AU MELIES VENDREDI A 20 HEURES 15
Vendredi à 20 heures 15, le cinéma Le Mélies de Pau présentera le film de Pierre Vidal et Antoine Laura « Gurs, un silence assourdissant ». L’historien Claude Laharie participera à un débat à l’issue de la projection. C’est l’occasion de découvrir pour la plupart des spectateurs un moment de l’histoire du Béarn tragique et encore trop méconnu. Un moment qui ne laissera personne indifférent car même si l’histoire ne se répète pas il est d’une terrible actualité.
Le camp de Gurs a été construit entre Oloron et Navarrenx sur une lande abandonnée et inhospitalière en quelques semaines en 1939. Il pouvait accueillir 15 000 personnes. Ce fut durant plusieurs années la troisième ville des Basses-Pyrénées après Pau et Bayonne. Ses habitants étaient tous des internés. Dans un premier temps ce furent les espagnols républicains qui le peuplèrent. Défaits par l’armée franquiste en hiver trente-neuf, ils trouvèrent là un refuge indigne de leurs conditions de défenseurs de la liberté. Après tout, n’avaient-ils pas défendu l’état de droit contre un régime factieux appuyé par l’Italie fasciste et l’Allemagne nazie ? Ils surent pourtant malgré des conditions rudes s’organiser, lutter contre les mesquineries de l’administration et garder un moral qui permit à la plupart d’entre eux de survivre…
Quand ils quittèrent le camp, ils furent suivis par un contingent « d’indésirables », c’est ainsi qu’on les nommait : des juifs allemands pour la plupart, qui avaient fui la montée des nazis en 1933 et qui pensaient trouver un refuge en France. Parmi eux de nombreux intellectuels prestigieux comme la philosophe Anna Harendt. Le gouvernement Daladier n’avait rien trouvé de mieux que les parquer dans des conditions qui commençaient à devenir très dures en raison de la dégradation du camp. Ils furent ensuite rejoints par les victimes d’une rafle antisémite opérée par les nazis dans la région du Palatinat. Ce fut alors une hécatombe : plus de 1000 morts en quelques semaines, en raison du froid, de la faim, des conditions sanitaires très dures, avant le départ pour les camps de la mort dans des convois nocturnes. Les mères étaient alors séparées de leurs enfants, les personnes âgées chargées sans ménagement et chacun se doutait que la destination finale était la mort.
A la fin de guerre, il fallut oublier Gurs. Oublier que la gestion du camp avait été assurée par des français, oublier le marché noir qui profita à certain, oublier l’indifférence et surtout oublier les victimes puisque le cimetière lui-même resta longtemps à l’abandon. Oublier aussi la solidarité de quelques héros comme la jeune suissesse Elsbeth Kasser du Secours Protestant, « l’Ange de Gurs » qui âgée de 22 ans enfermée dans le camp elle apporta son soutien aux enfants. Pour oublier, on vendit à l’encan ce qu’il restait des baraques, on brûla les dernières planches et on planta une forêt qui masque encore les derniers vestiges de lieu de souffrance. Sur Gurs plana alors « un silence assourdissant »…
Lentement s’ouvre désormais le chemin du souvenir grâce aux travaux de Claude Laharie, grâce aussi aux actions de l’Amicale du Camp de Gurs pour ne pas oublier ce que fut le camp par ses proportions, sa violence, l’héroïsme de ceux qui ont survécu. Ainsi les souffrances subies par ceux qui sont passés à Gurs n’auront pas été vaines…
PV