Politique et morale.

Le désamour dont est victime François FILLON depuis les révélations relatives à la rémunération de son épouse en tant qu’attachée parlementaire exprime l’attachement populaire à la moralisation de la vie politique. Il est évident que les dénonciations dont il a fait l’objet ont été orchestrées par ceux qui avaient intérêt à lui ôter le bénéfice des sondages qui lui accordaient la victoire à l’élection présidentielle.

Mais il n’aura échappé à aucun esprit averti qu’il n’a fait l’objet d’aucune attaque de la part de parlementaires de gauche. C’est que dans ce marigot les crocodiles n’entendent pas s’en faire éjecter.

Le linge sale ne se lavant plus en famille, notre ministre de l’intérieur se voit contraint de démissionner tout simplement parce que désormais l’omerta s’effondre.

Parviendra-t-on à une réconciliation absolue entre morale et politique ? Rien n’est moins sûr ! Quel pays aurait accepté qu’un président de la république entretienne une maîtresse et une fille adultérine aux frais du contribuable, qu’un autre président soit poursuivi et condamné pour des emplois fictifs, tout comme son premier ministre ou d’autres élus pour établissements de fausses factures. Notre silence se fait complice de cette turpitude dont on n’entrevoit pas les limites.

Et ce n’est pas le spectacle que nous offrent nos élus qui va réconcilier les Français avec la politique. En effet que voyons nous, entre autres ?

D’abord la faillite des primaires. D’un côté, François FILLON invité par certains amis à se retirer de la compétition. De l’autre, Benoît HAMON abandonné par Manuel VALLS et de nombreux parlementaires de gauche ou écologistes au profit d’Emmanuel MACRON, le poisson pilote du président HOLLANDE, auquel se raccroche le maire de PAU qui ne craint pas de se retrouver avec ces derniers dans l’espoir évident de décrocher un portefeuille ministériel.

Et puis des aveux, oh certes discrets, pour ne pas mettre l’électorat en ébullition, tels ceux de Patrick STEFANINI, ancien directeur de campagne de François FILLON qui, en l’abandonnant en cours de route, confesse que ce dernier est victime d’un système consistant à accorder aux parlementaires des compléments de rémunération à travers l’indemnité pour l’embauche d’attachés parlementaires. Sans doute voulait-il évoquer surtout l’indemnité représentative des frais de mandat (IRFM) dont le dernier chiffre connu est de 5770 € mensuels. Allocation non imposable et utilisable sans justification. Mieux même, jusqu’en 2015, certains ont cru possible de s’en servir aux fins d’achat d’un bien immobilier censé abriter leur permanence. Et personne encore n’a dit ni que l’opération constitue un usage abusif de fonds publics, ni que ce bien doit être immédiatement remis à l’État.

Et la réserve parlementaire ? 130.000€ par an à la disposition de l’élu pour subventionner toute personne de son choix, procédé habile de clientélisme.

Et combien d’autres avantages ? Retraites, prêts à des taux préférentiels, carnet d’adresses…

Le pire est le système électoral porteur de toutes les combines. Avec un scrutin à deux tours et les désistements qui en découlent, l’élection est faussée. Ce n’est pas le gagnant du premier tour qui en sera vainqueur, mais celui qui aura su, au prix de contorsions multiples, à obtenir des soutiens compensés par ailleurs.

Reste l’hypocrisie de l’élection présidentielle. Comment, au pays de DESCARTES, a-t-on pu imaginer que le président élu aurait systématiquement une majorité parlementaire pour soutenir son projet ?

Quel raisonnement logique doit conduire à cette fatalité ? Sans compter qu’une majorité systématiquement pour et une opposition systématiquement contre rend illusoire le débat démocratique ! L’alternance, voilà le grand mot de ceux qui veulent accéder aux responsabilités. Et l’on revient de fait au bipartisme dans lequel la majorité n’a rien à concéder à l’opposition dont le rôle devient dérisoire. Ne nous étonnons pas de l’écœurement des électeurs qui ne s’exprime, hélas, que par leur silence : l’abstention. Gare, toutefois, à leur réveil. Des dirigeants roumains capitulant, une présidente sud-coréenne destituée et un gouvernement islandais contraint à la démission sont des signes encourageants pour l’avenir démocraties.

Pierre ESPOSITO
Ancien bâtonnier du barreau de PAU

Crédit photo : la croix.com

Le Primaire en premier !

dessin de Deligne pour sujet de Véronique Mars Le blues des instits (dessin de Deligne)
dessin de Deligne

  L’école fait débat, et ce n’est pas nouveau. Aujourd’hui la réforme du collège unique, qui ne sera pas la dernière, rassemble des protestations de tous bords. Cacophonie.

Le constat fondamental a pourtant l’air d’être partagé par tous : trop d’élèves sont laissés sur le bord du chemin sans aucune formation. On rajoutera que les résultats vont en se dégradant au fil des années malgré un investissement financier élevé.

Il est aussi un constat qui fait l’unanimité : à la sortie du primaire 20% des élèves environ ont un niveau insuffisant dans les matières de base, français et mathématiques. A partir de là il est totalement illusoire de croire qu’une réforme du collège apportera une quelconque solution. C’est un peu comme si dans un 10 000 mètres, à mi-course, alors que les coureurs sont étalés sur un tour de piste, on décrétait qu’il fallait que tous franchissent la ligne en même temps, et si possible dans un bon temps… Non, la seule possibilité sera de ralentir les premiers, et encore, ce serait plus facile pour une course que pour l’éducation.

Il est une évidence : toute amélioration des performances doit passer d’abord par une réforme efficace du primaire.

Il existe un second problème de fond dont on parle insuffisamment et qui doit être traité car il influence la performance de l’Education nationale tout au long des études : le goût de l’effort tend à s’amenuiser (en fait il s’agit plutôt de l’acceptation d’une contrainte, pas toujours agréable il faut le reconnaître). Avec pour postulat complémentaire que les capacités scolaires des enfants sont toutes différentes, et seul cet effort permet de les atténuer.

La période de l’enfant roi, une éducation où longtemps on a privilégié l’éveil par rapport à l’apprentissage a vu débarquer au collège des jeunes éveillés, debout sur les tables et tutoyant le prof, pensant qu’il suffit de venir écouter d’une oreille distraite des cours écourtés par l’indiscipline, pour savoir parler anglais ou écrire français. Les parents sont les principaux coupables, mais aussi l’administration des établissements et certains enseignants. Et cela vaut quelle que soit la situation sociale. Je me souviens d’une émission qui traitait de l’échec scolaire ou l’on voyait une mère, au chômage, élevant seule ses trois enfants (en échec) mais heureuse d’avoir pu offrir a chacun de ses enfants une télé dans chacune de leurs chambres…

Quelle est donc cette société où on fait croire aux enfants que tout peut s’obtenir sans effort, que s’ils sont des cancres au collège c’est la faute des profs, mais que de toute façon ils passeront dans la classe supérieure, jusqu’au bac, et que plus de 90% l’auront ? Puis bizarrement tout change. On rentre dans la vraie vie, dans la compétition pour des études supérieures, pour un travail avec des règles du jeu totalement différentes qui ne sont plus celles de leur jeunesse, de leur éducation.

Bon, sans doute des reflexions d’un vieux nostalgique ringard…

 

                                                                                                                           par Daniel Sango