TAFTA – TTIP

imagesEssayez-donc de poser la question à votre entourage : « Que signifient cet acronyme et ce sigle ?». Peu parmi eux pourront répondre tant les négociations de ce traité se font dans l’opacité et le secret. De quoi s’agit-il ? Qui négocie ? Quelles pourront être les conséquences d’un accord qui n’est pas que commercial ?

Il sera difficile voire impossible d’analyser ici dans le détail le contenu et les conséquences du projet de traité qui est actuellement négocié. Jusqu’alors, c’était le silence, mais le président des États-Unis d’Amérique s’est rendu en Allemagne et il a largement évoqué cette négociation en espérant qu’elle aboutira à un accord le plus rapidement possible. Le sujet est devenu d’une brûlante actualité.

Que signifie l’acronyme TAFTA ? Transatlantic Free Trade Agreement – traité de libre-échange transatlantique.

Que signifie le sigle TTIP ? Transatlantic Trade And investissement Partnership – partenariat transatlantique de commerce et d’investissement.

La négociation qui en réalité a pris naissance le 22 novembre 1990 entre la Communauté européenne et ses 12 États membres et les États-Unis, a donné lieu à une «Déclaration transatlantique». Ce texte a pour objectif de promouvoir les principes de l’économie de marché, de rejeter le protectionnisme et d’étendre, de renforcer et d’ouvrir davantage le système commercial multilatéral.

Actuellement la négociation se fait dans le plus grand secret entre l’union européenne et les Etats-Unis. Le haut fonctionnaire européen chargé de celle-ci se nomme Ignacio Garcia Bercero. Les peuples des 28 Etats membres de l’union européenne (505 millions d’habitants) de même que leurs parlementaires nationaux ont été tenus à l’écart. Il n’y a pas eu jusqu’à maintenant de débat public sur ce sujet.

Le partenariat économique transatlantique vise à intensifier la coopération bilatérale en faveur de l’ouverture des marchés et s’engage à la suppression des entraves dans le commerce et les investissements. Tout est fait pour parvenir à une harmonisation des réglementations et des normes qu’elles soient salariales, sociales, sanitaires, phytosanitaires alimentaires, environnementales, mais aussi l’organisation des marchés publics et la protection des investisseurs à tous les niveaux : national, régional, départemental et local. Contrairement à l’affichage, ce ne sera pas un simple accord de libre-échange.

On peut donc s’interroger. Que vont devenir nos normes comme l’I.G.P. (Indication géographique protégée) A.O.C. et A.O.P. ? Pourra-t-on encore fabriquer des fromages avec du lait cru ? Sera-ton obligé de manger du poulet aux hormones après les avoir arrosés d’eau de javel ? Les O.G.M. seront-ils autorisés sans restriction ? L’exploitation du gaz de schiste sera-t-elle autorisée comme aux U.S.A. ? Le règlement des différends entre les firmes privées et les pouvoirs publics nationaux seront-ils de la seule compétence des tribunaux arbitraux indépendamment des juridictions nationales ?

Beaucoup d’inconnues qui ne peuvent que nous rendre méfiants d’autant que si l’accord est signé, il bénéficiera du principe de « living agreement ». Autrement dit demeurer vivant et être susceptible de modifications ; il comporte actuellement 46 articles.

« Quelque chose doit remplacer les gouvernements, et le pouvoir privé me semble l’entité adéquate pour le faire » (David Rockefeller). C’est ce qu’on appelle la mondialisation néolibérale, elle consiste à déléguer au secteur privé la maîtrise des choix, c’est à dire redéfinir le périmètre de compétence de l’État. Et nous Français, sommes-nous prêts à une révolution de nos usages et traditions ?

Pau, le 27 avril 2016
par Joël Braud

Crédit photo : Jour de colère

Bibliographie : Le grand marché transatlantique – La menace sur les peuples d’Europe de Raoul Marc Jennar – Editions Cap Bear (mars 2014). Raoul Marc Jennar est docteur en science politique, spécialiste des relation internationales, des questions européennes et du droit de l’Organisation Mondiale du Commerce.

Pétition : https://secure.avaaz.org/fr/stop_ttip_fr_loc/?akXjEkb

Elections européennes, TAFTA s’invite !

Tafta 3A peine sortie des municipales et de 2 mois de campagne, les Français, dans un mois, voteront aux européennes. La forte abstention lors des municipales et la participation habituellement faible au scrutin européen, font craindre une abstention record le 25 mai. Et pourtant…

Plus que jamais, le destin des nations qui la composent est entre les mains de l’Union Européenne (UE) ou plutôt de son exécutif, la Commission Européenne qui, rappelons-le, représente les intérêts de l’Union dans son ensemble et non les intérêts particuliers des pays de l’UE. La commission représente l’UE sur la scène internationale. Elle y négocie, entre autres, les accords commerciaux entre l’UE et d’autres pays.

Le 14 juin 2013, les Etats membres de l’UE ont donné mandat à la Commission Européenne pour négocier avec les Etats Unis (EU) un accord de libre-échange, le Transatlantic free trade area (TAFTA), dénommé aussi Transatlantic Trade and Investment Partnership (TTIP) ou encore, Partenariat Transatlantique de Commerce et d’Investissement (PTCI).

L’objectif du traité serait de créer un marché commun transatlantique de 820 millions de foyers. A terme, on en attendrait la création de 2 millions d’emplois, et selon le Centre for Economic Policy Research (CEPR), centre d’études sur la politique économique basé à Londres, un bonus annuel de 545 euros en moyenne par ménage de l’UE et de 655 euros par famille américaine.

Comment ? En facilitant les échanges transatlantiques : suppression des taxes aux frontières et des barrières non tarifaires (les normes, la règlementation, les quotas). Reconnaissons-le, des mesures positives pour le foie gras du Sud-Ouest !

En France, la presse grand public a très peu parlé du TAFTA jusqu’à présent. Et pourtant, c’est un enjeu de la prochaine élection européenne. Car c’est un accord sur lequel le parlement européen aura à se prononcer.
Le Président Hollande semble être pour, mais n’a que peu ou pas abordé le sujet lors d’une déclaration ou conférence de presse. Certains politiques sont contre et en soulignent les dangers : les représentants du front de Gauche, les représentants d’EELV, Marine Le Pen pour le Front National. Mais aussi Jean Arthuis, député UDI, qui se dit personnellement opposé à ce traité et ce pour 7 raisons majeures*. Enfin, les plus virulents des opposants dont ATTAC, se sont regroupés dans le Collectif #StopTafta

Dans ce projet très confidentiel à ce jour, n’y aurait-il pas, en effet, un risque quant aux positions et décisions de la France sur le gaz de schiste, sur les cultures OGM, sur l’alimentation animale et la viande aux hormones ? Quid de la politique de protection sociale de la France ? Quid du SMIC ? Quid de l’exception culturelle française ? Quid de la politique agricole commune de l’Europe ?….

Mais n’y a-t-il pas plus inquiétant encore ?
Ainsi, le Collectif #StopTafta n’hésite pas à avancer que cet accord réduirait au niveau américain qu’il qualifie proche de zéro, les droits en matière de protection des données et les droits de propriété intellectuelle.

Enfin n‘y a-t-il pas un risque majeur pour les nations composant l’UE de voir leur justice et donc leur identité et indépendance nationale remise en cause ? Les signataires du traité reconnaitraient le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (Cirdi) dont le siège est à Washington, comme tribunal d’arbitrage dans les litiges entre entreprises privées, mais également entre ces entreprises et les Etats. Les investissements des Etats-Unis en Europe n’échapperaient-ils pas ainsi au contrôle et à la justice des Etats de l’UE ?

Pour ses détracteurs ce traité relève de l’ultralibéralisme. Pour ses défenseurs, il doit permettre d’avancer là où l’OMC piétine : les négociations du Cycle de Doha lancées il y a plus de 10 ans, n’ont toujours pas permis de trouver un accord commercial multilatéral.

Et l’électeur européen ?
Qu’il se réjouisse des effets positifs annoncés ou qu’il craigne ses effets pervers, il doit être conscient de l’extrême importance du vote du 25 mai. Donc, il ne s’abstiendra pas, il ira voter !

– par Hélène lafon
25 avril 2014

* Jean Arthuis : 7 bonnes raisons de s’opposer au traité de libre-échange transatlantique / Le Figaro – 11/04/2014