Prévarication, quand tu nous tiens !

imagesLes élections sont parfois l’occasion de nous enrichir en vocabulaire, à défaut de nous enrichir en autres choses que de promesses.

Ainsi, lors de son dernier débat avec les autres candidats de « la belle alliance » Arnaud Montebourg a employé un substantif qui m’a paru étrange. Mais cette transformation d’un adjectif ne devrait pas obérer le vote des électeurs dont la « bravitude » pour affronter les intempéries n’est plus à démontrer.

En revanche, il est dommage que le registre dans lequel se situe cet enrichissement ne soit pas plus enthousiasmant que celui des termes : abus de biens sociaux, concussion, dissimulation, exaction, forfaiture, malversation, prévarication. Car la France est loin d’occuper une place honorable dans les classements internationaux en termes de corruption. Certes, il y a pire ; mais ce n’est pas une raison pour ne pas tenter de regagner un peu d’estime internationale. Cela fait partie aussi de nos intérêts. Songeons par exemple aux roueries fiscales utilisées par de grandes firmes : elles pèsent lourdement sur les contribuables qui paient des impôts pour que le déficit public ne soit pas trop élevé. Aussi, militer pour une plus grande rigueur devrait être un impératif pour chacune et pour chacun.

Les Républicains américains ont accepté une procédure de destitution (empeachment). Le parti Les Républicains ferait bien de ne pas laisser son image se dégrader plus qu’elle ne l’est. Ce n’est pas le parti, mais ses électeurs qui ont renvoyé M. Sarkozy à ses affaires. Il serait bon que ce parti prenne en compte le risque qu’il court (*). Il suffit de constater les dégâts dont a souffert le parti socialiste avec les dénégations de M. Cahusac pour mesurer ce risque.

Mais cette question de moralisation de la vie publique ne se place pas qu’au niveau national. Elle se place aussi au niveau européen, là où les lobbies sont les plus actifs. Que ce soit pour contrer des mesures qui seraient favorables à l’environnement, à la consommation alimentaire ou à la santé publique.

Ainsi, la revue Prescrire dévoile jeudi sa liste de près d’une centaine de médicaments « plus dangereux qu’utiles » à éviter en raison des risques sanitaires « disproportionnés » qu’ils font courir aux patients. On peut noter que les instances européennes sont beaucoup plus laxistes que les instances françaises en matière de retrait du marché de certains médicaments (**).

Mais l’attention ne doit pas seulement se porter sur ce qui se passe en haut. Bien des sujets sont traités au plus proche des administrés. On peut considérer que ce principe de subsidiarité est un bien car un problème est d’autant mieux compris que l’on en a une expérience directe. Mais on peut aussi penser qu’il comporte des dangers. D’abord dus à d’éventuels manques de compétences, notre monde étant complexe et les législations ou réglementations copieuses. Il faut aussi admettre que des relations proches peuvent fausser des décisions ou donner lieu à des pressions ou des copinages peu soucieux du bien public. Ainsi, l’élu d’une petite commune aura du mal à résister à un de ses administrés qui veut bâtir un entrepôt ou un garage qui dénature un site. Et comment départager une zone constructible d’une zone non constructible lorsque des intérêts rapprochés sont en jeu. Pour de telles questions et les permis de construire, ne faudrait-il pas remonter d’un échelon la prise de décision ? C’est le sort des paysages français qui est en jeu. Ils ont déjà bien souffert et ils ne peuvent se défendre seuls.

Paul Itaulog

(*) Une pétition circule déjà et semble avoir pris un démarrage fulgurant :
Madame #Fillon, rendez-nous les 500.000 euros #PenelopeGatens votre participation à la pétition .

(**)http://www.medisite.fr/revue-du-web-une-centaine-de-medicaments-a-eviter-selon-la-revue-prescrire.1260648.41633.html#ca6brOLgUo3uJ6C1.99

 

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