Pau en quelques chiffres

Dans l’un de ses récents articles, « Bayrou maquille Pau » paru dans les colonnes de Alternatives Pyrénées, le 24 juin 2018, Daniel Sango dresse une image peu reluisante de la situation actuelle de notre ville. Il existe de nombreuses statistiques pour matérialiser ses propos.

En tout premier lieu, ce n’est pas un scoop, la population de Pau est en baisse de façon que certains jugeront importante et significative. En 2007, au plus haut, la ville de Pau aurait compté 84 978 habitants selon l’INSEE. Bien que ce chiffre soit actuellement contesté par ceux qui disent qu’il y avait en réalité entre 80 500 et 81 000 habitants à cette date, il faut bien admettre que la population a baissé si l’on s’en tient au recensement de 2015 : 77 215 habitants. Alors moins 7 700 habitants ou moins 3 200 habitants, le débat reste ouvert. Cependant ce qui reste significatif est une tendance régulière à la baisse.

Autre chiffre également significatif, le taux des logements vacants de la ville. Toujours selon l’INSEE, il se situait en 2015 (nous ne disposons pas de chiffres plus récents) à 15% de l’ensemble des logements. Ce chiffre est considéré comme élevé surtout lorsqu’on le rapporte à la moyenne nationale qui est de 7,9% et à la moyenne régionale qui est de 8,5%. Comme le dit Daniel Sango : « …les logements ne correspondent plus aux souhaits des habitants […] La classe moyenne l’a (le centre ville) quitté… ».

L’opposition a récemment établi, avec l’aide d’un huissier, l’état des commerces du centre ville. Le nombre des pas-de-porte en déshérence est impressionnant. Les chiffres ainsi fournis sont évidemment contestés par la majorité. Alors au delà de la bataille des chiffres que chacun pourra utiliser à sa guise, entre les commerces qui existent et ceux qui vont bientôt s’implanter, il reste une certitude : lorsqu’on marche dans les rues de Pau le spectacle de ces vitrines vides, « à louer » ou « à vendre » saute aux yeux. Cette même opposition évoque la situation antérieure à 2014 et précise, qu’à cette époque, il n’y avait que 2 commerces fermés rue Serviez, aucun au Palais des Pyrénées, 4 rue Louis Barthou et Henri IV, 4 rue Joffre. Ne parlons pas du centre Bosquet où, après la réintégration de son implantation initiale par les Nouvelles Galeries, il ne restera pas grand chose.

On rétorquera avec raison que bon nombre de villes de la même importance que Pau connaissent une situation comparable. Mais lorsque l’on sait que le motif le plus réel de la fermeture des commerces des centre ville est l’extension des zones commerciales en périphérie, il faut bien s’interroger pour savoir qui autorise ces extensions. Ce sont évidemment les politiques qui délivrent des permis de construire. Ainsi dans l’agglomération paloise, on a vu s’agrandir les galeries marchandes, de Leclerc (Tempo), et de Carrefour. On a vu se créer des zones sur la route de Tarbes. On a vu fleurir des drives (Auchan). Ces extension ou créations sont estimées à plus de 10 000 m². Mais ce n’est pas fini, une zac à proximité de l’hippodrome est en train de voir le jour, on pourrait parler également du futur casino. Ces projets dont il serait ici fastidieux de fournir la liste sont estimés à une surface de 10 000 m². Alors messieurs les politiques, qui est responsable de la désertification du centre ville ?

Et pour clôturer cette énumération, lorsqu’on nous dit que les impôts locaux baissent, malgré une bonne volonté pour le croire, il faut se rendre à l’évidence. Pour ce qui me concerne, lorsque je fais le cumul de la taxe d’habitation et de la taxe foncière, je constate que sur les cinq dernières années ce que je dois payer a augmenté de 3,5%. Dans le même temps l’inflation n’a été que de 1,74%. Ne parlons pas de l’augmentation du prix de l’utilisation des transports en commun, cela a déjà été dit dans ces colonnes.

Alors que faire ? Faut-il se résigner et dire que cette évolution est dans la nature des chose, que tout ce qui se passe à Pau est inéluctable ? La principale préoccupation est certainement de vouloir réanimer le centre ville en facilitant son accès. Le BHNS apportera peut-être une réponse mais pas autant que déclaré. La gratuité des transports au moins pourrait être envisagée de façon périodique, en fin de semaine par exemple. Il existe une possibilité importante de stationnement du côté de la gare SNCF, (à proximité de ce qui était le SERNAM) avec un funiculaire plus adapté. Les économies seraient en partie possibles en abandonnant ce curieux projet d’une salle de spectacle au Foirail et en économisant sur les frais du Grand Prix.

Lorsque l’on écoute les commerçants du centre ville de Pau on ne peut que constater leur désarroi, leur situation est difficile et, de ce fait, l’image de notre ville en pâtit.

Pau, le 3 juillet 2018

par Joël BRAUD

crédit image : techniques-ingenieur.fr

Comment la France a tué ses villes

comment-la-france-a-tue-ses-villes« Comment la France a tué ses villes »* est le titre du livre écrit par Olivier Razemon. Au moment où, à Pau, nous apprenons la fermeture de plusieurs commerces comme Le Comptoir Carnot et la Concha, des questions se posent. La situation de notre ville est-elle une exception ? Existe-t-il des solutions pour sauver les commerces des centres villes ? Ce journaliste indépendant (Le Monde), reconnu comme un expert de la ville et de la mobilité, nous apporte un éclairage.

Les exemples ne manquent pas des centres urbains touchés par ces fermetures commerciales. La ville de Vierzon est citée et est qualifiée de « mouroir commercial ». La rue Lafayette de Landerneau est devenue « la rue Lafaillite ». Chaque année, au mois de juin, Procos, la fédération pour l’urbanisme et le développement du commerce, publie, pour les 300 plus grandes villes françaises, le taux des vacances commerciales.

Ainsi, nous apprenons que ce taux est de 9,5%, soit un point de plus qu’en 2014 ; 1,7 point de plus qu’en 2013 et 2,3 points de plus qu’en 2012. Autrement dit la tendance, ne faiblit pas. Ce taux est de 11,1% pour les villes de moins de 50 000 habitants et de 11,3% pour celles de 50 000 à 100 000 habitants. Le seuil de 10% est considéré comme le seuil d’alerte. Mais un phénomène nouveau apparaît puisque désormais les surfaces commerciales périphériques sont également touchées. Une exception, la ville de Saint-Jean-de-Luz.

Dans le même temps, selon l’expression d’Olivier Razemon, « l’habitat se nécrose » dans les centres ville. Selon l’INSEE (map.datafrance.info) la part des logements vacants est évalué à 7,56% pour l’ensemble du pays. En 2012, il dépassait 10% dans certains départements. Ce taux de logements vides enregistre une progression régulière, elle a été de 1,2% entre 2006 et 2012. A Pau ce taux atteint 8% et 9,5% dans l’hyper centre.

Apparaissent alors ce que l’auteur nomme « des commerces éphémères ». Ainsi avec les cybercafés, les bars à sourire, les vapotages, les fast-foods halal, les bijoux fantaisie, la nutrition sportive, les tatoueurs, le commerce urbain change de visage.

Les bus urbains, pour une raison difficile à déterminer et malgré une dé-motorisation individuelle, demeurent souvent vides. Les transports publics n’ont jamais été un secteur rentable, ils coûtent cher à la communauté.

Face à ce constat, existe-t-il des solutions ? Olivier Razemon cite quelques possibilités :
Stopper la prolifération des zones commerciales ;
taxer les parkings des hypermarchés ;
rendre le centre-ville aux piétons ;
valoriser davantage les transports publics ;
privilégier les commerces de proximité.

Ce livre qui doit paraître prochainement (mi octobre) contient, à n’en pas douter, une réflexion riche qui concerne des villes comme Pau. Il nous permettra non pas de nous résigner, mais de constater que nous ne sommes pas un cas unique et que sans doute, il existe des solutions à cette désertification.

Un livre pour ceux qui sont soucieux de l’avenir de notre ville, à lire absolument.

Pau, le 21 septembre 2016
par Joël Braud

*Éditions : Rue de l’Échiquier – collection Diagonales – 208 pages – 18 € – A paraître le 13 octobre 2016.