La France et le gaz de schiste

imgresBordes (64) le 29 septembre 2014 –

Dans son discours prononcé à Lambersart, le Président Sarkozy a bien précisé qu’il ne faut jamais dire « Fontaine je ne boirai pas de ton eau ».

Depuis trois années, l’Amicale des Foreurs et des Métiers du Pétrole (AFMP) ne cesse de se battre à coups de Communiqués de presse (CDPs), de Lettres ouvertes (LOs) et de Conférences ouvertes à tous, en demandant l’abrogation de la loi 2011-835 du 14 juillet 2011, dite Loi Jacob du nom de son promoteur, laquelle interdit purement et simplement la recherche et la mise en production des hydrocarbures dits de « schiste » par forages horizontaux suivis de fracturations hydrauliques.

Cette loi, basée sur des prémices mensongères (cf. le Projet de loi N°3301 du 30 mars 2011) est donc, à nos yeux, inconstitutionnelle mais elle a été jugée constitutionnelle par le Conseil éponyme en octobre dernier.

Les multiples CDPs et les dizaines de LOs que nous avons adressés à la classe politique dans son ensemble et aux principaux médias n’ont pas fait bouger d’un iota les nombreux incompétents (à quelques exceptions près) qui depuis 1971 dirigent l’ancien ministère de l’environnement.

La mandature présidentielle précédente porte une large part de responsabilité et la mandature actuelle n’a fait que de lui emboîter le pas. Mais tout le monde sait qu’en politique il faut adorer ce que l’on a brûlé et brûler ce que l’on a adoré, sans la moindre pudeur.

Si les urnes, en 2017, portent le Président Sarkozy à la magistrature suprême, nous aurons alors une chance de voir la France s’intéresser aux richesses de son sous-sol à la condition qu’il ne reconduise pas à la tête du MEDDE celle par laquelle le malheur de notre industrie est arrivé.

Comme vous pouvez l’imaginer, nous nous battons à mains nues contre un ennemi invisible qui pare tous nos coups comme si nos CDPs et nos LOs comportaient la mention « No reply » chère aux internautes.

Et pourtant, ce gaz « maudit » est tout bonnement du méthane, CH4, le plus simple de tous les hydrocarbures comme celui que nous utilisons, pour nous chauffer, nous éclairer et faire la cuisine. Il est en général inoffensif mais il lui arrive de se concentrer et se terrer dans des endroits inaccessibles, comme le grisou, cher à M. Montebourg, qui lui est du méthane issu de la houille.

Soyons donc patients car le temps milite en notre faveur. En effet, il deviendra de plus en plus difficile, pour un pays comme le nôtre, de se procurer les hydrocarbures dont il aura besoin, face à la concurrence des pays émergents qui pourront payer les prix demandés par les producteurs. C’est alors que nous nous pencherons sur le gaz dit de schiste et, compte tenu du retard que nous aurons pris pour son exploitation, il est probable que nous l’achèterons à nos voisins étrangers ce qui coûtera moins cher vraisemblablement que de le produire nous-mêmes.

Jacques Sallibartant, président

Gérard Medaisko, géologue conseil

Amicale des Foreurs et des Métiers du pétrole

14, rue Henri IV 64510 BORDES

wwww.foreurs.net

L’amicale des foreurs et métiers du pétrole est indépendante financièrement car gérée uniquement par des bénévoles entièrement dévoués à la cause de ses adhérents, qui la font vivre, et à leur place dans l’industrie pétrolière. Unique en France dans sa spécificité.

Afin de préserver son indépendance, notre amicale ne sollicite, et donc ne reçoit aucune subvention d’aucune sorte de quelque organisme, société, administration, collectivité – publique ou privée – que ce soit.

C’est dans notre éthique, et c’est notre fierté : du pur bénévolat, pas d’assistanat.

Notre autonomie, c’est-à-dire notre liberté à nous gérer selon nos propres concepts et notre indépendance totale de tous groupes de pressions (les lobbies en Franglais) qu’ils soient financiers, commerciaux, politiques ou syndicaux, donnent à nos propos et nos actions une résonance dérangeante, le parler creux et langue de bois étant en effet absents et bannis de nos discours.

Cette liberté d’expression nous permet la critique objective. Si cela dérange parfois c’est tant mieux, les choses pourront bouger, les tabous se lever et la concertation s’établir.

Les idéologies rigides ont fait leur temps. Place à la tolérance, fraternité et solidarité, devise de l’Amicale.

Les Foreurs et le Ministre

Capture d’écran 2013-10-09 à 11.01.29Les foreurs s’adressent à Philippe Martin, nouveau ministre de l’Écologie du Développement Durable et de l’Énergie, pour rouvrir le dossier de l’exploitation des mines d’hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique. Ils souhaitent que celui-ci les écoute plus que ne le fit Delphine Batho…

Monsieur le Ministre,

Votre installation au Ministère de l’Écologie du Développement Durable et de l’Énergie ouvre, nous l’espérons, une ère nouvelle de concertation et de coopération.

Nous avons toujours entretenu avec les services de ce Ministère d’excellentes relations. Nous sommes intervenus à plusieurs reprises auprès de ceux-ci sur des sujets variés qui concernaient l’exploration pétrolière en France (procédures d’attribution des permis miniers, règlementations techniques des appareils de forage, règlementation du travail sur les chantiers pétroliers, redevance aux collectivités locales, etc.) et avons participé à plusieurs groupes de travail avec eux sur ces sujets.

L’arrivée dans le paysage pétrolier français du sujet des hydrocarbures dits non conventionnels a ouvert une période de glaciation dans nos relations, période qui a atteint son paroxysme avec la venue de votre prédécesseur au ministère.

Nous avons en effet écrit à cinq reprises à Madame Delphine BATHO, soit directement soit par des courriers au Président de la République et au Premier ministre qui l’avaient chargé de nous fournir une réponse. Mais de réponse nous n’avons jamais eu, pas même un accusé de réception de nos courriers, ce qui a eu le don de nous irriter fortement, car nous l’avons pris pour une marque de mépris incompatible avec la conception que nous avons de la démocratie.

Nos derniers courriers étaient relatifs à l’application de la loi 2011-835 du 13 juillet 2011 dont l’article 2 prévoyait la création d’une Commission nationale d’orientation, de suivi et d’évaluation des techniques d’exploration et d’exploitation des hydrocarbures liquides et gazeux. Cette commission a été créée, mais jamais constituée et Madame BATHO en avait publiquement exclu la mise en place. Une question écrite sur ce sujet a été posée au Sénat à notre demande par Madame Frédérique ESPAGNAC, sénatrice des Pyrénées-Atlantiques (n° 05549 « Mise en application de la loi visant à interdire l’exploration et l’exploitation des mines d’hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique », déposée le 28 mars 2013) : elle n’a toujours pas reçue de réponse !

Il nous semble que l’heure est venue de relancer le débat car la position défendue par le gouvernement est devenue insoutenable : tout le monde convient maintenant que les arguments soi-disant techniques des opposants ne sont que le cache-sexe de honteuses manœuvres électoralistes et d’idéologies suicidaires.

L’état de l’opinion a considérablement évolué, les effets mensongers et dévastateurs du film « Gasland » s’estompent sous le poids de réalités que seuls s’obstinent à nier ceux qui sont affectés par le syndrome NIMBY.

Au sein même de la représentation parlementaire, y compris dans votre propre parti, nombreux sont ceux qui regrettent l’existence de cette loi 2011-835 qui est devenue l’archétype d’une absence flagrante de pragmatisme dans la gestion des affaires publiques.

Notre pays est une puissance déclinante alors que nous avons d’énormes atouts à faire valoir.

Nous avons besoin de reconstruire un appareil de production compétitif, et cela passe, entre-autres, par des énergies fossiles que nous n’avons plus et que nous devons importer massivement à grands frais.

Les énergies renouvelables, que bien évidemment nous encourageons, ne sont dans l’immédiat compétitives ni techniquement ni financièrement : les dernières prévisions de l’Agence Internationale de l’Énergie leur laissent une faible part dans le mix énergétique à l’horizon 2035.

Le gaz est le complément indispensable de ces énergies renouvelables (éolien, photovoltaïque, hydraulien) dont on nous fait croire qu’elles sont la solution à nos problèmes énergétiques ; leur caractère intermittent et aléatoire nécessite des centrales thermiques d’appoint qui doivent fonctionner au gaz, à condition que celui-ci soit compétitif par rapport au charbon (qui représente la pire des énergies sur la plan environnemental), et ce n’est malheureusement pas le cas actuellement.

Notre industrie pétrochimique, qui est encore un fleuron de notre patrimoine industriel, a besoin des hydrocarbures non seulement comme matière première mais aussi comme énergie primaire et la crainte que nous avons actuellement est de la voir sérieusement concurrencée par les États-Unis qui bénéficient, grâce au gaz et huile de schiste, d’une matière première et d’une énergie bon marché.

Alors, Monsieur le Ministre, il est grand temps de prendre des décisions déchirantes qui mettront certainement en cause le fragile équilibre de la majorité actuelle, mais vous vaudront une large reconnaissance dans le futur.

Plus de 100 permis de recherche d’hydrocarbures sont actuellement en instance : si vous les attribuez, c’est une manne financière qui viendra améliorer le faible niveau actuel de nos investissements, sans aucun coût pour le contribuable, c’est tout un tissu d’industries et d’activités qui en bénéficieront et donc des emplois qui viendront à point pour aider le Président de la République à tenir ses engagements.

Il n’est bien sûr pas question de laisser les compagnies pétrolières et les compagnies de service travailler sans contrôle. Vous disposez déjà de règlementations et de services de l’État compétents pour les faire appliquer.

Mais vous avez aussi à votre disposition un outil remarquable, l’Institut Français du Pétrole et des Énergies Nouvelles (IFPEN) qui pourrait fort bien être chargé d’assurer « l’orientation, le suivi et l’évaluation des techniques d’exploration et d’exploitation des hydrocarbures liquides et gazeux » prévue par la loi 2011-835. L’ex IFP a été le fer de lance de l’industrie pétrolière française pendant plusieurs décennies en promouvant de nombreuses techniques aujourd’hui mondialement utilisées : il pourrait dans ce nouveau cadre, retrouver des attributions dont le Grenelle de l’environnement l’a totalement dépouillé.

Notre métier nous a appris à être pragmatiques, c’est pourquoi nous souffrons de la situation actuelle de notre pays et des choix qui sont faits en matière énergétique.

Nous osons espérer que vous prendrez nos remarques en considération et répondrez à la question que nous avons posée.

Dans cette attente, veuillez croire, Monsieur le Ministre, à nos respectueux sentiments.

Jacques Sallibartant                                     Jean-Claude Rémondet
Président                                                        Vice-président