IMG_0490Il y a 31 ans, Jeanne Emma Graciet tombait amoureuse du château de Viven et de son parc, situés à vingt kilomètres au nord de Pau. Une demeure classée à l’ISMH (Inventaire Supplémentaire des Monuments Historiques).
Depuis, elle coupe, désherbe, réfléchit à de nouveaux aménagements, fait des boutures, crée des étiquettes explicatives pour chaque plante et chaque parterre afin de renseigner les passionnés comme elle. La consécration arrive en 2006 quand son jardin est, à son tour, classé parmi les « Jardins Remarquables » de France.
Jeanne Emma Graciet aurait pu en rester à sa passion jardinière. Elle a tant à faire avec le patchwork d’espaces qu’elle a aménagé : jardin à la française, verger, roseraie, labyrinthe, potager, bambouseraie, parc arboré, jardin zen – ponctué de fontaines et de pièces d’eau. Mais voilà, il lui fallait aussi ouvrir son espace à la culture. Deux théâtres sont mis en place dont un de verdure. Une association culturelle « Les 4 temps de Viven » est lancée, il y a 23 ans, et les espaces s’animent régulièrement de quelques évènements. Le prochain aura lieu le 20 juillet. « L’oiseau Tonnerre » y organise « Jardins de danse »…
Et, comme cela n’est pas suffisant pour l’hôte de ces lieux, elle assure le secrétariat de la programmation des « Musicales de Thèze ». Rencontre avec une béarnaise pleine de passions et passionnante.
Nota : Ak Pô a réalité un reportage photo remarquable sur les lieux. C’est à voir : ICI

AltPy – Quand vous avez acquis en 1982 le château de Viven et son parc, dans quels états étaient-ils ?
Jeanne Emma Graciet – C’était une « Belle au bois dormant », pas tout à fait en ruine. Les toitures étaient à refaire. Il fallait remonter une cheminée, installer l’eau courante. Nous n’avions qu’un point d’eau à l’intérieur, une seule toilette et l’électricité passait par des cordelettes tressées.
La bâtisse, qui est classée à l’ISMH, remonte au XVIIè siècle. Elle avait été bâtie sur d’autres vestiges après un tremblement de terre qui avait ébranlé la région. C’est le Baron d’Arros-de-Viven, frère du Baron d’Arros-de-Nay qui a fait les travaux.
Quand nous sommes arrivés, le jardin, lui aussi classé, était une vraie friche. Des buis ancestraux étaient posés d’une façon bien définie, marque classique d’un jardin à la française du XVIIè ou XVIIIè siècle. Nous nous sommes mis à défricher et, à ce moment-là, j’ai commencé à réaliser un DVD qui permet aujourd’hui de voir les différentes étapes de la renaissance des lieux.

AltPy – Aviez-vous en tête l’idée d’en faire un lieu d’exception ouvert au public ?
Jeanne Emma Graciet – Pas du tout. Je jardinais à Pau, boulevard de la Paix, où j’habitais à côté de ma pharmacie. Mais, je n’y étais jamais tranquille. Des clients venaient sans cesse me demander tel ou tel produit. Il me fallait trouver un autre lieu pour pratiquer ma passion du jardinage. Ce fut Viven.

AltPy – Que signifie pour vous le label « jardin remarquable » qui vous a été décerné en 2006 ?
Jeanne Emma Graciet – C’était une reconnaissance flatteuse pour le travail accompli mais aussi cela permettait de déduire des revenus l’entretien du jardin. Si cela venait à être supprimé, nous connaîtrions des difficultés.
Le label nous apporte des visiteurs. Il y en a malheureusement trop peu. L’an dernier, j’ai doublé mon chiffre d’affaires. J’ai fait 2.800 euros et quelques de recette. Peut-être, vais-je à nouveau doubler cette année ?

AltPy – Avez-vous une formation de jardinier-paysagiste ou hérité d’un don caché ?
Jeanne Emma Graciet – J’étais une petite fille toujours en train de jardiner. Pendant la guerre, nous étions à Bizanos et il fallait se nourrir. Je plantais des pommes de terre, récoltais des fraises etc. Je faisais cela avec ma mère et un jardinier qui me fascinait beaucoup. J’avais le jardinage dans l’âme ou… dans les gènes.

AltPy – Qu’est-ce qui fait le plus votre fierté parmi les espèces plantées ?
Jeanne Emma Graciet – Je crois que je les aime toutes. Chacune a son moment. Principalement quand elles s’épanouissent. Là, j’aime beaucoup des rosiers (ndlr : il y en a 1.300 à découvrir dans les jardins). Après, je vais un peu les oublier pour regarder autre chose puisqu’ils vont se calmer. Chacune a sa place dans mon cœur…

AltPy – Comme s’il n’y avait pas assez de travail pour entretenir ce lieu, vous animez depuis 23 ans, une association culturelle « Les 4 temps de Viven ». Quel est son programme pour les mois à venir ?
Jeanne Emma Graciet – « Les 4 temps de Viven » est une association d’amis d’amis. Nous sommes environ 150. Seuls les membres de l’association participent aux spectacles organisés. Ils ne viennent pas tous en même temps. Les soirées ont en moyenne environ 80 participants.
Pour le programme, je ne fais pas de  prospective à long terme. J’accueille les propositions. La prochaine, prévue dimanche 14 juillet, verra Jean-Claude Degros, ancien stagiaire à la Comédie Française, acteur, cinéaste nous proposer un « one-man show » : « Sur la vie de ma mère ». Il se produira au théâtre.

AltPy – Vous avez un théâtre ?
Jeanne Emma Graciet – J’en ai même deux ! Un couvert et un théâtre de verdure. Le théâtre couvert est en cours de rénovation. Terminé, il aura même des rideaux rouges… Nous avons des spectacles toute l’année. Nous évitons seulement les périodes très froides. Ces « grands machins » sont difficiles à chauffer avec de telles hauteur de plafond.

AltPy – Vous travaillez aussi à la programmation des « Musicales de Thèze », présidée par l’Abbé Vacher, responsable de la Paroisse St Pierre des Vallées. Quel est l’objectif poursuivi par cette association ?
Jeanne Emma Graciet – L’Abbé Vacher a pour ambition de donner à ses « ouailles » le goût de la musique, plutôt de qualité. Il pense que quand on ne sait plus prier, ni quoi prier, la musique peut être l’intermédiaire. Il y a un concert à peu près tous les mois, chaque fois à l’Eglise de Thèse qui a une bonne acoustique. .

AltPy – Le 20 juillet à Viven « L’oiseau Tonnerre » organise « Jardins de danse ». De quoi s’agit-il et comment pouvoir y assister ?
Jeanne Emma Graciet – « Jardins de danse » est une grosse manifestation qui rassemble beaucoup de monde. « L’oiseau Tonnerre » est un groupe qui fait du conte, du jazz. Son animateur, Jean-Claude Tessier, est très inventif. Avec Dominique Piollet, président de « L’oiseau Tonnerre », ils ont déposé le nom « Jardins de danse » pour en faire une série. Ils font venir Christian Bourigault, chorégraphe connu, pour mettre en scène des moments de danse dans tous les coins du jardin avec de petits groupes.
Pour clôturer la journée, il y aura une création de Christian Bourigault, au Théâtre de Verdure.
Si le beau temps actuel persiste, ce sera un moment merveilleux. Autrement, nous pourrons toujours nous rapatrier dans les bâtiments couverts. Pour s’inscrire, il suffit d’aller sur le site de « Jardins de danse ».

AltPy – Dernière question : vous arrive t-il de prendre du repos ?
Jeanne Emma Graciet – Le soir, avant de me coucher, vers minuit, c’est mon temps de communication. J’écris alors, par courriels, aux uns et aux autres. Je dors ensuite assez peu. Ma courte nuit est mon seul moment de repos. Dans la journée, pourquoi se reposer ? (ndlr : gros fou rire…)

– propos recueillis par Bernard Boutin

Nota : Le reportage photo d’AkPô sur les lieux. C’est à voir : ICI

Les jardins sont ouverts au public du 15 Mai au 15 Octobre de 13h à 19h, du lundi au samedi, fermé le dimanche sauf rendez vous aux jardins et journées du patrimoine.
Pour prendre rendez-vous :
Contact : Jeanne Emma Graciet au 06 86 48 60 97
Adresse : Les jardins du château de Viven, Chemin du château 64 450 Viven

Béarn-Adour-Pyrénées et ses combats

IMG_2666 - Version 2Béarn-Adour-Pyrénées, association regroupant des socio-professionnels et politiques de tous bords, milite pour l’amélioration des infrastructures dans la région. BAP est déjà bien connu pour ses combats engagés : Le premier, le plus emblématique, fut celui de l’autoroute A65, Pau-Bordeaux. Gagné, l’énergie de l’association s’est retournée vers : la déserte directe par LGV du Béarn et de la Bigorre,  la mise en place d’un diffuseur sur l’A64 à Morlanne, la création d’un liaison la plus courte possible entre Lescar et la rocade d’Oloron, l’amélioration de la RN 134 entre Oloron et le Somport et le renforcement des co-opérations entre Béarn et Bigorre. Rencontre avec Pierre Saubot, président de BAP autour du diffuseur de Morlanne, la Lescar-Oloron et Béarn-Bigorre.

AltPy – Le diffuseur de Morlanne, nom technique pour désigner l’intersection entre une route et une autoroute, est le serpent de mer de l’A64 à l’est de l’agglomération paloise. Pouvez-vous nous dire où il se situe et quels utilisateurs il concerne ?
Pierre Saubot – Sa position est historiquement très simple. Elle est située sur la route qui va de Pau vers Morlaàs. Après avoir longé le centre Féger de TOTAL, puis le rond-point de la rocade, la route de Morlaàs passe au-dessus de l’A64. C’est à cet endroit qu’il était prévu de réaliser le diffuseur, déjà inclus dans le cahier des charges lors de la réalisation de l’A64, ouvert en 1974 pour la section entre Artix et Soumoulou.  Il y a d’ailleurs sur place une zone industrielle qui s’appelle « zone de l’échangeur » à Berlanne-Morlaàs
Ce diffuseur est à deux pas du centre Féger avec ses 3.000 salariés et n’est pas éloigné de Turboméca, installé à Bordes, avec ses 5.000 salariés. Le diffuseur est proche du stade du Hameau et de la zone commerciale (Auchan/Leroy Merlin) et résidentielle de Pau-Est. Toute la zone a des besoins de désenclavement considérables.

AltPy – Quel pourrait-être le coût d’un tel échangeur et à quel rythme pourrait-il se réaliser ?
Pierre Saubot – Des estimations ont été faites mais je me méfie beaucoup d’estimations faites à des fins d’annonces soit dissuasives, soit pour préparer les esprits à un péage supplémentaire. Pour la sortie de Berlanne-Morlaàs, il y en a qui ont cour quand il s’agit d’un marché avec l’Etat, et d’autres quand il s’agit d’autofinancement amortis par des péages.
Je suis sûr que l’échangeur de Lescar qui a été réalisé par Aliènor sur ses fonds propres, n’a rien à voir en coût avec celui de Soumolou parce que le dessin n’est pas le même et que l’emprise au sol n’est pas la même. Le premier a du coûter beaucoup moins cher. Un chiffre de 10 millions d’euros a été dernièrement annoncé pour la sortie de Berlanne-Morlaàs. Il me semble probablement gonflé.
Les ASF ont un traité de concession jusqu’en 2034 qui prévoit que l’Etat peut être amené à demander à ASF de réaliser un certain nombre d’échangeurs. Les ASF sont donc engagés sur une base administrative et technique pour les réaliser si l’Etat le lui demande. Par contre, ASF n’est pas engagé sur le « Qui paye ? ». Ce contrat est ambigu et précis juridiquement. Dans l’esprit d’ASF, ce n’est pas à eux de payer.
Comme, ils n’ont aucune raison de la financer, il appartient au conseil général et à la communauté d’agglomération de considérer que, si c’est dans l’intérêt des populations de le réaliser, il faut alerter l’Etat qui est le point de passage obligé puisque le contrat est entre l’Etat et les ASF.  Et, c’est à ces deux collectivités de présenter à l’Etat le financement proposé.
Les deux collectivités sont conscientes que ce diffuseur doit se faire avant l’asphyxie de la rocade et de la vie économique dans le nord de Pau. La ville de Morlaàs est elle-aussi consciente de ce besoin puisqu’elle a commandité une étude qui conforte la nécessité de sa réalisation.
Là, où le débat est complètement ouvert c’est « qui fait quoi ? qui paye ? ». Cela devient plus compliqué quand on prend en compte que la rocade nord de Pau, financée par le Conseil Général, ne peut pas être élargie sauf à refaire tous les ponts et dégager la réserve foncière qui n’existe pas partout.
L’intuition de BAP, non vérifiée par des chiffres précis, est qu’il faut réaliser ce diffuseur et rendre gratuit l’autoroute, qui n’est pas saturée, entre ce diffuseur et celui de Pau-nord ou Lescar de façon à alléger le trafic sur la rocade et éviter des travaux d’élargissement de celle-ci.

AltPy – Dans ce cas-là : qui indemnise ASF ?
Pierre Saubot – Il faut chiffrer l’économie qui est faite sur l’élargissement de la rocade et la mettre dans la balance pour indemniser ASF sur la perte de péage. En premier lieu, c’est le Conseil Général mais il faudra faire probablement un tour de table avec la CDAPP et les communes proches directement concernées. Ce qu’il faut d’abord évaluer, c’est ce que couterait l’élargissement de la rocade pour éviter la trombose.
Cela nous semble une idée intelligente puisqu’elle n’est pas saturée et qu’elle peut ainsi absorber une partie du trafic de la rocade.

AltPy – Autre combat pour BAP, le projet de liaison nouvelle entre Lescar et Oloron. Le Conseil général des Pyrénées-Atlantiques étudie une nouvelle hypothèse de tracé qui partirait beaucoup plus à l’ouest qu’initialement envisagé. Elle relierait  Arbus ou Tarsac à Oloron et ne prolongerait pas dans les faits l’A65.  Qu’elle est la position de BAP par rapport à ce nouveau tracé ?
Pierre Saubot – BAP a été très amusé de retrouver dans des archives anciennes qu’un débat similaire a eu lieu au milieu du 19e siècle au moment de la création du pont de Lescar. Nos ancêtres ont été plus intelligents que nous puisqu’ils ont décidé de faire le pont là où il est. C’est exactement le même débat actuellement.
BAP martelle, depuis des années, pour que l’on fasse le parcours le plus court possible entre Bordeaux et Saragosse. Ce tracé a été défini par les techniciens prenant en compte la réalisation de l’A65, le tunnel du Somport,  le début d’amélioration de la RN 134 entre le Somport et Oloron et l’amorce de la rocade d’Oloron. Nous demandons que ce tracé soit terminé par une route la plus courte possible entre l’échangeur de l’A64 et la rocade d’Oloron.
Nous ne demandons pas que tout soit fait en une fois mais souhaitons que cela soit phasé. Nous sommes conscients des contraintes budgétaires mais aussi que l’argent n’est pas cher. On doit pouvoir faire tout de suite avec des financements privés avec en contrepartie, un péage pendant une certaine durée.
us sommes prêts à faire avancer toutes les idées intelligentes pour que la route se fasse le plus vite possible et la plus courte possible.

AltPy –  Le projet par Arbus ou Tarsac se précise t-il ? Comment vous y opposez-vous ?
Pierre Saubot – Ce n’est pas notre projet. Nous dirons que c’est moins intelligent que la solution la plus courte préconisée depuis le début. Nous craignons forcément que ceux qui proposent d’autres solutions aient en fait, en arrière pensée, d’obtenir que rien ne se fasse.
C’est le cas de la déviation de Bedous qui a connu une forte opposition et s’est finalement faite dans les pires conditions possibles. Elle n’a qu’un mérite, c’est d’exister. Elle aurait pu être faite beaucoup plus vite… pour beaucoup moins cher.
Tous les gens qui ont compliqué la réalisation de Bedous, avec le secret espoir qu’il ne se fasse rien, ont finalement fait dépenser de l’argent en plus à la collectivité, fait perdre du temps à la collectivité, détruits de emplois, augmenté l’émission de gaz à effet de serre pour arriver à un résultat qui n’est pas mauvais mais qui a couté plus cher et est arrivé plus tard.
A partir de cet exemple, nous ne voulons pas que cela se renouvelle et nous comprenons très bien la méthode mise au point par certains : à savoir, dès qu’un bon projet existe, dans un premier temps, ils favorisent l’étude d’un autre, forcément moins bon, avec le secret espoir que le deuxième projet étant moins bon, on poussera à un troisième projet, qui sera à son tour moins bon. A ce moment-là, devant l’impossibilité de faire un bon projet, la décision sera de ne rien faire ou de ne pas réaliser forcément le meilleur projet.
Pendant ce temps là, on aura dépensé du temps, laissé des automobilistes se tuer sur les routes, consommé de l’énergie fossile et détruit des emplois. Il faut en finir avec cette méthode destructrice qui est très élaborée. Il est important que les opposants sachent que nous le savons.

AltPy – Les Basques du département demandent un statut particulier. On ne sait s’ils l’obtiendront mais cela aura eu le mérite d’attirer l’attention des Béarnais sur un risque d’isolement. Nombreux se disent que nous avons là une occasion pour se rapprocher de la Bigorre, notre voisine pyrénéenne, aux caractéristiques si proches de notre territoire. Comment BAP analyse cette situation nouvelle ?
Pierre Saubot – Il y a un tropisme naturel du Pays basque français vers le Pays basque espagnol. Il existe presque de fait une conurbation de Bayonne jusqu’à Bilbao qui pèse suffisamment lourd pour obtenir des « choses ». De l’autre côté, il y a Bordeaux, Toulouse et Saragosse. De deux choses l’une : Soit nous considérons qu’au milieu de ce carré, il n’y a rien, soit qu’il y a quelque chose, à savoir une conurbation incluant Tarbes, Lourdes, Pau incluant Oloron et Orthez. Cette conurbation devient le centre d’un carré au lieu d’être rien.

AltPy – Comment se crée cette conurbation ?
Pierre Saubot – Il faut se parler et parler encore. J’aime bien la pièce de Racine, Andromaque, où « Oreste aime Hermione qui aime Pyrrus qui aime Andromaque qui aime son fils Astyanax ». Chacun regarde de l’autre côté. Les Basques regardent vers les Basque espagnols, les Béarnais regardent vers les Basques qui ne nous regardent pas. Les Bigourdans regardent vers les Béarnais et nous ne les regardons pas… Si, nous nous mettions à les regarder, peut-être que les choses commenceraient à avancer ?
Notre message, soutenu aussi par Max Moreau, par les Présidents des CCI de Pau et Tarbes, par des acteurs de la société civile et… certains rédacteurs d’Alternatives Pyrénées, va déboucher sur une première réunion qui aura lieu à la CCI de Tarbes le 3 juillet pour commencer à discuter de ce rapprochement. Un point de départ. Il faudra être efficace et simplifier une situation complexe. Pourquoi pas créer un « conseil de développement » comme le suggère Gérard Trémège ?
A titre personnel et en tant que Président de BAP, je propose des choses simples. Le territoire Béarn-Bigorre a des atouts considérables. Notre pays est dans une situation dramatique. Fixons-nous comme objectif de tout mettre en œuvre pour que notre action commune se mesure par une diminution du chômage. Faisons tout ce qui est nécessaire pour cela.

– propos recueillis par Bernard Boutin

PS : Parmi les autres projets de BAP : celui de positionner le Béarn (vallée d’Aspe ou vallée d’Ossau) comme voie de passage de la future TCP par un tunnel de moyenne altitude.
Le site de BAP : http://bap-europe.typepad.com/
Crédit photo : Jean-Michel Guillot / L’équipe de BAP devant d’un des tunnels de la nouvelle route Lerida-Sabinaningo qui vient d’ouvrir en Aragon. Pierre Saubot est le troisième en partant de la gauche.

Un architecte en Adour

arton3812Après 40 ans de conception et réalisation de bâtiments publics, de péages autoroutiers, de propriétés privées, d’usines…. Jean-Michel Lamaison, architecte basé à Pau, a marqué de son empreinte notre territoire.
Retour, avec le créateur, sur ses « gestes architecturaux » en Béarn, Bigorre et au Pays Basque, sur ceux des concurrents ou encore sur ceux qu’il aurait voulu réaliser et qu’il n’a pu faire. Une œuvre bien remplie, dont de nombreuses créations ne laissent pas indifférent, et que la République Française vient d’honorer en faisant, Jean-Michel Lamaison, chevalier de la légion d’honneur.
Une récompense bien méritée pour une œuvre qui nous accompagne, tous les jours, dans nos cheminements.

AltPy – Quelles sont vos réalisations, au cours des 40 années que vous avez passées au service de l’architecture et de l’urbanisme, qui vous ont le plus marqué en Béarn, en Bigorre et au Pays Basque et pourquoi ?
Jean-Michel Lamaison – En ce qui concerne les œuvres qui m’ont le plus marqué il est difficile de faire un choix. Elles ont été pour la plupart réalisées avec Michel Camborde et parfois d’autres confrères.
Je citerais pour le Béarn :

– L’aéroport de Pau Pyrénées à Uzein parce que c’est un des bâtiments les plus finis au niveau du détail architectural.
– Le Palais des sports de Pau parce que le parti architectural et fonctionnel est limpide.
– Le quartier Bosquet parce que c’est le seul quartier du centre-ville à Pau à avoir fait l’objet d’une véritable restructuration ce qui est fondamental pour la ville en matière d’urbanisme.
– L’usine du grand couturier André Courrèges réalisée avec E. Larribau route de Morlaàs à PAU, parce qu’elle évoque pour moi le début de ma carrière d’architecte ainsi que la rencontre avec une personnalité d’exception : André Courrèges.

Pour la Bigorre, je citerai le conservatoire de musique de Tarbes à cause de son archtecture originale qui avait été plébiscité par la population de Midi Pyrénées à l’époque de sa mise en service.

Pour le Pays Basque, je citerai le Palais des festivals de Biarritz (Gare du Midi) parce que c’est le point fort d’un quartier de la Ville que nous avons entierement conçu avec J.C. Lesgourgues : Le Plateau de la Gare.  Je citerai également la gare Auto Routière de Biarritz, pour sa couverture de métal et de verre en vagues décalées et son poste de contrôle sur un socle en pierre de Bidache.

AltPy – Toujours dans les Pays de l’Adour, quels bâtiments, récents ou anciens, qui ne sont pas le fruit de votre création, retiennent particulièrement votre attention, d’un point de vue esthétique, technique ou autre…
Jean-Michel Lamaison – Il y a un bâtiment que j’aime particulièrement au Pays Basque, réalisé depuis plus de 30 ans par les architectes J.R.Hébrard et A. Gresy, c’est le V.V.F. d’Anglet posé sur la plage.
Tel un vaisseau prêt à prendre le large. Cette construction inscrite dans une zone très sensible est parfaitement bien intégrée au paysage avec ses terrasses végétalisées ce qui était peu courant à l’époque.

AltPy – Dans tous les appels d’offres auxquels vous avez répondu, il y en a qui vous ont échappé. Quels sont ceux que vous auriez aimé pouvoir réaliser. Pourquoi ?
Jean-Michel Lamaison – Incontestablement le Palais des sports du Mans parce que nous avions fait un superbe projet, mieux encore que le Palais des sports de Pau. Nous avons été devancés par un projet nettement en dessous du nôtre et, qui plus est, d’un coût plus élevé. Nous avons su après le concours, que le choix avait été fait sur des critères politiques liés à l’entreprise avec laquelle nous faisions équipe et auxquels nous étions complètement étrangers, mais qui ont joué en défaveur de notre projet, pourtant considéré comme le meilleur.

AltPy –  Votre œuvre est principalement marquée par la modernité. Pourquoi ne pas avoir utilisé davantage les produits « classiques » qui caractérisent notre région : l’ardoise, le bois, les galets, le marbre ?
Jean-Michel Lamaison – Je répondrais tout d’abord que  la modernité et donc l’authenticité, doivent être le fil conducteur de la conception architecturale, en évitant le pastiche et le mélange des styles, qui procèdent d’avantage de la décoration.
Ensuite il est inexact de dire que je n’ai pas utilisé les matériaux traditionnels même si je l’ai moins fait que certains pour les raisons évoquées au début de ma réponse.
En effet parmi  les nombreuses maisons individuelles que j’ai conçues sur les coteaux de Jurançon ou de Buros par exemple, j’ai utilisé la pierre, le galet, l’ardoise et le bois.
C’est tellement vrai que nous avons obtenu en 1979 le premier prix national de la revue Maison Individuelle avec une villa construite sur les coteaux de Jurançon qui avait ses murs et son soubassement avec des galets et superstructures en bois et en ardoise

AltPy – La ville de Pau possède-t-elle un caractère propre sur le plan architectural ?
Jean-Michel Lamaison – Il est difficile de parler d’un caractère architectural qui serait propre à la ville de Pau même si un quartier comme le Hédas, avec ses galeries vitrées a effectivement un style qui lui est propre. Par contre on peut parler d’un caractère urbanistique propre à la ville de Pau avec ses jardins, ses parcs, ses espaces verts, sa végétation aux essences variées et, en point d’orgue, le boulevard des Pyrénées et son caractère balnéaire qui relie le Parc Beaumont avec le château, ses jardins et son vaste Parc.

AltPy – Mitage du territoire, déficit en logements sociaux, difficultés à valoriser le patrimoine des centres-villes… qu’est-ce-que ces mots vous inspirent ?
Jean-Michel Lamaison – Mitage du territoire, veut dire pour moi que l’on gâche le paysage naturel, en le saupoudrant de constructions éparses, au lieu de densifier les zones urbaines pour économiser l’espace. Par contre densifier les zones urbaines nécessite des études d’urbanisme très poussées pour créer des villes harmonieuses.
Déficit en logement sociaux veut dire pour moi que l’on a pas anticipé les besoins et que les logements sociaux sont construits au gré du hasard et du foncier disponible sans politique urbaine volontariste. La difficulté à valoriser le patrimoine du centre-ville vient de la difficulté à faire de véritables restructurations urbaines c’est à dire ne pas se contenter de rénover l’habitat mais créer de l’habitat nouveau en centre-ville ainsi que des structures urbaines modernisées ; le tissu Urbain doit se régénérer pour survivre et surtout être irrigué comme un tissu vivant sinon il meurt.

AltPy – Si c’était à refaire…
Jean-Michel Lamaison – Si c’était à refaire, ce serait évidemment bien mieux, puisque pour un Architecte, le plus beau projet est toujours celui « à venir ».

– propos recueillis par Bernard Boutin

L’Europe : Questions à Alain Lamassoure

Capture d’écran 2013-05-24 à 09.49.45AltPy – L’Europe est souvent montrée du doigt comme bouc émissaire pour les problèmes économiques et d’emploi en France. Principal responsable désigné : le tout-libéralisme de la commission avec ses conséquences sur notre secteur industriel en peau de chagrin. Quelles réponses apporter à ces détracteurs ?
Alain Lamassoure – L’Europe en général, la Commission en particulier, sont des boucs émissaires faciles de nos échecs nationaux. Au sein de la même zone euro, la France est en déficit commercial de 70 milliards alors que nos partenaires affichent aujourd’hui un excédent additionné de 200 milliards ! Si, au sein de la même zone, la part relative de notre industrie s’est réduite d’un tiers en dix ans (!), nous ne le devons évidemment qu’à nos propres faiblesses ! Quant au soi-disant « tout-libéralisme » de la Commission, la formule fait sourire hors de France. Ce n’est pas la Commission qui décide, ce sont les élus : les ministres réunis en Conseil, d’un côté, et le Parlement européen de l’autre. Or, au sein du Parlement, le rapport des forces est tel qu’aucun texte ne peut être adopté sans les voix des socialistes européens. Il y a un seul domaine pour lequel la Commission a des pouvoirs propres : c’est la concurrence. Le Commissaire en charge, Joaquin Almunia, est un socialiste espagnol…

AltPy – Potentiellement première puissance économique, l’Europe n’existe pas sur la scène internationale. Fondamentalement et structurellement, quelles en sont, selon vous, les raisons profondes ?  Quelles mesures faudrait-il prendre pour changer cela ?
Alain Lamassoure – Je nuancerais d’abord votre jugement. Ce qui est incontestable, c’est que l’Union européenne, en tant que telle, n’est guère visible sur la scène internationale. Cela s’explique par le fait que, pour l’essentiel, les relations extérieures restent de la compétence des États membres, le pouvoir de l’Union se limitant à la coordination des politiques nationales. En outre, l’Union n’a pas de moyens militaires propres pour soutenir son action diplomatique : elle dépend totalement du bon vouloir des États, non seulement sur le principe d’une action, mais sur son déroulement au jour le jour. Si bien que quand les grands pays (en pratique Paris, Berlin et Londres, les autres suivant peu ou prou) sont divisés, les Européens restent spectateurs. En revanche, quand ils sont unis, ils obtiennent des résultats non négligeables. Ce sont eux qui ont obtenu la création de l’Organisation mondiale du Commerce, du Tribunal Pénal International et même du G20, trois institutions dont les Américains ne voulaient pas. C’est la diplomatie européenne et les casques bleus européens qui ont mis fin, il y a quelques années, au conflit le plus sanglant depuis la deuxième Guerre Mondiale, la guerre du Congo. Plus récemment, ce sont les marines européennes qui sont venues à bout de la piraterie au large des côtes somaliennes. L’Autorité palestinienne n’existerait pas sans l’aide de l’Europe, qui paye la totalité des salaires de ses fonctionnaires. Enfin, c’est l’Europe qui porte à bout de bras les négociations contre le changement climatique, auxquelles le reste du monde finit – trop lentement – par se rallier.
Depuis trois ans, grâce au traité de Lisbonne, nous avons mis en place les moyens d’une coordination plus efficace et surtout plus visible : l’Union a désormais un Haut-Représentant pour la politique extérieure et des ambassadeurs dans 120 pays. A partir de là, tout dépend du choix des personnes. Le renouvellement des grands responsables prévus l’an prochain sera important.

AltPy – En mai 2014, les citoyens européens vont élire un nouveau parlement à Strasbourg. Beaucoup montrent du doigt le fonctionnement difficile à comprendre et peu représentatif des institutions européennes. Quelles améliorations « démocratiques » peuvent-ils espérer une fois que la nouvelle législature sera mise en place ?
Alain Lamassoure – Ils auront enfin ce qui leur manque : un »Monsieur » ou une « Madame » Europe, élu par eux. Car c’est une autre novation du traité de Lisbonne : le Président de la Commission européenne ne sera plus un haut fonctionnaire international nommé par les chefs d’Etat, il sera élu par le Parlement européen au lendemain de l’élection de celui-ci. Dès maintenant, les partis politique européens s’organisent pour choisir leur candidat et élaborer un programme commun pour les 28 pays. Pour la première fois, il y aura une vraie campagne d’échelle européenne, et ce sont les citoyens qui éliront le chef de l’Europe et son programme. Cela changera tout !

L’Europe, plus près de nous :
AltPy – Pour nos lecteurs béarnais, bigourdans et basques : En quoi concrètement, l’Europe intervient-elle pour favoriser le développement économique (et plus particulièrement le développement industriel et des voies et réseaux de communication) de notre territoire, bien éloigné de Bruxelles ? Quel(s) projet(s), nous concernant directement, êtes-vous prêt à défendre pendant la prochaine législature ?
Alain Lamassoure – C’est pour moi un sujet d’exaspération : loin de nous, l’Europe ? Elle est quasiment dans chacun de nos villages. Non seulement la moitié des ressources de nos agriculteurs proviennent directement des aides de la P.A.C., mais pour la seule région Aquitaine, c’est plus de mille projets d’investissements locaux qui bénéficient chaque année de financements européens. De la Cité mondiale du vin à Bordeaux au réseau d’aides ménagères des vallées du Haut-Béarn, du nouveau moteur expérimental de Turbomeca à Bordes à la laiterie d’Helette dans la montagne navarraise, l’Europe est partout. Y compris dans l’aide à la banque alimentaire et aux restos du cœur. Mais qui le sait ? Qui le dit ? Le jour de l’inauguration, le représentant de l’Etat et les élus locaux se partagent le mérite. À moins que, par extraordinaire, un député européen soit là. Mais chacun de nous est censé représenter un territoire vaste comme la Suède : le risque de la présence d’un élu européen est faible. En attendant, l’Europe, invisible, est le bouc émissaire commode de nos erreurs.
Ce que nous devons attendre de l’Europe, c’est d’abord le financement des grands projets d’infrastructure comme la LGV, les programmes de recherche et d’innovation, les expériences pilotes dans les quartiers défavorisés et dans les zones menacées de désertification. C’est le modèle européen de développement, dans lequel chacun a sa place.

– propos recueillis par Bernard Boutin

crédits photo PPE

A Vélo, à bicyclette : la liberté selon Christian Laborde

Capture d’écran 2013-05-21 à 08.02.25Le Vélo : un plaisir, une Fête. «Pau à Vélo» vous invite les 1 et 2 juin pour la 11ème Fête du Vélo à Pau et le 4ème Grand Prix Altermobile parrainés par Christian Laborde. Le dimanche 2 juin, il vous donne rendez-vous au kiosque de la Place Royale pour de nouvelles «Vélociférations» peut-être consacrées… au Vélo Urbain (?) et ouvrir cet après midi festif sur le Boulevard des Pyrénées en lançant le 4ème Grand Prix Altermobile.
Vous découvrirez également les chansons d’Abdelak – des Vélos vintage pilotés par des cycladins en costume d’époque – des fixies et autres engins à propulsion humaine – des animations pour enfants… et la remise du Clou Rouillé et du Guidon d’Or de l’agglomération paloise.

A@P – Christian Laborde, vous avez accepté d’être le parrain de cette édition 2013 de la Fête du Vélo à Pau et du Quatrième Grand Prix Altermobile. Tout le monde connaît votre passion pour le Tour de France et le vélo sport (pour la Grande Boucle et la Petite Reine). Lors de cette Fête, nous mettons en avant le vélo transport. Vous arrive-t-il de vous déplacer à vélo dans l’agglomération paloise ?
Christian Laborde – Pour l’instant, en ville, je suis resté fidèle à la bagnole, à la caisse, à la voix d’Alain Bashung sortant de l’autoradio : « La nuit je mens, je prends des trains à travers la plaine… ». Mais, je sais que le vélo m’attend. Et, je choisirai un beau vélo urbain, son cadre sera noir. Il sera beau comme un cheval. Mais jamais je n’enfourcherai un Vélib. Sur un Vélib, on a l’air idiot. Les vélos sont beaux, mais le Vélib hélas est laid.

A@P – Très souvent, amateurs de vélo et amateurs de bicyclette s’ignorent, qu’en pensez-vous ?
Christian Laborde – Amoureux du vélo, je le suis aussi de la bicyclette. Sans doute parce que j’ai passé mon enfance au milieu des bicyclettes : celle du facteur, celle de mon père, celle du paysan menant les bêtes… Philippe Delerm l’affirme : on n’est amoureux qu’à bicyclette. Sans doute. En même temps, observons que vélo est l’anagramme de… love. Je ne vois là qu’une seule et même aventure. Quand j’enfourche une bicyclette ou un vélo, je choisis la flânerie, je choisis l’envol. Je choisis mon rythme, j’échappe à l’épilepsie sociale : je suis libre. Bicyclette ou vélo, c’est la même joie, la même solitude délicieuse, la même trinquerie avec la vie, le grand vagabondage.

A@P – Les records du monde de « ‘vélo caréné » sont détenus par des françaises et des français qui se déplacent à plus de 80km/h sur leur engin à pédales. La française Barbara Buatois détient avec 121,81km/h, le record de vitesse atteint en compétition à Battle Mountain aux U.S.A. A votre avis, serait-il envisageable d’organiser des courses de ces champions sur le circuit automobile palois ?
Christian Laborde – Ces champions ont leur place à Pau. Ce sont de sacrés lascars, des aventuriers. Et l’aventure, sous toutes ses formes, est la bienvenue à Pau, sauf à considérer cette ville comme une maison de retraite.

A@P – Tracer des pistes cyclables permet à certaines villes américaines d’attirer « la classe créative » dont les entreprises ont besoin. Accenture à Minneapolis, Google, Motorola à Chicago… ont transféré leurs bureaux de la périphérie vers le Centre pour attirer ces jeunes talents qui veulent pouvoir se déplacer facilement à pied ou en bicyclette. Quelles réflexions cela vous inspire-t-il ?
Christian Laborde – A vélo dans Minneapolis, la ville de Prince ! Aller bosser à Accenture, en pédalant, en fredonnant « Purple Rain » : le pied ! Reste à savoir ce que sont les conditions de travail chez Accenture. Mais c’est un autre sujet…

A@P – Lors de vos voyages, avez-vous trouvé un pays où le vélo pouvait être un art de vivre ?
Christian Laborde – Le pays où le vélo est un art de vivre, c’est le col d’Aubisque.

– propos recueillis par Hervé Cadillac

Tribune Libre à François-Xavier Brunet

IMG_0280François-Xavier Brunet, Président de la CCI de Tarbes et des Hautes-Pyrénées, a du caractère et me mâche pas ses mots. Pour lui, les forces centrifuges et centripètes jouent à fond pour les Pays de l’Adour. Comme la Maire de Pau, il prend bien soin de ne pas oublier le Pays Basque. Trop éloignés des capitales régionales de Toulouse et Bordeaux, la Bigorre, le Béarn et le Pays Basque sont rejetés à l’extérieur et condamnés à travailler ensemble. Le Bigourdan concède que la « capitale » de ce territoire pourrait bien être Pau située entre Bayonne et Tarbes. Reste à faire travailler tous les acteurs ensemble. Dans l’immédiat, il nous annonce une initiative, à venir prochainement, entre les CCI de Pau et de Tarbes qui vont travailler de concert sur les infrastructures de transports et il lance un vibrant appel pour la Traversée Centrale des Pyrénées : « Dans les temps de crise et d’incertitude, il faut savoir avoir la hardiesse de ressortir quelques vieilles utopies qui sont des utopies structurantes et on pourrait bien dans 30 ans, nous reprocher d’avoir lâché sur ces ambitions-là. »

Alternatives Pyrénées – Les Pays de l’Adour : Une nécessité ou une vieille idée dépassée ?
François-Xavier Brunet – Nous allons avoir à faire face à un transfert d’un jacobinisme national à un jacobinisme régional et, la nature étant ce qu’elle est, les territoires qui seront à moins de 100 kms des métropoles régionales seront aspirés par un mouvement centrifuges. Les territoires qui seront à plus de 100 kms des pôles régionaux seront éjectés par un mouvement centripète. Il en sera de même comme pour la Bigorre, comme pour le Béarn, comme pour le Pays Basque.
Le Pays Basque pourra toujours se raccrocher dans une diagonale nord-sud le ramenant vers Bilbao. Pour autant, ils auront un problème parce que ni le Pays Basque français, ni le Pays Basque espagnol deviendront indépendants de la France et de l’Espagne. Il faudra bien qu’ils se raccrochent à leur intérêt national respectif. C’est la raison pour laquelle je crois que nous avons des intérêts extrêmement convergents et il serait probablement temps de ressortir cette vieille idée de Michel Inchauspé d’une région « Pays de l’Adour ». Ce que je dis est d’autant plus méritoire de la part d’un Bigourdan, que tout ceci aboutirait probablement à confier à Pau un destin de capitale régionale.

Le Nord des Landes a intérêt à être rapproché de la Gironde et du Lot-et-Garonne pour que l’arrondissement de Dax soit raccroché à notre région « Pays de l’Adour » avec 3 entités globalement : le Pays Dacquois, le Pays Basque et le Béarn et la Bigorre. On aurait un territoire cohérent. Si l’on ne touche pas aux frontières administratives, bien que nous ayons un destin commun, nous ne pourrons pas mener une politique commune.

A@P – Quels sont les enjeux communs actuels auxquels doit faire face ce territoire ?
François-Xavier Brunet – Le développement économique et industriel en se battant sur ses savoir-faire, son attractivité pour faire venir d’autres activités. C’est du « marketing territorial ». Tous les territoires sont en compétition les uns avec les autres. Quand l’Aquitaine et Midi-Pyrénées sont en concurrence, nous sommes encore plus les oubliés dans ce combat.
Des industriels de grands groupes me disent qu’ils ont l’impression que nous n’avons pas faim alors que des régions comme la Franche-Comté et les Pays de Loire ont les dents longues qui rayent le parquet. Donnez-nous les moyens d’exister en tant que Pays de l’Adour et vous verrez comme nous sommes (seront) combatifs. Pour l’instant, nous sommes obligés de demander à Toulouse l’autorisation d’exister et Pau doit faire de même à Bordeaux.

A@P – On fait quoi pour exister en tant que Pays de l’Adour ?
François-Xavier Brunet – Il faudrait que tous les acteurs politiques, économiques et institutionnels se mobilisent pour obtenir ce cadre territorial. C’est probablement une utopie ou une gageure. Mais, si on ne s’engage pas… autant rester chez soi.

A@P – Depuis les tentatives, il y a environ 30 ans, de Mr Inchauspé, les décideurs ont peu progressé…
François-Xavier Brunet – Je reprend la balle au bond, humblement et, je suis prêt à prendre mon bâton de pèlerin pour essayer de faire avancer cette idée. Je vais d’ailleurs prendre avec mon collègue et ami, Patrick de Stampa, Président de la CCI de Pau-Béarn, une initiative dans les semaines qui viennent notamment sur le sujet des infrastructures de transport. Le barreau Béarn-Bigorre LGV est primordial. Comment obtenir un amendement à un projet dont on est même pas sur que la puissance publique puisse le financer alors que nous n’avons pas la masse critique, la puissance politique et institutionnelle pour faire valoir ce point de vue ? Il faut trouver le moyen de peser dans le débat politique.
Les Chambres de Commerce et d’Industrie de Tarbes Hautes-Pyrénées et de Pau-Béarn vont s’allier pour faire valoir des points de vue communs au nom des acteurs économiques de nos territoires.

A@P – Les CCI représentent leurs ressortissants mais pas la population…
François-Xavier Brunet – Si vous rassemblez aussi les Chambres des Métiers et tous les acteurs de l’industrie, du commerce, du tourisme, du service, de l’artisanat et leurs familles et leurs salariés, il ne vous manque plus grand monde. Il vous manque la fonction publique.

A@P – Gérard Trémège, président du Grand Tarbes propose de mettre en place une structure, légère et pratique, une « Agence de développement économique » où siègeraient les grands élus : les Présidents des conseils généraux, des communautés d’agglomération et des CCI de Pau et de Tarbes.
François-Xavier Brunet – Je reprend la balle de Gérard Trémège au bond et je lui dis « banco ». Nous collaborons déjà au sein du BDE (à traduire en toutes lettres) qu’il préside et proposerons, avec Patrick de Stampa de poser la première pierre à cet édifice sous forme d’une espèce de conférence permanente entre les deux chambres. On verra comment nous l’appellerons. L’important n’est pas le titre mais ce que l’on veut en faire.

A@P – Au-delà du sujet de la LGV qui est à long-terme, il y a celui de la concurrence entre les deux aéroports et ces appels à une gestion commune…
François-Xavier Brunet – Ce serait idéal. Ces équipements sont tous neufs et de grande qualité. L’aéroport de Tarbes a été confié à un gestionnaire : Lavalin après plus de 60 années de gestion par la CCI de Tarbes. La CCI de Pau gère l’aéroport d’Uzein. Les gestionnaires doivent commencer d’abord par équilibrer l’exploitation.
Si on commence à dire que le trafic régulier va à Pau et le trafic saisonnier va à Tarbes, on place ce dernier en déficit chronique permanent et cela va coûter très cher au contribuable. Ce serait bien de trouver des convergences.
En son temps, pour le renouvellement de la concession d’exploitation de l’aéroport de Tarbes, mon prédécesseur avait compris qu’il fallait intégrer un grand groupe privé, Véolia Transport, et il avait fait la démarche auprès de la CCI de Pau de l’intégrer dans l’exploitation de l’aéroport de Tarbes avec réciprocité en 2015 (NDLR : année de fin de concession d’exploitation de Pau-Pyrénées par la CCI de Pau). Cela n’avait pas pu se faire parce que le Président Forgues (NDLR : ancien Président du CG65) voyait cela d’un très mauvais œil car cela ne correspondait pas à la candidature qu’il avait choisi dès le départ…
Pour ce qui est de Tarbes-Pyrénées, le trafic régulier sur Paris fonctionne bien mais le trafic charter baisse inexorablement depuis des années et les low-cost mises en place coutent chers. Ce sont des tentatives de diversification rendues nécessaires parce que les vols charters de pèlerins sur Lourdes, souffrent. Ils représentent encore 75 à 80% du trafic.
La convergence entre les deux aéroports ne marchera que si c’est du gagnant-gagnant. Si, c’est pour faire du perdant-perdant pour que ce soit encore le contribuable qui équilibre, on ne s’en sortira pas. D’abord parce qu’à force de se faire ponctionner, les poches se sont vidés et notre pays est au bord de la jacquerie fiscale.

A@P – La Bigorre appelle-t-elle de ses vœux, un autre projet majeur  ?
François-Xavier Brunet – Oui. La TCP (Traversée Centrale des Pyrénées). La question n’est pas de se bagarrer pour savoir si il faut la faire en Béarn ou en Bigorre. Ceci dit, à priori, pour des raisons qui sont propres aux Espagnols et à leur versant sud des Pyrénées, ils préféreraient voir creuser le tunnel ferroviaire de basse altitude en direction de la Bigorre.
Dans les temps de crise et d’incertitude, il faut savoir avoir la hardiesse de ressortir quelques vieilles utopies qui sont des utopies structurantes et on pourrait bien dans 30 ans, nous reprocher d’avoir lâché sur ces ambitions-là. La crise ne continuera pas à frapper éternellement les deux pays. Les couloirs est et ouest de la chaine sont à la veille de la thrombose. Le renchérissement inexorable du pétrole rendra plus pertinent le recours au ferroviaire et surtout il n’y a pas de développement économique, culturel et social loin des grands axes de communication.

Nous avons besoin de cet axe entre France et Espagne. 60% des Bigourdans sont d’origine espagnoles, moi-même je suis de la troisième génération, mes grands-parents étaient bergers aragonais. Je suis intimement convaincu de notre communauté de destin.

On a aussi tord d’opposer le Pau-Canfranc et la Traversée Centrale des Pyrénées. Ce sont des problématiques distinctes de réponses à des besoins différents. Les convois lourds ferroviaires ne passeront pas le Pau-Canfranc. Il n’aura qu’un trafic passager touristique et régional, ce qui ne sera pas le cas de la TCP.

A@P – Comment va la Bigorre aujourd’hui ?
François-Xavier Brunet – L’ensemble du pays ne va pas formidablement bien. Pour autant la Bigorre n’est pas confrontée à une souffrance excessive dans la mesure où d’une part, les fondamentaux du tissus industriels du département sont structurés autour de deux activités principales : l’activité aéronautique, Socata-Daher en tête, et ses périphériques, avec une conjoncture favorable, d’une part, et l’industrie mécanique et électromécanique de puissance, d’autre part. Il vient de se tenir à Tarbes la convention d’affaires des systèmes embarqués DéciElec dans le sillage d’Alstom.
L’industrie peut s’enorgueillir d’avoir, au cours des dernières années, vu la construction de deux nouvelles usines d’Alstom à Tarbes et de Knauf Insulation à Lannemazan. Le secteur touristique reste un marqueur très fort des Hautes-Pyrénées et un secteur d’attractivité considérable. Nous sommes la première destination touristique de Midi-Pyrénées.
Nous n’avons pas été forcément impactés par les premiers assauts des crises successives. Aujourd’hui, nous commençons à être atteint par la crise de consommation des ménages avec des tensions sur le commerce, les services, le bâtiment et les travaux publics qui font que le bilan raisonnable fait pourrait être plus alarmiste dans quelques mois.

– propos recueillis par Hélène Lafon et Bernard Boutin.

Max Moreau

130410 Max MoreauMax Moreau observe l’économie française et mondiale depuis de longues années. Pour l’économiste-écrivain, l’affaire « Cahuzac », avec toutes ses ramifications, n’est que la pointe de l’iceberg d’un mal profond et ancien. Plus que jamais, il en appelle à combattre la corruption, sous toutes ses formes. Mais, surtout pas dans l’improvisation et la précipitation… 

A@P – Beaucoup ont le sentiment que l’affaire Cahuzac n’est que la pointe de l’iceberg. Transparency International classe la France 22è loin derrière les pays scandinaves, le Canada, l’Australie, la Nouvelle-Zélande dans son indice de corruption. La transparence ne devrait-elle pas être inscrite dans le marbre de la constitution ?
Max Moreau – Les politiques s’emparent du problème de la lutte contre la corruption sous la menace de cette affaire Cahuzac mais ils n’y ont jamais réfléchi avant.
Je vous signale qu’en 1996, j’ai écrit « L’Embauchoir » où on trouve un long chapitre sur les effets pervers de la corruption sur la compétitivité. J’y explique le « harcèlement corrupteur », le « cycle de l’enrichissement canaille » et les problèmes de déontologie politique. Cela n’intéressait personne à l’époque. En 2011, j’ai étudié plus à fond le sujet, dans une réédition*, en donnant des solutions aux problèmes de conflits d’intérêt, de la corruption, des paradis fiscaux…

A@P – Par quelles premières mesures le Président de la République peut-il moraliser la vie politique de notre pays ?
Max Moreau – Le Président Hollande fait comme ses prédécesseurs. Il agit sous la contrainte avec tous les effets pervers des décisions prises dans la précipitation. Quelle que soit l’idéologie proposée, le résultat est toujours mauvais.
On annonce des mesures concernant la publication du patrimoine des élus ainsi que des dispositions concernant la déontologie. Mise en place dans la précipitation, elles n’auront pas l’effet escompté.

A@P – Une sixième République est-elle une réponse à la moralisation de la vie politique en France ?
Max Moreau – Je n’ai pas la compétence pour répondre à cette question. Si, les gouvernements quels qu’ils soient avaient fait leur travail, nous n’aurions pas de problème de déontologie, de chasse aux paradis fiscaux parce qu’on aurait trouvé des solutions. Sur la corruption, droite ou gauche n’ont pratiquement rien fait. Au contraire, on s’est protégé parce que les gouvernants ont dans leurs rangs des corrupteurs qui sont des corruptibles. Il n’est donc pas question d’engager des réformes sur ces plans là de façon à ne pas gêner certains collègues.

A@P – Mais alors, qui pour changer le fonctionnement de nos institutions si les politiques ne veulent pas le faire ?
Max Moreau – J’ai proposé la constitution d’un pool d’économistes et de scientifiques qui travaillent ensemble de façon à proposer à l’Etat, je ne dis pas au gouvernement, la mise en place d’une économie avec des objectifs à long-terme et des axes de fonctionnement de façon à ce qu’à chaque alternance politique on ne remette pas tout en question. Il s’agit de mettre en place une ligne directrice invariable.
A l’heure actuelle, il n’y a plus de confiance parce qu’il n’y a plus de perspective à long terme. Tout est remis constamment en cause : la fiscalité, le juridique…

A@P – Une fois les propositions faites par ce « pool » composé de membres issus de la société civile, qu’est-ce qui contraindra nos gouvernants à transformer le fonctionnement de nos institutions ?
Max Moreau – Sous la pression de l’opinion public, avec toutes les affaires qui sortent, les gouvernants et l’opposition vont être mis dans l’obligation de se bouger s’il ne veulent pas « se faire bouger ».

A@P – On va tous se retrouver dans la rue…
Max Moreau – Ce n’est pas la bonne solution. Je préfère la réflexion à l’agitation.

A@P – Revenons à la transparence. M. Cahuzac était membre de la Franc-Maçonnerie. Cette structure dite philosophique, vise avant tout à prôner l’entraide de ses membres. Elle est très présente parmi les « décideurs ». Qu’en pensez-vous ?
Max Moreau – A 4 ou 5 reprises dans ma vie professionnelle, il m’ a été proposé d’y rentrer. J’ai toujours refusé parce que je suis un esprit très indépendant. J’ai refusé aussi de rentrer dans des partis politiques. Comme je suis un républicain, je manifeste mes idées en votant mais ne l’annonce pas comme le veut la loi. Je suis un économiste qui n’est pas engagé ni à droite, ni à gauche. Je prends les bonne idées d’où qu’elles viennent et à mon tour essaye d’en proposer.
La Franc-Maçonnerie est comme toutes les associations. Il y a des gens qui s’investissent pour la droiture et il y a quelques « pourris » qui y rentrent pour faire des affaires. C’est la même chose au Rotary, Lions et bien d’autres clubs qui prônent l’entraide. Il y a le même pourcentage de « cons », c’est un peu trivial, qui sortent de Polytechnique que de la bouche d’un métro…

A@P – Le capitalisme n’est-il pas devenu fou, n’est-il plus sans capitaine à la barre ? Qui pour le contrôler ?
Max Moreau – Le principe de base est la cupidité des gens. C’est le mal du siècle. Dans toutes les relations internationales, pour faire des affaires, il faut « backchicher ». Cela ne vient pas uniquement d’Afrique. C’est mis en place, ce que j’appelle, la rétrocupidité, où l’on augmente artificiellement les commissions versées de façon à obtenir en retour des commissions qui servaient soit à financer des partis politiques, soit des dépenses personnelles.

A@P – La cupidité semble faire partie du fond de l’homme. Comment fait-on pour contrôler cela dans un monde global ?
Max Moreau – Alors que j’installais des éléments techniques d’une chaufferie au CET de Cajarc, le Président Pompidou m’avait dit « la corruption est à l’économie, ce que l’ombre est à l’homme ». Elle le poursuit toujours. Comme il y a besoin d’un certain montant d’argent au « black » pour faire tourner les affaires internationales. Il y a besoin de structures d’accueil pour ces sommes et c’est la raison pour laquelle on a fondé les paradis fiscaux.

A@P – Ils sont donc incontournables…
Max Moreau – Oui, mais on doit pouvoir y mettre un peu d’ordre bien que l’on soit tenu par le « marché ». Au Parti Communiste chinois, il y a 63 ou 69 milliardaires. Ici, en France, les scandales qui apparaissent ne sont en fait qu’une partie de l’iceberg. Un tas de gens, fascinés par l’argent, sont compromis dans des affaires.

A@P – Dans ces conditions, il ne nous reste qu’à travailler sur nous-même, la France…
Max Moreau – Commençons par balayer devant notre porte. Mettons en place toute une série de mesures de charte déontologiques pour que cela fonctionne à peu près normalement chez nous. Ne donnons pas de leçon à la mondialisation alors que nous même sommes mal placés dans les classements de « Transparency International ».

– propos recueillis par Bernard Boutin

PS : Une réédition de l’Embauchoir a été réalisé en 2011 suite aux événements et à la demande : Le livre est disponible auprès de l’Edition l’Harmattan.

Béarn – Bigorre : Le point de vue de Martine Lignières-Cassou

mlcLa Maire de Pau et Présidente de la Communauté d’Agglomération de Pau-Pyrénées est géographe de formation. Parler territoire, c’est pour elle revenir aux sources.

Le sujet des relations entre le Béarn et la Bigorre ne pouvait être approfondi sans recueillir son opinion. Si pour Martine Lignières-Cassou, la Bigorre est importante, l’élue aime à rappeler, qu’au pied des Pyrénées, la DATAR mentionne en premier lieu les agglomérations bayonnaises et paloises. Béarn-Bigorre ne peut pas être exclusif. Pour autant, un rendez-vous est programmé avec son homologue tarbais. On devrait y parler « pôle métropolitain ». Une chose est certaine, les relations avec notre voisine tarbaise dépendent de la « bonne volonté des hommes ». « La loi ne peut rien imposer, elle peut juste prescrire. »
Au détour de la conversation, Martine Lignières-Cassou lâche : « Souvent les politiques ne font que refléter l’état d’esprit des sociétés dans lesquelles ils vivent ». Un message à la société civile ?

A@P –  Marc Cabane, ancien préfet et donc connaisseur en « ingénierie territoriale », rappelle que la DATAR a identifié ce qu’elle appelle des « systèmes urbains métropolitains ». Il ne s’agit pas de métropoles au sens de la loi sur la décentralisation mais de territoires s’inscrivant dans des dynamiques d’échanges et de services.  La DATAR a classé Béarn-Bigorre parmi les 26 systèmes urbains nationaux identifiés. Pour autant, l’Etat n’a pas de solution incitative, pour favoriser la mise en relation entre territoires proches, malgré son intérêt stratégique pour le développement. Pour mémoire, le concept de « réseau de ville » a été un fiasco. 

Rien n’étant-là pour favoriser un rapprochement pérenne de ces territoires, on en est à se reposer sur la « bonne volonté des hommes » comme le dit M. Labazée, Président du Conseil Général des PA. Est-ce suffisant ? 

Martine Lignières-Cassou – Vous prêchez une convaincue puisque c’est tout le sens du projet Pau porte des Pyrénées : agir en coopération entre territoires du piémont pyrénéen pour assurer leur dynamisme et leur développement. Depuis 5 ans que je porte ce projet, je considère que nous avons significativement avancé même si beaucoup reste à faire. A cet égard, l’étude de la DATAR est très intéressante. Elle dit qu’entre Bordeaux et Toulouse, il y a un bipôle formé principalement, sur le piémont Pyrénéen, par Bayonne et Pau auquel il convient d’ajouter Tarbes. Bayonne et Pau en sont les deux principaux éléments puisque notre ville a un bassin de vie de plus de 250.000 habitants avec l’équivalent sur le Pays Basque. Tarbes a une population moindre. A noter, que dans cette analyse sur la structuration le long du Piémont Pyrénéen, Bayonne est bien incluse par la DATAR. C’est à cette échelle que je m’efforce de travailler avec les uns et les autres pour porter en commun des dossiers afin d’exister entre Toulouse et Bordeaux, villes qui profitent à plein du phénomène de métropolisation.

A@P – Pour autant, Tarbes semble beaucoup plus proche de Pau au niveau économique…

Martine Lignières-Cassou – Ce que je veux dire, c’est qu’il y a aussi des liens avec la région bayonnaise. Ne tournons le dos à personne. Le port de Bayonne a une importance stratégique pour le Béarn.Une interdépendance existe entre tous les pôles au pied des Pyrénées, il faut l’entretenir à l’échelle de pertinence nécessaire selon ce dont on parle. Il est évident que la Communauté d’agglomération de Pau-Pyrénées a un rôle de locomotive, parce que c’est la plus importante, par rapport à l’ensemble du sud-est aquitain et au-delà en incluant Tarbes.

Georges Labazée a raison de dire que les relations entre ces pôles reposent sur la bonne volonté des différents acteurs mais pas seulement des politiques. Il y a aussi les acteurs du monde de l’économie et de la société civile.  Souvent les politiques ne font que refléter l’état d’esprit des sociétés dans lesquelles ils vivent. Nous ne nous en sortirons, face à Bordeaux et Toulouse en particulier, que si nous savons nous allier.

A@P – Au niveau humain, on a l’impression que les relations entre les régions paloises et tarbaises sont plus fortes que celles entre les régions paloises et bayonnaises. Malheureusement, les chiffres ne sont pas connus…

Martine Lignières-Cassou – Tout à fait. Nous sommes en train de mener une étude avec Laurent Davezies* sur notre aire urbaine, par rapport à des aires comparables, et son impact sur le piémont Pyrénéen. Les résultats de l’étude seront rendus publics à la mi-avril. Ils rappelleront, on le sait déjà, que notre territoire est diversifié dans ses activités et ainsi, assez préservé jusqu’à présent.

A@P – Revenons aux « Les hommes de bonne volonté »…

Martine Lignières-Cassou – « Bonne volonté » bien sur. Ce n’est pas la loi qui peut imposer. Au plus, elle peut prescrire. Les avancées se font au fil des opportunités. Il faut savoir construire des coopérations avec nos voisins, d’abord à l’intérieur même du Béarn. Un exemple : dans le domaine de la santé, nous avons été une des premières région en France à créer une « communauté hospitalière de territoire »  incluant les hôpitaux de Pau, d’Oloron, d’Orthez et les cliniques qui les complètent.

A@P – mais, il s’agit là des coopérations les plus « faciles », celles mises en place entre politiques béarnais qui se retrouvent régulièrement dans un cadre ou un autre. Pour travailler avec les bigourdans, de tels cadres n’existent pas…

Martine Lignières-Cassou – Nous avons créé un établissement public pour l’école d’art entre Pau et Tarbes parce que nécessité a fait loi. D’ici quelques temps, à mon avis, Biarritz intégrera cet établissement de coopération culturel parce qu’il sera confronté aux mêmes obligations qu’ont eues Pau et Tarbes.A mon sens, c’est ce que fait Georges Labazée avec son collègue des Hautes Pyrénées, par exemple, sur les aéroports. Peut-on offrir des lignes low-costs entre les deux aéroports de Pau et de Tarbes ? C’est aussi ce qu’il fait pour les déchets (voir interview Georges Labazée du 25 février). On doit pouvoir multiplier ces dossiers.

A@P – à ce propos sur le forum d’Alternatives-Paloises, les commentateurs s’étonnaient qu’il y avait toujours un directeur pour chaque école. L’établissement public, va se retrouver avec trois directeurs…

Martine Lignières-Cassou – En règle générale, la mutualisation ne porte ses effets qu’à moyen terme. Il faut prendre en compte la dimension du temps dans les processus de mutualisation.

A@P – Gérard Trémège, président du Grand Tarbes propose de mettre en place une structure, légère et pratique, une « Agence de développement économique » où siègeraient les grands élus : les Présidents des conseils généraux, des communautés d’agglomération et des CCI de Pau et de Tarbes. Objectif : travailler sur les sujets concrets de développement économique et de « marketing territorial » concernant les deux départements. Monsieur Cabane dit à peu près la même chose et Georges Labazée en appelle à la rencontre des « hommes de bonnes volontés ». On fait quoi pour aller plus loin ?

Martine Lignières-Cassou – Sur mon initiative, nous nous étions rencontrés, mon collègue tarbais et moi, il y a un an. Membres de la Fédération des entreprises publiques locales (les SEM), nous nous sommes vus, il y a un mois et nous sommes convenus de nous rencontrer pour parler de pôle métropolitain. Un rendez-vous est pris et nous devrions aborder le sujet dans quelques jours.

J’ai aussi parlé à mes homologues béarnais de l’idée de « pôle métropolitain ». C’est une direction dans laquelle il faut qu’on aille.

A@P – Vous avancez donc avec Monsieur Trémège…

Martine Lignières-Cassou – Comme j’avance aussi avec Jean Grenet ou avec Georges Labazée, Bernard Uthurry ou David Habib.

A@P – sauf qu’il y a cette frontière réelle entre Béarn et Bigorre qui fait qu’il faut avancer d’une façon différente.

Martine Lignières-Cassou – Encore une fois, nécessité fait loi. Je suis très préoccupée par le devenir de l’aéroport de Pau et je pense que deux aéroport à 40 kilomètres l’un de l’autre, à terme, l’un sera sacrifié si rien n’est fait. Pour éviter une solution de ce type, il va falloir mutualiser. J’en suis convaincue.

A@P – A qui revient le responsabilité de mettre cela en place ?

Martine Lignières-Cassou – Nous allons avoir un conseil d’administration du Syndicat Mixte de l’Aéroport Pau-Pyrénées bientôt. Je pense que son Président, Bernard Uthurry qui représente la Région, proposera à l’Assemblée de lancer une expertise sur la suite de la concession qui s’arrête en 2015. Il y a 3 ou 4 scénarii possible à mettre sur la table.

A@P – N’y a-t-il pas un autre aspect sur lequel Béarn-Bigorre pourraient travailler sur le fond, à savoir la promotion touristique des Pyrénées ?

Martine Lignières-Cassou – Ce travail est bien entamé à travers le label « pôle d’excellence touristique » sur le thème de l’eau auquel sont parties prenantes Lourdes et Tarbes, mais aussi Mont de Marsan, Dax, Anglet, les Conseils généraux du Gers, des Hautes-Pyrénées, des Pyrénées-Atlantiques, l’Université de Pau, le Crédit agricole, Total, les organismes de formation, de tourisme. Le territoire couvert est celui compris entre les Pyrénées, la Gascogne et l’Atlantique soit 4 départements : le Gers, les Hautes-Pyrénées, les Landes et les Pyrénées-Atlantiques. Nous avons tous en commun, à des titres divers, l’eau. Voilà une piste de développement qui va se traduire par la création d’organismes de formation et d’actions de mise en visibilité du territoire concerné à travers la recherche et l’innovation.

– propos recueillis par Bernard Boutin

* Laurent Davezies est un économiste d’origine béarnaise qui vient de publier « La crise qui vient ».

 

Béarn – Bigorre : Le point de vue de Marc Cabane

Capture d’écran 2013-03-12 à 12.18.43Marc Cabane a passé toute sa carrière au service de l’État. Sous-préfet, préfet, en poste dans l’administration centrale parisienne, il aura eu de nombreuses fois l’occassion se pencher sur l’organisation territoriale. Lire la suite « Béarn – Bigorre : Le point de vue de Marc Cabane »