Un récent article évoquait la valeur du sourire, geste émotionnel, relationnel, parfois commercial. Contrairement au contenu de l’article, il ne représente pas un coût mais un enrichissement, une valeur inestimable d’un point de vue affectif, social, sociétal, financier même, dans son rôle d’attraction du client éventuel.
Pour justifier le raisonnement, il vantait les mérites du numérique, ne montrant que la partie visible de l’iceberg, bien plus réduite (10%) que la partie cachée (90%). En se retournant (c’est fréquent) l’efficacité destructrice peut être redoutable.
Le sourire est une richesse, l’absence, une pathologie ruineuse et destructrice d’une société.
Si encore il avait évoqué les effets largement positifs comme l’aventure spatiale et médicale, le contrôle des pollutions, la modélisation des risques environnementaux majeurs, la mise en place des SIG, des capteurs affinant l’épuration des eaux, la surveillance et la sécurité des milieux : biologiques et culturels, la modélisation climatique, les écoquartiers,…
Mais non,
«C’est le numérique qui permet cette augmentation de productivité, cette diminution des coûts» est-il affirmé.
En ce qui concerne la productivité, la commission européenne libérale ne s’y trompe pas, elle fait du développement des TIC un des axes majeurs de sa stratégie «Europe 2020». Selon elle, ce secteur contribuerait à un quart de la croissance de l’Union européenne et à 40% de la hausse de la productivité pour seulement… 4% d’emplois. L’idéal en somme !
Cette augmentation de productivité représente la face émergée de cet iceberg : froide, inhospitalière, sans considération ni respect pour les mortels que nous sommes, progressivement invivable, forcément limitée dans le temps et l’espace du fait du réchauffement climatique. Quelques prédateurs comme les ours, s’y trouvent encore, pas pour longtemps !
C’est un désastre social et sociétal.
Quant à la diminution des coûts, c’est la face cachée, immergée ; le bilan affirmé est complètement faux, tellement partiel qu’il devient de la fausse information ; il ne tient compte que d’une toute petite partie, nécessaire pour soutenir le raisonnement.
La réalité est tout autre ; c’est un gouffre financier, énergétique, un énorme pollueur terrestre et atmosphérique(GES), un générateur de guerres et de morts.
J’ai déjà eu l’occasion, à plusieurs reprises, d’évoquer ce sujet dans :
Les T.I.C. : une médaille d’or qui a son revers !
Le numérique : Miracle ou Mirage ?
Cherchons où se trouve la baisse des coûts.
+Numérique : le grand gâchis énergétique | CNRS Le journal.
Si l’on considère la totalité de son cycle de vie, le simple envoi d’un mail d’1 mégaoctet (1Mo) équivaut à l’utilisation d’une ampoule de 60 watts pendant 25 minutes, soit l’équivalent de 20 grammes de CO2 émis», rappelle Françoise Berthoud, informaticienne au Gricad (CNRS/Université Grenoble-Alpes/).
+Planetoscope – Statistiques : Emails envoyés dans le monde
https://www.planetoscope.com/Internet-/1024-emails-envoyes-dans-le-monde.html
Or, «en 2015, 204 milliards de mails ont été envoyés dans le monde (hors-spam) chaque jour, contre 183 milliards en 2013, soit environ 2 361 000 emails reçus et expédiés par seconde. En 2015, il y avait 4,3 milliards de comptes e-mail ouverts dans le monde.» Cela fait combien de CO2 émis ?
+Les spams ou pourriels ont, en 2009, une empreinte carbone annuelle équivalente à celle de trois millions de voitures sur la route chaque année.
+Toujours CNRS Le journal :
35 « applis » tournent en moyenne sur un smartphone, qu’elles soient utilisées ou pas. Résultat, les batteries se vident en moins d’une journée. En 2013, 21 millions de personnes en France possédaient un smartphone.
«Le secteur des nouvelles technologies représente à lui seul entre 6 et 10% de la consommation mondiale d’électricité, selon les estimations – soit près de 4% de nos émissions de gaz à effet de serre, assène Françoise Berthoud. Et la tendance est franchement à la hausse, à raison de 5 à 7% d’augmentation tous les ans.»
+Internet : le plus gros pollueur de la planète ? | Fournisseur-Energie
«D’après un rapport du Conseil général des technologies de l’information, les TIC pèsent 13,5% dans la consommation électrique française.»
«En matière d’émissions de CO2, internet pollue 1,5 fois plus que le transport aérien. La moitié des gaz à effet de serre produits par internet provient de l’utilisateur, l’autre moitié étant divisée entre le réseau et les data centers.»
+Planetoscope – Statistiques : Energie consommée par les data centers
https://www.planetoscope.com/…/230-energie-consommee-par-les-data-centers.html
«La consommation des data centers à la base du réseau internet ne cesse de croître, au point de représenter 4 % de la consommation énergétique mondiale en 2015. La climatisation et les systèmes de refroidissement représentent de 40 à 50 % de la consommation énergétique des data Centers. En 2013, les data centers ont consommé 56 milliards de kWh en Europe.»
Data Centers : la taxe sur l’électricité consommée réduite de moitié
https://www.lebigdata.fr › Cloud computing
Cerise sur le gâteau: les Data Centers installés en France payeront désormais moins d’impôts. Le gouvernement vient de réduire la taxe TICFE sur l’électricité consommée par les centres de données de 22,5€ par MW/h à seulement 12€.
Il faut bien favoriser la transition écologique !!!!!
+Pour relier les ordinateurs, plus d’un million de km de câbles ont été posés au fond des océans, soit 25 fois le tour de la terre. Ces transferts de données par fibres optiques, qui permettent de faire transiter 40 millions d’échanges dans un fil épais comme un cheveu, nécessitent des investissements et entretiens importants et coûteux. Des bateaux appelés câbliers partent régulièrement de Calais à travers le monde pour aller poser, sur le fond des océans, ces tuyaux : Inox, cuivre, polyéthylène, plastique…qui participent à l’élaboration de ces fibres optiques qui, elles, sont réelles, ainsi que les GES produits !
+Près de 5 milliards d’habitants possèdent des téléphones portables qui peuvent contenir 12 matériaux différents. La fabrication d’un ordinateur nécessite 1500 litres d’eau, 240 kg de combustible fossile et 22 kgs de matériaux différents (fair-computer.ch) dont : cuivre, aluminium, plomb, or, zinc, nickel, étain, argent, fer , platine, palladium, mercure, cobalt. La course à la miniaturisation oblige à utiliser de plus en plus de matériaux, en particulier les fameuses «terres rares».
Naturellement, cette affaire ne nous concerne pas car on ne produit pas. La plupart des appareils utilisés par les TIC sont fabriqués en Asie où les contraintes humaines et environnementales sont peu considérées ; ils sont, par contre, utilisés en Europe !
Polluants et destructeurs ? ce n’est pas notre fait mais la faute des autres! Facile !
+Selon l’Ademe, 16 à 20 kgs de DEEE (déchets d’équipements électriques et électroniques)sont rejetés par les Français. Que faire de toutes ces déjections de la société connectée ? Le fardeau est double : par la masse croissante de déchets générés par les «progrès !» de la révolution numérique et par la toxicité des matériaux qui la composent. Outre les impacts directs sur l’environnement comme les excavations de grandes quantités de terre engendrant le défrichage de sols, l’élimination de la végétation et la destruction des terres fertiles, cette course aux matières premières a des conséquences humaines et sanitaires désastreuses. Pour la République démocratique du Congo, la richesse en cuivre, coltan, zinc ou diamant provoque des désordres politiques et économiques allant jusqu’aux conflits armés. On estime a plus de 3,5 millions le nombre de personnes tuées dans les guerres pour le contrôle des ressources. Le coltan utilisé dans les téléphones portables est acheté aux rebelles et à des compagnies minières hors la loi par des sociétés internationales, qui transforment le minerai en une poudre qu’elles vendent à Nokia, Motorolla, Sony, Siemens…(L’échappée 2008).
+L’Asie et Afrique recyclent des métaux précieux en démantelant des appareils, qui finiront dans des décharges sauvages. En bout de chaîne, les chiffonniers accomplissent un pénible et dangereux travail où les enfants et les femmes sont exposés sans protection aux vapeurs toxiques des métaux lourds et des dioxines émises par le brûlage des déchets. Fermons les yeux, il n’y a rien à voir, quelle honte !
En ajoutant tout cela et ce qui n’a pas été dit, vraiment le numérique, pour la transition écologique et le moindre coût affirmé, c’est une réussite !
Signé Georges Vallet
crédits photos : Citation Sourire, Lumiere & Donne (Abbé Pierre – Phrase n°64516 …citation-celebre.leparisien.fr