Des efforts, encore et encore !

Comment y croire ? Depuis des années nos divers gouvernants s’escriment à nous faire croire que tout ira mieux au prix de sacrifices évidemment temporaires jusqu’à remise en état des finances de l’État.

Or, que disait M.FILLON, dés son accession à la tête du gouvernement en 2007 :

« Je suis à la tête d’un État qui est en situation de faillite  sur le plan financier, je suis à la tête d’un État qui est depuis 15 ans en déficit chronique, je suis à la tête d’un État qui n’a jamais voté un budget en équilibre depuis 25 ans. Ça ne peut pas durer» .

«Parfois, il faut utiliser des images. C’est ce que j’ai fait devant des agriculteurs qui demandaient toujours plus, toujours plus à l’État. Je leur ai dit que si la France était une entreprise, un ménage, elle serait en cessation de paiement».

Ou encore la France «s’endette et il faut que tous les Français prennent conscience qu’il est temps de mettre un terme à des solutions de facilité qui ont été employées depuis 25 ans et qui placent notre pays dans une position de faiblesse ».

Et s’engageant à ramener le budget de l’État à l’équilibre avant la fin du quinquennat, il avait mis en garde , « on ne pourra rien bâtir de solide ni pour la Corse ni pour aucune autre partie du territoire national et l’on devrait s’attirer les foudres de la Commission Européenne …» !

C’était en 2007. Dix ans et ni lui, ni les premiers ministres du quinquennat  » HOLLANDE  » ne sont parvenus à réduire la dette abyssale du pays ou seulement à présenter des budgets avec un déficit ne dépassant pas 3 % , limite qu’impose le traité de Maastricht du 7 février 1992.

Et l’avenir n’est pas rose ! Nous allons , en effet , vers un 44 ème budget déficitaire consécutif.

Car, que vient de déclarer M. LEMAIRE, nouvellement nommé à la tête du ministère de l’Economie ?

Tout simplement que l’objectif de passer sous la barre des 3 % de déficit en 2017 ne sera pas tenu «si nous ne faisons rien».

Et quoi faire, donc ?

Le poison est inoculé à petites doses. Pour nous y préparer, le même chirurgien justifie ainsi la nécessité de l’intervention :

«Les comptes publics sont dégradés. Le précédent gouvernement n’a pas budgété des dépenses quasi certaines et laissé filer la dépense depuis le début de l’année ».

« Baissons-nous les bras ? Ou prenons-nous immédiatement des décisions nécessaires pour tenir les engagements du chef de l’État ? L’intérêt national impose de prendre ces décisions difficiles pour repasser sous la barre des 3 % de déficit public».

Comme toujours , c’est à cause des gouvernements précédents, à l’un desquels appartenait M.MACRON au même titre que M. LEMAIRE !

«Il faut que chacun fasse un effort » dit de son côté le premier ministre qui sait fort bien que le rapport de la Cour des comptes, commandé par  lui-même,  ne sera pas bon pour les comptes publics .

Mais des efforts, tous ceux qui contribuent à faire avancer le navire, par leur travail et leurs impôts, en font depuis que les budgets du pays sont déficitaires. Ils rament, ils rament.

S’il s’agissait d’un particulier, tous ses biens feraient l’objet d’une liquidation dont le produit servirait à désintéresser totalement ou non ses créanciers.

Le même processus serait bien difficile à mettre en œuvre concernant la dette énorme du pays qui se chiffre en milliards d’euros.

Pour le citoyen lambda, tout cela est difficile et à admettre et à comprendre. Il pense qu’il doit bien y avoir des solutions premières avant une  augmentation des impôts ou de la CSG.

Quelques pistes ?

1. La suppression du Conseil Économique Social et Environnemental. 233 membres avec une indemnité mensuelle brute de 3982€ pour faire quoi ? Donner un avis consultatif, optionnel ou obligatoire dans le cadre d’un processus législatif .

En fait, assemblée qui consiste à caser des amis ou des candidats malheureux à une récente élection.

Et le plus beau est qu’on retrouve un même Conseil au niveau régional ! On ne prête qu’aux riches même quand ils ne le sont plus.

2. La réduction du nombre de parlementaires et d’élus de toute nature chaque fois qu’ils sont susceptibles de recevoir une indemnité de fonction.

3. La limitation de celle-ci à la justification de la présence du bénéficiaire.

4. La suppression des multiples avantages consentis aux élus (retraites, voyages , etc.).

5. Des sanctions accrues et effectives contre les fraudeurs de toutes natures (20 à 40 milliards d’euros de fraudes aux prestations sociales , par exemple).

6. Faire payer les dégradations de biens publics par les casseurs ou leurs parents.

7. Limiter la générosité de l’État à ce qui est strictement et humainement nécessaire.

La liste ne se prétend pas exhaustive. D’autres mieux informés sauront la compléter.

Mais les citoyens seraient certainement prêts à entendre les propos des ministres si, au lieu, ou même en plus, de leur demander des efforts, on leur disait quelles économies seront mises en œuvre. Et là, nous sommes tous dans l’attente.

Pierre Esposito

Les primaires assassines.

A moins d’être aveugle, innocent ou inconscient, le deuxième tour de l’élection présidentielle ne recèle aucun mystère. Emmanuel MACRON sera désigné le 7 mai pour diriger la France. Comment pourrait-il en être autrement après les appels en sa faveur d’élus de tous bords espérant conserver leur siège, du premier ministre, du parti socialiste, des ténors Républicains dont la voix est chaque jour moins audible et du chef de l’état lui-même qui, à ce titre, devrait observer une parfaite neutralité.

Un tel déferlement ne manque pas d’interpeller. Il n’est pas sans rappeler celui de 2012 où le slogan était  » Tout sauf Sarkozy « . On connaît la suite. Le procédé est honteux. Il conduit non à élire un candidat, mais à éliminer son concurrent. Autrement dit, aujourd’hui, c’est  » Tout sauf Marine Le Pen « .

Tout y passe depuis l’usage éhonté du  » front républicain  » à celui de la candidate de  » l’extrême droite « , car personne, sauf ceux qui en tirent profit pour affoler l’électorat, ne peut définir ces deux notions qui sont seulement la création d’une classe politique soucieuse de ses privilèges.

Les mœurs ne changent malheureusement pas. La trahison a été au centre du scrutin. Ainsi Emmanuel Valls, après s’être engagé, par écrit, à soutenir le candidat qui remporterait la primaire de gauche, s’est empressé de soutenir Emmanuel Macron, se déclarant prêt à gouverner avec lui. Robert Hue, ancien leader du parti communiste en fait de même.

Mais plus surprenante est la position d’une majorité des responsables Républicains qui entonnent la même antienne. Ces derniers sont probablement les plus hypocrites parce que leur position est bancale. En effet, s’ils soutiennent Emmanuel Macron au nom de  » Tout sauf Marine Le Pen  » ou de « barrage à l’extrême droite », leur grand dessein désormais est de devenir une force d’opposition à Emmanuel Macron, comme l’expliquait récemment sur les ondes un ancien premier ministre Républicain.

Ils visent évidemment les élections législatives en espérant obtenir à l’Assemblée Nationale une majorité qui leur permettrait d’empêcher Emmanuel Macron de mettre en œuvre son programme et suggèrent la désignation de François (c’est semble-t-il le prénom obligé pour exercer de hautes fonctions, sauf avatar) BAROIN comme premier ministre.

Autrement dit, ils le soutiennent comme la corde soutient un pendu, tandis que d’autres sont prêts à renoncer à leur étiquette d’origine pour le logo  » En marche « .

Encore et toujours des arrière-pensées par nature perfides. N’ont-ils pas compris que l’électorat ne veut plus du partage du pouvoir en deux camps et si l’on peut rendre un seul hommage au président Hollande, c’est celui d’avoir donné le jour à une créature d’autant moins vulnérable qu’elle est vierge de tout engagement politique antérieur, lui permettant de rassembler autour d’elle des sensibilités qui n’ont cessé de se combattre jusque-là. Autrement dit, il sera parvenu à faire siéger dans le même camp des personnages qui se sont toujours combattus par principe, sans autre souci que d’apparaître dans la majorité ou l’opposition.

L’histoire dira si le calcul était bon mais un fait est sûr beaucoup sont prêts au parjure en attendant un autre mouvement de fond. L’essentiel étant pour eux de se perpétuer.

Pierre Esposito

Politique et morale.

Le désamour dont est victime François FILLON depuis les révélations relatives à la rémunération de son épouse en tant qu’attachée parlementaire exprime l’attachement populaire à la moralisation de la vie politique. Il est évident que les dénonciations dont il a fait l’objet ont été orchestrées par ceux qui avaient intérêt à lui ôter le bénéfice des sondages qui lui accordaient la victoire à l’élection présidentielle.

Mais il n’aura échappé à aucun esprit averti qu’il n’a fait l’objet d’aucune attaque de la part de parlementaires de gauche. C’est que dans ce marigot les crocodiles n’entendent pas s’en faire éjecter.

Le linge sale ne se lavant plus en famille, notre ministre de l’intérieur se voit contraint de démissionner tout simplement parce que désormais l’omerta s’effondre.

Parviendra-t-on à une réconciliation absolue entre morale et politique ? Rien n’est moins sûr ! Quel pays aurait accepté qu’un président de la république entretienne une maîtresse et une fille adultérine aux frais du contribuable, qu’un autre président soit poursuivi et condamné pour des emplois fictifs, tout comme son premier ministre ou d’autres élus pour établissements de fausses factures. Notre silence se fait complice de cette turpitude dont on n’entrevoit pas les limites.

Et ce n’est pas le spectacle que nous offrent nos élus qui va réconcilier les Français avec la politique. En effet que voyons nous, entre autres ?

D’abord la faillite des primaires. D’un côté, François FILLON invité par certains amis à se retirer de la compétition. De l’autre, Benoît HAMON abandonné par Manuel VALLS et de nombreux parlementaires de gauche ou écologistes au profit d’Emmanuel MACRON, le poisson pilote du président HOLLANDE, auquel se raccroche le maire de PAU qui ne craint pas de se retrouver avec ces derniers dans l’espoir évident de décrocher un portefeuille ministériel.

Et puis des aveux, oh certes discrets, pour ne pas mettre l’électorat en ébullition, tels ceux de Patrick STEFANINI, ancien directeur de campagne de François FILLON qui, en l’abandonnant en cours de route, confesse que ce dernier est victime d’un système consistant à accorder aux parlementaires des compléments de rémunération à travers l’indemnité pour l’embauche d’attachés parlementaires. Sans doute voulait-il évoquer surtout l’indemnité représentative des frais de mandat (IRFM) dont le dernier chiffre connu est de 5770 € mensuels. Allocation non imposable et utilisable sans justification. Mieux même, jusqu’en 2015, certains ont cru possible de s’en servir aux fins d’achat d’un bien immobilier censé abriter leur permanence. Et personne encore n’a dit ni que l’opération constitue un usage abusif de fonds publics, ni que ce bien doit être immédiatement remis à l’État.

Et la réserve parlementaire ? 130.000€ par an à la disposition de l’élu pour subventionner toute personne de son choix, procédé habile de clientélisme.

Et combien d’autres avantages ? Retraites, prêts à des taux préférentiels, carnet d’adresses…

Le pire est le système électoral porteur de toutes les combines. Avec un scrutin à deux tours et les désistements qui en découlent, l’élection est faussée. Ce n’est pas le gagnant du premier tour qui en sera vainqueur, mais celui qui aura su, au prix de contorsions multiples, à obtenir des soutiens compensés par ailleurs.

Reste l’hypocrisie de l’élection présidentielle. Comment, au pays de DESCARTES, a-t-on pu imaginer que le président élu aurait systématiquement une majorité parlementaire pour soutenir son projet ?

Quel raisonnement logique doit conduire à cette fatalité ? Sans compter qu’une majorité systématiquement pour et une opposition systématiquement contre rend illusoire le débat démocratique ! L’alternance, voilà le grand mot de ceux qui veulent accéder aux responsabilités. Et l’on revient de fait au bipartisme dans lequel la majorité n’a rien à concéder à l’opposition dont le rôle devient dérisoire. Ne nous étonnons pas de l’écœurement des électeurs qui ne s’exprime, hélas, que par leur silence : l’abstention. Gare, toutefois, à leur réveil. Des dirigeants roumains capitulant, une présidente sud-coréenne destituée et un gouvernement islandais contraint à la démission sont des signes encourageants pour l’avenir démocraties.

Pierre ESPOSITO
Ancien bâtonnier du barreau de PAU

Crédit photo : la croix.com

Indigne

imagesLe président de la république vient de faire publier ses pensées et, s’agissant des magistrats, il évoque leur lâcheté, leur reprochant de se planquer et de jouer les vertueux.

Outre le fait que ces propos ne sont appuyés sur aucune preuve, je les trouve personnellement affligeants de la part de celui qui est le garant de l’indépendance des juges.
Pour avoir côtoyé leur corps pendant plus de quarante et un an, je m’étonne d’une telle appréciation alors même qu’il m’est arrivé de ne pas comprendre certaines décisions.
Mais, à un moment où la justice est de plus en plus décriée parce que tout simplement ses décisions ne peuvent pas être comprises de tous les citoyens, les paroles du président alimentent ceux qui déclarent ne pas croire en elle.
Il en est des juges comme de tout le monde.
Que serait leur lâcheté ? Quelle attitude indigne peut-on leur reprocher ?
Se planquer ? Sans doute notre président n’a-t-il jamais mis les pieds dans le bureau d’un magistrat où s’empilent des dossiers du fait d’un excès de travail. On ne peut demander aux magistrats d’aller vite et de bien juger.
Jouer les vertueux ? En quoi ? Nos juges sont un des derniers remparts contre un débridage des mœurs.
Non, Monsieur le Président, vos propos sont indignes parce que s’ils étaient l’œuvre de tout autre citoyen, il est fort à parier que le ministre de la justice aurait aussitôt engagé des poursuites.

Pierre ESPOSITO
Avocat honoraire
Ancien bâtonnier du barreau de PAU.

Compromis : un mot méconnu en français

imagesL’histoire de la France moderne a marqué profondément les corps sociaux dans le sens d’une opposition résolue refusant de considérer un point de vue contraire à ses propres convictions. Les guerres de religion, la révocation de l’Édit de Nantes, la Révolution ont été des moments décisifs établissant la préférence de la force sur la conciliation.

La situation politique relative à la loi travail suit une telle pente. On ne saurait considérer l’accord sur le défilé autour du bassin de l’Arsenal à Paris comme autre chose d’un avatar visant à limiter les débordements nuisibles aux deux parties, syndicats et gouvernement. Avatar résultant d’ailleurs d’une position de force.

Est-ce à dire que sur le sujet de la loi régissant le travail il n’y a pas de compromis possible ? Notre pays manquerait-il de conseillers, de membres de cabinets ministériels, de spécialistes des questions sociales ? L’inventif et brillant Emmanuel Macron peut-il ne se soucier en rien des retombées sur l’économie française et continuer à disserter sur les méfaits de l’I.S.F. sur la générosité des classes aisées ? Est-il impossible que les deux parties sortent la tête haute d’un conflit qui dure trop ? Car ce sont travailleurs et électeurs qui souffrent des grèves à répétition. Ainsi, lorsque la Seine a débordé sur les lignes de la SNCF, les syndicats de la RATP ont maintenu la grève qui a paralysé les voies permettant un détournement, au grand dam des voyageurs.

Je ne crois pas à cette impossibilité. Parmi d’autres, voici quelques pistes de sortie de crise. Pour le gouvernement céder en partie sur l’article 2 de la loi serait profitable : accepter que la majoration des heures supplémentaires reste du domaine des accords de branches et supérieur à 25% montrerait que le gouvernement reste fidèle aux orientations de la gauche qui privilégie une réduction de la durée du travail et une meilleure répartition de l’emploi. De quoi se rabibocher un peu avec les frondeurs, ce qui ne serait pas malvenu pour MM. Hollande et Valls. Le patronat pousserait les hauts cris, bien entendu. Mais on pourrait lui rétorquer que le million d’emplois qu’il avait promis en compensation des accords de compétitivité n’a guère été effectif. Et que la mesure pourrait être profitable aux entreprises si elle était assortie de dispositions visant à remplacer l’usage des heures supplémentaires par des emplois de type supplétif qui ne comporteraient pas les contraintes des contrats classiques. Non que les contrats « zéro-heures » britanniques ou les petits boulots germaniques soient des modèles absolus. Mais trouver des moyens de réduire la gangrène du chômage est une absolue nécessité (et dans la ligne de M. Hollande). Assortis de mesures en faveur de la qualification et de l’employabilité, ces « contrats de disponibilité » pourraient être profitables aux chômeurs, malgré la précarité qu’ils instaureraient. Et la flexibilité bénéficiant aux entreprises pourrait être orientée vers un surplus d’activité plus pérenne. L’expérience des pays voisins doit être mise à profit dans un état d’esprit critique mais constructif. On pourrait ainsi imaginer qu’en période de baisse des commandes les entreprises détachent une partie de leurs employés pour assurer la formation des candidats aux contrats de disponibilité, ce qui donnerait un peu de souplesse et orienterait vers l’emploi ceux qui en sont écartés.

La protection des travailleurs doit aussi être nourrie de mesures concernant le travail dans les pays où le coût de la main d’œuvre est bas (le coût du travail dans certains pays comme le Bangladesh représente 0,6% du prix d’un t-shirt, soit le centième de la part revenant au distributeur constate un rapport de l’OCDE). Afin de tenir compte des dépenses d’infrastructures, le coût du transport maritime devrait aussi être réévalué et supporté par les consommateurs plutôt que par les organes publics, et donc les contribuables. Cela permettrait de rééquilibrer un peu les échanges et de lutter contre les distorsions de concurrence. On le voit, le conflit actuel ne peut être considéré sous le seul angle de la rédaction d’articles de loi. Les quelques citations qui suivent visent à inciter au recul et à une réflexion plus large.

 Paul Itaulog

« Qui peut croire sérieusement qu’il suffirait pour sortir la France du marasme économique de supprimer les seuils sociaux, de faire travailler le dimanche, de supprimer le salaire minimum, d’interdire la contestation judiciaire des licenciements et autres recettes miraculeuses présentées au concours Lépine de la déconstruction du droit du travail ? »
Alain Supiot, La gouvernance par les nombres. Cours au Collège de France (2012-2014)
Fayard, 2015.

« La tendance lourde est celle de la mise en concurrence des droits nationaux et de la « réforme des marchés du travail » dans le sens de leur réactivité et de leur adaptation aux attentes des investisseurs. On ne peut que saluer la performance politique qui a consisté à faire oublier que la crise de 2008 était due aux marchés financiers pour l’imputer aux marchés du travail et aux protections extravagantes dont jouiraient les salariés et les chômeurs dans nos pays. » Idem, p. 348

« Cette évolution reflète certes le nouvel état du rapport des forces politiques et économiques, rapport très défavorable aux travailleurs, en raison de la distorsion entre les libertés collectives (qui demeurent, là où elles sont reconnues, cantonnées aux frontières nationales) et les libertés de circulation internationale des capitaux et des marchandises. Un large consensus s’est établi parmi les partis de gouvernements pour accorder la primauté absolue aux libertés du capital sur celles du travail. La croyance dans les bienfaits de la compétition mondiale a acquis pour eux la valeur d’un dogme. » Ibidem p. 347
« L’Histoire n’assure jamais le triomphe pur et simple d’un contraire sur son contraire : elle dévoile, en se faisant, des issues inimaginables, des synthèses imprévisibles.» Roland Barthes, Mythologies, p. 246, Le Seuil, 1957.

Hollande mène bien une politique de gauche

 touche-pas-a-mon-electorat  A écouter la minorité d’extrême gauche qui commence aux « frondeurs », Hollande mènerait une politique de droite. C’est tout le contraire.

Contrairement à la musique des partis de gauche et des syndicats, largement relayée par les media, il n’y a en France aucune politique d’austérité, et même pas de rigueur budgétaire. Les chiffres de l’INSEE sont là pour le démontrer.

Entre 2012 et 2015 la dépense publique française est passée de 1186 à 1243 milliards d’euro, soit une augmentation de 19 milliards d’euro par an alors que l’inflation est quasi nulle et que, grâce à la baisse des taux (nuls voire négatifs !) la charge de la dette a baissé de 56 à 44 milliards d’euro.

Ainsi donc la dette française continue à croître à 95,7 % du PIB. Elle dépasse les 2100 milliards d’euro elle était de 1720 milliards d’euro au 1/1/2012 ! Hollande mène donc bien une politique de gauche, où la redistribution est massive, les impôts élevés, et menée à crédit grâce à une augmentation très dangereuse de la dette.

La France est un bateau handicapé par le poids de sa dépense publique, la Cour des Comptes ne cesse de le répéter, et ce qui reste hallucinant c’est que le pays est divisé en deux camps. Les uns, à l’extrême gauche rêvent d’une fabrique de faux billets qui leur permettrait de vivre encore plus au dessus de nos moyens . Comment, jusqu’à quand ? Mystère, car personne au monde n’a expérimenté une voie laxiste. Même Tsipras et Syriza, confrontés aux réalités économiques de la Grèce sont revenus dans le rang, et eux, si on compare à la France, mènent une vraie politique d’austérité, enfin sur le papier, car les nouvelles décisions tardent à s’appliquer dans la réalité. Les autres (j’exclue le FN dont le programme économique est incomplet et fantaisiste), plus réalistes que le PS et Hollande préparent de vraies réformes de structures, déjà en application dans les pays européens qui ont réussi à baisser fortement le chômage, où la loi travail actuelle (destinée aux travailleurs du privé et qui, bien curieusement met les fonctionnaires dans la rue…) ne sera qu’une réformette. Et ne parlons pas de l’indispensable réduction de la dépense publique qui devra être drastique vu sa dérive continuelle.

Deux camps composent également le monde du travail. D’un côté le privé à qui on demande plus de flexibilité, plus de compétitivité, des durées de travail plus longues, dans une économie mondialisée irréversible. De l’autre le public, où les conditions sont très différentes, contrat de travail incassable, flexibilité nulle, augmentation de la productivité plate, âge et conditions de départ à la retraite très avantageux, participation très limitée à la solidarité en matière d’emploi (pas de cotisation chômage), …etc.

Cette différence n’est plus acceptable car injuste et contre productive. Mais clientélisme de gauche oblige, Hollande ferme les yeux.

Les trois quarts des fonctionnaires ne devraient pas en avoir le statut ! Déjà, ce n’est qu’au sein des fonctions régaliennes de l’État qu’on devrait les trouver. Employés territoriaux, personnel hospitalier ou enseignants devraient relever d’un contrat identique à celui du privé.

Dans beaucoup d’États européens c’est le cas : Danemark, Italie, Finlande, Suède, Royaume Uni.

Il ne peut plus y avoir une France du travail à deux vitesses.

On le voit, François Hollande mène bien une politique de gauche, n’en déplaise aux tenants d’un socialisme archaïque. Mais la situation de la France nécessite des mesures bien plus efficientes.

Daniel Sango

Debout la nuit et en marche

IMAG8857[1]Le premier mot d’ordre ne peut plaire à tout le monde : beaucoup d’entre nous ont besoin de sommeil. Quant au second, on peut se demander vers quoi la marche est supposée se diriger. Ce n’est pas précisé dans les déclarations d’Emmanuel Macron qui est plus disert sur ses proclamations de fidélité à la gauche et à François Hollande. Peut-être sent-il le besoin de convaincre sur ce point. Mais on peut supposer que ses initiatives laissent présager une voie fort libérale, plus soutenue par le monde de l’entreprise que par le monde du travail.

Cependant, chacun de ces mouvements reflète un sentiment diffus de rejet de la situation actuelle, ou au moins de critique profonde de l’organisation de la société. L’ennui est que ces deux critiques vont dans des sens différents et que leurs appuis ne représentent pour le moment qu’une part minime du corps électoral, même s’ils peuvent jouir de sympathies. Ils constituent donc plus des frémissements que des mouvements. Cependant, des expériences passées comme la révolte de mai 68 ou Podemos montrent que des courants ascendants peuvent faire monter l’emprise sur l’opinion.

Il faut tout de même ajouter que mai 68 a donné lieu à un vote record pour la droite aux élections du mois suivant. Cependant, la vague a laissé des traces : il est difficile d’imaginer aujourd’hui ce qu’était la société française avant 1968, engoncée qu’elle était dans une rigidité qui s’alliait bien avec les vieillards au pouvoir. De sorte que les appels au modernisme de M. Macron et les aspirations à une société plus juste, plus humaine des veilleurs de la nuit laisseront peut-être des traces palpables.  Les uns et les autres rejettent le carriérisme des hommes politiques, le cumul des mandats dans le temps et dans les fonctions. Mais cela suffira-t-il à faire changer les choses ?

Séduire les lecteurs du Financial Times pour l’un, agiter les mains comme des marionnettes pour approuver une résolution ou mouliner ses avant-bras pour montrer son souhait de passer à autre chose est peut-être novateur et sympathique. Mais les forces à l’œuvre dans le monde, celles des multinationales notamment, ne bougeront pas avec de simples pratiques de ce genre.

Lorsque je considère ces deux mouvements, je ne ne peux m’empêcher de penser au livre « L’homme qui parle » de Mario Vargas Llosa. Une étude quasi ethnographique du peuple machiguenga de la forêt amazonienne, qui se met en marche pour arrêter le soleil dans sa chute, tandis que les tronçonneuses détruisent la forêt pour que les surfaces dédiées aux tourteaux de soja nous parviennent en quantités toujours plus grandes.

Paul Itaulog

Un remaniement normal ?

2Vous souhaiteriez peut-être que je commente ce remaniement. Je ne suis pas certain d’en avoir plus envie que vous. Voyons cependant en quoi il pourrait nous concerner.

Bien que le chef de l’État se soit défendu de tout calcul, il saute aux yeux que ce remaniement vise à lui apporter une plus large assise politique et à faire taire les critiques, ou du moins à leur mettre une sourdine. La composition du gouvernement montre à l’évidence l’art de la synthèse de M. Hollande. Peut-on lui reprocher de chercher à s’entourer de personnes qui renforceraient ses choix ? Avec Arnaud Montebourg et Christiane Taubira le pays a connu des situations déroutantes dans lesquelles des ministres s’exprimaient en opposition radicale avec les options prises par le Président. Dans le domaine sportif, l’équipe nationale de football a connu de telles tensions et il faut bien reconnaître qu’elles ne sont guère propices aux succès.

Dans un pays qui adore la critique, voire le dénigrement, on ne peut pas s’attendre à la fin des divergences d’opinion. A l’extérieur du gouvernement, bien sûr, comme chez les écologistes indignés par le ralliement de certains de leurs dirigeants, mais aussi à l’intérieur, comme l’ont montré les propos d’Emmanuelle Cosse au lendemain de sa nomination. Mais du moins ces critiques sont-elles feutrées et marquées du ton de la loyauté. Sur la question de la déchéance de nationalité on peut se demander si le chef de l’État lui-même ne regrette pas son engagement dans une voie incertaine, voire sans issue. Et à la lecture de l’opinion d’un homme aussi respecté que M. Badinter (Le Monde du 6 février) on constate que l’éminent juriste ne sait guère mieux que vous et moi comment sortir de l’antinomie entre l’obligation de traiter de manière égale tous les citoyens français et le respect d’engagements internationaux interdisant la fabrication d’apatrides. S’appuyer sur le code civil plutôt que sur un changement constitutionnel ne change rien au problème, même s’il se présente de manière moins solennel. Aussi, le mieux est d’en finir au plus vite avec cette impasse prise sous le coup de l’émotion et de s’attaquer aux vrais problèmes du pays : le chômage, la sécurité, l’intégration, la relance de l’économie. Le recrutement de nouvelles têtes ne provenant pas du microcosme politique apportera-t-il un souffle nouveau ? Probablement plus un zéphyr qu’un vent violent ; mais un peu de féminité et de tac ne feraient pas de mal.

La mise en œuvre d’un référendum local au cours de l’épisode actuel peut retenir notre attention. L’épreuve du feu montrera si elle est capable de mettre fin aux dissensions. L’essai vaut d’être tenté. Il pourrait donner des idées pour la Pau-Oloron et pour la LGV. Chiche !

Paul Itaulog

Et demain ? Comme avant !

imgresDe Nicolas Sarkozy, Alain Juppé à François Hollande, tous pensent et souhaitent même que Marine Le Pen soit présente au second tour de l’élection présidentielle.

Pensent, parce que cela semble actuellement évident. Souhaitent, parce qu’ils espèrent invoquer contre elle le fameux ( et fumeux ) front républicain qui a privé le FN de la présidence des régions PACA et Nord- Pas-de Calais. Et à ce jeu-là, le plus malin, le plus fin, celui qu’on raille, qu’on caricature comme un benêt, c’est le président Hollande. Il a pour meilleur argument la preuve du succès du rassemblement des forces de gauche. Le moment venu, il leur dira  » si nous ne sommes pas unis, nous laisserons la présidence à la droite, voire au FN  » et les verts, le front de gauche, auxquels seront promis des récompenses, se rallieront autour de sa candidature. Face à Marine Le PEN, il gagnera, puisqu’elle n’obtiendra pas l’aide des  » républicains » et des « centristes ». Et s’il est éliminé au premier tour, on reverra le film du second tour des régionales.

Le FN ne sera pas au pouvoir en 2017. Pour y accéder, il lui faudra peut-être prôner les changements auxquels aspirent les français, à savoir des réformes institutionnelles telles que non cumul des mandats dans le temps, réduction du nombre d’élus, bref la fin du professionnalisme politique. Mais comment, les dirigeants des partis qui ne vivent que de leurs mandats, accepteraient-ils de s’engager sur cette voie ? Tant que morale et politique ne feront pas bon ménage, le  » bon peuple  » se réfugiera de plus en plus dans l’abstention ou le vote blanc. Car que voyons-nous si ce n’est langue de bois et hypocrisie? Un  » futur » président de région renoncer de participer à une primaire  » de la droite et du centre » qu’il n’avait aucune chance de remporter, un chef de file des verts se rapprocher du président Hollande, une bagarre sournoise contre Nicolas Sarkozy au sein de son propre camp, un président du Modem qui soutient Alain Juppé dans l’espoir non avoué mais tellement sonore d’en devenir le premier ministre.
Et parmi tout ce beau monde quel est celui qui a vécu d’autre chose que de ses mandats ? Certains ont largement dépassé l’âge moyen de la retraite, mais l’ambition du pouvoir continuera de les animer tant qu’une élimination naturelle ou électorale ne mettra pas fin à leur appétit. Les habitudes devront changer, mais n’imaginons pas changer les hommes, malgré les incantations entendues récemment.

Il faudra commencer par respecter l’autre, cesser de s’invectiver, accepter la contradiction, ne pas se parer d’une posture de matador, comme le fait trop souvent le premier ministre, réfléchir enfin au fait que l’élection donne seulement une légitimité électorale mais non une représentation réellement majoritaire du pays.

Pierre ESPOSITO 
Docteur en droit
Avocat honoraire

Carton du FN: « Comment en est-on arrivé là ?»

images« Comment en est-on arrivé là ? », c’est le titre de l’éditorial du Monde du 8 décembre, après le « carton » du Front National au premier tour des élections régionales. Passé le titre, dont on imagine qu’il conduit à une analyse connue, vient la conclusion : « C’est une reconstruction en profondeur qui s’impose ». On n’en saura pas plus sur le type de reconstruction imaginé par le quotidien et la méthode pour y arriver.

Cette reconstruction en profondeur, de nombreux rédacteurs, sur Alternatives Pyrénées, l’appellent de leurs souhaits depuis bien longtemps. Mais rien n’y fait. Rien ne bouge. Du coup 30% des français pensent que seul le FN peut faire bouger les choses. Ils n’ont pas tort ! Ni le PS, ni les Républicains ne proposent quoi que ce soit pour faire sortir notre Nation de l’immobilisme. Ils se contentent d’un face-à-face stérile depuis si longtemps.

Oui, seul le FN peut faire bouger les choses, sauf que le replis sur soi, la xénophobie ne peut que conduire qu’à plus de chômage, plus de difficultés encore. France : De pays des lumières, pays universel passant au statut de pays fermé, recroquevillé sur lui-même !

Pas une nation du monde, au « top » de l’attractivité, ne vit repliée sur elle-même. Où préférez-vous vivre ? Canada, Finlande ou Corée du Nord, Vénézuela ?

Les observateurs semblent avoir du mal à conclure que ce sont nos présentes institutions qui créent le personnel politique actuel. Soit dit en passant, n’en doutons pas un instant, ces institutions amèneront les cadres du FN, en l’espace de deux petites mandatures, à être des copier-coller de l’UMPS actuelle. La soupe est trop bonne.

La Constitution de la Vè République avait été taillée sur mesure pour Charles de Gaulle. Sauf que, celui-ci disparu, sa constitution présidentielle est restée en place. Un uniforme toujours trop grand pour ses successeurs. Un uniforme qui conduit la France, depuis plusieurs décennies, dans une lente glissade vers le bas. Pour beaucoup, la France a maintenant besoin d’un Napoléon ou d’un De Gaulle. Le recours à l’homme providentiel est la preuve ultime que nos institutions ne sont pas à la hauteur d’une démocratie moderne. « Il nous faut un De Gaulle… ». Quel constat d’échec ! Entendons-nous ce type de réactions dans les pays anglo-saxons ou du nord de l’Europe ?

Supprimons la Présidence, supprimons les communes, diminuons de moitié les représentants à toutes nos assemblées (de 800.000 indemnités de fonction « politiques », la France passera à 400.000… contre 30.000 en Grande Bretagne à ce jour), publions leur patrimoine en tant que couple, limitons le cumul dans le temps à deux mandats, interdisons le cumul simple, rendons contraignantes, sous peine de pénalité, les recommandations de la Cours des Comptes, introduisons la notion de Transparence dans le préambule de la Constitution, veillons à limiter les domaines d’intervention des différentes strates administratives à des compétences très précises, rendons pénalisable leur non-respect, rendons obligatoire la consultation des citoyens par voie de référendums locaux, régionaux, nationaux dès que des niveaux de budgets sont atteints, uniformisons les régimes (tous), payons les indemnités d’élus au temps de présence mais n’oublions pas la mise en place d’un statut de l’élu etc. Tout a été écrit sur AltPy.

Une fois cette longue liste (non-exhaustive) de réformes arrètées, il s’agit d’imaginer comment la mettre en place. Typiquement, cela devrait être le rôle de la prochaine présidentielle qui doit refonder la démocratie française.

Le programme des candidats à l’élection de 2017 sera primordial sur ce point. Qui osera s’atteler à ce chantier ? Qui de Sarkozy (qui a déjà annoncé vouloir revenir sur la loi sur le cumul !), Juppé, Fillon, Bayrou, Hollande ou Valls saura se jeter à l’eau et proposer un nouveau fonctionnement pour notre démocratie. Oser, encore oser, toujours oser !

A moins que cela ne soit Marine Le Pen qui, dans le rôle de l’homme providentiel, se contente simplement d’endosser l’uniforme du Général. Un vieux modèle datant des années trente…

Tout est ouvert et le pire probable. A nous citoyens, tout au long de 2016, de bousculer, sans ménagement et avec ténacité, nos « politicards » pour qu’ils se bougent. Tant qu’il n’est pas trop tard. Nous n’avons qu’une petite année devant nous. Comment s’y prendre ?

– par Bernard Boutin