Ces élus qui n’appartiennent pas au même monde que nous

Souvent cette phrase revient comme un leitmotiv pour dénoncer le comportement de nos élus. L’actualité qu’elle soit nationale ou locale nous offre les exemples de ce qu’ils peuvent se permettre. Ne serait-ce pas la principale raison de la désaffection des Français pour ce monde des politiques ?

Sur le plan national d’abord, la campagne électorale pour la présidentielle est entièrement axée sur les avantages que certains s’octroient ou se sont octroyés. Qui savait qu’un député ou un sénateur pouvait disposer de sommes aussi importantes pour rémunérer son épouse et ses enfants ? En réalité peu de monde parmi les électeurs. Qui savait que l’on pouvait trouver des costumes au prix de 6500 euros et se les faire offrir sans compensation ? Vous peut-être mais pas moi. Qui savait qu’avec des subventions européennes détournées, on pouvait financer un parti politique ? Qui savait que l’on pouvait accuser la justice d’être instrumentalisée par les politiques ? Qui savait que lorsqu’on est un (e) élu(e) on est autorisé à ne pas répondre aux convocations de la justice ?

Plus près de nous, certains élus du département ne dépareillent pas le tableau. Dans le genre « c’est moi que je suis » et qui possède des prérogatives, voire des privilèges, que vous autres n’avez pas, on trouve notre célèbre Jean Lassalle. Celui-ci est toujours en retard. Lorsqu’il perçoit qu’il va rater son avion, il téléphone à l’aéroport de Pau et demande qu’on lui prenne un billet et qu’on veuille bien l’attendre. Alors on attend Monsieur le député, presque candidat à la présidentielle. Une sénatrice bien connue et très engagée, refuse, elle, de montrer une pièce d’identité avant l’embarquement. Elle doit sans doute considérer que sa position la rend célèbre et que tout le monde doit la connaître et la reconnaître. Ce genre de comportement, même sans grandes conséquences, est significatif d’un état d’esprit de moins en moins toléré. Ce sont d’ailleurs les mêmes qui, parce qu’il se disent près du peuple, s’opposent avec une détermination suspecte, à la fusion des communes.

Par la suite l’un comme l’autre présentent leurs excuses. Mais que valent celles-ci ? Tout semble un peu trop facile. Parfois, il leur arrive de dire en guise de défense : « Et alors ? » Sans doute parce que cela ne regarde personne. René Dosière (Sud Ouest dimanche 12 mars 2017), pourtant considéré comme le « Monsieur propre » de l’assemblée nationale, n’hésite pas à dire, qu’en ce qui concerne la déontologie, l’Assemblée nationale est souveraine. Une façon de reconnaître, là encore, que ce qui s’y passe ne regarde que cette caste des élus : on lave son linge sale en famille. Pour être déclarés au déontologue, il doit être établi que les cadeaux ont un lien avec le mandat de ceux qui les reçoivent. Voilà une vaste hypocrisie car bien malin celui qui pourra démontrer que ce lien existe ? Un échappatoire bien trop large dans lequel beaucoup s’engouffrent.

L’électeur est ainsi fait que, pour éclairer son choix, il tient de moins en moins compte des programmes proposés et de plus en plus de la personnalité des candidats. Son raisonnement repose sur le fait que les promesses ne sont pas tenues et qu’il faut bien choisir d’autres critères. Mesdames et messieurs les politiques êtes-vous réellement conscients de cet écart qui se creuse entre vous et les citoyens ? Savez-vous en déterminer les causes ?

Pau, le 15 mars 2017
Joël Braud

Crédit photo : saptco.org.sg

Aberrations politiciennes en Béarn

Carte-Biarn-8 avec rose fanéeMais que font les socialistes du département ? Entre boycott de Pays de Béarn et inaction sur la réforme territoriale, on se demande quelle mouche les a piqués. S’agit-il d’une stratégie ou d’un réflexe d’appareil, ou d’un manque de conviction ? 

La réforme territoriale mise en œuvre par le gouvernement tient les Français et les parlementaires en haleine depuis le mois de mai. Cette réforme, il faut bien le dire, a toutes les apparences d’un scenario de mauvaise série TV, lequel s’invente au fur et à mesure des saisons et en fonction de l’audience. Sans logique économique argumentée, avec peu d’économies d’échelle prévues, plein d’aberrations géographique et culturelles, la réforme territoriale est résumée par les atermoiements concernant la région Aquitaine : d’abord seule pour faire plaisir à M. Rousset, on la maria au Limousin, puis, devant la pression des élus charentais, on y ajouta la région Poitou Charente. Cette région, qui s’étend de Pau à Limoges, n’a de point commun que l’égo surdimensionné de la métropole bordelaise au détriment des autres centres régionaux et de Pau en particulier. Quant à Midi-Pyrénées, dans son obsession à échapper à l’ogre bordelais, elle se mit dans la tête d’absorber le Languedoc et Montpellier, avant que ces derniers ne se révoltassent et obtinssent l’indépendance, à grands renforts de lobbying parisien. Tout concourrait donc à ce que cette réforme, néfaste au sud de l’Aquitaine et de Midi Pyrénées réduits à un rôle d’arrière-pays, fût combattue avec vigueur par nos représentants politiques, et en premier lieu par nos parlementaires. Cela fut le cas, du moins dans un premier temps, car on vit une belle unanimité en Béarn, au centre comme à gauche (la droite hors-centre n’ayant pas de parlementaire dans le département) pour appeler le rattachement d’Aquitaine et de Midi-Pyrénées, rejoignant ainsi la demande générale des milieux socio-économiques, mais aussi historico-culturels de notre département. Une pétition était même prévue par l’ensemble des parlementaires, MM. Habib et Lasserre en tête. Mais las, ces belles intentions n’ont semble-t-il pas résisté à la torpeur de l’été indien, et surtout aux turpitudes de l’appareil politique socialiste. Sans bruit, on ne parlait plus de la pétition et, alors qu’un front commun aurait pu être constitué à l’occasion du débat au Sénat, on vit les sénateurs socialistes Fortassin et Labazée refuser de s’unir à M. Lasserre et présenter un amendement séparé, pour demander en fait la même chose, à savoir la fusion Aquitaine / Midi-Pyrénées. Cela aurait été un moindre mal si, le jour de la discussion de ces amendements, ces parlementaires bien peu zélés n’avaient pas omis d’être présents, rendant inévitable le rejet de leur proposition.

Cet épisode malheureux, lourd de conséquence pour le sud Aquitaine condamné à demeurer un cul de sac et à tourner le dos à ses frères pyrénéens de Bigorre, a été précédé par un autre non moins lourd de sens, à savoir le boycott socialiste de la réunion « Pays de Béarn ». S’il est compréhensible que les hommes politiques aient des opinions différentes et doivent parfois les exprimer, on pourrait attendre d’une initiative comme Pays de Béarn, qu’elle rassemble largement les élites. Or, l’union départementale des élus socialistes et républicains (UDESR) fit savoir, dans un communiqué, que les élus qu’elle représente ne participeront pas à la réunion du 21 octobre au palais Beaumont, considérant que « Le Pays de Béarn tel que le propose François Bayrou est un entre-soi qui ignore la Bigorre et les communautés de communes déjà existantes et qui ne va pas dans le sens de l’histoire qui est de se grouper pour être plus fort ». Or, c’est ignorer que le pays de Béarn ne va pas à l’encontre d’un rapprochement avec la Bigorre, bien au contraire, car une stratégie de marketing territorial passe par le renforcement de l’ensemble des identités fortes représentées, donc de Béarn et de Bigorre. En outre, si la solution était à un regroupement Béarn et Bigorre, bien nécessaire par ailleurs, pourquoi les mêmes parlementaires ne l’ont pas mis en œuvre, alors qu’ils maîtrisaient la communauté d’agglomération de Pau, les conseils généraux 64 et 65, et les deux conseils régionaux ? Enfin, si le rapprochement Béarn et Bigorre est si important, pourquoi ne pas réclamer avec plus de vigueur le rapprochement Aquitaine – Midi-Pyrénées ?

Dans le cas de la réforme territoriale comme de Pays de Béarn, les parlementaires socialistes béarnais ont donc pris des positions contraires à l’intérêt des Béarnais et des citoyens du département, et ont au mieux fait preuve d’une bien faible résistance aux propositions absurdes de redécoupage du gouvernement. On peut donc légitimement se demander si ce parti ne préfère pas la politique politicienne à la défense des intérêts de notre région et de ses citoyens. Il n’est certes pas le seul parti politique dans ce cas, mais il en est, de par sa représentativité et les fonctions occupées, le principal responsable.

Par Emmanuel Pène

le 4 novembre 2014