L’Europe un rêve déçu

colère

 

Mes frères, cessons nos plaintes !
Qu’un cri joyeux élève aux cieux nos chants de fêtes et nos accords pieux !

Beethoven (Prélude de « l’Ode à la joie », 4e mouvement de la IXe symphonie).   Hymne Européen.

La campagne pour les élections Européennes va mettre au centre du débat l’avenir d’une « Communauté » en piteux état. Cette Communauté elle est née d’une aspiration généreuse portée par des objectifs d’abord spirituels. Il faut entendre ce mot au sens laïc. C’est Victor Hugo lui-même qui l’évoqua en premier, lors d’une séance de l’assemblée Nationale repliée à Bordeaux : « Le peuple français a taillé dans le granit indestructible et posé au milieu du continent monarchique de l’Europe la première assise de cet immense édifice qui s’appellera un jour les Etats-Unis d’Europe (approbation à gauche- Rires sur les bancs de la majorité). »

La « vision hugolienne » devait avancer portée par les « pères fondateurs » dont le pilier fut Jean Monnet, bête noire du Général car il avait soutenu Giraud, marionnette de Roosevelt, son concurrent pendant la guerre ; De Gaulle incarnant la Résistance réelle comme il le prouvera par la suite. L’alliance des grandes nations européennes, la France et l’Allemagne –la Grande-Bretagne restant sur sa réserve insulaire- se fit malgré les réticences Gaulliennes sur une double nécessité : économique et morale.

C’est cette dernière qui nous intéresse aujourd’ hui. Il fallait, au sortir de la guerre, tirer un trait sur ce qui avait été le plus grand massacre de masse de l’histoire européenne, cette industrialisation de la mort que fut la Shoah ; phénomène unique quantitativement mais aussi dans son fonctionnement. Il était singulier –et horrible- qu’elle fût conçue et élaborée dans le pays de Kant et de Hegel, de « l’Aufklärung » et soutenue par l’Etat Français (celui de Pétain) sur les terres des « Lumières » de Voltaire et de Descartes. C’est donc la volonté de revenir à un humanisme porté par la Raison qui conduit le mouvement Européen à ses débuts. On peut dire que la construction européenne a été élaborée en réaction à cette brutale manifestation d’antisémitisme, vue désormais comme une sorte de parenthèse honteuse dont il fallait tourner la page. Tourner la page ne voulant pas dire oublier, bien sûr. C’est là, dans la prise de conscience de l’horreur de la Shoah, que se trouve le fondement moral de cette union, la base d’une construction commune ; toute construction naissant d’abord d’une idée.

La montée progressive et récente d’un antisémitisme aux arguments nouveaux, largement répandu dans tous les pays européens sans exception, montre que l’édifice n’est pas à la hauteur de cet objectif généreux et nécessaire. Comme l’analyse parfaitement Alain Finkielkraut tirant la leçon de sa récente agression : dans un curieux retournement de situation, l’antisémitisme est devenu une « figure de l’antiracisme ». Paradoxe absurde mais bien réel. L’Europe a donc failli dans son objectif premier : éradiquer cette haine qui mène à des conduites insensées. Pourquoi ? C’est la question principale : on aimerait la voir évoquée dans ce débat électoral dominé jusqu’à maintenant par les tambouilles électorales habituelles qui n’ont pour objet que d’assurer des postes aux uns et aux autres.

On a changé le curseur européen. L’objectif matérialiste a pris le pas sur les autres considérations. Il faut assurer un bien-être collectif optimal -objectif en partie réalisé- en s’appuyant sur des considérations exclusivement économiques et financières, tout cela dans le cadre d’un système qui a fait ses preuves mais dont on sait qu’il doit être amendé, contrôlé : le libéralisme. A cela, s’ajoute une multitude de décisions tatillonnes et autocratiques pondues par une administration qui n’a rien à envier à « l’énarchie » qui sévit en France combattue résolument par Xavier Bertrand.

A-t-on entendu Jean-Claude Junker nous parler de culture ? A-t-on apporté une réponse politique aux pro-Bexit ? Les obstacles technocratiques de Michel Barnier ont-ils fait réellement évoluer les esprits britanniques ? La faible participation annoncée pour ces élections est-elle le signe d’un désamour définitif ? La montée des populismes est-elle une fatalité ? Y aurait-il un langage des chiffres unique, des statistiques  désincarnées et définitives pour évoquer ce grand dessin ? Si oui, alors pourquoi débattre ? Ne pouvons-nous pas trouver, ni même chercher, une réponse commune aux questions essentielles : l’immigration, le terrorisme, la transition énergétique ? Apporter une réplique conjointe à l’antisémitisme et au racisme dans un ensemble qui pourtant s’était promis de les bannir définitivement ?

L’Europe, gouvernée ainsi, ne fait plus rêver. Hélas !

Pierre Michel Vidal

La culture, supplément d’âme ?

“Un homme sans culture ressemble à un zèbre sans rayures.”

Proverbe africain.

Il devient difficile de s’exprimer sans être qualifié de pour ou contre et subir de violentes interpellations, blessantes, même pour ceux qui ont le cuir tanné. On ne peut désormais être observateur sans être pointé comme critique et critique sans être accusé de destructeur. Ce n’est pas le signe d’une démocratie en forme ni apaisée. La pensée unique règne et « les chiens de garde » comme disait Paul Nizan sont là pour faire observer une sorte police de l’esprit. La tolérance nous abandonne et la raison fait place à la passion.

Voilà un phénomène récent, comme est nouveau la montée de la droite dure en Europe et de celle de l’antisémitisme. La corrélation entre les deux n’est pas surprenante car la Communauté Européenne s’est fondée sur le rejet de la Shoah, ce massacre de masse, cette tentative d’élimination d’un peuple, unique dans l’histoire de l’humanité. Il ne s’agit pas « un détail de l’histoire » mais au contraire d’une rupture profonde d’un processus historique. Il a légitimé la construction européenne, même si cette construction est loin d’être parfaite.

Dans ce débat violent, les Gilets Jaunes, avant leur dérive pitoyable, ont eu le mérite de mettre le doigt sur l’urgence sociale à laquelle le pouvoir a apporté une réponse quantitative plus que structurelle. Le Grand Débat, lui, a été un exercice talentueux du Président de la République qui tient plus de la communication que de l’échange espéré. Il est aussi question de « transition écologique » qui a trouvé une nouvelle icône : Greta Thunberg, 16 ans. Chaque vendredi depuis des mois elle proteste devant le parlement suédois suivie par quelques adolescents. Ce mouvement évoque vaguement cette « croisade des enfants » qui en 1212, dans un élan millénariste, voulut partir à la conquête de Jérusalem ; aventure qui se termina en échec sanglant.

Dans cette abondance, il est une question essentielle passée à la trappe, aussi bien sur le plan national que sur le plan local, celle de la culture : sa diffusion, le statut des créateurs, son économie. Le ministre titulaire est inexistant (qui connaît son nom ?)  et la rue de Valois est devenue une sinécure. Elle a pourtant été un lieu prestigieux, avec de brillants prédécesseurs : André Malraux, Jacques Duhamel, Jack Lang, Frédéric Mitterrand pour n’en citer que les plus célèbres.

Le président Macron avait fait de la culture un des piliers de sa campagne et émis comme promesse le « pass-culture » pour les jeunes. Qu’est devenu cet engagement séduisant ? Et l’Europe, tant critiquée par ailleurs, n’a-t-elle pas fait l’unanimité avec le programme Erasmus ? Ces échanges entre jeunes européens gentiment moqués par Cédric Klapisch dans « L’auberge Espagnole ». L’homme ne vit pas que de pain faut-il le rappeler ?

Pau de son côté est devenu une sorte de désert culturel. Le relais du centre-ville abandonné du public a été pris par les salles périphériques, un temps critiquées à tort. Un exemple : l’Atelier du Neez de Jurançon une salle à la jauge ajustée et à la programmation adaptée qui se remplit régulièrement. Preuve qu’une demande existe sur le plan local comme sur le plan national en faveur du spectacle vivant. Nous ne parlons pas des grosses machines, soutenues par les médias, qui remplissent le « Zénith » sans effort… Pour prendre un autre exemple on avait évoqué la possibilité de transformer la Halle de la Sernam située à côté de la gare, en centre de musique moderne. Belle idée, dans un lieu parfait, inutilisé, pour un coût réduit, sans gêne pour le voisinage qui serait plébiscitée par la jeunesse. Où en est-on ?

La culture qui relie les hommes plutôt que les diviser, qui porte à la réflexion plus qu’au déchaînement des passions, qui pousse à la quête de la beauté et de l’harmonie, à l’apaisement et à l’exaltation de la pensée, est devenue la grande oubliée des débats (ne faut-il pas dire de nos divisions) qui nuisent à notre présent et hypothèquent notre avenir.

 

Pierre Michel Vidal

Photo: alamy stock photo

 

Une jeune fille à Pau

Ce mardi 19 février, je me trouvais devant la Préfecture des Pyrénées Atlantiques à Pau. Je participais à la manifestation pour dénoncer l’antisémitisme qui revient comme une bête immonde. Nous étions environ cinq cents personnes. Lorsqu’une jeune fille …

Une jeune fille s’est approchée de moi et avec un sourire timide m’a demandé ce qu’il se passait. Il s’est alors installé entre elle et moi le dialogue suivant :

Elle : Que se passe-t-il ?
Moi : II s’agit d’une manifestation contre l’antisémitisme et l’antisionisme. Vous êtes au courant de ce qui s’est passé à Paris ?
Elle : Non.
Moi : A Paris, samedi dernier, le philosophe et académicien, Alain Finkielkraut a été insulté. Il a été victime de propos racistes, antisémites et antisionistes. Vous ne le saviez pas ?
Elle : Non
Moi : Vous connaissez Alain Finkielkraut ?
Elle : Non.
Moi : Vous ne lisez pas les journaux, vous ne regardez pas la télévision, vous n’écoutez pas la radio ?
Elle : Non.
Moi : Est-ce que l’explication que je viens de vous donner vous suffit ?
Elle : Oui.
Et avec son sourire de jeune fille bien élevée, elle est partie. Elle ne s’est pas jointe aux autres manifestants.

Cela m’a fait penser à cette intervention de Brice Teinturier, président délégué de l’IFOP qui, lors de l’émission C dans l’air sur la Cinq, a exposé qu’un récent sondage faisait apparaître que 62% des personnes interrogées se disaient indifférentes à ce problème. Vous vous rendez compte, 62%, une forte majorité ! L’indifférence est ici insupportable. Elle résulte sans doute d’un manque d’information, comme l’a reconnu cette jeune fille.

Alors si vous rencontrez un de ces 62% d’indifférents, qu’il soit jeune ou pas, dites-lui qu’il doit savoir. Qu’il doit savoir ce qu’à été le génocide, ce qu’est l’antisémitisme, ce qu’est le racisme. Dites-lui surtout que l’indifférence fait le lit de la bête immonde qui, un jour, si l’on ne crie pas le dégoût qu’elle suscite, va resurgir. Avant qu’il ne soit trop tard.

Pau, le 20 février 2019

par Joël Braud

« Banalité du mal »*

 » À l’heure actuelle, mon avis est que le mal n’est jamais “radical”, qu’il est seulement extrême, et qu’il ne possède ni profondeur, ni dimension démoniaque. Il peut tout envahir et ravager le monde entier précisément parce qu’il se propage comme un champignon. Il “défie la pensée”, comme je l’ai dit, parce que la pensée essaie d’atteindre à la profondeur, de toucher aux racines, et du moment qu’elle s’occupe du mal, elle est frustrée parce qu’elle ne trouve rien. C’est là sa “banalité”. »  Hanna Arendt « lettre à Scholem du 24 juillet 1963 »

L’agression dont Alain Finkielkraut a fait l’objet samedi à Paris est une horreur, une tâche morale qui achève de discréditer les Gilets Jaunes qui, après avoir défendu des objectifs honorables, soutenus par Finkielkraut lui-même, obtenu pas moins de dix milliards d’euros et fait plier les sacro-saintes règles européennes en dépassant les 3% de déficit budgétaire, auraient dû rentrer sagement à la maison légitimement fier d’un succès conséquent. Manipulation ? Naïveté ?  Irresponsabilité ? Les GJ ont persisté, accumulant des revendications absurdes et des attitudes scandaleuses.

Ainsi Alain Finkielkraut, écrivain, académicien et animateur d’une excellente émission de Radio le samedi matin sur France Culture a été molesté et traité, entre autre, de « sale juif » lorsqu’il sortait de chez lui. La scène véritablement haineuse étant filmée, les faits ne peuvent pas être contestés. Il n’aurait pas dû sortir, c’était de la provocation ont expliqué, après coup, certains « beaux » esprits. Parmi ceux qui relativisent cette inacceptable agression des personnes connues, de gauche, d’extrême gauche ou proches des milieux indigénistes, comme Jean-Pierre Mignard, Thomas Guénolé, Aude Lancelin ou Yassine Bellatar. Citons par exemple ce tweet de Thomas Guénolé de la France Insoumise : « Cela fait des années qu’Alain #Finkielkraut répand la haine en France. Contre les jeunes de banlieue. Contre les musulmans. Contre l’Education nationale. Etc. L’insulter, comme insulter quiconque, est condamnable. Mais le plaindre, certainement pas ». C’est ce que l’on appelle banaliser l’affaire car il ne s’agit pas d’insultes mais de menaces physiques et morales qui à travers une personne visent une communauté, compte tenu de l’Histoire de cette communauté ça n’est pas neutre. Le tweet de l’avocat Mignard familier de François Hollande, est du même tonneau : « Alain Finkielkraut se fait huer lors de sa présence le long du cortège GJ. On s’émeut sur les plateaux. Bon d’accord mais il n’a pas été, et heureusement frappé. Ce qui aurait tout changé. Là il doit être content. Il le cherchait. On l’avait oublié. C’est réparé ». Et celui de Yassine Belatar, humoriste proche d’Emmanuel Macron : « Durant une semaine voire plus, tous les médias parleront de cet acte pour faire l’amalgame entre musulmans et ces abrutis. Évidemment personne ne sera en face pour expliquer le contraire et vous serez chez vous en train de chialer.#Finkelkraut a tellement fait de mal… »

Nous avons dénoncé ici même, il y a peu, (https://alternatives-pyrenees.com/2019/01/27/noublier-jamais/ ) le cancer de l’antisémitisme, maladie latente de notre société, ancienne et bien incrustée, qui ressort brutalement et menace la cohésion sociale ; la République. Pas d’excuses donc, tolérance zéro ! La manifestation prévue mardi soir à Pau devrait rassembler très largement tous les courants de pensées et toutes les sensibilités politiques. Tout le monde en conviendra, même si on ne partage pas ses idées, Finkielkraut ne répand pas la haine en France. Lors d’une récente émission sur France Culture il a reçu par exemple, avec empathie, Régis Debré au parcours si différent du sien. On ne peut donc pas le taxer d’intolérance et même si… cela ne justifierait en rien ces actes immondes.

La réaction du maire de Pau François Bayrou dans  La république de ce lundi est pleine de bon sens : « Face à la haine antisémite, le visage d’Alain Finkielkrault était à soi seul un acte de résistance. Comme est un acte de résistance sa déclaration : ‘J’ai ressenti la haine absolue… Je ne porterai pas plainte… Ma position, c’est de comprendre…’ »

Que dit l’agressé, des violences qu’il a subies (in le Figaro de ce lundi) : « Nous ne vivons pas le retour des années 30. C’est à un nouveau type d’antisémitisme que nous devons faire face. Ce sont des gens qui ont crié “Palestine”, qui m’ont traité de sioniste. Il y en a un avec une légère barbe qui me dit “Dieu va te punir”: ça n’est pas tout à fait le langage de l’extrême droite, c’est même la rhétorique islamiste. Peut-être y a-t-il des gens d’extrême droite qui s’accrochent aux wagons, comme des soraliens (proches de l’essayiste d’extrême droite Alain Soral, NDLR), qui rêvent d’agréger une France black-blanc-beur autour de la haine des Juifs. C’est la version hideuse de la convergence des luttes.»

Observateur perspicace des évolutions sociétales et pour cela durement attaqué, le philosophe nous livre ainsi une clé de cette brutale résurgence qui non seulement nous bouleverse mais donne aussi une image calamiteuse de notre pays. C’est bien de défiler, d’envoyer des tweets rageurs mais il faut d’abord comprendre d’où vient cette poussée de haine du juif, sinon nous allons droit dans le mur. Cessons les atermoiements : à la question y-a-t’il un lien entre antisémitisme et antisionisme ? La réponse est oui. L’ « islamogauchisme » favorise-t-il ces actes odieux ? La réponse est oui également. Les faits sont les faits.

Pierre Vidal

 

*« Banalité du mal » concept élaboré par la grande philosophe juive d’origine Allemande, réfugiée aux Etats Unis, Hanna Arendt qui passa plusieurs mois enfermée dans le camp de Gurs.

Photo : cercledesvolontaires.fr

 

L’antisémitisme

L’horrible assassinat de Mireille Knoll est le symbole de la montée souvent sourde mais bien réelle de l’antisémitisme en France. D’ailleurs, quelques heures après la marche blanche, un commando s’en prenait au local de l’Union des étudiants juifs de France (UEJF) à l’Université Paris-I La Sorbonne. Local saccagé et couvert de slogans antisémites. Ainsi, la France n’a jamais fait le lit de ses vieux démons et le voile trop pudique jeté sur la shoah n’aura servi à rien. Car en vérité il est contreproductif de masquer la vérité : un pays démocratique doit regarder son passé en face.

Nous savons maintenant que, dans l’indifférence voir avec la complicité d’une partie de la société française, des centaines de milliers juifs furent dirigés de France vers les camps d’extermination pour le plus grand massacre de masse de l’histoire. Nous devrions le savoir particulièrement, nous Béarnais, puisque, sur notre sol, plus de mille juifs disparurent à Gurs, et qu’ils furent beaucoup plus nombreux encore à être dirigés vers les camps de la mort via Drancy. Bien peu de nos compatriotes se levèrent, protestèrent où tentèrent quoique ce soit pour enrayer cette mécanique nazie. Il y en eut une poignée cependant et ce furent des héros.

Ces faits trop mal connus sans doute devraient nous imposer un comportement exemplaire. On voit bien que non ! Le sort révoltant fait à Mireille Knoll, rescapée des camps de la mort et aimée de tous ses voisins, a suscité des réactions d’indignations parce qu’il vient après d’autres manifestations antisémites : cimetières saccagés, inscriptions sur les murs et les bâtiments publics, personnes agressées voir assassinées. L’antisémitisme n’est pas mort en France. C’est un acquis spécifiquement républicain qui est attaqué de manière sournoise ; car c’est la république qui a donné aux juifs un statut de citoyen. Il faut voir sans doute dans ce comportement le signe d’une dégradation du civisme et de l’idée même du vivre ensemble.

De nombreux remous ont perturbé la marche blanche organisée jeudi à Paris. A juste titre, le fils de la victime a souhaité que cette marche soit ouverte à tous. Et on ne peut fait de procès d’intention a priori à ceux qui souhaitaient y participer. Ceci dit, il y a un vieil antisémitisme qui a survécu et qui ne manque jamais de renaître. Il se situe à l’extrême droite. C’est triste mais cela ne surprendra personne. Par contre la naissance d’un nouvel antisémitisme qui s’appuie sur la haine d’Israël et sur un soutien aveugle de ses adversaires, au nom d’une prétendue lutte contre « l’islamophobie », est plus récente et plus inquiétante.

La lutte contre l’antisémitisme a toujours été portée par la gauche de Zola à Jaurés. On peut certes contester la politique de Nethanyaou -élu démocratiquement-, faut-il en réaction soutenir des mouvements qui n’ont jamais reconnu Israël et qui combattent même son existence ? Apporter une solidarité unilatérale comme on peut le voir de la part de certains -près de chez nous- n’est-ce pas une manière de diaboliser l’autre sans faire de distinction ? L’autre en l’occurrence c’est-à-dire le juif ?

L’extrême gauche et la France Insoumise notamment n’a jamais été claire sur ces positions pas plus qu’elle ne l’est sur le martyre subi par le peuple vénézuélien. L’antisémitisme a donc pris, pour une part, un visage nouveau et il est porté par des forces nouvelles peut-être sans qu’elles ne le désirent ou sans qu’elles aient conscience de la portée de leurs prises de position. Même si elles n’assument pas, est-ce une raison pour les absoudre ?

Pierre Vidal

Crédit image : UEJF – Le Figaro.