Et si on parlait d’autre chose !

image-08-09-2016-at-12-30L’activité médiatique, allergisante, déclenche auprès «du bon peuple» un véritable choc anaphylactique ! Entre les primaires où tous veulent sauver la France et les experts qui disent tout et son contraire avec la même assurance, c’est la saturation ! A cela vient s’ajouter le burkini : la cerise sur le gâteau !

Si, en dehors de leur ego, les politiciens voulaient sauver les Français il devraient aborder les vrais problèmes et rompent le silence sur leur vision de ceux qui, de plus en plus, vont peser sur le P.I.B, la dette privée et publique, les inégalités, la sécurité lato sensu…; je veux parler de la politique environnementale : énergie, pollution, climat, santé….et les problèmes agricoles.

Par exemple, la disparition progressive des abeilles domestiques est devenue de notoriété publique ; elle est vécue comme une catastrophe, non seulement écologique mais économique. En fait, le problème est bien plus grave car les abeilles domestiques représentent 15 à 25% seulement dans ce travail de reproduction des plantes, le reste est assuré par d’autres pollinisateurs, dont des «abeilles» sauvages inconnues du grand public ; or, ces pollinisateurs sont aussi en voie de disparition.

Face à cette situation, une société agenaise, Osmia, propose de sélectionner des «abeilles» sauvages meilleures pollinisatrices que l’abeille domestique et de les élever.

Un article dans ce sens est paru dans Sud Ouest du 5 septembre 2016.

L’idée, et la réalisation qui a été faite, est de produire, par élevages préparés en chambres spéciales, des nichoirs installés ensuite dans les champs de culture à polliniser ; ces nichoirs contiennent des cocons avant leur éclosion ; ils sont introduits au moment opportun pour que les adultes sortent quand la pollinisation est nécessaire.

Précisons donc, pour ceux dont la gente hyménoptère n’est pas familière, que le mot «abeille»recouvre des milliers d’espèces(2000 en Europe, 1000 en France) ; les unes sont sociales, d’autres solitaires. Il y a les abeilles domestiques et les sauvages. Elles ne font pas toutes du miel mais toutes collectent pollen, nectar, miellat, propolis, pour se nourrir ainsi que leur progéniture. Toutes fréquentent donc les fleurs et participent à la pollinisation ; c’est une symbiose entre plantes à fleurs et insectes, le fruit d’une coévolution apparue il y a des millions d’années.

Deux groupes sont utilisables pour leurs qualités au service de l’agriculture des plantes à fleurs : vergers, maraîchers comme les tomates, concombre, piments, …, colza, tournesol…., luzerne…, ce sont les Osmies et les Mégachiles pour ceux qui veulent chercher des informations complémentaires sur Internet.

Ce sont des abeilles dîtes «maçonnes» car certaines aménagent des galeries préexistantes construites par certains insectes, d’autres creusent le sol, le bois, des tiges sèches de ronce ou de roseau, ou construisent leurs cellules à l’air libre. Elles utilisent des matériaux de construction de nature très variée : argile, petits cailloux, fragments de feuilles. Certaines construisent le nid dans des coquilles d’escargot vides.

Leur intérêt vient du fait :

Elles sont solitaires donc pas de ruches à entretenir et très peu agressives (femelles).
Elles sont plus velues que l’abeille domestique, elle récoltent donc plus de pollen.
Elles ont un rayon de prélèvement plus restreint ; les abeilles butinent jusqu’à plusieurs kilomètres, ces «abeilles» là entre 50 et 100 mètres, ce qui permet de cibler la pollinisation sur l’unique surface du verger ou du champs à polliniser.
Elles sortent à des températures jusqu’à 4 degrés inférieurs à ceux des abeilles domestiques ; elles travaillent donc plus tôt dans l’année.

L’intérêt économique est donc important :

Compensation du manque de pollinisateurs en général, donc augmentation des rendements.
Efficacité plus grande.
Travail plus étendu dans l’année.
Création d’emplois pour faire ces élevages.

L’intérêt est-il écologique ?

Le fait que leur espace d’intervention soit plus réduit que celui des abeilles va à l’encontre de l’étendue du brassage génétique donc de l ‘extension de la biodiversité.

>Une espèce lâchée en quantité dans la nature peut être une bonne chose dans l’immédiat et constituer un facteur de déséquilibre par la suite.

La rentabilité des récoltes est en baisse car les pollinisateurs disparaissent ; or,

la lutte contre les causes est aussi importante que la lutte contre les conséquences.

Parmi les causes on peut citer :

La disparition des plantes nourricières (herbicides, invasives, urbanisme…) dont la floraison est échelonnée dans l’année ; même si, dans certaines cultures, les intervalles restent souvent enherbés, la diversité et la quantité de plantes à fleurs, sauvages, ont beaucoup diminué.
La disparition des lieux possibles de nidification : arbres, haies, terrains vagues, jachères, prairies intermédiaires…, escargots !
L’utilisation d’insecticides néonicotinoïdes qui détruisent sans discrimination abeilles domestiques et autres pollinisateurs. Dernièrement, au cœur du mois d’août, l’Agence Nationale de Sécurité Sanitaire de l’Alimentation et de l’Environnement (ANSES) a lancé une consultation « publique » en vue d’autoriser deux insecticides « tueurs d’abeilles ». le Gaucho350 et le Gaucho Néo. En ce qui concerne les insecticides en général, le nombre de traitements est variable suivant les cultures mais toujours plusieurs fois dans l’année. Comme l’entreprise «Osmia»est à Agen on peut se faire une idée des traitements en consultant :
Canevas de traitements – Prunier 37 – Chambre d’Agriculture de Lot-et …

lot-et-garonne.chambagri.fr/…/traitements…traitements/prunier-canevas-guide-arbo-so…

En conséquence, les adultes libérés dans les espaces agricoles à polliniser seront tués comme les autres, soit avant leur intervention par la rémanence des insecticides soit, après leur mission accomplie, car à la floraison il n’y a pas de traitements prévus ; ils ne pourront pas se reproduire car si des nids ont été réalisés ils seront détruits par les herbicides ou pesticides répandus. Il faudra chaque année recommencer l’introduction !

Bon pour l’entreprise peut-être, aucun intérêt pour le développement durable des pollinisateurs.

Une telle opération n’est qu’un soin palliatif, un «bricolage» destiné à permettre la survie artificielle des rendements de l’agriculture industrielle car l’agro-écologie ou le bio, par la méthode de culture très diversifiée, a bien moins besoin de complément de pollinisateurs car elle les favorise, si la surface est assez grande et les cultures industrielles éloignées.

C’est incohérent, illogique, inconscient, autodestructeur de :

Favoriser la multiplication des parasites en pratiquant de la monoculture sur de très grandes surfaces: vergers, tomates, piments, aubergines, colza…
Favoriser la disparition des pollinisateurs par l’utilisation d’insecticides qui ne tuent pas que les parasites.
Faire des dépenses supplémentaires en élevant des pollinisateurs à vie éphémère.
Mettre en danger les ouvriers agricoles, les propriétaires sur le terrain et les voisins ! Le port du masque, sous les tunnels, est fortement conseillé et pas que là ! Les consommateurs aussi, qui ne pèlent pas fruits et légumes.
Réaliser une surproduction parfois invendable du fait de la concurrence ; le bas de gamme s’étale dans nos grandes surfaces : très médiocre qualité gustative, fruits durs comme de la pierre et légumes insipides, qui «pourrissent» parfois avant d’être mûrs, beau à l’extérieur, décomposés à l’intérieur (le piège).

Non seulement la rentabilité est en danger par manque de pollinisateurs mais, de plus en plus aussi, très largement, par manque de consommateurs !

Signé Georges Vallet

crédit photos : discoverlife.org