Le prélèvement à la source.

Alors qu’une lettre du ministre de l’action et des comptes publics ,accompagnant l’avis d’imposition que certains ont reçu , explique la manière dont nous paieront l’impôt sur le revenu à compter de janvier 2019 , nous apprenons en même temps qu’il pourrait en aller autrement .
Les causes ? Un système peut-être encore imparfait, certains fonctionnaires des finances peu enclins à mettre en œuvre la réforme , des employeurs dénonçant une surcharge d’investissement sans contrepartie , une opposition parlementaire cherchant à affaiblir le président de la république et le gouvernement, ou tout cela en même temps?
L’opposition parlementaire n’est pas concevable si l’on veut bien se souvenir qu’en 1973 déjà , Monsieur Valéry GISCARD D’ESTAING , alors ministre des Finances , puis à sa suite, plus récemment , Monsieur Thierry BRETON et Monsieur Eric WOERTH , souhaitaient cette réforme qui , faut-il le rappeler, a été adoptée par le parlement en fin d’année 2016 et doit s’appliquer comme toute loi de la république.
Celle des fonctionnaires ne l’est pas davantage, leur mission et leur statut ne leur donnant aucun droit à refuser ou mettre en cause l’application d’une disposition législative qui devait voir le jour le premier janvier 2018 et ne le fut pas en raison d’une impréparation technique.
Pour la même raison, la grogne d’employeurs n’est guère plus admissible.
Alors que reste-t-il ? Tout simplement un casse-tête parce que le ministère des finances ne sait pas faire ! Mais il ne faut surtout pas le dire .
Comment pourrait-on comprendre une nouvelle reculade après le report d’une année d’une disposition votée fin 2016 . Les techniciens ont eu tout loisir pour que tout fonctionne début 2019 et , alors qu’une majorité de contribuables se déclare favorable à la mesure, le gouvernement et le président de la république lui-même semblent empêtrés à l’approche de l’échéance.
Le bon sens impose de se poser des questions car, enfin, le prélèvement à la source existe dans la plupart des pays administrativement développés.
L’Allemagne le pratique depuis 1925, l’ont suivie les Pays-Bas en 1941 ,la Grande-Bretagne en 1944, l’Espagne en 1979 . Et pourquoi la France ne saurait pas faire ? Impossible de comprendre , sauf à imaginer une incompétence des responsables ou une rétrogradation du pays qui serait bien vaniteux à vouloir faire partie des grands de la planète.
Pourtant, même si certaines pratiques salariales ont évolué, le système présente divers avantages mal exploités par la communication gouvernementale.
Ainsi faudrait-il rappeler qu’au décès de leur auteur ses héritiers n’auront pratiquement pas à régler d’impôts sur ses salaires ou sa retraite. Or personne ou presque n’en parle .
Par ailleurs, le prélèvement interdit la fraude fiscale . En effet, même si le fait de ne pas déclarer ses revenus est pénalement punissable, ce n’est qu’après des années que la carence peut-être découverte et l’état risque alors de se trouver en face soit d’insolvables, soit d’individus ne vivant plus en France .
Le seul inconvénient vient du fait que certains entreprises en difficulté pourraient utiliser les prélèvements comme une trésorerie propre.
Reste à espérer que la réforme verra enfin le jour et que comme dans bien d’autres pays , une autre la suivra afin que l’imposition demeure individuelle l’intérieur d’un couple pour mettre un terme à la solidarité fiscale des époux ou concubins pacsés qui , dans certaines situations peut être catastrophique pour celui qui , bien que de bonne foi , devra répondre seul aux réclamations fiscales pouvant le conduire à liquider des biens héréditaires.

Pierre ESPOSITO
Avocat honoraire.

L’excès en tout est un défaut.

Qui trop embrasse, mal étreint.

«Chaque génération, sans doute, se croit vouée à refaire le monde. La mienne sait pourtant qu’elle ne le fera pas. Mais sa tâche est bien plus grande. Elle consiste à empêcher que le monde se défasse»

Albert Camus, à l’occasion de la remise du prix Nobel de littérature.

Manifestement, notre Président n’a pas été convaincu par ces pensées et conseils. Avec une détermination sans faille, il a décidé justement, de défaire notre monde, à la hussarde, même. Il est, pour cela, non seulement fidèle à ses engagements, mais tout à fait en phase avec la pensée unique internationale dont l’objectif est de multiplier (croissance), en divisant (individualisme), pour mieux additionner (les bénéfices) ; peu importe les soustractions subséquentes chez les autres, la politique de l’autruche, en somme.

Une telle démarche est bien sûr uniquement politique, économique et financière, elle se refuse à tenir compte de la nature de notre monde, de la société qui l’habite, de son fonctionnement durable. Les dirigeants du monde et de la France n’ont jamais vu plus loin que le portefeuille, sans se soucier des déséquilibres de plus en plus nombreux et redoutables qui atteignent progressivement le seuil de l’irréversible.

Petit rappel pour ceux qui auraient perdu de vue la nature du monde biologique et culturel :

+ C’est un ensemble de structures en déséquilibre permanent, fragiles donc, du fait qu’elles reçoivent, de l’univers, trois flux incessants : Energie, Matière, Information. Ces flux l’ont construit, l’entretiennent, mais menacent aussi sans arrêt son existence.

+ Les structures en jeu sont toutes des écosystèmes complexes qui répondent à certaines propriétés :

++ Elles ont de perpétuels échanges avec l’environnement.

++ Elles sont composées d’un très grand nombre d’éléments différents qui sont en interrelations et interactions non linéaires, en réseaux, réalisant des rétroactions.

Les éléments dépendent tous les uns des autres.

++ Sous la pression du nombre, de l’intensité, de la diversité des niveaux d’organisation, des actions et réactions multiples, des entités nouvelles imprévisibles et aléatoires apparaissent appelées émergences réagissant, secondairement, sur les éléments eux-mêmes. Il en résulte :

+++Un élément évolue différemment suivant qu’il est isolé ou dans un système d’accueil (espèce isolée ou en présence d’autres espèces).

+++ Plus il y a d’éléments, de relations et d’actions, plus il y a d’émergences, donc d’incertitudes.

Non, la société n’est pas constituée d’individus juxtaposés (individualisme) qui évoluent séparément et qui doivent être gérés chacun de leur côté : c’est un non sens de considérer qu’il n’y a pas de liens entre les hommes, les femmes, les jeunes , les vieux, les boulangers, les politiques, les chefs d’entreprises, les salariés, les terroristes, les violonistes, les agriculteurs, les cheminots, le métropolitain et le rural…., le climat. Réformer à part, par des lois différentes, l’enseignement, les retraites, le travail, la sécu, l’agriculture, l’alimentation, le réchauffement climatique, la pollution, le chômage, la pêche….le terrorisme…, c’est absolument le type du raisonnement linéaire qui est voué à l’échec, pire même, qui voue à la désorganisation, car tout réagit sur tout. Faire éclater les entités fonctionnelles comme la SNCF, le bloc «agriculture, monde paysan, industrie agroalimentaire, alimentation, produits phytosanitaires, pollution, ..»,…. c’est diviser pour mieux détruire.

Cette chienlit actuelle, s’enracine dans l’histoire. Citons seulement, pour des questions de temps et d’espace, quelques événements significatifs  ayant contribué à augmenter les échanges, relations et interactions : hausse de la démographie, colonisation, exploitation des richesses du sol, du sous-sol et des hommes, comme au moment du boom industriel quand notre industrie avait besoin de matières premières et de main d’œuvre ; plus récent, guerres d’Irak, de Libye, de Syrie, le prélèvements des richesses dans tous les pays, la métropolisation, le tourisme, la croissance : fabrication, transformation, transports, consommation, rejet des inutiles, d’où la pollution généralisée de la terre, de l’air, des eaux, des esprits et des corps, mondialisation du commerce,… les catastrophes climatiques.

Devant une telle augmentation des facteurs et des échanges, depuis des années, rien d’anormal que de nombreuses émergences imprévisibles et aléatoires surviennent : «populismes», crises migratoires, racisme, revendications dans tous les domaines, inégalités, conflits commerciaux, religieux, financiers, économiques, sociaux, climatiques.

Des tentatives «politiquement  admissibles et médiatiquement convaincantes» se succèdent mais, comme il y a trop, et de plus en plus, de paramètres essentiels à maîtriser en même temps, il n’est pas possible de prévoir la suite ;

la solution trouvée est d’en négliger la plupart, de retenir ceux qui arrangent afin de supprimer la complexité, donc non seulement de ne rien résoudre du tout  mais même de faire empirer les émergences ! 

Les chiffres obtenus alors, dont nous sommes inondés, sont complètement en dehors de la réalité, ils ne servent qu’à démontrer «la justesse» des décisions prises ou à prendre, en attendant l’échec auquel on trouve aussitôt, grâce aux chiffres, une autre raison ! De toute manière, en général,

on ne lutte pas contre les causes mais seulement contre les conséquences car, dans le premier cas, on perdrait de l’argent alors que dans le second certains en gagnent..

Dans un autre domaine, au « big data » à la mode en ce moment en informatique/statistique : la NSA écoute la terre entière et enregistre tout, par contre il lui est impossible de traiter ce qui est enregistré, trop de choses.

En France, si l’on considère toutes les réformes réalisées et prévues à plus ou moins brève échéance, les interférences sont telles que plus personne n’est capable de suivre, y compris spécialistes et experts, car les retombées dévastatrices jaillissent dans tous les domaines, semant l’incompréhension, le désarroi, l’angoisse, la colère, la violence…Les causes ?

Ces Français qui n’y comprennent rien aux vertus du libéralisme !

Macron n’est pas le grand stratège universel, la grande intelligence qui tient compte des «petits, des obscurs et des sans-grades», la grande sensibilité, qui a compris ce qu’il convenait de faire pour relever la France et les Français ; son histoire ne l’a pas conduit à utiliser l’ascenseur social, il est devenu général sans avoir été troufion, patron sans avoir été au départ apprenti balayeur et avoir gravi les échelons de la connaissance du terrain ; par contre, il a fait beaucoup de théâtre, ce qui aurait pu lui inspirer la démarche définie par A. Camus sur l’artiste :

«les vrais artistes ne méprisent rien ; ils s’obligent à comprendre au lieu de juger.»

Il n’est pas préparé à la compréhension de la vie des abandonnés de l’existence qu’il domine de toute son assurance ; il a seulement compris ce qu’il fallait faire pour amener des capitaux en France et faire fructifier une économie qui détruit tout sur son passage, y compris, à terme, l’économie elle-même ! Sa devise est : «Aide-toi et le ciel t’aidera». Malheureusement, le ciel, appelé par les citoyens, «État Providence», est fauché ; «On» l’a ruiné en privatisant tous ses avoirs ; il faut donc diminuer les «dingues» charges sociales et «responsabiliser les pauvres !!!», pas les autres sans doute !

Alors ! Quelle solution ?

Dans l’état d’esprit actuel, aucune ! Les mesures jugées incontournables ne font qu’activer la décomposition de l’union, de la collaboration, de l’empathie, du partage des richesses, donc de l’envie de lutte et d’efficacité. Comme ils sont loin les grands principes élaborés par le Conseil National de la Résistance !

Non, ce n’est pas mieux chez les autres, l’actualité nous le rappelle constamment !
Il faudrait repartir avec d’autres postulats réduisant le nombre de paramètres comme le passage de la compétition à l’union, en France et en Europe pour commencer. L’espoir résiderait dans le développement actuel de petites collectivités vivant le plus possible localement, en économie circulaire ; un tel maillage, en abaissant drastiquement le nombre des éléments de l’écosystème, permet une maîtrise plus réalisable du déséquilibre ; malheureusement, ce n’est guère possible tant que l’économie favorisera la métropolisation et l’intensité des échanges.

Nous allons comme on dit, dans le mur, de l’aléatoire et de l’imprévisible ; ce sont les seules certitudes ; les catastrophes environnementales s’abattent, le feu nucléaire, actuellement, rentre même, à l’international, dans l’ère du probable avec les malades qui dirigent le monde, comme ces deux pigeons, Kim et Trump qui s’aiment d’amour tendre !

Signé Georges Vallet

crédits photos:citation-celebre.leparisien.fr

Impôt inique

Au gré de mes lectures dominicales, je suis tombé sur un texte intitulé « Taxe d’habitation »* dans le journal Sud Ouest Dimanche du 6 août 2017. Il figure à la page 4 dans la rubrique : « Courrier des lecteurs ». Parce que son contenu présente comme principale caractéristique d’avoir été écrit par un ancien directeur des services fiscaux (Daniel Louis, Bordeaux) d’une part et d’autre part de correspondre à ce que l’on pourrait appeler mon principal cheval** de bataille, je ne résiste pas au plaisir d’y ajouter quelques réflexions personnelles.

Cet auteur, qu’on ne pourra pas suspecter de s’exprimer dans un domaine qu’il ne connaît pas, n’hésite pas à qualifier cet impôt de plus injuste et de plus inique qu’il soit. Et pour appuyer son affirmation, il compare Lille à La Madeleine, à Paris et à Bordeaux. Selon ses lieux d’habitation, cette taxe pouvait aller du simple au double.

Ensuite, il la qualifie d’archaïque puisque ses bases datent de 1970. Une réforme ou révision, selon ce que l’on veut, avait bien été envisagée dès cette année là, mais les élus locaux s’y sont fermement opposés. Maintenant, et c’est tant pis pour eux, il leur faudra bien accepter sa suppression.

Alors il est permis de s’interroger. La décentralisation n’a-t-elle pas donné trop de pouvoir aux élus locaux en leur permettant de fixer le taux des taxes locales? Le moment ne serait-il pas venu d’obliger à une harmonisation de ces impôts ? En même temps qu’il supprime la taxe d’habitation, le pouvoir central n’aurait-il pas toute latitude pour mettre en place une réforme visant à une totale égalité entre les villes ? Il faudra que les élus locaux prennent au sérieux cette perspective et s’attachent à envisager de maîtriser les dépenses.

Sur quels chapitres les collectivités territoriales devraient-elles faire porter ces économies ? Les frais de fonctionnement, difficile car ce serait réduire des emplois, inutiles certes, de plus la démarche serait loin d’être électoraliste. La sécurité par la suppression des polices municipales dont l’indispensable existence n’est pas prouvée. On rétorquera que sans elles ce serait bien pire. Formule facile car impossible à démontrer. Et puis auprès d’une certaine catégorie d’électeurs, cela reste porteur. Alors diminuer les investissements. Il ne reste guère que cette solution même si certains affirment que 73% de ceux-ci sont payés par les collectivités territoriales. Là encore il faudrait démontrer que les sommes prélevées sur les particuliers ne seraient pas mieux dépensées par eux. Donnez-moi votre pognon, je le dépenserai mieux que vous.

Les élus locaux ont cette facilité de considérer que lorsqu’ils ne disposent pas d’un budget suffisant pour financer leurs projets, il leur suffit d’augmenter les prélèvements obligatoires. Les particuliers sont bien contraints, eux, de s’organisent autrement ; ils ne dépensent qu’en fonction de leurs ressources. Il faudra bien sortir de cette logique surtout maintenant que l’État vient de décider d’une nouvelle diminution des dotations de 300 millions d’euros.

On verra bien ce qui va se passer. Il reste que ce courrier d’un lecteur avisé me conforte dans mes convictions.

 

Pau, le 9 août 2017
Joël Braud

 

Crédit image : blogs.lexpress.fr

* « Ancien directeur des services fiscaux à Digne, Lille puis Bordeaux (trente ans d’expérience), je pense en toute objectivité, que la taxe d’habitation est l’impôt le plus injuste et le plus inique. A Lille, où j’habitais, la taxe d’habitation était quasiment le double de celle de La Madeleine, 500 mètres plus loin. En comparaison avec Paris où j’ai également habité, de 1987 à 1992, c’était la moitié de La Madeleine ! Bordeaux est la ville où la taxe d’habitation est une des plus lourdes, sinon la plus lourde, des grandes villes du pays. A titre indicatif, je paie plus de 4 000 euros pour le même logement à Bordeaux, alors que je paierais 2 000 euros pour le même logement à Paris. Je ne me plains pas, car je ne suis pas à plaindre. Toutefois, dans un souci d’équité, je peux déplorer l’injustice des bases fiscale locales. Archaïques, telles sont les bases de cette taxe, car elles datent de 1970. Leur révision préparée en 1970 a échoué à cause des élus qui n’ont pas eu le courage de coller au réel des valeurs locatives. Celle-ci qui relevait du bon sens est devenue « une patate chaude » pour tous les gouvernements successifs, de droite comme de gauche. Le cri de vieux élus locaux est pitoyable : ils n’ont pas voulu la réforme de la taxe d’habitation et maintenant, ils doivent en accepter la suppression. »

Daniel Louis, Bordeaux (33)

** Au risque de vous saturer voici les autres articles que j’ai écrits sur le même sujet :

– Ras-le-bol fiscal – 22 mars 2014
– Impau de pôt : 27 novembre 2014
– Taxe d’habitation : 5 novembre 2015

-Réforme de la taxe d’habitation 19 juillet 2017

Réforme de la taxe d’habitation

Nous, Palois, sommes particulièrement attentifs à une réforme qui se profile, celle de la taxe d’habitation. Nous appartenons à ces villes les plus lourdement ponctionnées au titre de ce prélèvement. Alors pouvons-nous raisonnablement espérer un soulagement ?

Le Président de la République s’est engagé et donne l’image d’une détermination sans faille à ce propos. Mais lorsqu’il dit que 80% seront prochainement exonérés de la totalité de cette taxe, nous vient immédiatement une question : Est-ce que j’appartiens à ces 80% ? Il y aura, c’est certain, beaucoup de déceptions. En réalité cette exonération sera fonction du revenu de chacun. Il faudra que celui-ci soit à peu près du niveau du SMIC pour appartenir à ces fameux 80%. Une réforme en trompe-l’œil en quelque sorte.

L’actualité – la conférence des territoires sur la refonte de la fiscalité locale qui a eu lieu le 17 juillet 2017 – nous apprend que les élus locaux sont vent debout face à ce projet. On leur demande de réaliser non plus 10 milliards, mais 13 milliards d’euros d’économies. Ils se disent étranglés. Rappelons simplement que la France est le seul pays européen où l’on paie à la fois une taxe foncière et une taxe d’habitation. Rappelons également que cette réforme privera les élus locaux de ce pouvoir de décider, à leur niveau, du montant de ces prélèvements. Une perte d’autonomie certes (article 72-2 de la Constitution*) mais qui ira dans le sens d’une égalité de tous devant ces prélèvements obligatoires. Lorsque l’on compare les taux pratiqués, il est bien difficile de trouver une justification à ces différences. Ils varient en effet du simple au triple.

Sont-ils aussi étranglés qu’ils le prétendent ? Il faudrait leur mettre sous le nez ces rapports des cours régionales des comptes qui listent, de manière non exhaustive d’ailleurs, toutes ces dépenses inutiles qu’entreprennent certaines collectivités locales dans le seul but de satisfaire à la gloire des élus. Tous les investissements effectués à Pau correspondent-ils à un besoin en considération de l’intérêt général ? La démonstration d’un clientélisme dans certains cas. Rappelons aussi que des économies de personnel auraient dû être réalisées par le regroupement des communes. Cela s’appelle la mutualisation des moyens. Il n’en a rien été, au contraire ces emplois ont progressé dans des conditions bien supérieures à ce que nécessitaient les transferts de charges de l’État central vers ces collectivités locales.

Alors il faut entreprendre une réforme de cette fiscalité locale. Tout le monde est d’accord pour considérer que la taxe d’habitation est obsolète et calculée sur des bases qui doivent être modifiées. Pourquoi ne revient-il pas à l’État central de fixer de manière autoritaire le taux de la taxe d’habitation ? Ce serait une harmonisation et ce ne serait que justice. Ce n’est pas la première fois qu’une telle réforme est envisagée et s’inscrit dans le programme des candidats à la présidentielle, mais personne ne la réalise face au tollé des élus locaux. Ils sont puissants surtout en cette période où s’ouvre la campagne pour les sénatoriales. Ce sont eux les grands électeurs.

Il faut craindre que les élus locaux aient, à terme, raison de la détermination affichée du Président de la République. Ces projets de réformes seront reportés à plus tard, cela s’appelle la procrastination.

Pau, le 19 juillet 2017
Joël Braud

Crédit photo : 20minutes.fr

*Article 72-2

Créé par Loi constitutionnelle n°2003-276 du 28 mars 2003 – art. 7

Les collectivités territoriales bénéficient de ressources dont elles peuvent disposer librement dans les conditions fixées par la loi.

Elles peuvent recevoir tout ou partie du produit des impositions de toutes natures. La loi peut les autoriser à en fixer l’assiette et le taux dans les limites qu’elle détermine.

Les recettes fiscales et les autres ressources propres des collectivités territoriales représentent, pour chaque catégorie de collectivités, une part déterminante de l’ensemble de leurs ressources. La loi organique fixe les conditions dans lesquelles cette règle est mise en oeuvre.

Tout transfert de compétences entre l’Etat et les collectivités territoriales s’accompagne de l’attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice. Toute création ou extension de compétences ayant pour conséquence d’augmenter les dépenses des collectivités territoriales est accompagnée de ressources déterminées par la loi.

La loi prévoit des dispositifs de péréquation destinés à favoriser l’égalité entre les collectivités territoriales.

La loi travail, quel boulot !

vrai-changement-ou-reformette-commentaireDiscuter d’un projet de loi, surtout lorsqu’il n’est pas bien connu et susceptible de recevoir des modifications importantes n’est pas chose aisée.

Si vous en doutez, regardez les mesures envisagées pour calmer le conflit entre chauffeurs de taxis, de VTC et de LOTI. Le 15 janvier dernier, le Conseil constitutionnel a pris position après une saisine du Conseil d’État sur une question prioritaire de constitutionnalité estimant qu’un chauffeur de taxi peut exercer en parallèle une activité VTC. Vous ne vous sentez guère concerné  et vous trouvez la question trop complexe ? En revanche, la loi travail concerne un grand nombre de citoyens. Mais ils ne sont pas plus armés juridiquement sur cette question que sur l’autre et il faut bien qu’ils écoutent ceux qui semblent plus compétents pour l’analyser.

A lire le communiqué des unions départementales de la CGT, FO et FSU des Pyrénées atlantiques il y a de quoi blêmir devant ce qui paraît être un retour cent ans en arrière. Un peu comme ces images glaçantes de corps efflanqués parvenues de villages encerclés de Syrie qui ne peuvent qu’évoquer la Shoah. Voici ce communiqué :
L’inventaire non exhaustif est terrifiant :
·     Une entreprise peut, par accord, baisser les salaires et modifier le temps de travail.
·     En cas de refus de modification du contrat de travail, conséquence de tels accords, les salariés seront licenciés pour motif personnel, sans possibilité d’en contester la cause réelle.
·     Élargissement des motifs de licenciement économiques : une baisse de commandes sur plusieurs trimestres devient suffisante.
·     Un accord ou une mesure dégradant les droits des salarié-e-s, peuvent être imposés par référendum 
contre l’avis des syndicats représentant 70% des salariés. Quand la représentation des salariés est 
affaiblie ou détournée, c’est au seul bénéfice du 
patronat et du capital.
·     Pour neutraliser le déclenchement des heures supplémentaires le temps de travail pourrait être calculé sur 3 ans.
·      Par simple accord on peut passer de 10h à 12h de travail maximum par jour.
·      Le temps de repos minimum va descendre sous les 11 heures.
·      Les indemnités prud’homales sont plafonnées à un maximum de 15 mois de salaires pour licenciement illicite. Les juges n’auront plus la possibilité d’apprécier la réalité du préjudice subi.
·      Le temps de travail des apprentis augmentera passant de 8h à 10h par jour et de 35 à 40h par semaine.
·      Les temps d’astreinte peuvent être décomptés des temps de repos.
·      Un accord d’entreprise peut prévoir que les heures supplémentaires soient 5 fois moins majorées, c’est la fin programmée des 35h.

A cette lecture on peut se demander comment peuvent se sentir les membres de la commission Badinter qui ont tracé les grandes lignes d’une réforme du droit du travail.

En sens opposé à l’analyse précédente, un collectif de plus de trente professeurs d’économie, dont le prix Nobel Jean Tirole, estime dans une tribune du journal « Le Monde » que la réforme envisagée est une avancée pour les plus fragiles. Leur argument est fondé sur une observation de l’exemple espagnol qui a connu en 2013, 300.000 embauches supplémentaires en CDI après la promulgation d’une loi similaire en 2012. Selon eux, la loi El Khomri pourrait bénéficier aux jeunes, aux personnes peu qualifiées et aux chômeurs en fluidifiant le marché du travail. Elle pourrait aussi bénéficier à celles et ceux qui se sentent mal dans leur emploi mais ne veulent pas le quitter, de crainte de ne pas en retrouver un autre.

Concilier ces deux points de vue ne sera pas chose aisée et deux semaines pourraient ne pas suffire. Une méthode pourrait consister à sortir de la loi les dispositions les plus controversées, comme les plafonds des indemnités prud’homales. Une concertation entre les instances prud’homales (qui émettent souvent des avis divergents) pourrait amener à des grilles de référence selon les différentes situations qui donneraient plus de visibilité et d’homogénéité. Ce qui allégerait le travail de ces instances et raccourcirait le temps de traitement des dossiers, souvent insupportables pour les deux parties.

Il serait souhaitable que des propositions concrètes sur tous les points du projet de loi soient faites et débattues. Notre site peut s’ouvrir sur des témoignages. AP a déjà publié un article par un observateur averti (La réforme du code du travail : un danger pour l’emploi ?, AP du 29 février) sur un point crucial du texte : l’éventualité d’un maquillage de la situation financière d’une entreprise afin d’entrer dans les critères définissant les limites du licenciement économique. Cette éventualité n’est pas à écarter ; mais le danger serait-il moins grand s’il n’y avait pas de critères et de règles ? Par ailleurs toutes les entreprises n’ont pas la capacité de jouer sur des filiales à l’étranger pour fausser leurs comptes. Bien des chefs d’entreprise ne font pas des licenciements de gaieté de cœur. Et s’il est évidemment antinomique qu’une entreprise qui licencie se mette à embaucher, il n’est pas exclu qu’elle le fasse pour des recrutements d’un autre type ou ultérieurs. Toute la question est de savoir si globalement il y aura plus d’embauches parce que le droit du travail est plus « flexible ».

Il n’est pas douteux que chefs d’entreprise et actionnaires sont extrêmement sensibles au manque de souplesse de la situation de l’emploi en France. On peut les créditer de sincérité dans leur réticence à embaucher. Mais la promesse non tenue de créer 1.000.000 d’emplois avec les pactes de compétitivité et de responsabilité jette une ombre. C’est cette ombre qu’il faut dissiper.

On ne peut plus dire « Pour l’emploi, on a tout essayé ». Il faut sortir du marasme. Mais pas les yeux fermés. Des garanties doivent être apportées afin que les efforts consentis par la nation ( pas seulement les 30 milliards des pactes avec le patronat) soient fructueux. Les comptes publics et les exclus du système méritent de l’attention et ces derniers doivent être entendus.

Paul Itaulog

L’orthographe, reflet de la société franceaise ?

imgresNos immortels sont-ils de dangereux révolutionnaires ? On pourrait le croire à écouter certaines voix. Tellement dangereux que 26 ans après leur proposition unanime leurs conclusions ne sont pas encore adoptées (*).

Cependant, les éditeurs de manuels scolaires semblent se décider à tenir compte de ces recommandations. Ce qui soulève un tollé dans certains milieux. Ainsi « Le Figaro » en fait son titre pour son édition du vendredi 5 janvier, qui ne consacre pas moins de 5 pages au sujet.

On aurait pu croire ce quotidien plus sensible à l’image de notre pays : un pays sophistiqué, raffiné comme sa gastronomie, mais compliqué, peu adepte du solide et pratique. Une image peu favorable à nos exportations et aux investissements en France. Prenez notre clavier d’ordinateur : impossible sans clavier numérique de taper un chiffre si l’on n’actionne pas en même temps la touche majuscule. C’est pratique lorsque l’on tient une feuille ! L’arobase et les crochets nécessitent des acrobaties digitales tandis qu’une touche est réservée à une lettre accentuée qui n’intervient que dans un seul mot du français qui me vienne à l’esprit: le ù.

On pourrait aussi penser que les événements récents ont mis en lumière les dangers de rejet de l’école et de la société française de la part de jeunes qui ont renoncé à la réussite. Malheureusement, les évaluations faites à l’issue du collège par l’enquête internationale PISA montrent que ce décrochement est sensible. Qu’à cela ne tienne ! Entretenons les chausses-trappes, les incohérences (un seul r pour chariot, deux pour charrette…), les incongruités (côte, coteau, grâce, gracieux…), les subtilités (gardes-pêche (les personnes), garde-pêche (les bateaux)! Qu’importent si elles rebutent tant d’étrangers alors qu’une langue comme l’espagnol qui a su se simplifier et s’adapter est en expansion…

Laissons de plus en plus de titres de films sans traduction, de publicités polluées par l’anglo-américain et brandissons l’étendard de la cédille et de l’accent circonflexe ! Qu’importe que cet accent ait remplacé un s que l’on entend dans des mots voisins (hospitalisation, défenestration…). Revenir sur des changements vieux de 300 ans et désormais incompatibles avec l’usage des téléphones portables serait un crime !

Pourtant, ce que proposaient l’académie et le gouvernement en 1990 était compatible avec la devise que l’on voit sur les frontons de nos mairies : la liberté. Certaines de ces libertés sont entrées dans les mœurs : clé ou clef, cuiller ou cuillère sont acceptés également. Et d’autres n’éveillent guère de fantasmes ou de fantômes, et encore moins de phantasmes et de phantomes…

Paul Itologue

(*) Sans compter l’arrêté Haby de 1977, les ajustements de 1975, et …un arrêté du 26 février 1901 qui proposait de tolérer des orthographes multiples pour les concours et dictées…

Réforme ou…cautère sur une jambe de bois ?

 imagesRegrettablement.  Cette année encore.  Le classement mondial confirme  l’indiscutable et  constant recul  de nos niveaux scolaires. Et ce n’est certes  pas faute de « réformes » qui, au fil des décennies, se sont succédé  au rythme des   gouvernements. Vainement à ce qu’il paraît ! Malgré cela. Sans  doute pour ne pas déroger à la règle. Le  gouvernement actuel  prépare donc, lui aussi, « sa » réforme. Celle  qui permettrait de garantir à chacun une «véritable  égalité des chances ».

Utopique. Absurde. Cautère sur une jambe de bois.  Ses détracteurs  considèrent que cette réforme  n’aura d’autre résultat que de  mettre l’ensemble du cursus scolaire au niveau  de ceux qui « issus de milieux  défavorisés » sont actuellement en difficulté. Elle  ne serait  donc   une chance pour personne mais, au contraire,  une pénalité pour tous. Et, singulièrement pour ceux, certes pas assez nombreux,  pour lesquels « l’élitisme » était un  tremplin social inestimable. Les autres contournant plus ou moins facilement la question. Hors de l’enseignement public ou grâce à des leçons particulières.

 En réalité, pour justifier son choix  le gouvernement préfère entretenir une confusion  entre milieu  défavorisé au plan social et  défavorisé  au plan culturel.  Il ne peut cependant ignorer que si la dimension sociale  constitue, certes,  un empêchement majeur à la poursuite d’études. Il n’appartient qu’à lui de le réduire par une politique  d’aide financière énergique (bourses). Il ne peut ignorer davantage, que  la  dimension culturelle – singulièrement quand la langue maternelle n’est pas le français – facteur déterminant dès la petite enfance – constitue un handicap considérable. Handicap qui contribue à créer une situation qui ne peut que s’aggraver dans le double contexte d’une  immigration toujours forte et celui d’une tension intercommunautaire croissante. Situation qui, elle, impose, d’urgence, une véritable réforme. Réforme courageuse, évidemment complexe, à laquelle ce gouvernement, pas davantage que ceux qui l’ont précédé, n’a envie de s’atteler.  Réforme qu’il faudra  bien, pourtant, faire ! Tôt ou tard ! L’avenir de l’ensemble de notre communauté l’exige ! D’autres nombreux pays, confrontés au même problème, et qui n’avaient la prétention de n’être le « phare » de personne, l’ont faite !

Et, quand on fait profession de foi d’être résolument «  réformiste … !

 

– par Maurice Meireles
Pontacq

Élections départementales. La suppression des départements n’aura pas lieu !

imagesCe n’est pas être un grand clerc que de se permettre une telle affirmation aussi péremptoire que peu divinatrice. Le projet qui avait pris la forme d’un engagement définitif dans une circonstance officielle de la part du premier ministre de la France a plus que du plomb dans l’aile. Mais est-il possible dans notre pays de réaliser une réforme ?

 Dans un premier temps on nous disait que la réforme territoriale allait entrer en vigueur très prochainement ; les régions se sont agrandies. On nous disait pour être plus précis, que les départements allaient bientôt disparaître, à la fin du quinquennat, soit en 2017. Puis devant un grand nombre de difficultés, le premier ministre dans un discours, dit de politique générale, a repoussé l’échéance à 2021.

 On nous disait que la totalité des départements allait disparaître puis il fut question de ne conserver que les départements essentiellement ruraux, pour des raisons de proximité.  Au passage on est autorisé à s’interroger sur la définition d’un département rural et à vouloir savoir ce que représente vraiment la proximité chez les élus.

 Alors devant ces échéances sans fin reportées aux calendes grecques on a organisé, selon des règles jusque là inédites, des élections départementales.  Vous avez évidemment  tous remarqué qu’on n’élit plus des conseillers généraux mais des conseillers départementaux. Tu parles d’un changement. Si c’est là que se trouve l’amincissement du millefeuille, c’est sans doute un peu court.

 Maintenant on nous dit qu’il faut craindre les futurs résultats de ce scrutin et qu’on a peur pour le pays, car une certaine formation politique est bien placée dans les sondages. Devant cet émoi, on est en droit de se demander pourquoi donc dans ces conditions, recourir à ces élections nouvelles formes. La logique n’est pas évidente chez nos politiques.

 On nous dit, pour nous laisser croire que l’on met les départements sur une voie de garage, que l’on va légiférer sur ses compétences. Dans le but, ceci étant sous-entendu, d’amoindrir dans des proportions conséquentes son influence, voire son pouvoir. Mais les élus cumulards s’emparent du sujet, font traîner les débats au point que le résultat de leurs travaux ne sera pas connu avant la fin de l’année. En tout cas bien après des élections où les candidats sont ipso facto placés dans l’impossibilité de débattre d’un programme parce qu’ils ignorent officiellement ce qu’ils auront à faire.

 On nous dit sur tous les tons qu’il faut réformer la constitution, voire changer de constitution. Les beaux apôtres adeptes de ces grandes théories ignorent jusqu’au contenu  d’un tel changement. Mais faudrait-il  changer la constitution pour changer la constitution ; parce qu’elle date de 1958 et que les données sociales de l’époque ne sont plus celles d’aujourd’hui ?

 « Il ne faut toucher aux lois que d’une main tremblante. Les lois inutiles affaiblissent les lois nécessaires »*.

  Il existe des modalités précises pour parvenir à cette fin. Le problème justement est qu’actuellement ces modalités sont impossibles. Modifier la constitution ne peut se faire que de deux façons, soit par la réunion du parlement en congrès** (Sénat plus Assemblée Nationale). Il faudra alors pour adopter un texte une majorité des trois cinquièmes.  Soit  la voie référendaire. Mais c’est compter sans les élus actuels qui,  vent debout contre toute réforme  par crainte de perdre leur fromage, feront tout pour que cette majorité des trois cinquièmes n’existe pas. D’autre part, les politiques qui savent que les Français profiteraient de l’occasion d’un référendum pour les désavouer, ne veulent pas de cette consultation du peuple.

 Alors c’est l’impasse et, à part le retour d’un Général de Gaulle, ou une explosion sociale, nous sommes condamnés à subir ce millefeuille. Et les élus, dans l’unique souci de se valoriser, dépenseront encore sans compter l’argent des contribuables. Une réforme impossible donc, mais cela on a soigneusement oublié de vous le dire.

 

Pau, le 10 mars 2015

Par Joël BRAUD

*Charles-Louis de Secondat, baron de la Brède et de Montesquieu.

**Article 89 de la constitution.

 

L’immobilisme est en marche.

 

imgres« L’immobilisme est en marche. Rien ne saurait l’arrêter ». Comment ne pas emprunter à Edgar Faure cette formule au moment où de tout bord on entend les politiques s’élever avec véhémence contre le projet de réforme des régions et des départements ? Mais que défendent-ils exactement derrière leurs propos sirupeux ?

 Depuis maintenant plus de cinq ans, la commission Balladur consulte à tout va sur la réforme des structures territoriales. Tout le monde sait bien qu’un jour ou l’autre en France, il faudra sortir de ce qui fait de nous une exception en Europe et diminuer ce mille-feuille qui nous rend ridicules. Le constat existe et ceux qui disent ne pas avoir été informés ou qui prétendent qu’ils n’ont pas été consultés sont des menteurs.

 En France nous avons 36 683 communes (un tiers de la totalité des communes des pays européens), 101 départements qui, créés sous la révolution,  sont devenus trop petits et 24 régions que l’on considère comme très nombreuses et non conformes à la taille habituellement observée chez nos voisins. Ajoutons les intercommunalités, les syndicats de communes et les métropoles. La réforme engagée vise à diminuer le nombre des communes en imposant des intercommunalités d’au moins 20 000 habitants en faisant disparaître les départements et en divisant par deux (14 en réalité) le nombre des régions.

 Nos voisins l’ont fait, en Allemagne par exemple dans les années soixante-dix, avant la réunification, il y avait environ 25 000 communes. Par décision des politiques, qui d’ailleurs n’a pas soulevé de révolution, ce nombre a été ramené à 8 000. Puis après la réunification, une procédure comparable a fait en sorte que l’Allemagne ne compte aujourd’hui que 12 000 communes,  pour un pays de 82 millions d’habitants. En Italie, Matteo Renzi s’attaque au problème, il est en passe de réussir.

 Chez nous en France, les élus, la classe politique tout entière, venant d’apprendre que les départements vont être supprimés et que les régions vont être seulement 14 au lieu de 24 freinent des quatre fers en utilisant toutes les arguties possibles parmi les plus malhonnêtes. Peu leur importe ce que pense l’opinion publique.

 Ainsi  ils affirment ne pas avoir été consultés, tu parles ! La commission Balladur n’a fait que ça. Mais il faut discuter, discutailler et surtout ne pas avancer.

Ils proclament que cette réforme est insuffisante, tu parles ! Il s’agit d’une façon déguisée de retarder l’échéance en tentant d’imposer des mesures plus larges. Diversion.

Enfin ils n’hésitent pas à lister de prétendus inconvénients  qui s’opposeraient au but recherché : trop cher, trop compliqué, tout va être bloqué. Faux !

 Mensonges que tout cela. Ecoutons les arguments développés, à commencer par ceux de Jean-Jacques Lasserre, sénateur des Pyrénées Atlantiques, président du groupe Forces 64 au conseil général et ancien président du conseil général des Pyrénées Atlantiques. Dans le journal « La République des Pyrénées (7/8/ et 9 juin 2014) avec un art consommé de celui qui manie à merveille la langue de bois, il peine à trouver des arguments pour le maintien des départements. De son côté Dominique Bussereau président du conseil général de la Charente-Maritime espère le rattachement de son département avec la région Aquitaine. Si on les écoute on verra qu’ils ont tous leur mot à dire sur le projet de diminution des régions ; ce ne sont là que des procédés dilatoires.

 Il est malheureusement une autre réalité qui, elle, conduira cette réforme voulue par l’actuel pouvoir en place, à perdre son identité ; c’est le retard pris pour s’engager sur le terrain de la simplification des strates. Les bonnes réformes ne se font que dans les deux premières années du mandat présidentiel, au-delà elles sont vouées à être dénaturées. D’autre part, le gouvernement et le Président de la République ont pris conscience tardivement que pour supprimer les départements il faudra réformer la constitution. Cette réforme ne pourra se faire que de deux façons, soit réunir le parlement en congrès à Versailles et obtenir la majorité des trois cinquièmes qui actuellement n’existe pas, soit utiliser la voie référendaire. Mais cette seconde solution comporte le risque que les Français, comme toujours, se trompent de scrutin et votent pour ou contre le président de la république au lieu de répondre à la question posée.

 En réalité, la véritable préoccupation des barons locaux, c’est le maintien de leurs avantages et de leur part du fromage,  et peu importe l’intérêt général. Devant tant d’immobilisme, ce qui devrait être une grande réforme ne sera qu’une montagne qui accouche d’une souris.

  Pau, le 9 juin 2014

   Par Joël Braud