Non M. Valance, la Chine ce n’est pas le XIXè siècle

Valance 19 aout 2015L’éditorial de l’Eclair Pyrénées du 19 aout 2015 signé par Georges Valance et intitulé « La Chine au temps de Zola » n’a pas manqué de me surprendre. En résumé, il s’agit d’une charge contre les pays émergents comme la Chine ou le Brésil, dont la croissance extraordinaire des dernières années, que l’auteur ne nie pas, cacherait des « faiblesses structurelles qui la menacent ainsi que les équilibres sociaux et politiques ».

Pour étayer son propos, M. Valance prend alors en exemple la catastrophe de Tianjin, « dû à l’évidence au non-respect des règles de stockage de produits dangereux, (…), bref aux insuffisances des infrastructures industrielles et sociales ». A partir de là, l’attitude du gouvernement chinois, réduit au « régime communiste chinois » est comparé au « cynisme » de « certains capitalistes du XIXè siècle », étant  plus loin résumé comme un modèle de croissance « reposant sur le mépris de l’homme ». Qu’en est-il réellement ? Ayant travaillé plusieurs années dans ce pays que je connais bien et dont je maitrise la langue, je me permets de vous apporter ma vision des choses.

La catastrophe de Tianjin n’est pas vraiment liée à l’insuffisance des infrastructures industrielles et sociales. Du reste, il suffit de connaitre un peu la Chine d’aujourd’hui pour comprendre que leurs infrastructures industrielles, de transport ou de sécurité publique, sous l’effet d’investissements massifs ces dernières années, sont non seulement au niveau, mais je dirais même supérieures à ce que nous avons en France. Certes la représentation sociale n’est-elle peut-être pas au niveau de notre règlementation sociale française, dont au connait la lourdeur, mais nos exemplaires infrastructures sociales n’ont pourtant pas empêché la catastrophe d’AZF à Toulouse, dont l’ampleur peut être comparée à celle de Tianjin.

Venons-en maintenant à l’idée que le régime (terme péjoratif) chinois soutient un modèle de croissance « reposant sur le mépris de l’homme ». Certes, la Chine, pays de culture confucéenne, a toujours eu plus tendance à privilégier le bien collectif que le bien individuel, mais les progrès économiques chinois des trente dernières années se sont accompagnés d’une amélioration drastique des conditions de vie et de logement, des normes de sécurité et d’hygiène, et des loisirs individuels. En outre, j’ai pu constater moi-même que malgré les idées reçues, les libertés religieuses étaient largement respectées. Il y a bien sûr la monopolisation du pouvoir et de l’expression politique par un parti unique, qui n’a d’ailleurs plus rien à voir avec l’idéologie communiste, mais la Chine a toujours connu dans l’histoire la stabilité par des gouvernements forts, et l’instabilité lorsque ses gouvernements étaient faibles.

En résumé, il me semble qu’intituler un éditorial « La Chine au temps de Zola » est non seulement un raccourci anachronique et inadéquat, mais dénote d’une méconnaissance de la situation de la Chine et des Chinois aujourd’hui.

 

par Emmanuel Pène – le dimanche 30 août 2015