La France est dans une mauvaise passe. La colère gronde, l’entêtement pointe son nez, la contagion gagne, l’économie souffre. Comment écarter tant d’insatisfactions ?
M. Macron est intelligent et sans doute plus inspirant que bien de ses prédécesseurs, mais il commet des maladresses : le « pognon dingue », la « traversée de la rue », et moins remarquée, la listes des pays visés par lui pour l’armée européenne : fallait-il les désigner nommément alors qu’on célébrait l’aide de nos alliés lors des derniers conflits mondiaux ?
Par-dessus tout, son manque de réactivité lors du début de la crise que nous connaissons va lui coûter cher politiquement. Les mesures adoptées aujourd’hui vont apparaître bien tardives et insuffisantes. Et la transition écologique risque d’être la grande victime de la tension.
Chaque partie doit pouvoir sortir la tête haute du conflit. Mais avec humilité et compréhension. La souffrance de celles et ceux qui bloquent les carrefours doit être comprise et soulagée. Mais le sort de la planète ne peut être oublié. Les victimes des inondations, des incendies et des pollutions ne nous le pardonneraient pas. Ni nos enfants.
Aussi, nos gouvernants doivent plaider au plan européen et au plan mondial pour un effort sans précédent pour la lutte contre le réchauffement climatique et contre l’injustice fiscale et sociale. Les grandes compagnies internationales doivent payer des impôts dans les pays dans lesquels elles font des profits. Le kérosène des avions doit être taxé au moins autant que les carburants pour voitures : n’est-il pas choquant de voir des offres pour des voyages aériens à des prix (10 ou 15 euros !) de l’ordre du coût de la traversée en voiture d’un département comme le nôtre (sans compter les péages d’autoroute et l’entretien de la voiture). Il faut aussi taxer le fioul lourd des porte-conteneurs ; ce serait plus juste que des hausses de droits de douane et plus favorable à une consommation locale. Enfin, il faut freiner le transport routier qui endommage nos routes, les encombrent et surtout polluent l’atmosphère. N’avez-vous pas entendu que les restrictions de carburant dans certaines régions (en Bretagne notamment) sont de 30 litres pour les voitures et de 200 litres pour les poids lourds. N’est-ce pas éclairant ?
Il faut aussi revenir sur l’abandon de l’ISF sur les revenus financiers. Il est un moyen qui permettrait de ne pas perdre la face en attendant une remise à plat équitable : remplacer la partie de la taxe carbone qui ne va pas à la transition énergétique (c’est-à-dire la plus grande partie) par une taxation normale des revenus exceptionnels de l’année 2018. Ces revenus sont essentiellement des revenus financiers, pas des fruits du travail. Or, pour faire passer la pilule du prélèvement à la source (qui est une vraie pénalisation des employeurs) le gouvernement a décidé un allègement des impôts sur ces revenus. Cet allègement représente un manque de rentrées conséquent pour l’État alors que de petites gens, et en particulier des retraités, voient leur CSG alourdie. Un comble ! Certes il faudrait donner du temps pour lisser ce prélèvement afin de ne pas plomber ponctuellement ceux qui auront à le payer. Mais il y aurait là un geste qui serait compris de la population.
Bien d’autres mesures seraient appréciées, comme des transports publics ferroviaires ou routiers à la périphérie des villes afin d’éviter des engorgements, de la pollution et des frais. Ou encore la réduction du mille-feuilles administratif et des doublons qu’il engendre.
Dommage que le gouvernement n’ait pas saisi à temps la proposition syndicale d’une large concertation avant l’explosion. L’image du pays en est marquée.
Paul Itaulog