Démocratie(s)

imgresCertains événements piochés dans l’actualité conduisent à s’interroger sur les possibles exercices de la démocratie. D’un côté il y a ceux qui s’expriment et qui ne sont pas écoutés, ceux dont l’avis est sollicité mais qui ne se sentent pas concernés et ceux qui sont représentés et se plaignent de leurs élus. Différentes conceptions du pouvoir du peuple par le peuple et pour le peuple.

Ce mouvement qui s’étend maintenant dans les grandes villes de France, « Nuit debout », ne finit pas d’interpeller tous les observateurs. Ils ne comprennent pas vraiment ce que veulent ces jeunes qui dissertent à n’en plus finir sur les nouvelles formes que devrait adopter notre démocratie. Un slogan a retenu mon attention : « Ce n’est pas aux gens de pouvoir d’écrire les règles du pouvoir ». La formule est aussi belle que vide de sens. L’utopie du pouvoir qui est dans la rue, comme cela se disait en 68, est de retour. Mais c’est vrai que l’utopie a quelque chose d’enthousiasmant, qui permet de rêver à un monde meilleur. Cependant arrive un moment où malheureusement ce rêve doit prendre fin : lorsqu’on prend conscience que ce n’est qu’un rêve et que les illusions s’enfuient. Ce rêve se nomme la démocratie directe, sans doute la forme la plus séduisante de ce système de gouvernance, aussi séduisante qu’irréaliste. Comme l’anarchie, sa proche parente, elle ne se réalise que dans l’imagination. On écoute pour ne pas décevoir et parce que on ne peut se désintéresser d’un mal vivre. Mais on pense que cela va se dissoudre dans l’air du temps. Il en restera peut-être quelques enseignements…

Récemment plus proche de nous, dans les limites de la nouvelle région, Aquitaine plus Limousin, plus Poitou-Charentes, les élus en place cherchent des idées, ils sont comme en panne d’imagination. En effet le problème est d’importance, pensez-donc, il s’agit de trouver un nouveau nom à ce nouveau découpage administratif qui a pris forme depuis le début de l’année. Alors on sollicite le bon peuple, on lui demande si, lui, de son côté, avec son imagination qui ne connaît pas de limites, n’aurait pas une idée. Comme il est difficile de mobiliser les esprits sur un sujet de cette nature, on bat la campagne, on multiplie les annonces, on met la presse à contribution. Peu de propositions sont faites et lorsqu’elles le sont, elles paraissent originales, voire farfelues et en tout cas indignes d’être prises en compte. On a même dit, mais cela venait d’un plaisantin, que parmi les propositions l’un avait formulé : « Apoil ». Cet acronyme partait de A comme Aquitaine – Poi comme Poitou et L comme limousin. Voilà un bel exemple de la démocratie participative. On sollicite le peuple sur des sujets sans importance qui ne modifieront en rien la gouvernance confiée aux élus et c’est là sans doute son principal intérêt. Le risque c’est que, sous prétexte de démocratie participative, un jour, par erreur, on pose au peuple une question lourde de conséquences, comme : « Faut-il supprimer les impôts ». Je n’ose imaginer la réponse.

Et enfin il y a la situation que nous vivons actuellement et qui se nomme la démocratie représentative. Le peuple est représenté par des élus qui ont proposé un programme qu’ils se sont engagés mordicus à mettre en place. On sait maintenant que « les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent » (Henri Queuille). L’expérience le confirme tous les jours mais le peuple est mécontent et se sent trahi. A juste raison ou pas, il trouve que ce système présente, par certains côtés, comme une forme de trahison. La preuve, les partis politiques sont en perte d’audience et le monde politique se sent discrédité. Comme le disait Tony Benn, nous devons poser constamment cinq questions à ceux qui nous gouvernent :
– Quel pouvoir avez-vous ?
– D’où le tenez-vous ?
– Dans l’intérêt de qui l’exercez-vous ?
– A qui rendez-vous des comptes ?
– Comment peut-on se débarrasser de vous ?

La démocratie reste le moyen de gouvernance le plus juste et respectueux des aspirations de chacun mais toutes ses formes ne sont pas réalistes. Et si l’on raisonne comme Winston Churchill on convient que « La démocratie est un mauvais système, mais elle est le moins mauvais de tous les systèmes.»

Pau, le 20 avril 2016
par joël Braud

Pau rétrograde

imagesLa mise en place de la région apporte des modifications dans le classement des villes à plus forte démographie. Si jusqu’à ce début 2016, la capitale béarnaise était la deuxième ville de l’Aquitaine en termes de population, elle vient de rétrograder en 4 ème position. Plus grave sa population décline régulièrement. Existe-il un moyen de renverser la tendance et de mettre fin à cette hémorragie ?

L’INSEE vient de publier les chiffres du dernier recensement de 2013. Selon cet organisme qui est considéré comme étant la référence dans le domaine, la ville de Pau ne compte plus que 77 573 habitants. Oui, « ne compte plus que », parce que ce chiffre est en baisse depuis 2007. En 2006 on recensait pour la ville 83 903 habitants, puis 84 978 en 2007 pour passer ensuite à 84 036 en 2008.
Depuis 2008 la baisse est constante. Ce sont donc entre 2007 et 2013, 7405 habitants qui ont déserté la capitale béarnaise, soit 8,71%.

Promenez vous dans la ville et amusez-vous à compter les pas-de-porte commerciaux qui sont fermés, vous pourrez ainsi concrétiser un certain malaise. Les rues les plus atteintes par cette déshérence sont la rue des Cordeliers et la rue Carnot auxquelles il faut ajouter le centre commercial Bosquet dont les magasins continuent à ne pas trouver de repreneurs. D’ailleurs ce centre que nous avons connu dynamique, devient triste et peu achalandé (achalandé :qui a de nombreux chalands, c’est-à-dire de nombreux clients). En raison de l’état dans lequel il se trouve maintenant, il est difficile d’imaginer son renouveau.

Ce bien pénible constat ne permet pas de connaître les causes du dépeuplement de la cité. Une autre question vient à l’esprit, celle de savoir s’il est ou non réversible. Pourquoi cette baisse de la population a-t-elle débuté en 2007 ? Que des villes d’importance comparable connaissent la même évolution ne justifie rien, ni n’apporte d’explications à la situation particulière de Pau.

La pression fiscale locale ne cesse de croître et cela plus vite que l’inflation. Les élus affirment le contraire mais plus personne ne les croit. Cet élément devient décisif dans le choix des acheteurs de biens immeubles. Ainsi tous les professionnels de l’immobilier le reconnaissent, la question sur le montant des taxes, qu’elles soient d’habitation ou foncière, est systématique et pèse sur la décision de l’éventuel acquéreur. Pau est d’ailleurs la plus fortement imposée des villes de l’agglomération ; il ne faut pas chercher ailleurs le fait que la population de ces dernières augmente à l’inverse de celle de la capitale du Béarn.

Les transports sont également un élément qui ne peut être ignoré. A trop vouloir dissuader de l’utilisation de la voiture dans le centre de la ville, on finit par décourager les éventuelles installations. Le coût du stationnement en surface a augmenté. Le prix minimum accepté par un parcmètre est passé de 0,40 à 0,50 euro. Les transports en commun ont récemment augmenté, le prix d’un trajet est passé de 0,82 euro à 0,84 euro, soit une hausse de 2,43%, au delà de l’inflation. Sont-ce là les meilleurs choix pour rendre la ville attirante et facile à vivre ? La mise à la disposition du public de véhicules de location par la municipalité s’est révélée être un fiasco.

Enfin et cet élément est sans doute un des plus déterminant, les commerces du centre ville n’attirent plus comme auparavant. L’implantation de nombreux centres commerciaux en périphérie, disposant de stationnements gratuits et de galeries marchandes dont les surfaces ne cessent de s’accroître rend de moins en moins attrayant le choix d’une domiciliation à Pau. Quel intérêt d’habiter à Pau quand l’accès aux grandes surfaces se fait très aisément depuis une autre ville de l’agglomération ?

Pau est donc devenue la quatrième ville de la nouvelle grande région aquitaine, elle est devancée par Bordeaux, Limoges et Poitiers. Cette situation semble irréversible, à moins que les élus, au lieu de clamer inutilement que notre ville est une grande ville, acceptent de mieux gérer son budget pour qu’elle perde son image de la ville la plus lourdement taxée de la région. Alors peut-être de nouveaux habitants viendront s’installer. D’ici là il y a de l’eau à passer sous le pont du XIV juillet.

Pau, le 7 janvier 2016
par joël Braud

Indigestion

imagesSamedi dernier, à propos de la réforme territoriale, la page 39 de notre quotidien local, La République, révélait deux points de vue contrastés…en apparence. Le premier, écrit, semble t-il à trois mains (?), par les actuels présidents des régions Aquitaine, Limousin et Poitou-Charentes. Surprenant d’abord en ce qu’ils ne pas semblent pas considérer que le projet de la grande région qui les concerne ( et nous concerne) ressort d’une obligation légale mais d’une sorte d’aimable invitation à « se rapprocher » !

Suivi des considérations habituelles et promesses rassurantes, sur la nécessité de ne rien précipiter, de conserver la proximité de décision, de maintenir les services publics de qualité… ! Bref. Selon une formule désormais consacrée : « faire mieux et plus, ensemble ». Ou, comme disait un élu de la Belle Epoque : « demander plus à l’impôt. Et moins au contribuable » !

Qui s’en plaindrait ? Probablement pas le porte-parole du PCF qui, quelques lignes plus bas, disait , en fait, à peu près tellement la même chose que, si personne ne veut rien changer, il n’est peut être pas vraiment utile de faire une réforme territoriale.

D’autant que, – entre les Communautés de communes sensées se substituer peu à peu aux communes au nom d’une mutualisation génératrice d’économies (Elles ont toujours bon pied bon œil et les économies promises se sont, finalement, traduites par une augmentation vertigineuse des dépenses) – les « nouveaux cantons » qui, sans se soucier d’une réalité qui depuis 235 ans, a, probablement, quelque peu changé, se sont surtout attaché à ménager les espaces électoraux – ou le département qui pour pallier sa disparition programmée s’est, notamment, ici ou là,dépêché de bétonner son territoire par de coûteuse « Maisons du Département » d’une douteuse utilité – jusquà présent, la question de supprimer un étage de notre désormais célèbre mille-feuilles administratif a, toujours, finalement, abouti, soit au statu quo, soit à l’apparition d’un couche de plus. Et, comme il semble probable que, pas davantage que leurs collègues, aucun de nos trois « barons socialistes » n’envisagent de renoncer à sa couronne. Ne vont-ils pas imaginer, ensemble, une sorte de « super-région » ? Étage administratif supplémentaire qui rendra notre mille-feuilles carrément… indigeste !

Maurice Meireles PONTACQ

L’immobilisme est en marche.

 

imgres« L’immobilisme est en marche. Rien ne saurait l’arrêter ». Comment ne pas emprunter à Edgar Faure cette formule au moment où de tout bord on entend les politiques s’élever avec véhémence contre le projet de réforme des régions et des départements ? Mais que défendent-ils exactement derrière leurs propos sirupeux ?

 Depuis maintenant plus de cinq ans, la commission Balladur consulte à tout va sur la réforme des structures territoriales. Tout le monde sait bien qu’un jour ou l’autre en France, il faudra sortir de ce qui fait de nous une exception en Europe et diminuer ce mille-feuille qui nous rend ridicules. Le constat existe et ceux qui disent ne pas avoir été informés ou qui prétendent qu’ils n’ont pas été consultés sont des menteurs.

 En France nous avons 36 683 communes (un tiers de la totalité des communes des pays européens), 101 départements qui, créés sous la révolution,  sont devenus trop petits et 24 régions que l’on considère comme très nombreuses et non conformes à la taille habituellement observée chez nos voisins. Ajoutons les intercommunalités, les syndicats de communes et les métropoles. La réforme engagée vise à diminuer le nombre des communes en imposant des intercommunalités d’au moins 20 000 habitants en faisant disparaître les départements et en divisant par deux (14 en réalité) le nombre des régions.

 Nos voisins l’ont fait, en Allemagne par exemple dans les années soixante-dix, avant la réunification, il y avait environ 25 000 communes. Par décision des politiques, qui d’ailleurs n’a pas soulevé de révolution, ce nombre a été ramené à 8 000. Puis après la réunification, une procédure comparable a fait en sorte que l’Allemagne ne compte aujourd’hui que 12 000 communes,  pour un pays de 82 millions d’habitants. En Italie, Matteo Renzi s’attaque au problème, il est en passe de réussir.

 Chez nous en France, les élus, la classe politique tout entière, venant d’apprendre que les départements vont être supprimés et que les régions vont être seulement 14 au lieu de 24 freinent des quatre fers en utilisant toutes les arguties possibles parmi les plus malhonnêtes. Peu leur importe ce que pense l’opinion publique.

 Ainsi  ils affirment ne pas avoir été consultés, tu parles ! La commission Balladur n’a fait que ça. Mais il faut discuter, discutailler et surtout ne pas avancer.

Ils proclament que cette réforme est insuffisante, tu parles ! Il s’agit d’une façon déguisée de retarder l’échéance en tentant d’imposer des mesures plus larges. Diversion.

Enfin ils n’hésitent pas à lister de prétendus inconvénients  qui s’opposeraient au but recherché : trop cher, trop compliqué, tout va être bloqué. Faux !

 Mensonges que tout cela. Ecoutons les arguments développés, à commencer par ceux de Jean-Jacques Lasserre, sénateur des Pyrénées Atlantiques, président du groupe Forces 64 au conseil général et ancien président du conseil général des Pyrénées Atlantiques. Dans le journal « La République des Pyrénées (7/8/ et 9 juin 2014) avec un art consommé de celui qui manie à merveille la langue de bois, il peine à trouver des arguments pour le maintien des départements. De son côté Dominique Bussereau président du conseil général de la Charente-Maritime espère le rattachement de son département avec la région Aquitaine. Si on les écoute on verra qu’ils ont tous leur mot à dire sur le projet de diminution des régions ; ce ne sont là que des procédés dilatoires.

 Il est malheureusement une autre réalité qui, elle, conduira cette réforme voulue par l’actuel pouvoir en place, à perdre son identité ; c’est le retard pris pour s’engager sur le terrain de la simplification des strates. Les bonnes réformes ne se font que dans les deux premières années du mandat présidentiel, au-delà elles sont vouées à être dénaturées. D’autre part, le gouvernement et le Président de la République ont pris conscience tardivement que pour supprimer les départements il faudra réformer la constitution. Cette réforme ne pourra se faire que de deux façons, soit réunir le parlement en congrès à Versailles et obtenir la majorité des trois cinquièmes qui actuellement n’existe pas, soit utiliser la voie référendaire. Mais cette seconde solution comporte le risque que les Français, comme toujours, se trompent de scrutin et votent pour ou contre le président de la république au lieu de répondre à la question posée.

 En réalité, la véritable préoccupation des barons locaux, c’est le maintien de leurs avantages et de leur part du fromage,  et peu importe l’intérêt général. Devant tant d’immobilisme, ce qui devrait être une grande réforme ne sera qu’une montagne qui accouche d’une souris.

  Pau, le 9 juin 2014

   Par Joël Braud

ASPOROTSITTIPI & L’U.E.

Corniche basqueVous devez vous demander où je veux en venir. C’est très simple : un bon exemple vaut souvent mieux qu’une longue théorie. Alors, suivez-moi. Le lieu est magique.

La ferme Asporotsittipi est située sur la Corniche basque. Le Conservatoire du littoral est en train de l’aménager pour en faire un centre d’interprétation de la Corniche basque qui accueillera les visiteurs. Précédemment elle était devenue une discothèque. Cette transformation entre dans le cadre du projet Txinbadia qui comporte plusieurs actions en direction de différents milieux naturels (marais de Txingudi, corniche basque…).

Les travaux sont évalués à 1,7 million d’euros. Ils seront financés par :

– le Conseil général des Pyrénées atlantiques 388 856 euros,

– la Région 457 500 euros,

– l’Europe  676 149 euros,

– le Conservatoire du littoral 192 180 euros.

Ces données sont instructives. Elles montrent d’une part que l’Europe joue un rôle important dans une telle opération, contrairement à ce que proclament certains qui pensent que l’Europe ne sert à rien. Elles montrent aussi qu’un tel projet passe par plusieurs instances. Ce  n’est pas anormal, et on peut même penser qu’il est bon que les projets importants soient examinés sous plusieurs angles et contrôlés à  plusieurs niveaux. Mais on réalise aussi que le mille-feuille administratif a plus de strates qu’on pourrait le penser. Si le cas est un peu particulier en raison de son caractère transfrontalier, n’y a-t-il pas en France trop d’étages administratifs ?

Ce qui se passe au niveau de l’Europe doit aussi nous mettre en garde contre des mesures qui peuvent paraître séduisantes mais qui n’apporteront pas nécessairement toutes les économies escomptées. Fusionner des régions peut être légitime. Mais il est probable que les villes qui perdront le statut de capitale régionale demanderont des compensations. On pourrait alors assister à des dispositions aussi choquantes (et dispendieuses) que la migration mensuelle des parlementaires européens de Bruxelles à Strasbourg.

Voir la réforme territoriale sous cet éclairage européen peut avoir son intérêt, mais ce n’est pas notre propos. En sens inverse, on peut se demander s’il ne serait pas opportun de considérer l’avenir de l’Europe avec l’expérience de notre pays. Il a connu un aménagement du territoire volontariste avec la DATAR. Son bilan mériterait d’être médité. On constate aujourd’hui un mouvement en faveur des « métropoles régionales » dont on peut se demander s’il est bien fondé si son effet essentiel est de vider les territoires de leur substance et de renchérir les coûts (prix des locaux, coûts des aménagements et infrastructures…).

Au niveau européen (et mondial), c’est à une optimisation fiscale exacerbée que l’on assiste. Le Luxembourg et l’Irlande en profitent. Mais est-il sain que les profits générés par SFR en France aillent alimenter les caisses du Luxembourg ? Ce n’est là encore qu’un exemple. Mais il montre que l’Europe est l’affaire des citoyens et qu’il faut qu’ils se saisissent de l’occasion d’exprimer leur avis par un vote.Aussi, dimanche, pas de balade sur la Corniche, la Vire des fleurs ou ailleurs avant d’avoir voté !

– par Jean-Paul Penot

Le désengagement de l’Etat.

imagesSoucieux de faire des économies, l’Etat a annoncé que les prochaines dotations aux collectivités locales, Régions, Départements et Communes, seraient revues à la baisse. Cela n’est pas sans créer une forte inquiétude chez les élus locaux qui, en cette période d’élection et en raison du climat actuel, rechignent à envisager une augmentation des prélèvements. Mais il y a plus insidieux encore.

 Il existe, nous le savons, plusieurs formes de dotations consenties par l’Etat. Les dotations de fonctionnement qui s’élèvent à 41,5 milliards d’euros pour 2013 et les dotations d’équipement qui sont évaluées à 20 milliards. Au total 61,5 milliards ont été versés aux collectivités territoriales. Actuellement le désengagement de l’Etat est programmé mais on ne sait pas dans le détail à quelle hauteur.

 Et même lorsque ce calcul sera effectué, il ne tiendra pas compte des conséquences de certaines économies du pouvoir central.

 Ainsi ces jours-ci, nous apprenons que la Gendarmerie Nationale n’a plus les moyens, en raison de la faiblesse de son budget, de payer les loyers de certains locaux qu’elle occupe. Ces loyers sont pour la plupart dus aux départements et aux communes. Officiellement il ne s’agit que d’un report, mais en la matière, on connait le sens du mot report. La direction générale de la gendarmerie nationale avoue un manque de 16 millions d’euros. Devra-t-elle engager une procédure d’auto-expulsion locative pour non paiement de loyer ?

 Toujours dans le domaine de la sécurité, les créations de polices municipales se multiplient. Pau en est un exemple significatif. Dans notre Béarn, seules les très petites communes n’en sont pas dotées. Leurs missions qui paraissent essentiellement répressives, ne modifient en rien celles initialement confiées à  la police nationale. Pourtant cette dernière arguant d’une baisse de ses effectifs, se retire volontairement d’un certain nombre de ses charges. Ces chevauchements de compétence coûtent cher au contribuable qui reste persuadé que sa sécurité est ainsi mieux garantie. Cela reste à démontrer.

 D’autres exemples pourraient être cités confirmant le désengagement des services de l’Etat.

 Mais tout le monde s’accorde à dire que l’Etat ne sera vertueux que lorsqu’il réussira à réduire son budget de fonctionnement. A quel prix ? Le contribuable est toujours en bout de ligne, il paiera, soit à l’Etat, soit aux collectivités locales.

                                                                                               Pau, le 29 octobre 2013

                                                                                               Par Joël Braud

Mille-feuille à la crème pépère

Dessin-humoristique decentralisation,L’organisation territoriale française empile les organisations. Celle moyenâgeuse des paroisses (nos communes), celle napoléonienne des Départements, (le préfet doit pouvoir parcourir son territoire en une journée de cheval) et celles plus récentes des Régions et des Intercommunalités.

Jamais nos politiques n’ont eu le courage de simplifier cet empilement d’archaïsmes car les politiques locaux, Maires et Conseillers Généraux soutenus par leurs obligés, les sénateurs, ont toujours préféré privilégier leurs pouvoirs (leurs intérêts ?) personnels à celui de l’efficience de la France.

On lira avec intérêt les nombreux rapports de la Cour des Comptes (dont celui de Novembre 2005 « L’Intercommunalité en France ») qui dénoncent depuis des années cet empilage désorganisé, fruit de l’égoïsme de nos élus, et qui coûte des milliards au contribuable. Tous nos voisins depuis les années 70, ont su évoluer. Pas la France.

Le résultat est une mutualisation inexistante, une armée de fonctionnaires territoriaux inutiles (500 000 emplois supplémentaires créés ces 20 dernières années), des bataillons d’élus et une dépense publique record, insoutenable dans une période de croissance nulle pour un Etat hyper endetté.

Pépère a donc tranché, mais pas dans le lard de notre mammouth décentralisé. Pire, il nous rajoute des « comités thèodules », validant ainsi le merdier ingérable de la décentralisation à la française.

Ce sont trois projets de loi qui ont été examinés lors du Conseil des Ministres du 10 avril, dans l’indifférence médiatique générale.

« Les projets de loi consacrent des collectivités chefs de file : la région pour le développement économique, le département pour l’action sociale. Les compétences de la région en matière de formation professionnelle sont confortées et la région se voit confier le pilotage du service de l’orientation. Pour favoriser, au niveau régional, la coordination entre collectivités, des Conférences territoriales de l’action publique doivent être créées. Dans ce cadre, des pactes de gouvernance territoriale répartissent les compétences entre collectivités. Des schémas d’organisation des compétences et de mutualisation de services seront également conclus et les intercommunalités seront renforcées. Pour les relations entre l’État et les collectivités territoriales, un Haut Conseil des territoires doit être créé comme lieu de dialogue entre l’État et les représentants des collectivités. Par ailleurs, les communautés d’agglomération et les communautés urbaines de plus de 400 000 habitants seront transformées en métropoles. Le statut de métropole tend à affirmer le rôle des grandes agglomérations comme moteurs de la croissance économique et de l’attractivité du territoire. Une métropole est dotée de compétences larges qui lui sont transférées par l’État, les communes, mais aussi par convention, par le département ou la région. Le projet de loi prévoit la création de la métropole Aix-Provence-Marseille au 1er janvier 2015, celle de Lyon au 1er avril 2015 et celle de Paris au 1er janvier 2016 » (Vie Publique .fr).

Création de « Conférences territoriales », de « pactes de gouvernance territoriale »,d’un « Haut Conseil des territoires », et plus anecdotiquement de « métropoles », sans suppression d’ailleurs du Conseil Général ou des communes. Il faut oser le faire !

Pourtant tout le monde s’accorde pour dire qu’il existe une prérogative calamiteuse : la « compétence générale » qui permet à toutes les couches du mille-feuille de s’occuper de tout, rendant ainsi totalement illisible le fonctionnement, y compris pour les élus eux mêmes. Tout le monde peut s’occuper de développement économique ou de social, de sport ou de culture, etc… Il en résulte un fonctionnement totalement anarchique, incompréhensible, ingérable, dispendieux. Il fallait bien sûr commencer par supprimer cette clause de compétence générale, c’était le minimum !

Que dire d’une organisation où le citoyen ne peut absolument pas comprendre qui fait quoi ?
Comment peut-il porter un jugement sur l’action des élus, puisqu’il ne sait pas ce qu’ils font ?
Comment peut fonctionner une démocratie sur ces bases ?

Au moment où on veut moraliser la vie politique française, où on veut chasser les conflits d’intérêt, le comportement des élus français est pitoyable.
Si l’on conserve cet empilement d’archaïsme, c’est parce que les Maires veulent défendre bec et ongles leur prérogatives, par exemple le PLU (Plan Local d’Urbanisme) qui permet de décider quelles parcelles seront constructibles et auront une valeur multipliée par 20 ou par 100, favorisant ainsi, entre autres (…), l’étalement urbain et la consommation effrénée de terres agricoles. Ou bien le droit de construire sa salle des fêtes utilisées vingt jours par an, tout comme celle de la commune voisine… Ou celui de ne pas optimiser les écoles en défendant au mépris de toute optimisation financière le « à chaque commune son école », …etc.

Pour être réélus, les Maires ou les Conseillers Généraux ont besoin de cette compétence générale qui leur permet d’attribuer des fonds à telle association sportive ou culturelle, qui permet au Conseiller Général du canton de distribuer quelques dizaines de milliers d’euro de subvention au boulanger du coin pour le renouvellement de son four à pain où à cette dame qui veut refaire des chambres d’hôtes, qui permet au Conseil Général de subventionner aussi tel club de rugby professionnel, ou de financer une improbable coopération internationale (« Tango à gogo au Conseil Général » AP du 19/11/2012 et « Au vert à Madagascar… » AP du 7/2/2011) …etc.
La liste serait interminable des méfaits et des surcoûts de la désorganisation actuelle de nos territoires.

Pourtant les solutions sont connues :

– Regroupement des communes pour un nombre de cellules démocratiques de base autour de 8000 au lieu des 36 600 actuelles.
– Suppression du Conseil Général avec transfert de ses compétences vers la Région et les intercommunalités (nouvelles communes regroupées)
– Remodelage de certaines Régions avec regroupements.
– Définition claire et unique des responsabilités des deux échelons restant.

Mais la France est indécrottable. La démarche alsacienne, exemplaire à bien des égards, a capoté à cause de rumeurs lancées par des minorités (syndicats de fonctionnaires, élus, …) du Haut Rhin et un désintérêt coupable des Alsaciens qui nous avaient habitués à mieux. Pourtant, la question reste posée : faut-il deux départements et une Région en Alsace ou en Corse ? En France le ridicule ne tue pas, et avec la dernière recette Hollande, le mille-feuille à la crème pépère, on n’aura pas avancé d’un pouce, comme d’habitude.

Dormez citoyens dormez, plus dur sera le réveil !

par Daniel Sango