Je n’étais pas en montagne en ce dimanche matin. La sortie prévue était annulée. J’avais à faire, mais j’ai pensé qu’une petite diversion valait la peine : je me suis rendu à la mosquée.
Un cercle d’amis de la mosquée avait lancé une invitation à la population pour une visite accompagnée de dialogues, de thé et de gâteaux. Je pensais que la période était propice pour de telles rencontres. J’avais d’ailleurs échangé par courriel des pensées et des articles avec une Algérienne vivant en Algérie mais ayant fait de longs séjours à Pau et une Iranienne de mon laboratoire à Paris.
J’étais loin d’être le seul à avoir répondu à cet appel. C’était réconfortant de constater que mes concitoyens (ou du moins quelques dizaines ou centaines d’entre eux) avaient compris combien il était crucial de serrer cette main tendue (au sens propre ou au sens figuré). Bien des musulmans de France craignent qu’un fossé se creuse entre eux et le reste de la population. Ils en feraient les frais. Ils en font déjà les frais si l’on en croit l’étude de l’INED (Institut National d’Etudes Démographiques) et de l’Insee intitulée « Trajectoires et origines » menée sur 22.000 personnes en 2008 et 2009 et qui a été rendue publique le 8 janvier (*). On peut craindre que la situation n’ait fait que se dégrader depuis cette enquête (inédite car la publication de statistiques en ce domaine était jusqu’ici prohibée).
Il était bon d’entendre ce que des musulmans ouverts et intelligents ont à dire sur leur foi et leur religion. Pour eux, le conflit entre chiites et sunnites ne relève pas du religieux, mais du politique. Certes, mais on peut aussi penser que ce conflit de succession qui remonte à 661 a bien trop duré et que si le conflit est d’ordre politique, on y a mêlé aussi du religieux et de la tradition.
Le dialogue est courtois et attentif. Mais je ne peux m’empêcher de m’indigner de la barbarie de la « loi » islamique (couper la main des voleurs, lapider les pécheresses…) et du sort réservé aux femmes dans le monde musulman. Il me paraît trop facile de dire que si les femmes portent le voile, c’est qu’elles le veulent bien. C’est faire bon marché du poids de la pression sociale et de la tradition. Tenir en sujétion la moitié de l’humanité ne peut être sain. Nous tombons d’accord sur le fait que la situation dépend des pays. Et implicitement sur le fait qu’elle n’est pas figée.
Il n’est pas indifférent de laisser un peu de place à l’écoute et au dialogue en ces temps de deuil et de désespérance.
Jean-Paul Penot
(*) Le Monde, du samedi 9 janvier 2016, pages 8 et 9.