BAP (Béarn Adour Pyrénées), lobby officiel de la CCI, rois du béton et du goudron, est à l’offensive, dans la presse et les colonnes d’Alternatives Pyrénées.
Pourtant, l’environnement économique n’est pas très favorable au gaspillage financier dans lequel ils s’ébattent inlassablement. Les budgets français et européens sont durablement en berne, et même les collectivités territoriales gaspilleuses au possible comme notre Conseil Général des Pyrénées Atlantiques ont enfin appris leur deuxième leçon d’arithmétique: la soustraction.
Enfin, pas complètement puisqu’une dizaine d’entre eux est encore partie se balader, sans raison, aux frais du contribuable, dans ce merveilleux site d’Iguazu en Argentine. ( » Indignez vous! » AP du 17/4/2013)
BAP pourtant censée être composée de chefs d’entreprise gestionnaires rigoureux ne regarde pas à la dépense. Rien n’est trop beau, mais c’est bien la raison d’être de ce lobby.
Dans son édition du 17/05 Sud Ouest rapporte les axes de l’action de BAP lors de leur AG ( « Doutes sur la Pau / Canfranc, l’échangeur de Morlaàs, vital » )
Commençons par le consensuel, le diffuseur de Morlaàs, prévu contractuellement, mais dans deux décennies seulement. Il faut bien sûr le faire, mais dans un cadre cohérent qui prend en compte l’ensemble de la circulation autour de Pau. Il peut ainsi permettre de doubler le périphérique entre lui et le diffuseur de Lescar. Mais c’est la totalité du périphérique qu’il faut doubler et avant tout le sud et son prolongement jusqu’à Gan.
Pourquoi BAP ne dit mot de la situation totalement bloquée tout autour de Pau?
Pourquoi BAP veut que convergent sur Pau routes et autoroutes et ne dit mot de ce que deviennent ces flux de véhicules bloqués aux portes de l’agglomération?
D’autant que Mme Lignières-Cassou ne veut plus voir de voitures dans l’agglomération… ( « Le plan de déplacement urbain fait fausse route! »AP du 3/12/2012)
On comprend bien sûr que la réalisation d’une voie rapide sud de Pau à Gan mettrait en péril le projet de l’inutile nouvelle route Oloron / Pau. Pourtant, l’attractivité de l’agglomération paloise et les gains de temps pour les Palois, les Oloronais et les Ossalois seraient très importants.
Concernant la Pau Oloron j’ai eu l’occasion de proposer une bien meilleure solution ( « Pau/Oloron, c’est la route actuelle qu’il faut améliorer! » AP du 27/02/2012) je n’y reviendrai pas. Sauf que, si aujourd’hui la liaison vient encore plus à l’Ouest pour éviter Arbus, comme certains le laissaient entendre dans un récent article, alors ce n’est plus une route pour relier Oloron et Pau. C’est autre chose, uniquement pour les camions espagnols et quelques riches Oloronais se rendant à Bordeaux.
Et que proposera alors BAP pour Pau / Gan?
BAP s’émeut du trafic de 18 000 véhicules jour sur la partie Nord du périphérique, mais curieusement ne propose rien pour l’entrée Nord (route de Bordeaux) avec ses 30 000 véhicules jour, (record départemental pour une deux voies) bizarre…et incohérent, d’autant que l’aéroport (géré par la CCI), la zone d’activité Nord et les habitants en ont bien besoin.
Je n’insisterai pas sur la LGV et son appendice douloureuse vers Pau. On ne tire pas sur les ambulances. Dans le classement des travaux en cours d’évaluation et qui sortira bientôt, les responsables ont déjà, et fort logiquement annoncé la couleur.
Ils ont déjà suffisamment de mal à savoir comment ils vont financer Bordeaux Toulouse et Bordeaux Hendaye et essayer de ne pas trop retarder ces projets. Je prends le pari que Toulouse sera devant, puis Bordeaux/Dax, quelques années après, et enfin, bien plus tard, Dax/ Espagne.
On sait depuis le début que le barreau de Pau ne se fera pas, BAP ferait mieux de travailler sur l’amélioration de l’existant en répondant entre autre à une question en fait posée plus haut: comment rendre l’inaccessible gare de Pau accessible dans un temps acceptable pour tous les habitants du bassin de vie ? Mais cela ne fait pas vendre beaucoup de goudron.
Le plus surprenant est pour maintenant. Pour notre lobby de la CCI, la TCP (Traversée Centrale des Pyrénées) serait jugée prioritaire!
Là vraiment on peut penser que ce choix s’est fait après une dégustation de petit manseng trop prolongée. C’est la seule explication que je trouve. Je passerai sur les déclarations du Consul d’Espagne rapportées dans l’article, enthousiaste soutien de ce tunnel qui en fait n’est qu’un trou financier soutenu par l’Aragon et Saragosse.
Ce monsieur n’a pas dû se rendre compte que l’Espagne (en cela modèle parfait pour BAP) grâce aux largesses de l’Europe et a un endettement substantiel a construit pléthore d’aéroports aujourd’hui en faillite ou fermés, des LGV pour une fréquentation ridicule et des autoroutes désertes. ( « Au pays de Poulit l’Enchanteur » AP du 10/12/2012 )
Il faudrait donc en plus un tunnel gigantesque pour évacuer à grande vitesse le flot ininterrompu du fret espagnol!
C’est pas sérieux!
La réalité c’est qu’aujourd’hui il existe une ligne orientale maintenant à l’écartement européen, et qui est inutilisée. Côté Ouest il en est de même, la capacité de transport de fret existe, elle est énorme.
Il faut savoir qu’aujourd’hui l’Espagne transporte par rail seulement 1% de son fret vers la France et entre 1 et 2% vers le reste de l’Europe. C’est à dire RIEN!
Rappelons aussi que 83% du fret de l’Espagne vers la France se fait par camion. Une folie écologique.
On a donc deux lignes inutilisées, disponibles pour le fret (Est et Ouest) correspondant d’ailleurs aux provinces espagnoles les plus actives, Pays Basque et Catalogne.
Comment peut-on soutenir qu’il faut une troisième ligne à grande vitesse pour le fret ? Ceci pour un coût gigantesque de 10, mais plutôt 15 milliards d’euro.
Je m’étonne que BAP, aréopage d’industriels avertis, ne place pas en priorité des priorités l’indispensable développement du fret ferroviaire simultanément en France et en Espagne.
Voilà un vrai combat intelligent dans tous les domaines.
Que propose BAP pour développer le fret ferroviaire ?
Il y a des actions simples: taxer le transport routier par un prix du gazole plus élevé que l’essence et par une taxe routière significative; s’attaquer aux coûts trop élevés de la SNCF pour le fret, entreprise d’une autre époque où la productivité doit être immensément améliorée; etc.
Non, BAP voudrait occuper toutes les pelleteuses de France pour creuser un tunnel !
D’ailleurs l’Europe ne s’y est pas trompée et en 2011 a déclassé le projet de TCP (PP 16) dans ses projets ferroviaires.
Pour compléter l’information des lecteurs, à défaut de celle de BAP, je rappelle qu’il existe un projet européen encore plus intelligent et partiellement concurrent avec le fret ferroviaire: « Les autoroutes de la mer » (Priority Project 21 au départ d’Algeciras sur l’arc méditerranéen et de Sines sur l’Atlantique vers la France et l’Europe du Nord) Ce projet vise à développer le fret maritime, solution économique et écologique.
Pour terminer, il est toujours étonnant de voir BAP passer sous silence l’ubuesque situation de nos aéroports régionaux. Pourtant, la CCI est bien placée pour être une force de proposition pour arrêter ce scandale qui se nourrit de l’argent des contribuables.
Un sujet pourtant clair, précis et qui s’inscrit idéalement dans le cadre de cette volonté de créer des synergies et de rapprocher Béarn et Bigorre.
Je prends le pari que nos professionnels du béton proposeraient la construction d’un troisième aéroport à mi- chemin…
Je propose donc à BAP de traiter en priorité ces différents thèmes, ils représentent des investissements efficients ou des économies substantielles pour des résultats très significatifs. Et le contribuable pourrait enfin rêver.
– par Daniel Sango