Abcès

Cela fait mal. Et quand on a mal, on a envie de crier, de dire n’importe quoi qui pourrait soulager, même si l’on sait que cela a peu de chances de se produire.

Oui, voir le visage du Président de la France à la une d’un hebdomadaire (plutôt bien-pensant, à l’usage des bobos) entouré de barbelés avec un titre qui interpelle sur la France, pays des droits de l’homme, cela fait mal. Car on sait bien que la police du pays pourchasse les immigrés, lacère leurs tentes, jette leurs vêtements.

Oui, lire dans un quotidien local d’une ville tranquille comme Pau qu’on a fait appel à la police pour s’opposer aux gardiens de prisons, et voir sur une photographie ces membres des forces de l’ordre s’empoigner, cela fait mal, car on n’a pas à jeter la pierre (symbolique !) d’un côté ou de l’autre. De part et d’autre, c’est un métier difficile que l’on exerce.

Alors, on se prend à rêver que les CRS ont affrété leurs cars pour transporter quelques réfugiés afin qu’ils prêtent la main aux gardiens de prison fatigués, meurtris, découragés. En échange, ils recevront un toit décent, de quoi se nourrir et se vêtir. Vous savez bien que ce n’est pas possible, que l’Etat se doit de donner le bon exemple et ne signer que des contrats de travail en bonne et due forme. Mais le rêve est là. Pendant la période 1940-1945, quelques Français, pas si nombreux, ont fait des actions illégales comme cacher des Juifs, aider la Résistance. Ils sont maintenant considérés comme des Justes. De nos jours, on voit bien que des hommes laissés à l’abandon, à l’errance, pourraient donner des couleurs à des quartiers défavorisés, pas seulement en Seine-Saint-Denis ou entre Charleroi et Maubeuge. On sait qu’avec de la générosité on pourrait organiser des goûters entre migrants et personnes âgées ou isolées. Un sourire d’enfant n’est pas une marchandise. C’est une denrée précieuse.

Le rêve ne chasse pas le cauchemar que sont nos prisons et leur délabrement : 59.000 places pour quelque 70.000 détenus, 1500 détenus couchant sur le sol. Pire encore, la violence, l’endoctrinement. Construire de nouveaux centres de détention ? Peut-être le faut-il, mais comme on aimerait plutôt voir apparaître de nouvelles usines, de nouveaux bureaux, de nouveaux centres de recherche ! Faudrait-il négocier avec d’autres pays l’accueil des irréductibles radicalisés qui vomissent nos valeurs ? Certes, il faudrait des compensations, certes il faudrait être certain que les détenus transférés ne subiraient pas des peines plus lourdes que leur condamnation. La mesure pourrait avoir un effet dissuasif cependant, car on se douterait bien que tous les pays n’ont pas la même déontologie, les mêmes principes. Economiquement, la France y gagnerait et pourrait mieux rétribuer ceux qui protègent les citoyens, car construire est cher et prend du temps. Et une part des économies pourrait être affectée aux migrants afin de les former en français et en anglais (je pense que souligner les traits communs entre les deux langues serait productif) et leur procurer une formation à un métier. Munis d’un tel bagage culturel, ils pourraient devenir les ambassadeurs de nos entreprises et de nos techniques auprès des populations de grands pays africains anglophones comme le Nigéria et l’Afrique du Sud.

Préférons-nous rejeter des jeunes révoltés, aigris qui nous en voudront pendant des décennies ?

Paul Itaulog

Les flics sont dans la rue

imagesA priori, rien de plus normal que les forces de l’ordre soient dans la rue, sauf que ce mercredi 18 mai, elles n’y étaient que de leur propre initiative. Aucun ordre de la hiérarchie, seulement un mot d’ordre syndical. Que veulent les policiers ? Leur besoin de reconnaissance n’est-il pas un tantinet utopiste ?

Le rôle d’un policier est d’être sur la voie publique pour prévenir tout incident, être à l’écoute de ses concitoyens, éventuellement réprimer les infractions qu’il constate, en un mot assurer la sécurité. Mais depuis maintenant deux mois, dans toutes les villes importantes de France, l’ordre public est menacé. Viennent s’adjoindre aux manifestants des groupes de casseurs dont on perçoit mal les revendications. Leurs actions violentes tant par les destructions matérielles que par les atteintes physiques sur les policiers et les gendarmes ont contraint les forces de l’ordre à passer du niveau de maintien au niveau de rétablissement de l’ordre public.

La mission n’est pas la même et oblige à l’emploi de la force par tous moyens légaux. Le risque est grand d’arriver à une situation de désordre incontrôlable. Cette extrémité est en effet crainte par le pouvoir en place. A cette crainte s’ajoute le souci de faire en sorte que l’opinion publique lui soit favorable. L’image des casseurs et du désordre, fait qu’ils sont maintenant rejetés par cette opinion publique. Il ne faut pas exclure que le pouvoir en place laisse dégénérer cette situation afin précisément de provoquer un ras-le-bol.

Dans une telle circonstance, les policiers des compagnies républicaines de sécurité (CRS) et les gendarmes des compagnies mobiles ne peuvent faire usage de la force que sur ordre. Il faut avoir connu cette situation qui fait que pendant des heures, les forces de l’ordre sont prises à partie par des casseurs, sans pouvoir réagir. Ils sont la cible de jets des objets les plus divers et d’insultes. Lorsque l’ordre est donné de charger se libère une rage qui avait été contenue jusqu’alors. Des violences policières sont rapportées par la presse, celle-là même qui, quelque temps auparavant, ne s’était pas attardée sur les actes et les comportements des casseurs.

Cette façon partiale de présenter les événements a pour première conséquence d’entamer la réputation des forces de l’ordre. Celles-ci en prennent conscience et ne comprennent pas que tandis qu’elles sont particulièrement exposées et sollicitées pour faire face à un désordre qui met en danger le fonctionnement de l’État, elles se voient clouées au pilori. Certes, rien ne peut excuser des violences illégitimes, cependant ces policiers, ces gendarmes constituent actuellement le seul rempart face à une situation grave. Certains s’expriment publiquement pour dire que malgré leur longue expérience du maintien de l’ordre, ils n’ont jamais eu à faire face à tant de violence et de haine à leur égard. Il se trouve également qu’un certain syndicat, le même d’ailleurs qui n’hésite pas à équiper son propre service d’ordre de gourdins et de battes de base-ball, fustige par des affiches sanglantes, les services de l’État en charge de l’ordre public.

C’est pour cet ensemble de données que les policiers se considèrent comme injustement dévalués et critiqués. Pourtant après les attentats de janvier et novembre 2015, l’opinion publique avait affiché sa reconnaissance à leur égard. Un récent sondage dit que 82% des Français ont une bonne opinion de la police.Un chanteur que l’on peut classer au rang des anarchistes, dans une de ses dernières chansons, avoue avoir embrassé un flic. On compte environ 350 blessés parmi les forces de l’ordre. Alors pour exprimer ce besoin de considération et leur épuisement, ils descendent dans la rue. Les héros d’hier seraient-ils les ennemis d’aujourd’hui ; de l’amour à la haine ?

Seront-ils entendus ? Sans doute pendant un court instant, il est flagrant que l’opinion publique est versatile. C’est une douce illusion de croire que, dans notre pays, ceux qui sont chargés de la répression puissent bénéficier de la considération et de la reconnaissance de leurs concitoyens. Le Français est ainsi fait, il pense que la loi doit s’appliquer avec sévérité… à l’égard des autres, elle devient injuste si c’est contre lui. Certains, comme ce commentateur du forum d’Alternatives Pyrénées, n’hésitent pas à considérer qu’une prune (sic) ne peut être que le résultat d’un excès de zèle des flics et non de l’existence d’une infraction.

Il n’est pas exclu que cette manifestation qui se veut en premier lieu une réaction à la haine anti flics comporte d’autres revendications. Les syndicats sont opportunistes, c’est dans leur nature.

Pau, le 19 mai 2016

par Joël Braud

 

Crédit photo : le monde