Le projet lancé de suppression des départements, de fusion des régions et de réorganisation de communes se heurte à ce qu’on pourrait appeler une sorte d’autisme des politiques. Mais pourquoi tant de morgue ?
Dans un récent article intitulé « Révolution » Daniel Sango fustige fort à propos, la position des trois actuels présidents de région, Aquitaine, Limousin, Poitou-Charentes, qui, à l’encontre de ce qui est voulu par le pouvoir et la loi récemment votée, décident que leurs régions ne vont pas fusionner mais vont s’unir.
A Pau, lors de la réunion des représentants des départements de France, le premier Ministre est venu rassurer nos pauvres élus inquiets surtout pour eux-mêmes, en leur disant que la suppression des départements n’aurait pas un caractère aussi définitif et total qu’on l’avait envisagé dans un premier temps. D’ailleurs fort de cette nouvelle donnée, notre président Georges Labazée s’est empressé de soumettre des amendements au Sénat pour réclamer des financements pour la gestion des missions actuellement départementales.
Souvenons-nous, qu’il y a maintenant plus de vingt ans, lorsque les regroupements de communes ont été lancés pour aboutir à des communautés de communes ou d’agglomération, il était bien clair et évident dans l’esprit de ses concepteurs que cette réorganisation devait à terme déboucher sur une fusion des communes afin d’en diminuer le nombre. Rappelons que nos 36 700 communes françaises, représentent 40 % de l’ensemble des communes de pays européens. Rappelons aussi que d’autres pays de l’Europe, (Allemagne et Belgique par exemple) ont diminué de façon draconienne le nombre de ces structures administratives et ce dans des proportions considérables.
Tout ceci a été dit et redit maintes fois.
Il faut se souvenir qu’il n’y a pas si longtemps, un sondage faisait ressortir qu’à la question : « Diriez-vous que la décentralisation, c’est-à-dire le transfert de compétences aux collectivités locales, se traduit plutôt par… ? » 71 % répondent : « par des surcoûts engendrant une augmentation des impôts locaux ».
Alors quel constat faire lorsque l’on considère que les Français sont ainsi dans leur très grande majorité, favorables à une diminution significative des strates administratives ? Soit que le pouvoir central (l’Etat, le gouvernement) manque cruellement d’autorité, soit que la décentralisation a atteint maintenant un point de non retour, soit enfin que les élus ne sont préoccupés que par un seul avenir, le leur personnel, et qu’ils méprisent de façon définitive et rédhibitoire l’intérêt général.
Ignorer ainsi la volonté du peuple qui les a élus, s’appelle ou de l’autisme*, ou de la morgue*, de la part des politiques, à moins que ce ne soit la conjonction des deux. Lorsque le peuple se sent à ce point ignoré, il se tourne vers les extrêmes ou adopte lui-même des positions irréversibles qui deviendront à terme regrettables.
Pau, le 11 décembre 2014
Par Joël BRAUD
- *Autisme : forte tendance à l’introversion et à l’égocentrisme (Le Petit Robert)
- ** Morgue : contenance hautaine et méprisante (Le Petit Robert)