Un ministre m’écrit.

Tout arrive, même à moi qui ne me savais pas si important pour retenir l’attention d’un personnage si haut placé. Le Ministre me parle d’une réforme de la fiscalité locale et plus précisément de la taxe d’habitation. Oui, mais voilà, je ne suis pas concerné et étant retraité je saisis ici l’occasion de lui faire part de ma situation.

Alors je vais essayer de lui expliquer par la voie d’Alternatives Pyrénées, que forcément il lit avec assiduité, que j’ai comme l’impression qu’il y a erreur d’acheminement de son courrier. En effet, je n’entre pas dans la catégorie des éligibles à une « réduction de 30% de la taxe d’habitation sur ma résidence principale ». Dois-je m’en plaindre ? Oui et non. Oui parce qu’étant domicilié dans une ville, Pau, où cette taxe est une des plus élevées de France, je n’ai pas le plaisir d’économiser une somme correspondante. Non parce qu’en réalité, mes revenus dépassent, de pas beaucoup mais d’un peu, la somme exigée pour entrer dans le cadre.

Mais puisque je vous tiens Monsieur le Ministre de l’Action et des Comptes publics, permettez-moi de vous expliquer la situation de la ville de Pau. Depuis 2014, année de la dernière élection municipale, j’ai constaté que le montant de la taxe d’habitation que je paie, avait progressé de 4,11%. Plus vite que l’inflation qui, elle, dans le même temps n’a progressé que de 4,01% (source INSEE). La différence n’est pas énorme, me direz-vous, certes, cependant en rognant tous les ans un peu plus sur le pouvoir d’achat on arrive à un résultat qui finit par décourager le brave contribuable que je suis.

Puisque nous sommes dans les chiffres continuons et acceptez que je vous dise que ma taxe foncière, dans le même laps de temps a augmenté de 5,86% (contre 4,01% d’inflation). Quand j’additionne ce que je paie au titre de la taxe d’habitation avec ce que je paie au titre de la taxe foncière, je constate que cette progression est de 4,85%. Ce qui progresse le plus vite, ici à Pau, c’est ce qui est versé au bénéfice de l’intercommunalité : + 9,92 % (foncière et habitation confondues*). Pas mal. Il faut être honnête et ne pas accabler de reproches François Bayrou quand il est maire de Pau, puisque, toujours en cumulé, foncière plus habitation, la part qui revient à la commune n’a augmenté que de 2,87%. Par contre on peut lui reprocher de ne pas être aussi vertueux en sa qualité de président de l’intercommunalité (+ 9,92%).

Je suis retraité comme je l’ai dit plus haut et, à ce titre, j’ai pu calculer ce que que me coûte sur une année, l’augmentation de la CSG. J’ai aussi pu calculer ce que me coûtent les mensualités de ma complémentaire santé : + 6% par an depuis maintenant 7 ans. J’ai entendu parler de la suppression du « reste à charge », la formule est belle et attrayante mais elle serait pourvue de davantage de charme s’il ne s’agissait pas seulement d’une formule. Je prends de l’âge, que voulez-vous, et ce naufrage qu’est la vieillesse, m’oblige à voir augmenter dans des proportions considérables mes dépenses de santé. Je fais le strict nécessaire, sans excès.

Heureusement que vous, Monsieur le Ministre, et le gouvernement auquel vous appartenez, avez veillé au grain et décidé d’augmenter les pensions de retraite de 0,3%. Dans ce sens, c’est bien moins que l’inflation. Considérez, Monsieur le Ministre, que je suis d’un naturel raisonnable, jamais porté sur des exagérations, aussi, je demande non pas que mon pouvoir d’achat augmente, mais qu’il soit seulement maintenu à son niveau et surtout que mes revenus cessent de baisser. Cela me permettrait de regarder d’un œil moins jaloux ces 1% les plus riches de France qui ont vu cette année leurs revenus progresser de 12%. Ruissellement oblige…

En définitive, j’accepterais ces sacrifices que vous m’imposez s’ils étaient suivis d’effets. Cependant le chômage stagne, la croissance est en berne, le commerce extérieur reste déficitaire et la dette progresse. Je ne sais pas encore pour qui je voterai lors des prochaines élections, mais je sais pour qui je ne voterai pas.

Je vous prie de croire, cher (!) Monsieur le Ministre, à l’assurance de ma considération distinguée.

Pau, le 6 novembre 2018

par Joël Braud

* Depuis 2017 une somme de la taxe foncière est au bénéfice de l’intercommunalité.

 

Lettre du ministre de l’Action et des Comptes publics en date du 4 novembre 2018

Madame, Monsieur, cher contribuable,

Le Gouvernement a engagé une importante réforme de la fiscalité locale. Le premier acte concerne la taxe d’habitation : 80 % des ménages en seront exonérés pour leur résidence principale d’ici 2020. À terme, cet impôt sera entièrement supprimé pour toutes les résidences principales.

Concrètement, dès cette année, 80 % des ménages vont bénéficier d’une réduction de 30 % de leur taxe d’habitation sur leur résidence principale : vous en faites partie.

Si vous continuez de respecter les conditions de revenu fixées par la loi, votre taxe d’habitation sera réduite de 65 % en 2019 puis supprimée en 2020. Ce gain peut toutefois être diminué si l’une des collectivités locales qui vous taxe a augmenté son taux d’imposition ou supprimé des avantages vous concernant.

Conformément aux engagements du Président de la République, cette mesure forte est destinée à favoriser le pouvoir d’achat.

Je vous prie de croire, Madame, Monsieur, à l’assurance de ma considération distinguée.

Gérald DARMANIN