Qui trop embrasse, mal étreint.
«Chaque génération, sans doute, se croit vouée à refaire le monde. La mienne sait pourtant qu’elle ne le fera pas. Mais sa tâche est bien plus grande. Elle consiste à empêcher que le monde se défasse»
Albert Camus, à l’occasion de la remise du prix Nobel de littérature.
Manifestement, notre Président n’a pas été convaincu par ces pensées et conseils. Avec une détermination sans faille, il a décidé justement, de défaire notre monde, à la hussarde, même. Il est, pour cela, non seulement fidèle à ses engagements, mais tout à fait en phase avec la pensée unique internationale dont l’objectif est de multiplier (croissance), en divisant (individualisme), pour mieux additionner (les bénéfices) ; peu importe les soustractions subséquentes chez les autres, la politique de l’autruche, en somme.
Une telle démarche est bien sûr uniquement politique, économique et financière, elle se refuse à tenir compte de la nature de notre monde, de la société qui l’habite, de son fonctionnement durable. Les dirigeants du monde et de la France n’ont jamais vu plus loin que le portefeuille, sans se soucier des déséquilibres de plus en plus nombreux et redoutables qui atteignent progressivement le seuil de l’irréversible.
Petit rappel pour ceux qui auraient perdu de vue la nature du monde biologique et culturel :
+ C’est un ensemble de structures en déséquilibre permanent, fragiles donc, du fait qu’elles reçoivent, de l’univers, trois flux incessants : Energie, Matière, Information. Ces flux l’ont construit, l’entretiennent, mais menacent aussi sans arrêt son existence.
+ Les structures en jeu sont toutes des écosystèmes complexes qui répondent à certaines propriétés :
++ Elles ont de perpétuels échanges avec l’environnement.
++ Elles sont composées d’un très grand nombre d’éléments différents qui sont en interrelations et interactions non linéaires, en réseaux, réalisant des rétroactions.
Les éléments dépendent tous les uns des autres.
++ Sous la pression du nombre, de l’intensité, de la diversité des niveaux d’organisation, des actions et réactions multiples, des entités nouvelles imprévisibles et aléatoires apparaissent appelées émergences réagissant, secondairement, sur les éléments eux-mêmes. Il en résulte :
+++Un élément évolue différemment suivant qu’il est isolé ou dans un système d’accueil (espèce isolée ou en présence d’autres espèces).
+++ Plus il y a d’éléments, de relations et d’actions, plus il y a d’émergences, donc d’incertitudes.
Non, la société n’est pas constituée d’individus juxtaposés (individualisme) qui évoluent séparément et qui doivent être gérés chacun de leur côté : c’est un non sens de considérer qu’il n’y a pas de liens entre les hommes, les femmes, les jeunes , les vieux, les boulangers, les politiques, les chefs d’entreprises, les salariés, les terroristes, les violonistes, les agriculteurs, les cheminots, le métropolitain et le rural…., le climat. Réformer à part, par des lois différentes, l’enseignement, les retraites, le travail, la sécu, l’agriculture, l’alimentation, le réchauffement climatique, la pollution, le chômage, la pêche….le terrorisme…, c’est absolument le type du raisonnement linéaire qui est voué à l’échec, pire même, qui voue à la désorganisation, car tout réagit sur tout. Faire éclater les entités fonctionnelles comme la SNCF, le bloc «agriculture, monde paysan, industrie agroalimentaire, alimentation, produits phytosanitaires, pollution, ..»,…. c’est diviser pour mieux détruire.
Cette chienlit actuelle, s’enracine dans l’histoire. Citons seulement, pour des questions de temps et d’espace, quelques événements significatifs ayant contribué à augmenter les échanges, relations et interactions : hausse de la démographie, colonisation, exploitation des richesses du sol, du sous-sol et des hommes, comme au moment du boom industriel quand notre industrie avait besoin de matières premières et de main d’œuvre ; plus récent, guerres d’Irak, de Libye, de Syrie, le prélèvements des richesses dans tous les pays, la métropolisation, le tourisme, la croissance : fabrication, transformation, transports, consommation, rejet des inutiles, d’où la pollution généralisée de la terre, de l’air, des eaux, des esprits et des corps, mondialisation du commerce,… les catastrophes climatiques.
Devant une telle augmentation des facteurs et des échanges, depuis des années, rien d’anormal que de nombreuses émergences imprévisibles et aléatoires surviennent : «populismes», crises migratoires, racisme, revendications dans tous les domaines, inégalités, conflits commerciaux, religieux, financiers, économiques, sociaux, climatiques.
Des tentatives «politiquement admissibles et médiatiquement convaincantes» se succèdent mais, comme il y a trop, et de plus en plus, de paramètres essentiels à maîtriser en même temps, il n’est pas possible de prévoir la suite ;
la solution trouvée est d’en négliger la plupart, de retenir ceux qui arrangent afin de supprimer la complexité, donc non seulement de ne rien résoudre du tout mais même de faire empirer les émergences !
Les chiffres obtenus alors, dont nous sommes inondés, sont complètement en dehors de la réalité, ils ne servent qu’à démontrer «la justesse» des décisions prises ou à prendre, en attendant l’échec auquel on trouve aussitôt, grâce aux chiffres, une autre raison ! De toute manière, en général,
on ne lutte pas contre les causes mais seulement contre les conséquences car, dans le premier cas, on perdrait de l’argent alors que dans le second certains en gagnent..
Dans un autre domaine, au « big data » à la mode en ce moment en informatique/statistique : la NSA écoute la terre entière et enregistre tout, par contre il lui est impossible de traiter ce qui est enregistré, trop de choses.
En France, si l’on considère toutes les réformes réalisées et prévues à plus ou moins brève échéance, les interférences sont telles que plus personne n’est capable de suivre, y compris spécialistes et experts, car les retombées dévastatrices jaillissent dans tous les domaines, semant l’incompréhension, le désarroi, l’angoisse, la colère, la violence…Les causes ?
Ces Français qui n’y comprennent rien aux vertus du libéralisme !
Macron n’est pas le grand stratège universel, la grande intelligence qui tient compte des «petits, des obscurs et des sans-grades», la grande sensibilité, qui a compris ce qu’il convenait de faire pour relever la France et les Français ; son histoire ne l’a pas conduit à utiliser l’ascenseur social, il est devenu général sans avoir été troufion, patron sans avoir été au départ apprenti balayeur et avoir gravi les échelons de la connaissance du terrain ; par contre, il a fait beaucoup de théâtre, ce qui aurait pu lui inspirer la démarche définie par A. Camus sur l’artiste :
«les vrais artistes ne méprisent rien ; ils s’obligent à comprendre au lieu de juger.»
Il n’est pas préparé à la compréhension de la vie des abandonnés de l’existence qu’il domine de toute son assurance ; il a seulement compris ce qu’il fallait faire pour amener des capitaux en France et faire fructifier une économie qui détruit tout sur son passage, y compris, à terme, l’économie elle-même ! Sa devise est : «Aide-toi et le ciel t’aidera». Malheureusement, le ciel, appelé par les citoyens, «État Providence», est fauché ; «On» l’a ruiné en privatisant tous ses avoirs ; il faut donc diminuer les «dingues» charges sociales et «responsabiliser les pauvres !!!», pas les autres sans doute !
Alors ! Quelle solution ?
Dans l’état d’esprit actuel, aucune ! Les mesures jugées incontournables ne font qu’activer la décomposition de l’union, de la collaboration, de l’empathie, du partage des richesses, donc de l’envie de lutte et d’efficacité. Comme ils sont loin les grands principes élaborés par le Conseil National de la Résistance !
Non, ce n’est pas mieux chez les autres, l’actualité nous le rappelle constamment !
Il faudrait repartir avec d’autres postulats réduisant le nombre de paramètres comme le passage de la compétition à l’union, en France et en Europe pour commencer. L’espoir résiderait dans le développement actuel de petites collectivités vivant le plus possible localement, en économie circulaire ; un tel maillage, en abaissant drastiquement le nombre des éléments de l’écosystème, permet une maîtrise plus réalisable du déséquilibre ; malheureusement, ce n’est guère possible tant que l’économie favorisera la métropolisation et l’intensité des échanges.
Nous allons comme on dit, dans le mur, de l’aléatoire et de l’imprévisible ; ce sont les seules certitudes ; les catastrophes environnementales s’abattent, le feu nucléaire, actuellement, rentre même, à l’international, dans l’ère du probable avec les malades qui dirigent le monde, comme ces deux pigeons, Kim et Trump qui s’aiment d’amour tendre !
Signé Georges Vallet
crédits photos:citation-celebre.leparisien.fr