Il y a parfois des positions des élus qui méritent qu’on leur fasse une grande publicité tellement elles constituent un progrès pour l’information du citoyen. C’est le cas des déclarations d’Alain Rousset, Président de la Région Aquitaine et Président de l’Association des Régions de France jeudi 13 novembre à la commission des lois du Sénat. (Sud Ouest du 14/11)
« Oui, nous avons confondu en France l’emploi public et le service public. Oui, nous avons dégradé le service public parce que nous avons privilégié l’emploi public, que ce soit au niveau national ou au niveau territorial. Reconnaissons cela à notre débit. Il n’y a pas de contestation possible là-dessus, tous les recrutements qui ont été faits en redondance avec les communes plutôt que de la mutualisation… »,
On peut bien sûr s’étonner de cette illumination tardive… D’autant que les rapports de la Cour des Comptes, à commencer par celui de 2005 « L’intercommunalité en France », expliquent tout cela en détail, et que Rousset ( « Sciences Po » Paris et haut fonctionnaire) trempe dans le mille feuille depuis toujours…
Pour ma part je dénonce cette gabegie depuis plus de dix ans, comme dans « Drôle de gestion à Montardon » (AP du 17/12/2012) :
« Par ailleurs, vous n’êtes pas sans savoir les difficultés structurelles françaises qui font qu’aujourd’hui notre Etat et tout ce qui y est rattaché, est en faillite. La France vit au dessus de ses moyens, et la gabegie règne dans notre mille feuille territorial, à commencer par nos communes. L’intercommunalité française est un fiasco financier total car les Maires n’ont pas su dépasser leurs intérêts en protégeant à toute force leur pouvoir personnel au détriment du collectif. Alors que les effectifs des fonctionnaires territoriaux auraient dû diminuer ces dix dernières années par suite de ces mutualisations et des gains de productivité, ils ont augmenté de 40% ! Pendant que l’Etat central dans cette période supprimait 165 000 fonctionnaires, les collectivités territoriales créaient 500 000 postes de fonctionnaires ! »
Histoire de ne pas perdre de vue la réalité, il faut rajouter que malgré la situation calamiteuse actuelle de la France, la dépense publique n’a toujours pas diminué et ne diminuera pas en 2014 alors qu’elle est située à 6 points de PIB (120 milliards d’euro) de plus que la moyenne européenne et 10 points de PIB (200 milliards d’euro) de plus que l’Allemagne !
Alain Rousset poursuit:
« en France, on a acheté l’intercommunalité. Nous sommes dans un pays gaulois où chacun veut garder tout et le reste (…) Plus l’intercommunalité était riche, plus on a payé cher par habitant. Comme l’intercommunalité a été payée, achetée, les intercommunalités ont recruté massivement ».
Ceci mérite une petite explication. Alors que la réorganisation territoriale avec suppression des petites communes s’est faite en Europe dans les années 1970, nos Maires, arc-boutés sur leurs territoires, sur leurs petits pouvoirs personnels, ont refusé (et continuent de refuser) toute modification. L’Etat, dans son grand courage a donc initié un regroupement partiel (intercommunalités / agglomérations) sur la base du seul volontariat (aboutissant ainsi a des aberrations comme celle de l’agglomération Pau Pyrénées) . Le message était : mutualisez vos compétences, vous ferez des économies d’échelle et donc des économies tout court. Rien de plus logique, et tous les européens ont compris cela, sauf les Maires français.
Pour encourager cette mutualisation, l’Etat dans sa grande stupidité a accordé des subventions (au prorata de la population) d’autant plus importantes que l’intercommunalité mettait des compétences en commun, alors que le gain devait venir de l’économie d’échelle et qu’il aurait fallu au contraire, pénaliser par une taxe, les communes qui ne mettaient pas suffisamment de compétences en commun. Bilan, l’Etat a dépensé (et dépense) des fortunes. Les intercommunalités ont vu une manne leur arriver, elles ont embauché au lieu de mutualiser leur personnel, et c’est ainsi qu’on a plus de 500 000 fonctionnaires de trop dans l’ensemble intercommunalité / Communes. C’est le cas bien sûr à Pau.
Alain Rousset a encore estimé qu’en raison de l’organisation territoriale actuelle, « le coût de la décision publique est quatre à cinq fois plus élevé, le temps de la décision publique est plus long » que chez nos voisins.
Là aussi c’est connu depuis plus de 15 ans, plus on décentralise en empilant plus le coût de gestion s’élève. Un financement fait par l’Etat a le coût de gestion le plus faible. La perte en ligne augmente au fur et à mesure que l’on s’enfonce dans les crèmes du mille feuille… et bien sûr le temps.
« Qu’on fasse un peu le ménage, que les Français sachent, quand ils viennent voter, qui a fait quoi et qui est responsable de quoi »
Point fondamental que je dénonce depuis plus de dix ans : il n’y a pas de fonctionnement normal de la démocratie en France dans les échelons territoriaux car le citoyen ne peut comprendre qui fait quoi.
Comment peut-il porter un jugement sur l’action de ses élus ?
Mais nos politiciens professionnels se régalent de cette situation !
« Le bond de la fonction publique territoriale, c’est les interco. Et les redondances entre les syndicats, il faut que vous mettiez de l’ordre là-dedans, c’est le bazar et le bazar coûte cher« .
Il existe des sources très importantes d’économies suite à cet empilage de redondances, j’aurai l’occasion de le démontrer dans un prochain article en prenant pour exemple le Conseil Général des Pyrénées Atlantiques, dont le Président cumulard se promène actuellement en Australie au frais du contribuable…
Car on pourrait rajouter qu’aujourd’hui on peut supprimer l’échelon départemental (Les Conseils Généraux) du jour au lendemain, sans qu’aucun citoyen ne s’en rende compte. C’est d’une simplicité affligeante, contrairement à ce que hurlent les meutes de Conseillers Généraux rentiers, mais inéluctablement, bientôt retraités.
par Daniel Sango