Pas de train sans contrôleur

Un p’tit train s’en va dans la campagne
Un p’tit train s’en va de bon matin
On le voit filer vers la montagne
Tchi tchi fou tchi tchi fou
Pleins d’entrain… 

André Claveau.

Des trains sans contrôleurs c’est ce qui nous attend, sur les lignes dites secondaires ; celles qui concernent quotidiennement une grande partie d’entre nous. Cette décision imminente de la SNCF (on parle du mois de mars) est critiquée par le personnel, elle l’est aussi par de nombreux voyageurs et c’est assez naturel. Le monde change certes, et la machine est censée remplacer le contact avec l’être humain, c’est l’ère numérique qui, annoncée comme un facteur de progrès est en réalité, pour beaucoup –et notamment les plus âgés qui prennent en priorité les transports collectifs- , un casse-tête supplémentaire.

Ainsi, vous l’ignorez peut-être, mais il y a une station, un arrêt plutôt, à la Croix du Prince pour la rame qui va de Pau Gare jusqu’à Bedous désormais. On ne dira jamais assez l’intérêt de cette ligne qui réduit la circulation sur une route dangereuse et déjà très embouteillée. Elle sert cette proximité qui est réclamée par de nombreux de nos concitoyens et participe au désenclavement du monde rural. Une rame confortable, ponctuelle qui semble considérablement fréquentée entre Pau et Oloron en tout cas.

Donc si vous montez dans le train à la Croix du Prince vous ne pouvez pas acheter votre billet sur place car il n’y a pas de distributeurs. Si vous avez acheté une carte de réduction senior, vous ne trouverez pas cette réduction sur page horaire de la SNCF pour prendre le billet à l’avance –elle existe paraît-il mais personne ne la trouve ni n’est capable de la montrer pas même le personnel SNCF. Ainsi si vous arrivez au dernier moment sans billet vous serez obligé d’aller voir le contrôleur, comme vous en avez le droit pour quelques jours encore. Ainsi vous vous signalez auprès de lui et celui-ci vous  fait un billet au prix normal, dans le train. Tout se passe bien ; dans la courtoisie. Les contrôleurs sont assez vigilants pour éviter les infractions. Donc vous descendez à Buzy, par exemple. Au retour, après avoir passé la journée avec votre copain agriculteur, il n’y a pas non plus de moyens d’acheter de billets à cette halte bien commode comme il n’y en a aucun distributeur sur la ligne entre Pau et Bedous sauf à la gare d’Oloron. Rebelote : vous vous signalez dans le train et le contrôleur vous fait un « titre de transport ». Pas de problème donc.

Eh bien, prendre son billet dans le train, ce misérable confort, ne sera plus possible à partir du mois de mars prochain. En montant dans le train sans billet vous vous exposerez à une amende sérieuse. Ainsi le prix du trajet entre Pau et Bedous passera pour vous de 11 à 19 euros. Vous serez présumés coupable d’une grave infraction (voleur en quelque sorte) et, avant même de vous déclarer au contrôleur s’il y en a un par hasard, vous serez considéré comme délinquant, coupable. Pas moyen d’échapper à cette sanction puisque les machines seront paramétrées à cet effet. Si vous persistez à monter sans billet, vous vous exposez à un contrôle à l’arrivée ; ces contrôles seront multipliés dit-on.

Entre Pau et Bedous, dans le train, la vie est un long fleuve tranquille : les paysages sont magnifiques et les voyageurs sympas. Mais ça n’est pas toujours le cas dans les TER. Les témoignages indiquent que sur la ligne Pessac-Arcachon où on expérimente l’absence de contrôleurs, les incivilités se multiplient et les voyageurs les plus fidèles et notamment les plus âgés sont régulièrement ennuyés. On signale par ailleurs que le 23 janvier dernier un accident de voiture a eu lieu entre Bayonne et Hendaye, le 16 janvier une tentative d’agression s’est déroulée entre Pau et Oloron, le 14 décembre 2018 des menaces de mort ont été proférées entre Dax et Ondres et le 10 décembre 2018 entre Dax et Biarritz un conducteur de train a fait un malaise. Tout cela désormais sera signalé par les voyageurs eux-mêmes sur une plateforme téléphonique ou par SMS. A cette invitation de la direction de la SNCF on se demande quelle sera la réponse et les moyens mis en œuvre pour intervenir s’il n’y a plus de contrôleurs et si le conducteur a un malaise : c’est le film catastrophe. Y’a-t-il un pilote dans le train ?

« Pas de train sans contrôleurs » cela devrait être le mot d’ordre des voyageurs pour leur confort comme pour leur sécurité.  Pour ce qui concerne les TER on peut encore écrire au Conseil Régional Nouvelle Aquitain, 14 rue François de Sourdis, 33077 Bordeaux  ou écrire aux élus responsables renaud.lagrave@nouvelle-aquitaine.fr ou alain.rousset@nouvelle-aquitaine.fr ou encore signer la pétition Internet Change.org PasDeTrainSansControleur.

Pierre Vidal

 

Photo Rue89 Bordeaux

 

A Oloron ça tourne pas rond !

Sur le blog « OLORONBLOG » (https://oloron.blog) Joël ADAM qui en est l’unique rédacteur et le principal animateur a soulevé un lièvre de taille. Il a en effet dénoncé de façon argumentée le comportement du maire de la cité qui s’octroie de nombreux avantages. La justice est-elle concernée ?

Ce blog, il faut le dire, est une publication de qualité, bien présentée, bien rédigée dont les sujets, pour le plus grand nombre politiques, sont traités par quelqu’un de grande expérience dans le domaine. Il a fait savoir que le maire de la ville s’octroyait généreusement des défraiements injustifiés sur le budget de la ville. Nul ne s’aventurerait dans une telle dénonciation sans avoir dans sa besace tous les éléments de nature à prouver ses affirmations. C’est une évidence.

Le comportement du maire d’Oloron-Sainte-Marie est pour le moins répréhensible. D’ailleurs l’opposition du conseil municipal a alerté la Chambre régionale des comptes afin de faire la lumière sur ces agissements. Cependant les faits rapportés par le blogueur d’Oloron sont du niveau de l’infraction pénale au point de pouvoir justifier que le parquet de Pau se saisisse. En effet, les dispositions de l’article 432-12 du code pénal correspondent à une qualification possible. Il s’agit d’une prise illégale d’intérêt susceptible d’entraîner, si la culpabilité est reconnue, une peine de 75000€ d’amende et 5 ans d’emprisonnement. Ce n’est pas rien. Rappelons avec insistance que le principe de la présomption d’innocence s’applique en la circonstance.

La chambre régionale des comptes n’est pas une instance pénale, son rôle est d’analyser les comptes et d’en relever les anomalies. Elle n’a pas ce pouvoir régalien d’organiser des poursuites et la répression, celui-ci est de la compétence du parquet et de lui seul. Le procureur a la possibilité de s’auto-saisir et de confier l’enquête à un service de son choix. Il lui appartient par ailleurs d’apprécier l’opportunité des poursuites. A ce jour, aucune information n’a filtré pour dire que c’était le cas.

Ce qui est important ici est de souligner le rôle déterminant d’une structure comme le blog d’Oloron. Si son rédacteur n’avait pas soulevé ce lièvre, qui l’aurait fait ? Personne sans doute. L’opposition municipale a pris le train en marche. Pourtant dans une démocratie qui fonctionne selon ses principes affichés, les élus sont là pour exercer un contrôle. Il n’a pas eu lieu.

Ainsi à un moment où on évoque le statut de lanceur d’alerte, il faut rappeler l’indispensable fonction de ceux qui osent dénoncer ces sortes d’abus. Les élus de tous les niveaux doivent savoir que la moralisation de la vie politique n’est pas une simple formule électoraliste.

Pau, le 24 mai 2017
Joël Braud

Crédit photo : tripadvisor.fr

La nouvelle Oloron-Lescar

BA CaptureLa nouvelle route Oloron -Lescar est vitale pour l’avenir du Haut-Béarn, le projet doit aller d’urgence à son terme sur la bande des 300m actuelle, selon Béarn Adour Pyrénées (BAP)

Le comportement de certains opposants à ce projet est pour le moins inconséquent, au pire destructeur. Qui sont les responsables de 95% du gel des terrains sur la bande de 300m entre Oloron et Lescar sinon ceux qui ont empêché sa réalisation depuis des années. Si la route était faite, seuls les 5% nécessaires auraient été occupés et le reste serait libéré depuis longtemps pour le plus grand bonheur des agriculteurs, des promeneurs, des ramasseurs de champignon et de tous. Peut-être ceux qui menacent d’attaquer le Conseil Départemental tentent-ils de faire oublier leur outrecuidance. À moins qu’ils n’aient des projets de lotissement sur tout ou partie de l’emprise foncière actuellement gelée. Ce qui serait le comble du mépris au bon sens. Qui subit les conséquences de l’ absence de nouvelle route: les habitants de Cardesse, Monein, Lasseube, Lacommande,…. qui voient leur patrimoine dévalué, leurs routes surchargées, détériorées, effondrées, coupées parfois pendant des mois, les salariés et entreprises d’Oloron qui sont pénalisés par l’enclavement, les lecteurs qui sont désinformés alors que tout le monde sait que la réalisation indispensable de cette route peut coûter moins de 200 millions d’euro d’ argent privé, avec un impact écologique très positif. Bref, Béarn Adour Pyrénées exhorte le Conseil Départemental, qui a toujours été favorable à cette nouvelle liaison, à tout faire pour que la bande des 300m soit maintenue sur tout le trajet prévu à l’origine et pour que le projet soit réalisé sans délai. Il y va de l’avenir économique du Haut Béarn et de la sécurité des riverains et des usagers des routes actuelles.

Pierre Saubot,
Président de Béarn Adour Pyrénées

Égalité

imagesC’est un des trois principes figurant sur les frontispices des bâtiments de notre République. La devise a de l’envergure, mais se nourrir de mots est forcément plus facile que d’en respecter les concepts. Le mot égalité est, aux yeux de beaucoup, le plus difficile à respecter ou à faire respecter pourtant il est sans doute le plus essentiel. Pour autant il n’a pas la signification facile que certains lui accordent. Mais égalité de qui ? Egalité en quoi ?

 Nous ne sommes pas tous égaux, Coluche le disait dans un de ses sketchs, mais par rapport à l’ancien régime ce terme marquait une évolution. Egalité de tous devant la loi et devant l’impôt. La nuit du 4 août 1789 a proclamé l’abolition des privilèges. A partir de cette date La Fontaine ne pourra plus dire « Selon que vous serez puissants ou misérables les jugements de cour vous rendront blanc ou noir » (Les animaux malades de la peste). La loi s’appliquera à tous avec la même rigueur, selon les mêmes principes.

 Parmi les décrets de ce 4 août 1789 figurait le principe absolu de l’égalité de tous devant l’impôt. Mais pourquoi ce principe a-t-il été de nos jours autant oublié ? Il n’est pour s’en convaincre que de comparer la pression fiscale locale. J’ai eu l’occasion ces jours-ci de comparer la taxe d’habitation récoltée à Pau avec celle pratiquée à Oloron. Par chance la comparaison porte sur deux cas parfaitement identiques. Les maisons d’habitation récemment estimées sont de même valeur. Les revenus sont légèrement plus élevés chez le contribuable oloronais.

 Force est de constater que la taxe d’habitation payée par le Palois est trois fois plus élevée que celle payée par l’Oloronais. Oui vous avez bien lu, trois fois !

 Alors comment expliquer cette flagrante inégalité des citoyens devant l’impôt ? La réponse facile est de dire : «  oui mais vous à Pau, vous avez un Zénith, un Palais des Sports, un Stade d’eaux vives, un stade nautique, un Jaï Alaï, un palais  Beaumont, une médiathèque ». Comme si ces lieux étaient interdits aux habitants des autres communes du Béarn.

 L’autre réponse est de dire : «  Mais vous avez voté pour des candidats qui se sont engagés sur des dépenses excessives ». Et là c’est plutôt vrai. André Labarrère avait coutume de dire que l’on n’est pas élu sur des économies d’impôts mais au contraire sur des projets de dépenses. C’est un peu le défaut du système dans lequel les élus locaux disposent d’une latitude exagérée pour gérer les collectivités. Ils sont plus soucieux de laisser leur nom à la postérité par le moyen de réalisations dispendieuses, que de réellement servir l’intérêt général.

 Les projets actuels de François Bayrou vont dans le même sens. Le stade de rugby, les Halles,  les alentours du stade d’eaux vives et plus tard le parc des expositions doivent être agrandis, aménagés, rénovés voire déplacés. Ce n’est pas tout de construire il faut ensuite entretenir et toutes ces installations ne sont pas budgétairement autonomes.

 La solution de facilité pour les responsables politiques a toujours été de ponctionner davantage les contribuables. Certains y verront, avec raison, une dérive de la décentralisation où ces pouvoirs trop larges reconnus aux élus locaux ont entraînés ces inégalités. Un pouvoir central qui fixerait des règles communes au niveau national ne serait pas après tout inconcevable. Il limiterait, dans des proportions significatives, les pouvoirs des baronnets locaux. Ceux-ci d’ailleurs, comme tous les politiques de notre pays, sont incapables de baisser les impôts. F. Bayrou s’était engagé à baisser les impôts locaux de 1% (SIC). En réalité il n’a baissé que le taux de la taxe d’habitation de 1%, ce qui n’est pas la même chose *.

 Alors, devons-nous nous résigner ? En attendant évoquons le cynisme d’Henri QUEUILLE :

« Toute réforme fiscale consiste à supprimer des impôts sur des choses qui étaient taxées depuis longtemps pour les remplacer par de nouveaux plus lourds sur des choses qui ne l’étaient pas. »

 

Pau, le 24 février 2015

Par Joël BRAUD

 *Pour ce qui concerne mon cas personnel, la taxe d’habitation a baissé de deux euros.

Pierre Bourdieu, le bal des célibataires ou l’inconscient du Béarn.

 BourdieuEn cette veille Toussaint de l’année 2000 monsieur PYC a su vaincre sa timidité.

Il a appelé son presque voisin le très prestigieux Pierre Bourdieu qui , une fois encore, est revenu au pays. Comme il l’a déjà fait sans arriver à finaliser, il l’a appelé dans sa maison familiale dans ce très beau bourg béarnais de Lasseube à moins de 20 kilomètres d’Oloron .

Comme PYC a quelques entrées dans l’administration locale il est passé par le maire du village, un ami d’enfance de Pierre, pour connaître son numéro de téléphone et plaider sa cause.

En effet le grand intellectuel béarnais, mondialement reconnu comme un phare des sciences sociales, est réputé pour son caractère rugueux comme on dit au rugby et n’accepte pas d’être importuné plus particulièrement dans ces terres béarnaises et natales où il se réfugie si souvent. Et dont il a fait une somme sociologique particulièrement pénétrante qui reprend beaucoup de ses travaux sur le célibat en Béarn sous le titre évocateur du « bal des célibataires » paru au seuil au mois de mars de la présente année du siècle nouveau.

Et frapper directement à sa porte eût été inconcevable.

Cette année encore une fois, à Lasseube et dans le piémont béarnais, en cette fin d’octobre somptueuse les températures dépassent les 30 degrés. Soit les plus chaudes du pays. Cela a valu à Lasseube un reportage dans le journal de TF1 de 13 heures de Jean-pierre Pernaut. On y a vu les musiciens et les danseurs du village évoluer sur la place. Avec les Pyrénées illuminées de soleil qui se découplent en arrière-plan.

Que ce soit également le village de Pierre Bourdieu, on ne sait pourquoi, a semblé échapper à la sagacité des reporters de la chaîne de la maison Bouygues..

En fait la rencontre avec Pierre Bourdieu a eu lieu dans l’arrière salle d’un des deniers bistrots du village chez Massaly. Une guinguette qui a pour particularité de faire, aussi, boucherie charcuterie et, comme tous les bistrots campagnards, d’être un point focal de la localité. Presque au même titre que l’église ou la mairie.

Un haut lieu de sociabilité et d’échanges réels et symbolique, ouvert, autrefois au moins, aux plus fortunés et aux seuls habitants du bourg .Une sociabilité complexe encore que très ordonnée à laquelle il est beaucoup fait référence dans l’ouvrage de Pierre. En fait sa moelle substantifique au travers de l’image à la fois si banale et si émouvante du bal. Du bal campagnard dans les circonstances de l’espèce Même si son propos fait beaucoup références aux années d’après guerre celles de son enfance et de sa toute première jeunesse où il était, parmi d’autres, un enfant de ce village reculé.

Un temps de jeunesse (Pierre est né en 1930) en fait à compter des années cinquante et des trente glorieuses où les règles excessivement anciennes et ces jeux subtils ont commencé de se diluer voire à se déliter. Même si, sans l’exprimer, à ce que nous avons cru comprendre il suggère fortement qu’elles continuent à surdéterminer une certaine manière béarnaise et singulière d’être au monde. Une manière également partagée, mais seulement pour partie, dans le sur-monde pyrénéen d’une part, du sur-monde occitan d’autre part.

Dans ce contexte Bourdieu est, néanmoins, ce qu’il n’aime pas qu’on lui rappelle , une sorte de bourgeois, fils du receveur des postes, et un rien étranger puisque lui est né à Denguin dans la plaine alluviale de Pau. Un autre pays que cette incise un peu perdue et néanmoins très prospère (vignes, élevage, maïs) qui joint par un chemin détourné Pau à Oloron au cœur du vignoble béarnais.

En fait la voie la plus directe ; mais que contourne et isole largement la RN 134. Une vallée et un gros bourg exemplaire du Béarn rural et piémontais tout à la fois très cossu voire florissant au moins dans son centre bourg mais très ramassé sur une certaine sociologie. Une sociologie que d’aucuns pourraient qualifier, sans doute pas de manière infondée, d’archaïque en tout cas de très originale. Même si à travers de cet archaïsme c’est toute l’histoire si singulière du Béarn à laquelle il est fait référence… au moins depuis le commencement des temps modernes. Autant que de sociologie c’est d’ethnographie voire d’anthropologie historique dont il est ici question. Toutes ces disciplines complexes avec leur vocabulaire souvent abscons dans lesquelles notre petit Béarnais périphérique nage avec une volupté non dissimulée… à la limite du pédantisme jargonneux.

Alors Pyc c’est vous.

En fait les gens te connaissent un peu ici. Quand tu passes seul en vélo en dehors des troupeaux de cyclistes palois en tenues bariolées qui font le tour depuis Gan et reviennent par Laroin. On m’a même dit qu’un moment tu voulais acheter une maison… une des plus belles et des plus anciennes du village sous évaluée à cause de l’isolement du pays.

Comment savez-vous cela ?

Tu habites depuis presque 40 ans en Béarn donc tu connais les Béarnais timides, « biaiseux » discrets et très curieux..

Permettez de m’étonner qu’un phare de la pensée mondiale en sociologie et en ethnographie historique se laisse aller à de tels stéréotypes un rien rebattus. Vous dont le métier ultime, si j’ai bien tout compris, est de déterminer la construction des dits stéréotypes pour, le cas échéant, les déconstruire notamment par une approche politique. Dans tous les cas de les stigmatiser après les avoir méticuleusement analysés en tant que violence symbolique. Que ce soit en Kabylie ou au fond du Béarn ou auprès de la supposée intelligentsia parisienne… A l’école des hautes études en sciences sociales ou au collège de France.

Pierre Yves, analyser les stéréotypes ce n’est pas les déconstruire : c’est montrer non pas comment on les a construits mais comment ils se sont construits. Même si je suis engagé à gauche c’est ce qui me différencie des marxistes si importants dans la scène intellectuelle et à la génération à laquelle j’appartiens.

Et puis tu vois, ici on n’est pas à Paris. Pas même à Pau ou à Oloron. Encore qu’ici, à équidistance des deux villes, on est plus tourné vers la sous-préfecture haut-béarnaise que vers la capitale provinciale dans laquelle j’ai fait mes études secondaires. Dans laquelle j’ai fait le lycée comme disent les jeunes. Une ville très agreste très pénétrée par la monde et par l’imaginaire agricole. Même si, par ailleurs, elle comporte et a comporté de grandes fortunes industrielles développées dans les textiles. Et même si l’émigration espagnole, et maintenant portugaise, en a profondément modifié les équilibres. Encore que la très grande force, l’inertie de la sociologie béarnaise les a complètement amalgamés. Qu’on s’appelle Fanlo, Galarzaa, Soares ou Suarez, Dieste, Bordenave, Laclau, Lacrampe, Uthurry ou Lucbéreilh ne change pas grand chose à l’affaire ni mêmes aux bulletins glissés dans les urnes.

Pour en revenir à Oloron, et si incroyable que cela paraisse aujourd’hui, tu veux dire la ville où seuls les plus fortunés des habitants de Lasseube avaient le privilège de se rendre au marché pour y commercer et y faire « le monsieur ». s’emmoussouriser si je me rappelle bien l’expression francisée par mimétisme au Béarnais. Et où certains, notamment les célibataires des hameaux les plus reculés, ne sont jamais allés tout au long de leur existence. Bloqués voire protégés dans leurs campagnes perdues d’où, très rarement, ils s’accordaient le simple privilège de rendre au bourg. Oloron et même le bourg ce n’était pas leur monde.

Eh oui Même pour les bals qui auraient pu leur permettre comme ailleurs, comme partout de trouver âmes sœurs ils restaient dans leurs petits quartiers parsemés de bistrots aujourd’hui disparus sans même se rendre au bourg principal et où des musiciens itinérants permettaient d’exécuter quelques pas de danses un peu plus élaborés. Et puis le mariage c’est une affaire sérieuse qui engage la famille beaucoup plus que les individus

Alors Oloron…

A la limite il était plus facile ce qui faisait d’ailleurs beaucoup de partir définitivement pour les Amériques et fonder une famille avec une « payse » amenée d’ici ou rencontrée là bas. Éventuellement une Basquaise dure à la tâche…  Surtout j’ai bien noté que de 1836 à 1954 le bourg n’a jamais dépassé 25 % de la population du village. Une situation très différente de celle d’aujourd’hui.

C’est cela .Tu as à peu près compris. Tu as même su décortiquer mes statistiques faites à l’époque tout à la main.

De toute manière les mariages ou plutôt les unions de lignages étaient surdéterminées par des stratégies matrimoniales d’une immense complexité. Les bals servaient juste de lieu d’amusements et non pas comme ailleurs d’éclosion pour les futures gynécées. Les filles plus dégourdies trouvaient toujours le biais de danser entre elles ou d’inviter, par charité plus que par moquerie, pour une seule danse, un célibataire qui exagérait sa maladresse et dont tout le monde savait qu’il était immariable. Immariable car cadet évidemment. Ou trop pauvre ou trop riche pour convenir à une héritière… dont la lignée, la maison, la valeur ultime, aurait risqué de déchoir voire, à l’inverse, d’avoir à rembourser la dot si l’union venait à se défaire.

Ou alors pas assez pauvre pour s’abstraire de la classe paysanne souvent propriétaire en Béarn et s’amalgamer au prolétariat voire au petit peuple urbain. Et si j’ai bien compris la condition de domestique qui était aussi celle des cadets ne permettait pas de se marier.

Il semble que tu aies bien lu mes propos.

Des propos complexes surreprésentés en chiffres et en graphique dont tu nous fais bien comprendre qu’il s’agit de science dure. Avec des appendices et des index dont il est difficile de se dépêtrer et de voir à quels propos ils font référence.

Un peu comme si tu voulais bien nous persuader de la distance avec ton sujet. Même si, au détour de beaucoup de phrases, on ne manque pas de ressentir et de te surprendre dans une empathie presque douloureuse mais toujours bienveillante avec le sujet que tu traites.

Peut-être je ne sais pas. Si tu le dis…

C’est aussi sans doute car les enquêtes très serrées, précises et circonstanciées, qui ont étayé mes propos ont été conduites avec l’aide très précieuse de mon père qui m’a évidemment beaucoup aidé à dépasser cette retenue et cette timidité qui chez nous, plus qu’ailleurs, empêche la parole de se libérer.

Sans doute aussi parce que, comme tu le notes avec précision, les hommes interrogés sont des sujets âgés avec une conversation conduite beaucoup en Béarnais.

A ce propos il est difficile de ne pas remarquer que les célibataires dont tu parles sont tous des hommes. Mais comme les gendarmes si je compte bien les célibataires évoluent par couple. De fait par couples non constitués.

Oui je comprends ce que tu veux dire. Mais c’est peut-être qu’à mes yeux et à celles de mon père, le célibat des femmes m’est apparu, pour des raisons que j’ignore, moins scandaleux moins anormal… ou que nous entrions plus spontanément en résonance avec celui des hommes.

Avec toutes ces tantes ou toutes ces marraines qu’on trouvait autrefois dans les maisons et qui faisaient partie de meubles et qu’on imaginait très difficilement mariées.

Ou alors parce qu’à l’époque de ta jeunesse dans les premières années 60 comme tu le dis d’ailleurs explicitement le système se délitait rapidement. Avec des emplois pour les femmes dans les bureaux ou les ateliers ou la possibilité d’épouser un facteur ou un agent EDF. Et que les hommes moins débrouillards moins perdants dans le système ancien avaient beaucoup plus de difficulté à se sortir du dit système.

En fait si je vous suis bien tout le particularisme béarnais, sa douceur et sa violence ; peut s’analyser au travers du système complexe de la dot dont tu expliques le calcul très précis à partir de la valeur de la propriété. Avec un système néanmoins pour sous doter les cadets. Et naturellement une possibilité pour les femmes d’être héritière de la propriété pour autant qu’il n’existe aucun mâle puîné. Pas de lois salique en l’espèce une loi opportune inventée par la monarchie française.

Je te vois venir ; rien d’extraordinaire à cela c’est le système de la noblesse française d’ancien régime voire par exemple aujourd’hui celle dans beaucoup d’états de l’Inde.

  • sauf qu’il s’agit d’une société dont les terres qui ne peuvent beaucoup s’agrandir car les pasteurs de la montagne ont des droits imprescriptibles sur les terres agricoles. L’histoire béarnaise se lit, aussi, beaucoup dans ses oppositions montagne et plat pays.
  • sauf qu’il s’agit d’une société plutôt friche avec un faible dénivelé social.
  • sauf que le prestige attaché à une famille à un lignage peut ne pas exactement s’analyser en termes de richesse ou de revenu. D’autant que dans les siècles antérieurs très peu de monnaies circulaient.
  • sauf que le chef de famille avait toujours la faculté de déshériter l’aîné pas assez docile ou pas assez capable… voire de choisir en tordant le droit son favori le cas échéant en ne retenant pas outre mesure dehors les cadets qui ne restaient pas à la maison comme domestique.
  • sauf que le système dérogeait au droit ambiant même après la révolution par la survie d’un droit purement autonome.
  • même si un par système de contrat devant notaire très bien organisé et très officiel tout cela était parfaitement légalisé… le Béarn est un pays particulier mais très légaliste qui sans trop forcer fait entrer son droit original dans le droit républicain.

Monsieur PYC qui tout savez et semblez avoir une opinion sur tout je vais demander, de retour à Paris pour vous, une chaire au collège de France.

Mon cher Pierre je crois remarquer là comme un soupçon d’ironie.

Pour la chaire je suggère néanmoins l’inconscient du Béarn de Francis Jammes à Pierre Bourdieu.

Sauf Pierre-Yves que là tu touches une corde sensible. Si j’ai bien voulu te rencontrer c’est que j’avais lu le joli sujet de 1 924 d’un tien homonyme sur Francis Jammes  ou l’inconscient du Béarn (1) : A mon époque, dans les petites écoles comme au lycée, les poésies du poète orthézien étaient autant étudiées et apprises par cœur que celle de Jean de la Fontaine.

Et moi je reste très pénétré de ce lyrisme rural doux aux humbles et aux animaux. D’où affleure une très puissante sensualité qui beaucoup emporte.

Je ne vous voyais pas du tout ainsi .Il est vrai que vous êtes tout deux issus de la bourgeoisiale béarnaise et rurale. Pour être franc je pensais que Jammes pour toi avait quelque chose de ringard.

Et non pas du tout. Moi je suis un fils du peuple, mon père s’est élevé grâce à l’élitisme républicain. Jammes fait partie d’une tout autre tradition celle des Béarnais voyageurs frottés de mangues de littérature et de cannelle et qui ont fait fortune outre-mer.

Celle des Supervielle des Lautréamont ou de Saint-John-perse …

C’est tout à fait cela….

Est-ce à dire que vous pensez, au fonds, que le lyrisme et la poésie ne sont pas moins utiles à décrire un pays et les hommes qui l’habitent que les moyens de la sociologie et des sciences humaines ?

Si tu le dis…

 PYC, Oloron le 23/11/2014

Francis Jammes  ou l’inconscient du Béarn.

jAMMESFrancis Jammes  ou l’inconscient du Béarn (1) :

Francis Jammes n’est pas un habitant du Béarn mais un habitant des Basses-Pyrénées.

Un gascon (avec toute l’ambiguïté attachée à ce terme) sans doute, aussi, qui vécut  dans son adolescence à Bordeaux. Un habitant des Pyrénées occidentales, des pays de l’Adour dira-t-on plus tard puisqu’il est né à Tournay dans le département des hautes-Pyrénées, sans que sa composante proprement béarnaise ne soit, par lui, mise en avant. 

 Pour cela, monsieur PYC, n’écoutant que son courage et en violentant sa timidité se déplace depuis Oloron jusqu’à Orthez ; d’une sous-préfecture béarnaise à une autre. Ceci par le chemin de fer qui trace sa route au milieu des seringas  et des acacias qui blanchissent de leurs lourdes hampes florales  les talus  comme une seconde couche neigeuse.  Cette grosse machine fumante et salissante l’effraie quelque peu. En premiers jours du printemps béarnais de 1924 avec un carnet de notes spécialement préparé il s’en est allé voir le grand poète reconnu désormais dans la France entière et bien au delà. Un poète illustre  qui fréquente Claudel, Gide, Alexis Léger dit Saint-John-Perse, Jules Supervielle… entre autres. Comme un aimable oncle rustique et délicat, mais un peu gauche, retiré dans ses marches pyrénéennes.

PYC : Bonjour,  monsieur Jammes qui êtes-vous ?

FJ :  Feu monsieur mon père, mon si sérieux et cher papa, était conservateur des hypothèques dans ce joli département bordé de roses de montagnes et de rêves que je n’ai jamais quitté. Sauf, quelque temps, pour séjourner à Bordeaux où mon pauvre père, qui avait parfois la nuque un peu raide, avait été nommé  après une disponibilité un peu forcée.

PYC : Une nuque raidie  par ses attaches protestantes ?

FJ : On peut le penser…

Je suis né à Tournay dans les hautes-Pyrénées voisines d’où, enfant, je visitais ma  grand-mère  à PAU via les chemin de fer de la compagnie du midi depuis la ligne sublime qui court depuis Toulouse entre gaves sauvages et hautes montagnes si longtemps enneigées.

J’ai fréquenté les petites écoles et les pensions de village notamment à Saint-Palais. Je suis allé au prestigieux  lycée de Pau et à celui de Bordeaux où, piètre élève, sauf en littérature et en botanique j’ai beaucoup souffert de l’enfermement qui ne convenait pas à ma fantaisie naturelle.

Même le bachot n’a pas voulu de moi.

Encore que mon pauvre père m’aurait bien vu polytechnicien. A la rigueur sous-préfet ou apothicaire (dernière fonction qui ne m’aurait pas déplu).

PYC ; Jammes ? Un rat des villes un rat des champs ?

FJ : Fondamentalement je suis un garçon de la campagne principalement des eaux et des bois, un peu à  la mode de Jean de la Fontaine qui fut maître des eaux et forêts dans ce grand nord français qui commence une fois passée l’Adour. Ma sensibilité s’est forgée dans les petites cités et les villages alentours où mon père a été nommé et où réside ma famille.

PYC : Quelles villes, quels bourgs ?

FJ : Assat, Saint-Palais, Orthez et Hasparren.

PYC : Et vos autres occupations en dehors de la poésie ?

FJ : La chasse presque comme une obsession ; singulièrement celle, si subtile, de la bécasse.

La botanique aux travers des herbiers dans lesquels, depuis les collines de Magret et de Sainte-Suzanne, j’épaissis de lourds herbiers comme Jean-Jaques Rousseau en son temps. Par dessus tout les fleurs les plus humbles comme les véroniques (veronica  officialis), les iris des marais ou les papavéracées :  rouges dans la plaine jaunes dans nos Pyrénées si élevées.

Et, bien sûr, toujours les rosacées depuis l’aubépine jusqu’à celles cultivées dans les vastes propriétés tenues par les aristocrates irlandais ou  anglais qui hivernent sur les coteaux de Pau.

Par dessus tout, les pivoines tellement féminines et odorantes sublimes et douces comme  les gorges de nos jeunes filles  qui émergent obstinément  de mes souvenirs.

PYC : les jeunes filles ou les  pivoines ?

FJ : je vous laisse juge.

 PYC : Je choisirai en vous citant :

Tu me mèneras sur ce petit chemin.
Tu ne seras pas nue, mais, ô ma rose,
Ton col chaste fleurira dans ton corsage mauve.
Nous ne nous baiserons même pas au front.
Mais, la main dans la main, le long des fraîches ronces
Où la grise araignée file des arcs-en-ciel,
Nous ferons un silence aussi doux que du miel ;

FJ : Si vous voulez.

 PYC : A ce propos peut-on qualifier votre poésie de géorgique ou de dionysiaque comme on l’entend dans les cercles cultivés à Bordeaux et à Paris ?

 FJ : Pourquoi pas. Encore que la foi catholique, celle des femmes de ma famille,  illumine ma vie et mes écrits. Mais une religion que l’on pourrait qualifier de franciscaine : ouverte  aux pauvres et aux animaux comme ultimes valeurs. Aux chapelles des campagnes plus qu’aux immensités écrasantes des cathédrales.

PYC : Et la place des animaux dans votre sensibilité et dans votre poésie ?

FJ : Dans le prolongement de mon amour pour la botanique, un grand intérêt pour les insectes qui vivent en symbiose avec les plantes surtout les coléoptères bleus de feu ou couverts d’azur .

Tous les insectes pollinisateurs qui, pour moi sont l’image même de la création et des puissances divines : la semence des dieux, celle  des mythes chrétiens ou helléniques… franciscains et orphiques

Un grand intérêt pour la faune fourmillante des eaux comme les si aimables reinettes à la verdeur absolue et les anguilles que, enfant,  je pêchais à la nasse dans les eaux de Saint-Palais. Ces anguilles, revenues des Amériques, que cachoucha (caxuxa?) notre servante basquaise, qui ne parlait pas un mot de chrétien, cuisinait de piments d’Espelette. Voire de quelques piments rouges dont certains vous explosent les papilles et peuvent vous laisser  au bord de la pâmoison.

 PYC : Une attention particulière à nos animaux paysans comme les ânes et les abeilles ?

 J’aime l’âne si doux
Marchant le long des houx.
Il prend garde aux abeilles
Et bouge ses oreilles ;

FJ : Exactement monsieur PYC, je vois que vous avez révisé avant de me visiter. Ou que vous appartenez encore à cette génération en train de disparaître  à la mémoire  constellée de vers.

PYC : Si je comprends bien monsieur Jammes vous êtes un vrai Béarnais ?

PJ : Non, je suis un habitant de ce singulier département des Basses-Pyrénées aussi Basques que Béarnaises aussi parpaillotes que catholiques dont beaucoup de familles, dont la mienne, émargent aux deux ethnies, aux deux religions. Même si ma véritable patrie est celle des poètes et se glisse au fond des eaux et dans l’odeur, à jamais insurpassable, des foins coupés.

PYC : Un Pays, aussi, d’esprits forts, de bouffeurs de curés, et de francs-maçons

FJ : Oui  je dois en convenir ; d’ailleurs dans les milieux de l’administration où travaillait mon père on trouvait, beaucoup ce mouvement de pensée… Mais je dirais que la modération est la vraie substance de l’inconscient béarnais que pour ma part j’attribuerais au substrat protestant et à la douceur de vivre. Sauf peut-être dans les vallées sauvages au dessus de votre pays Oloronais. Orthez, à cet égard, est très représentatif de cet état de choses.

PYC : Vous êtes, monsieur Jammes,  au moins, un vrai Gascon ?

FJ : Sans doute mais une sorte de Gascon dionysiaque et parfois un peu  mélancolique, mais un Gascon plein de retenue infiniment éloigné des provençaux, voire même des Languedociens,  auxquels nous amalgament sottement  nos compatriotes venus du nord.

PYC : Comme beaucoup de Pyrénéens vous avez de très  fortes attaches ultramarines.

FJ : Tout à fait : je suis un Gascon de sang créole. Mon père venait des Antilles qui, comme les Amériques plus spécialement latines, font partie de l’horizon  de la population des Basses-Pyrénées.

PYC : Comme vos collègues poètes Jules Supervielle, le grand poète né à Montevideo, enterré à Oloron et monsieur Saint- John-Perse.

FJ : Vous voulez dire comme mes amis très proches qui me visitent souvent même si leur inspiration est plus voyageuse et plus éthérée, moins bucolique certainement.

PYC : A ce propos monsieur Jammes, je résiste difficilement à citer à nos lecteurs  ce texte datant de 1894 où transparaît cette sensualité ultramarine qui coule dans vos veines :

8 juillet 1894,

Dimanche, Sainte Virginie

LE CALENDRIER.
C’est aujourd’hui la fête de Virginie…
Tu étais nue sous ta robe de mousseline.
Tu mangeais de gros fruits au goût de Mozambique,
Et la mer salée couvrait les crabes creux et gris.
Ta chair était pareille à celle des cocos.
Les marchands te portaient des pagnes couleur d’air
Et des mouchoirs de tête à carreaux jaune-clair.
Labourdonnais signait des papiers d’amiraux.

FJ : Évidemment monsieur PYC vous qui me semblez avoir quelques lettres vous avez reconnu une allusion transparente  à Bernardin de Saint-Pierre.

Par ailleurs,  cher monsieur, qui avez travaillé à la commune d’Orthez dans les années 80 du dernier siècle et qui venez d’un autre Béarn que le mien celui du piémont et de la haute montagne ne pourriez-vous pas citer quelques vers de votre cru ? Je me suis laissé dire que vous taquinez non seulement le goujon mais aussi la muse..

PYC : Oui mais alors doucement…

 Alors passer le pont , passer les ponts , se noyer dans le gave….se gaver de noyades juste pour trouver des jupons auxquels se raccrocher .
Il doit rester des lavandières et des pêcheurs d’azur.

 FJ : Lautréamont, Supervielle ; Léon-Paul Fargues un autre style que le mien… Une veine pyrénéenne venue de Montevideo plus aqueuse et moins solaire… mais pas du tout exempte de sensualité…

 PYC : Si vous le dîtes !

 Propos recueillis en cette veille pascale le 19 avril 1924 à Orthez pour la Gazette Alternative des Basses Pyrénées.

 par Pierre-Yves Couderc

 (1) Une nouvelle enquête inédite  du  professeur PYC président à vie  de l’académie des belles lettres du Haut-Béarn et de la Soule méridionale.

Piolle/Dubedout, un axe Béarn Grenoble.

photoîolleUn des faits marquant de ces municipales c’est, bien sûr, la débâcle de la gauche et la montée du Front national.

Une déroute dans les villes populaires voire ex-communistes comme Béziers, Tarbes ou Nîmes. A l’exception très notable des villes dites BOBO : Paris, Strasbourg, Nantes, Avignon, La Rochelle, Rennes, Montpellier, Oloron (aux dernières nouvelles David Pujadas me souffle que je me serais trompé de 8 voies). Plutôt descendance deuxième gauche ou chrétien de gauche. Une ville comme Bayonne qui rentre dans ce profil aurait pu basculer pour quelques voies. Le cas échéant en se pacsant avec les Abertzales.

On peut même noter qu’à la Rochelle (ville des parpaillots anti-Ségolène), à Orthez (ville des parpaillots et de pradette) et à Montpellier la bataille s’est faite entre deux listes de gauche voire de centre gauche.

Le point le plus étonnant est évidemment Grenoble passée, largement, aux écologistes.
Bien sûr on regarde sur Wikipédia qui est ce monsieur Piolle et on trouve :

1) ingénieur
2) 4 loupiots
3) 40 ans
4) ascendance catholique
5) montagnard et sportif
6) et surtout Béarnais (Oloronais ??)
7) propre sur lui, sportif, et décontracté

Un nouveau Dubedout, ingénieur oloronais, de sensibilité rocardienne, qui prit la ville en 1965 et qui l’a profondément marquée.

A l’évidence on pense à Pau qui a un profil très similaire à Grenoble (en beaucoup plus beau, plus relax et plus proche d’Oloron). A la place on a Josy Poueyto et l’archange de Bordères.
Pour être honnête François Bayrou n’est pas forcément très loin de cette famille. Au moins par ses franges MODEM.

Mais ;
1) on le voit venir avec ses gros sabots pour monter avec Juppé un commando pour 2017
2) la liste qu’il a montée ne soulève pas l’enthousiasme (mais il faut voir à l’usage)
3) l’âge du capitaine n’est sûrement pas un atout.

Allô les Cognacq-Jay, allô radio Oloron, on me dit que madame Eurydice partirait pour les Alpes iséroises, un pays de rugby montagnard dominé par les crêtes, plein d’écolos modernistes.

Non en fait elle se préparerait pour les municipales de 2020 à Oloron.

– Par PYC
Oloron, 06/04/2014.

Recensement – Pau, Lourdes, Tarbes plus en difficultés que les autres grandes villes du Bassin de l’Adour

nouveau_logo_insee_0Indiscutablement la côte semble avoir plus la « cote » que les Pyrénées. Entre les deux derniers recensements (2006 et 2011), les département des Landes a vu sa population augmenter de 7% pendant que les départements des Hautes-Pyrénées ne progresse que de 1% et les Pyrénées-Atlantiques de 3%.

Parmi les villes dont la population est supérieure à 10.000 habitants, au niveau des Landes : Mont-de-Marsan progresse de 5% et sa voisine St Pierre-du-Mont passe de 8171 à 9081 habitants soit plus 11,1%. Une forte croissance. Dax baisse un peu : – 2% mais voit son importante voisine, Saint-Paul-les-Dax grimper de 6%. Tarnos : +5%, Capbreton +7% (8087, contre 7565 en 2006) et Soorts-Hossegor + 5% (3758 contre 3586 en 2006) confirment la « bonne » tendance générale du département des Landes. (A noter qu’un tableau joint au bas du sujet reprend le détail de tous les chiffres)

Dans la Côte Basque, la surprise vient de la très côtière et frontalière Hendaye qui gagne 14% de population et près de 2.000 habitants en 5 ans. Probablement, l’implantation de nombreux Espagnols explique cette forte hausse. Un effet que ne retrouvent ni Anglet (plus 2%), Bayonne (population stable) et encore moins St Jean-de-Luz (-5%), ni Biarritz (-3%). Les villes les plus touristiques de la Côte Basque sont-elles devenues trop chères ?

Les villes béarnaises progressent modestement (environ 5% pour Lons, Orthez et Lescar) ou se maintiennent (Billère, Oloron). Seule Pau décroche avec une perte de plus de 4.000 habitant soit -5%. Plus forte baisse en volume dans le Bassin de l’Adour.

Pour autant, le décrochage en pourcentage est plus accentué encore à Tarbes – 6% et Lourdes -7% (-2545 et -983 habitants respectivement). Les villes bigourdanes sont à la peine. Ces deux communes subissent fortement la concurrence des périphéries puisque, malgré elles, le département lui-même progresse légèrement : plus 1%.

Dans le Gers qui progresse de 4%, la ville d’Auch, seule ville de plus de 10.000 habitants dans le département, voit sa population augmenter légèrement : + 2% à 21.871 habitants.

Au total, les 4 départements traversés par l’Adour voient leur population passer de 1.408.787 habitants à 1.462.658 habitants soit plus 3,8 % et 53.871 résidents de plus en 5 ans. A noter toutefois que le département des Landes croît plus vite en volume que celui des Pyrénées-Atlantiques sur la période : plus 25.102 habitants contre 19.759. Les Hautes-Pyrénées font moins bien que la tendance générale avec une faible augmentation de 2.092 habitants.

Pour finir, 53.871 résidents de plus en 5 ans, dans les 4 départements traversés par l’Adour, signifie combien de milliers de voitures en plus qui circulent sur les routes ? Combien de logements supplémentaires à construire ? Quel pourcentage de terre agricole amputé ?

L’augmentation de population d’un territoire est-elle une fin en soi ?

– par Bernard Boutin

PS : Il est dommage que l’INSEE de donne pas ses chiffres par bassins de vie pour une analyse plus fine.  Elle doit pouvoir être faite, si vous en avez le courage (je ne l’ai pas) et un bon tableau EXCEL : la source : http://www.insee.fr.

Tous les chiffres sont repris dans le tableau ci-dessous (cliquer dessus pour agrandir) :

Capture d’écran 2014-01-03 à 07.56.37

DEPECHE AFP (Agence France Pau) : Le Petit Prince de passage à Oloron

Capture d’écran 2013-06-05 à 11.48.41Le soleil dans le ciel descend lentement sur la terre, des enfants jouent à cache-cache dans le vieux cimetière de Sainte-Croix aux grilles rouillées surplombant Oloron-Sainte-Marie. Jean Palou est là, juge du tribunal civil, lui qui fut « l’ami des pauvres » dit son élogieuse épitaphe. Sainte-Croix, c’est la plus vieille église du Béarn (11ème s.), une des plus belles aussi.

J’ai assisté à une lecture théâtralisée du Petit Prince de Saint-Exupéry à la médiathèque des Gaves, le plus beau conte poétique et philosophique de la terre. Le livre le plus vendu après la Bible, 170 millions d’exemplaires en 70 ans. « Voici mon secret. Il est très simple : on ne voit bien qu’avec le cœur. L’essentiel est invisible pour les yeux. » dit le renard au petit prince joué par Pauline qui lit si bien son texte. Et Jacques Duval joue un merveilleux renard, malicieux.

Tous les lecteurs sont merveilleux. « S’il vous plait… dessine moi une belle médiathèque à la Confluence, avec deux gaves coulant à ses pieds, ceux d’Aspe et d’Ossau ! » Tiens, la voici, je te l’ai dessinée, elle aura l’Equerre d’argent en 2010, un grand prix national d’architecture en France.

Les enfants courent dans la nuit, se cachent derrière les tombes. Je regarde le coucher de soleil au loin, une boule rouge, sur nos belles montagnes, les collines, les toits d’ardoise, et pense au petit prince sur sa planète.

Tu seras unique au monde, rose, et je suis l’enfant qui t’apprivoise doucement.

Je regarde l’immense vierge dans le prè en partant de la promenade Bellevue, descends vers la vieille ville par les petites rues. J’arrive à la rue Palassou puis à la Confluence, je repars. Tous les enfants m’ont dit bonjour.

Le ciel est sombre, les rues étoilées de lumières. Je suis heureux. Oui Antoine il faut chercher avec le cœur.

– par Jean-François Le Goff

5 juin 2013 9 : 18 : 02

Balade à Oloron via le chemin de fer

Dans le cadre des petites chroniques oloronaises le chapitre 1 : Allons prendre le train pour visiter la médiathèque.

Le but du voyage c’est d’abord le voyage. Un voyage, via la ligne Pau Oloron rénovée qui n’est qu’un tronçon de la Pau Canfranc, elle même continuation de la Ligne Paris Dax Bayonne exploitée, en son temps par les chemins de fer du midi. Un voyage dans le temps et le piémont mais surtout,espérons le, un voyage dans le futur .Sinon un retour vers le futur.

Ce ne sera pas le voyage de monsieur Perrichon. Encore qu’il s’agisse d’un voyage à finalité littéraire sur une des plus formidables lignes inaugurée en 1928 par Doumergue et Barthou et le roi d’Espagne soi-même. La pièce d’Eugène Labiche (le voyage de monsieur Perrichon) et les prémices de la ligne sont contemporains soit l’opulent et très entreprenant second empire qui reste comme un climax insurpassable du capitalisme français. Dans ce contexte, le sud-ouest sans doute sous l’influence de l’impératrice Eugénie, de son petit nom Maria Eugenia Palafox Portocarrero y Kirkpatrick de Closbourn, ci-devante princesse espagnole et épouse de Napoléon III, y fut particulièrement favorisé. Sans doute, également, sous l’influence des frères Pereire, banquiers d’origine séfarade, nés à Bordeaux, et qui ont, entre autres, créé, de toute pièce, la station d’Arcachon et sa ville d’hiver et investi, beaucoup, dans le ferroviaire.

Mais revenons à nos moutons qui, très heureusement, parsèment la ligne de leur épaisse toison avec les vaches, les chevaux, et les jolies fermes béarnaises enchâssées dans les collines. Avec, en second plan, en ce début de printemps triomphant la haute montagne toute poudrée de neige.

De temps en temps des viaducs et des tunnels joliment maçonnés d’où on s’attendrait presque à voir sortir les volutes noires des anciennes locomotives (encore que la ligne ait été pionnière en matière d’électrification) . Et pour rappeler que les béarnais ont beaucoup voyagé dans le nouveau monde dans les cours des fermes les toupets de palmier souvent un peu maigrelets comme des plumeaux insolites émergeant des collines .

On doit noter que cette ligne est la jumelle du petit train jaune du pays catalan qui monte depuis Villefranche de Gonflent jusqu’en Cerdagne. Les deux lignes, toutes deux portées par des politiques pyrénéens qui avaient de la vision, du cœur au ventre et..certainement de relations bien placées. Sans parler du génie des ingénieurs saint-simoniens et des sacrifices des ouvriers, auteurs oubliés de ces travaux, pharaoniques encore que graciles et délicats, qui aux deux bouts de la chaîne franchissent la grande muraille mur pyrénéenne .

Après 35 minutes arrivée à la gare d’Oloron : Comme souvent le plus vilain quartier de la ville. Puis départ à pied vers le centre ville via la rue Sadi Carnot, le jardin public et le pont sainte-claire, d’où on a le meilleur point de vue, à droite, sur les très beaux immeubles qui dominent le gave d’Aspe à et, à gauche, et sur la confluence.
.
Et là au milieu de la confluence, sur des friches industrielles, cet étonnant objet architectural au milieu du gave relié aux berges par deux passerelles de bois qui, de très haut, dominent le gave.
Quelque chose comme un île de la cité à la mode pyrénéenne.

Un ouvrage totalement zen, conçu pour s’enchâsser exactement dans son environnement, et surtout permettre au lecteur de lire dans un étonnant paysage nautique et montagnard. De très grands espaces qui forment une architecture plutôt fonctionaliste et très structurée. Une architecture qui a été récompensée par l’équerre d’argent, rien moins que le plus grand et le plus prestigieux prix d’architecture au niveau français… Les palois apprécieront…

Faute d’argent cet ouvrage ,qui faisait partie de programmes démesurés, reste un peu isolé sur un parvis en voie d’aménagement. Il est vrai qu’à hauteur de 7 000 000 € il a notablement participé à mettre en péril les finances de la communauté de communes d’Oloron autant par l’endettement nécessité que par le besoins en fonctionnement. Peut-être une nécessité de pour faire émerger un petit Beaubourg béarnais qui n’était qu’une partie du programme démesuré de l’ancien maire.
Un programme, généreusement sponsorisé par la SEPA, la société d’aménagement du conseil général, certainement plus qualifiée pour produire des aménagements que pour en vérifier la pertinence économique… Sur la droite du bâtiment un projet assez peu identifié, à vocation touristique, dont on peut imaginer qu’il participe, également, à un approfondissement du trou financier.

Voilà une première proposition pour découvrir une ville d’Oloron, très méconnue des palois, qui hésite entre des immeuble souvent très beaux, mais un rien décatis dans un environnement naturel tout à fait singulier et exceptionnel.

A la différence d’Orthez, un peu sa sœur jumelle, elle a, néanmoins, su conforter son passé industriel, qui a fait sa fortune, en confortant de très puissants atouts industriels autour des usines Lindt, d’une part, et Messier Safran d’autre part.

Des atouts industriels qui devraient aider la communauté de communes, par les taxes professionnelles générées, à amortir ces jolis objets…
On peut toujours y rêver en revenant à la gare via le pont Laclau d’où on a le plus beau point de vue sur la ville et le gave dominé de plusieurs centaines de mètres.

Le reste cela sera pour un autre jour…

– par Pierre Yves Couderc

Références utiles :
http://reseau-train-ho-de-paquito40.e-monsite.com/

http://cauhape.bernard.free.fr/Canfranc.htm