27 condamnations , premières manifestations délinquantes à l’âge de 10 ans , 67 faits délictueux, dernière condamnation en 2015 et recherché pour tentative d’homicide, Chérif CHEKATT a pu accomplir un acte funeste lourd de sens. Un acte contre la France où il est né, où il a été scolarisé, où il a pu bénéficier de tout ce qu’elle offre en formations et allocations, un acte contre des coutumes populaires mais aussi, ouvrons les yeux, contre la chrétienté qui commande d’aimer ses ennemis. Remarques banales qui ne semblent pas avoir fait encore l’objet de commentaires et pourtant elles laissent douter que cette tuerie soit la dernière. Parce qu’elle n’est pas crapuleuse mais idéologique !
Au-delà, c’est la philosophie de notre réponse pénale qui interpelle ! Monsieur Hervé MORIN, ancien ministre de la défense, préconise d’interner préventivement les suspects de radicalisation. Idée impossible à mettre en œuvre, susceptible de devenir une arme totalitaire et en contradiction absolue avec toutes les conventions internationales relatives aux droits de l’homme, cette philosophie souvent paralysante pour la protection d’une société. On a préféré l’individu au groupe social ; il faut en payer le prix !
Cependant, le cas de Chérif CHEKATT est la preuve de l’inefficacité et de l’inéquation des mesures laissées à l’autorité judiciaire qui elle n’est pas en cause, des moyens légaux mis à sa disposition par le législateur.
Ce douloureux événement met le point sur la faiblesse des mesures laissées aux juges des enfants car, enfin, le tueur a manifesté sa désocialisation dès l’âge de dix ans ! Le mal était-il déjà si grand qu’il fut impossible d’en venir à bout ?
Il est aussi légitime de s’interroger sur l’efficacité des divers services (il y en a beaucoup et ils coûtent cher) mis à la disposition de ces juges et plus tard des juridictions correctionnelles voire des cours d’assises.
Tout est fait pour mettre à l’écart des malfaiteurs. On a multiplié les mesures pour éviter l’incarcération des délinquants. Sursis successifs, mise à l’épreuve sans grand succès, réduction immédiate de sept jours par mois de la condamnation mise à exécution, réduction de peine, incarcération immédiate non ordonnée, aménagement des sanctions inférieures à deux ans d’emprisonnement.
Des mesures dictées tout à la fois par le droit au pardon, à la chance de rédemption, à la réinsertion (difficile de réinsérer, hélas, celui qui n’a aucune envie de renoncer aux trafics en tous genres plus rémunérateurs qu’une insertion sociale), à ne pas surpeupler les prisons, à préserver la sécurité d’un personnel pénitentiaire dont on parle peu, à éviter de faire goûter aux joies de la détention des ministres (Monsieur CAHUZAC , Monsieur BERTRAND ), une sénatrice, Madame Sylvie ANDRIEUX.
Une belle faillite d’idées aussi généreuses qu’irréalistes. Les mesures pénales doivent avoir pour première finalité de punir et de prévenir toute envie de récidive par la fermeté des sanctions. Le curriculum vitae de Chérif CHEKATT, les multiples évasions auxquelles nous assistons régulièrement, les agressions contre les forces de l’ordre, l’augmentation de la délinquance, prouvent que notre société se défend mal. On ne change pas une équipe qui gagne, mais on doit changer un système en faillite. Sans doute ces propos ne convaincront-ils pas ceux qui, comme Jean-Jacques ROUSSEAU, continuent de penser que la société est la source de toute corruption.
Pierre ESPOSITO
Avocat honoraire