Le Béarn sur le Tour de France : inutile et coûteux !

henri au tour    C’est la troisième année que le Conseil Départemental finance le tour de France d’Henri IV censé développer l’image et l’attractivité du Béarn. Est-ce vraiment efficient ? On peut en douter.

J’ai eu l’occasion de montrer l’incroyable addiction de nos élus au tourisme ( « Le tourisme, l’activité préférée de nos élus » AP du 20 mai 2018, à relire en cliquant sur le titre). De la commune à l’Etat, tous les échelons de notre invraisemblable mille feuille se sentent investis d’une mission dans ce domaine et œuvrent en ordre dispersé, dans un grand gaspillage d’argent public. Parmi les plus « touristes » on retrouve le Conseil Départemental et son président de l’Agence d’Attractivité et de Développement Touristique (AaDT, ex Comité Départemental du Tourisme), Jacques Pédehontaa dont les pitreries font la joie des media locaux, et sa gestion le désespoir des habitants de Laas dont il est le Maire fantasque. Depuis quelques années ils promènent dans la caravane du Tour de France une copie d’Henri IV et quelques autres véhicules avec l’aide des agences Crea – Sud et Panenka (Quatre véhicules et une douzaine de personnes). Si on en croit le Conseil Départemental, et les media asservis, c’est un succès…

Un succès, quel succès ? Bien évidement la caractéristique de ces initiatives enfantines c’est qu’elles ne sont assorties d’aucune évaluation sérieuse. Est-ce que l’image d’Henri IV donne envie d’aller passer des vacances en Béarn, même accompagné de la poule au pot ? On peut vraiment en douter, car c’est une image du passé, dépassée. Et puis cette démarche est-elle adaptée au public qui la voit ? Certainement pas. Tous les amateurs du Tour de France qui sont au bord de la route connaissent le Béarn, Pau ville étape à de multiples reprises, le col d’Aubisque et autres hauts lieux de la course, ainsi que la campagne béarnaise ont été télévisés longuement des dizaines de fois au nombreux public qui se trouve sur la route du Tour, avec les commentaires « touristiques » toujours flatteurs de l’historien de service. On voit ici la belle coordination de stratégie entre la ville de Pau et le Conseil Départemental… Sacré mille feuille !

Dans ces démarches c’est d’abord l’évaluation du résultat qui compte. Et là, la mascarade continue…

Il aurait été très simple dans les enquêtes que font les agences de demander précisément qu’est-ce qui a motivé la venue de cette personne en Béarn et d’y glisser une case : « la caravane publicitaire du Tour de France et Henri IV ». Le résultat aurait été réel, mais sans doute nul… Alors les agences qui participent à cette action chiffrent  » les retombées médiatiques, mesurées en contre-valeur publicitaire ». Escroquerie évidente qui ne sert qu’à masquer un bide total. On imagine que le compte est fait du nombre de fois où Henri IV et sa caravane sont cité dans les media ou les radio, et l’on calcule le coût d’une publicité correspondante sur ce media. Sauf que c’est stupide puisque les cibles sont aléatoires et les messages non maîtrisés. De plus l’évaluation est faite par les promoteurs de la démarche eux même, gage d’une grande objectivité ! Ainsi cette caravane est surtout très largement commentée dans Sud Ouest, La République, FR3 Pau Sud Aquitaine, tous les media locaux qui font donc de la publicité… pour le tourisme en Béarn…aux Béarnais et cela est comptabilisé… Cela me rappelle cette campagne publicitaire faite pour le Béarn il y a quelques années avec une soixantaine d’affiches très grand format placées…en Béarn .

Alors parlons un peu des coûts de cette action folklorique.

Le budget serait de 320 000 € en coûts externes. Il faut bien sûr y rajouter les coûts internes et comme toujours cela n’est pas directement accessible pour le citoyen.

L’AaDT dispose d’un budget 2018 de 3,3 M€ pour le tourisme (gigantesque !) dont 1,7 M€ de coût de personnel (en augmentation de 21,5% par rapport à 2017 !!!) soit bien plus que les coûts externes !

Avec ce ratio, on peut donc estimer le coût complet de cette opération à 640 000 €.

Et on peut lire dans la presse ( La République) : « La présence du Béarn et du «bon roi Henri» sur le Tour 2017 auraient généré 770 661 euros d’équivalent publicitaire. »

On le voit le résultat est précis… mais en fait calamiteux.

En attendant et comme d’habitude, les contribuables paieront pour une organisation honteuse où des dizaines de fonctionnaires inutiles se marchent sur les pieds, tout cela pour satisfaire l’ego insatiable de politiciens aux compétences douteuses.

Daniel Sango

Crédit photo : Sud Ouest

Henri de Navarre ou l’inconscient du Béarn : Deuxième saison.

henri 4 2Encore une fois, Monsieur Pyc, fidèle à son sillon, a souhaité approfondir ses interrogations sur l’inconscient du Béarn.
Pour cela (comme on dit dans les séries télé que PYC ne regarde pas) voici la saison 2 ou plutôt le second épisode comme aux temps obscurs de Thierry la fronde.

Henri :
Calixte mon payse gascon ci-devant Béarnais De quoi veux tu me parler ?
De la religion, de la guerre, des femmes et du Béarn à ce que je crois deviner ?

Calixte :
Monseigneur sérénissime, de tout cela mais je ferai suivant votre bon plaisir…

Allons Calixte, détends-toi et souffle, parle clairement et commençons par le début.
Et remets ton haut de chausse sinon l’oiseau va s’envoler..

Peut être par vos parents par Jehanne, madame votre mère, votre maman et Antoine ce grand monsieur de Bourbon…

De Jeanne ma mère que tu appelles maman à la sauce française tu veux sans doute parler – A savoir de madame ma sainte et terrible mère – monsieur le paysan, plus ou moins nobliau, Hobereau de la plaine de Nay, à peine sorti de Ouzoum parmi les ânes et de ses brebis dont vous ne déparez peu.
A savoir,
• de la reine de Navarre
• de la princesse de Boisbelle
• de la duchesse d’Albretesses
• de la comtesse de Foix, du Périgord, de Rodez, d’Armagnac, de Fézensac, de Bigorre, de Dreux, de Gause, du Perche, de L’Isle-Jourdain, de Porhoët, de Pardiac et de Guînes,
• vicomtesse de Limoges, de Béarn, de Tartas, de Lomagne, de Maremne, de Fézensaguet, de Dax, de Brulhois, de Cressey et d’Auvillars,
Pour simplifier de la reine des Gascons comme on nous appelle ici à Paris où pullulent tant de cadets de chez vous qui ont fait le choix des armes pour ne pas se faire prêtre. Ou vivoter avec ce que le puîné a bien voulu leur laisser. A savoir les yeux pour pleurer.

De chez vous dîtes-vous ?

Eh oui mon petit frère béarnais, je ne suis pas roi du Béarn, le roi de chez vous qui d’ailleurs n’a jamais existé. Mais je suis encore, encore le roi de Navarre le IIIème du nom… Et sans doute le pénultième voir déjà le dernier.
Je suis roi des Français descendant de Saint Louis par Antoine mon père. Je suis le roi des Français le Rex francorum, ces francs germaniques et barbares mal dégrossis par le latin et la foi catholique. Je suis le roi de la plus grande puissance de la terre, la plus riche certainement, où coulent abondamment le vin, le lait et le miel et pas seulement celui de ma petite patrie de naissance.
Ego nominor Ricou, fils de France du Béarn et de la Navarre.
Incidemment roi de la nation la plus déchirée par les questions religieuses et les guerres civiles les plus odieuses et les plus cruelles qui soient.
Par ma mère je me sens il est vrai Gascon (gaschoun?) et Navarrais, fils des Pyrénées et de Gaston Fébus soleil de Bruges, de Tournay, et de Gan, patron de la maison de Foix avec ce rêve, peut-être un moment caressé, d’un royaume au pied de nos montagnes merveilleuses et si douces à mon cœur.
Et puis c’est vrai j’aime les montagnes rivières et les champs.

Montanhas E Ribera ?

Si tu veux mon gentil paysanasse et j’aime aussi le bruit des galets que roulent sur nos gaves les fleurs de printemps. Touts ce que les gens de Paris ignorent et craignent par dessus tout comme tout ce qui sent les chemins crottés et la présence des loups, des rats et des serpents. Dans cette capitale du monde qui sent la merde, l’ordure, la mort et les parfums italiens. Ses odeurs fortes qui, parfois, je le concède, troublent mes désirs.

Chacun voit midi à sa porte…seigneur sérénissime…

Les ourses et les fleurs de nos montagnes seuls les gentilshommes et leurs dames les connaissent pour les avoir aperçues en tapisserie.
Sans doute ce qu’on peut entendre dans ces vers sublimes composés du côté de Lourdios par le marquis Jehan de Lassalle et que le Français, voire le Béarnais parlé à Pau, rend si mal..
Alors passer le pont, passer les ponts, se noyer dans le gave….se gaver de noyades juste pour trouver des jupons auxquels se raccrocher .
Il doit rester des lavandières et des pêcheurs d’azur ….

Mon altesse sérénissime, mon si beau roi navarrais si je puis me permettre ce qui vous attire beaucoup dans ses vers ce sont, peut-être, aussi, les hanches généreuses, les girons et poitrines offertes quand ces dames de chez nous, dones ou servantes, se glacent les mains pour frotter et blanchir le meilleur linge. Ce linge somptueux, parfois somptuaire, filé du lin qui fait la fierté des armoires et des belles-mères.

Tu as peut-être raison. Tout d’un coup tu me sembles moins sot et moins falot que j’ai pu le croire..
Mais au départ le sujet c’est de Jehanne, ma mère, l’inflexible parpaillote qui a introduit la vraie foi en Béarn et remplacé nos braves curés par ces austères pasteurs calvinistes et souvent Genevois avec leurs si drôles de chapeaux.
De Jeanne à chaque moment je sens le regard accusateur à mes changement de foi et, il est vrai, à ce goût désordonné des très jeunes femmes : lavandières ou marquises, bergères ou catins, tendrons trop souvent. Mon père, lui, a définitivement épousé la foi catholique celle des Médicis et d’Henri III à qui j’ai succédé et qui, il est vrai, n’étaient pas des modèles de vertus et de tempérance.

D’où ce partage que vous avez fait en France entre les droits des uns et des autres des places fortes pour le parti protestant et une préséance pour la foi romaine et papiste la religion du roi.
CUJUS REX EJUS RELIGIO… 

Mais c’est que le petit Calixte à des lettres autres que l’Aspois ou l’Ossallois voire le gascon plus ou moins francisé.

Monseigneur vous me faites rougir.

Reprenez-vous pour ne pas retomber dans votre désagréable bégaiement comme une pucelle à son premier rendez-vous…

Madame votre mère c’est aussi la fille de Marguerite de Navarre de la maison d’ Angoulême poétesse, religieusement modérée , la sœur de François 1 er roi des français sans doute plus proche à votre tempérament modéré et primesautier.

Sans doute même si, pour moi, les lettres et même la poésie restent beaucoup une affaire de dames et de religieux.
Je reste un guerrier et un administrateur des pays à moi confiés. A chaque moment dans les mains et dans la grâce de notre seigneur suprême.
Ma grande préoccupation reste la bonne tenue et l’épanouissement des pays que le seigneur a voulu me donner. Singulièrement l’agriculture si belle et si fertile dans notre vicomté béarnaise notamment depuis l’arrivée du blé des Indes qui se complaît si bien avec le fumier de nos vaches et de nos agrestes brebis. J’aime aussi, beaucoup, les parcelles si bien rangées derrière des haies de frênes, de châtaigniers ou de toutes sortes de saules quand le sol est par trop humide.

Un vrai pays de cocagne.

A ce propos chaque jour on me lit un chapitre d’Olivier de Serres un homme courageux, travailleur, entreprenant et ordonné qui a si précisément écrit sur cette matière. Lui qui a développé, dans son Vivarais natal, la culture de la soie venue de Chine. Je lui ai demandé de venir, ici, à Paris enseigner cette science, à mes yeux, plus utile qu’aucune autre.

Et surtout un homme de votre foi protestant calviniste et sudiste …
Comme le comte Sully, lui venu d’Artois il est vrai, toujours à vos côtés à la guerre ( A Coutras, à Ivry, au terrible siège de Paris) comme pour moderniser le pays, grand viguier et grand argentier du royaume et de sa propre fortune.

C’est vrai. Maintenant que tu le dis…
Mais je crains, avant que tu ne me poses la question, de répondre que la grande passion celle à laquelle j’ai le plus sacrifié ce ne soit la chasse et la guerre.
Plus que le lait et le miel, plus que l’odeur des femmes aimées ce sont les flots de sang de mes dagues et de mes épées qui m’ont le plus émotionné.
Avec quand le matin se lève et que la bataille, voire la simple embuscade est si proche, cette folle excitation ce bouillonnement de colère ces cris de Montjoie, ces prières pour monter au ciel une fois occis qui me poursuivent dans mes rêves.

Des rêves qui tous ne sont pas des cauchemars.

Loin s’en faut…
Mais c’est avec notre Seigneur le jour du jugement dernier que j’en parlerai, pas à toi messire l’archange de Bordères ou même à ce coquin d’Amaury de Thou avec qui, incognito, j’ai couru les filles lubriques dans les fêtes de village entre Nousty et Soumoulou juste avant la Marina, un bouge fréquenté par les tiercos espagnols venus dépenser leurs soldes.
Les pires des massacreurs surtout les Aragonais ou les Basques de LOYOLA ceux-là même qui aux Amériques dépècent les indiennes pour voir si elles ont une âme…certainement une manière de papiste à qui tout peut être pardonné.
Mais je me suis laissé dire que toi aussi comme moi tu voulais devenir roi des Français et, pas seulement, vicomte du Béarn.

Vous savez beaucoup de choses.

C’est aussi mon métier que d’être bien renseigné.
Décidément toujours un goût pour la galéjade à la mode gasconne.
Une gasconhitude dirait Ségolène la très charmante duchesse du Poitou qui n’est pas sans me rappeler Gabrielle ou même Françoise de Montmorency …Voire la petite Suzon…

Suzon la souillon de Bordères ?  Permettez, seigneur sérénissime, que tout cela reste entre nous..

Tu dois avoir raison…

– par PYC
Paris 14 mai 1609 ,
une année de Pâques tardives et d’inondation au château de Bordères.

L’identité du Béarn vue d’un village du Soubestre

Décor  paysager d'une assiette A@PLa fierté de posséder de beaux paysages ainsi qu’une histoire fonderait une identité et constituerait un atout essentiel pour affronter l’avenir. S’approprier cette thèse n’est pas immédiat. En Soubestre le développement parait avoir d’autres fondements que la beauté des paysages ou l’histoire. Cependant la foi en l’avenir n’est plus inébranlable.
De nouveaux déterminants du développement se mettent en place.

Les paysages de mon village appartiennent aux « Versants Remarquables » des Luys.
Leur qualité est loin de représenter un facteur crucial de développement pour la majorité des habitants. Pourtant des générations ont construit ce décor qui est maintenant considéré comme un cadre transparent et étroit à la fois. Alors que l’art des anciens compagnons est souvent vanté, la tolérance à la laideur l’emporte fréquemment lorsqu’elle apparaît source de rentabilité. Bouleverser des espaces exerce même une certaine fascination. Sauf comme décoration, un beau paysage ne remplit pas une assiette.

L’histoire du village s’identifie à celle d’une ancienne Abbaye-Laïque. Elle n’est pas davantage reconnue comme facteur de développement. Elle est tout simplement ignorée. Pourtant l’Histoire de Fébus ou d’Henri IV, voire celle de petites baronnies, témoignent d’un niveau de civilisation avancé. Mais le monde a évolué. Les ingrédients et les recettes de la grandeur passée seraient forcément obsolètes. Pour beaucoup, le passé est synonyme de difficultés, de sacrifices et de souffrances. « Remuer le passé » ne servirait à rien et équivaudrait à réhabiliter la bicyclette ou la bougie, voire à retourner à l’âge de pierre.

La foi en l’avenir a conduit à un relatif désintérêt pour le passé ou pour l’environnement paysager. Cette foi en l’avenir est certainement portée par l’individualisme qui caractérise, entre autres, le monde paysan. L’intérêt général est davantage constitué par la somme d’intérêts individuels, souvent portés par le clan dominant, que par l’intérêt de la Société. Mais l’avenir n’apparait plus synonyme de bénéfice. Le progrès a un coût de plus en plus ressenti. Et puis, même le « temps se détraque ».          Les chemins du développement, suivis depuis des décennies, semblent incertains. En écho à ces doutes, le « loto-fientes », le concours du cri du cochon ou le vote FN se répandent en Soubestre. Un besoin d’enracinement dans une identité est manifeste.

Mais l’esprit de tolérance, la convivialité, les usages, le soin apporté aux personnes, aux maisons, aux jardins ont aussi de l’importance en Soubestre. Le matérialisme n’est pas la réalité profonde de la ruralité. Le besoin d’harmonie reste essentiel.
L’engouement pour la généalogie témoigne également d’un besoin de renouer avec l’histoire. Toutes les semaines, aux beaux jours, les pèlerins défilent par centaines sur le chemin du Puy-en-Velay. Des déterminants du progrès se mettent ou se remettent en place.

Réhabiliter l’intérêt général parait également nécessaire. Un retour au « bien commun » est souvent invoqué. Encore faudrait-il que cette notion, comme d’ailleurs celle du « penser global et agir local », voire du « développement durable », soit bien approfondie.

– par Larouture

PS : Les lectures d’articles dédiés à l’identité occitane sur le site A@P, des publications de  Laurent Davezies, Michel Houellebecq,  Axel Kahn et Jean Lassalle, accessoirement la vie politique régionale et nationale ont inspiré cet article.