A moins d’être aveugle, innocent ou inconscient, le deuxième tour de l’élection présidentielle ne recèle aucun mystère. Emmanuel MACRON sera désigné le 7 mai pour diriger la France. Comment pourrait-il en être autrement après les appels en sa faveur d’élus de tous bords espérant conserver leur siège, du premier ministre, du parti socialiste, des ténors Républicains dont la voix est chaque jour moins audible et du chef de l’état lui-même qui, à ce titre, devrait observer une parfaite neutralité.
Un tel déferlement ne manque pas d’interpeller. Il n’est pas sans rappeler celui de 2012 où le slogan était » Tout sauf Sarkozy « . On connaît la suite. Le procédé est honteux. Il conduit non à élire un candidat, mais à éliminer son concurrent. Autrement dit, aujourd’hui, c’est » Tout sauf Marine Le Pen « .
Tout y passe depuis l’usage éhonté du » front républicain » à celui de la candidate de » l’extrême droite « , car personne, sauf ceux qui en tirent profit pour affoler l’électorat, ne peut définir ces deux notions qui sont seulement la création d’une classe politique soucieuse de ses privilèges.
Les mœurs ne changent malheureusement pas. La trahison a été au centre du scrutin. Ainsi Emmanuel Valls, après s’être engagé, par écrit, à soutenir le candidat qui remporterait la primaire de gauche, s’est empressé de soutenir Emmanuel Macron, se déclarant prêt à gouverner avec lui. Robert Hue, ancien leader du parti communiste en fait de même.
Mais plus surprenante est la position d’une majorité des responsables Républicains qui entonnent la même antienne. Ces derniers sont probablement les plus hypocrites parce que leur position est bancale. En effet, s’ils soutiennent Emmanuel Macron au nom de » Tout sauf Marine Le Pen » ou de « barrage à l’extrême droite », leur grand dessein désormais est de devenir une force d’opposition à Emmanuel Macron, comme l’expliquait récemment sur les ondes un ancien premier ministre Républicain.
Ils visent évidemment les élections législatives en espérant obtenir à l’Assemblée Nationale une majorité qui leur permettrait d’empêcher Emmanuel Macron de mettre en œuvre son programme et suggèrent la désignation de François (c’est semble-t-il le prénom obligé pour exercer de hautes fonctions, sauf avatar) BAROIN comme premier ministre.
Autrement dit, ils le soutiennent comme la corde soutient un pendu, tandis que d’autres sont prêts à renoncer à leur étiquette d’origine pour le logo » En marche « .
Encore et toujours des arrière-pensées par nature perfides. N’ont-ils pas compris que l’électorat ne veut plus du partage du pouvoir en deux camps et si l’on peut rendre un seul hommage au président Hollande, c’est celui d’avoir donné le jour à une créature d’autant moins vulnérable qu’elle est vierge de tout engagement politique antérieur, lui permettant de rassembler autour d’elle des sensibilités qui n’ont cessé de se combattre jusque-là. Autrement dit, il sera parvenu à faire siéger dans le même camp des personnages qui se sont toujours combattus par principe, sans autre souci que d’apparaître dans la majorité ou l’opposition.
L’histoire dira si le calcul était bon mais un fait est sûr beaucoup sont prêts au parjure en attendant un autre mouvement de fond. L’essentiel étant pour eux de se perpétuer.
Pierre Esposito