Le festival musical de Louvie-Juzon menacé
C’est la rentrée ! Restent les souvenirs de vacances. Une partie non négligeable des estivants optent désormais pour la montagne ; la côte étant saturée. C’est la chance du Béarn et de ses vallées somptueuses. Encore faut-il que cette opportunité soit bien conduite, soutenue par les collectivités locales : les communes, le conseil départemental; l’État en premier lieu… Il n’y a pas que les routes, les chaussées, les infrastructures : ce bétonnage tout azimut qui a pour alibi un prétendu aménagement qui ressemble plus à de la conduite accompagnée qu’à cette liberté que nous offrent les montagnes. Il y a ce supplément d’âme indispensable à l’être humain : la culture dont on a beaucoup parlé durant la campagne présidentielle, désormais la grande oubliée des promesses de la macronie (cf. le « pass-jeunes) pour laquelle on ne fait rien ou si peu ; particulièrement sur les terres qui jadis appartenaient au « bon roi Henri » et sur lesquelles règne désormais qui vous savez.
Un exemple ? Les « Estives Musicales internationales de Louvie-Juzon ». C’était, cette année, la 39ème édition de ce magnifique festival de musique classique. 146 concerts au compteur, tous de grande qualité ; d’une grande diversité dans le répertoire et avec des musiciens prestigieux venus du monde entier. Il n’a pas d’équivalent dans notre Béarn où la musique classique fait l’objet d’un monopole contestable engagé dans un projet risqué d’inspiration « bolivarienne ». Ce festival se déroule dans la magnifique église de Louvie-Juzon entièrement rénovée qui possède un orgue baroque rénové lui-aussi.
Le public y est mélangé : beaucoup de « valléens » qui donnent un coup de main aux organisateurs mais aussi des touristes de passage, étrangers notamment : anglais ou néerlandais par exemple. On y fait le plein régulièrement ; 400 personnes environ, serrées comme des harengs mais attentives et recueillies comme il se doit pour écouter de la musique de qualité. C’était le cas le 22 août pour un concert autour de Gabriel Fauré avec au programme son magnifique requiem. Concert donné par « les voix d’Oxford », chœur mixte de 14 chanteurs et orgue dirigé par Mark Shepherd. Ils ont déclenché un enthousiasme légitime.
Par contre, la tristesse est venue des déclarations de Jean-Etienne Béliard, cheville ouvrière de ce festival quand il a annoncé publiquement que cela serait sans doute la dernière édition de ces « Estives musicales ». L’argent évidemment… Il n’y a pas le compte… Malgré un budget modeste, 33 000 euros cette année, les organisateurs n’ont pas trouvé auprès des collectivités le soutien financier indispensable à joindre les deux bouts. C’est une baisse successive des aides des collectivités depuis 2008. Comme le souligne Monsieur Béliard : « les artistes doivent être payés normalement ». En effet et c’est une question de fond : les artistes ne vivent pas d’amour et d’eau fraîche. L’époque de la « Bohème » est loin derrière nous, même si l’opéra de Puccini nous émeut toujours autant. Voilà une réalité que nous avons tendance à oublier.
Un festival de cette qualité a des répercussions très importantes pour la vallée et pour son économie. Il participe à sa vie culturelle dont il est un des phares et plus prosaïquement il a des répercussions économiques non négligeables à l’échelle d’une commune qui dépasse à peine les mille habitants. Pour assurer la pérennité de cet événement il faut bien peu au regard d’un budget du type de celui du Conseil Départemental. L’État lui aussi pourrait même mettre la main à la poche, même si le temps est à l’austérité, car les sommes sont modestes et l’homme ne vit pas que de pain…
Pierre Vidal