Carton du FN: « Comment en est-on arrivé là ?»

images« Comment en est-on arrivé là ? », c’est le titre de l’éditorial du Monde du 8 décembre, après le « carton » du Front National au premier tour des élections régionales. Passé le titre, dont on imagine qu’il conduit à une analyse connue, vient la conclusion : « C’est une reconstruction en profondeur qui s’impose ». On n’en saura pas plus sur le type de reconstruction imaginé par le quotidien et la méthode pour y arriver.

Cette reconstruction en profondeur, de nombreux rédacteurs, sur Alternatives Pyrénées, l’appellent de leurs souhaits depuis bien longtemps. Mais rien n’y fait. Rien ne bouge. Du coup 30% des français pensent que seul le FN peut faire bouger les choses. Ils n’ont pas tort ! Ni le PS, ni les Républicains ne proposent quoi que ce soit pour faire sortir notre Nation de l’immobilisme. Ils se contentent d’un face-à-face stérile depuis si longtemps.

Oui, seul le FN peut faire bouger les choses, sauf que le replis sur soi, la xénophobie ne peut que conduire qu’à plus de chômage, plus de difficultés encore. France : De pays des lumières, pays universel passant au statut de pays fermé, recroquevillé sur lui-même !

Pas une nation du monde, au « top » de l’attractivité, ne vit repliée sur elle-même. Où préférez-vous vivre ? Canada, Finlande ou Corée du Nord, Vénézuela ?

Les observateurs semblent avoir du mal à conclure que ce sont nos présentes institutions qui créent le personnel politique actuel. Soit dit en passant, n’en doutons pas un instant, ces institutions amèneront les cadres du FN, en l’espace de deux petites mandatures, à être des copier-coller de l’UMPS actuelle. La soupe est trop bonne.

La Constitution de la Vè République avait été taillée sur mesure pour Charles de Gaulle. Sauf que, celui-ci disparu, sa constitution présidentielle est restée en place. Un uniforme toujours trop grand pour ses successeurs. Un uniforme qui conduit la France, depuis plusieurs décennies, dans une lente glissade vers le bas. Pour beaucoup, la France a maintenant besoin d’un Napoléon ou d’un De Gaulle. Le recours à l’homme providentiel est la preuve ultime que nos institutions ne sont pas à la hauteur d’une démocratie moderne. « Il nous faut un De Gaulle… ». Quel constat d’échec ! Entendons-nous ce type de réactions dans les pays anglo-saxons ou du nord de l’Europe ?

Supprimons la Présidence, supprimons les communes, diminuons de moitié les représentants à toutes nos assemblées (de 800.000 indemnités de fonction « politiques », la France passera à 400.000… contre 30.000 en Grande Bretagne à ce jour), publions leur patrimoine en tant que couple, limitons le cumul dans le temps à deux mandats, interdisons le cumul simple, rendons contraignantes, sous peine de pénalité, les recommandations de la Cours des Comptes, introduisons la notion de Transparence dans le préambule de la Constitution, veillons à limiter les domaines d’intervention des différentes strates administratives à des compétences très précises, rendons pénalisable leur non-respect, rendons obligatoire la consultation des citoyens par voie de référendums locaux, régionaux, nationaux dès que des niveaux de budgets sont atteints, uniformisons les régimes (tous), payons les indemnités d’élus au temps de présence mais n’oublions pas la mise en place d’un statut de l’élu etc. Tout a été écrit sur AltPy.

Une fois cette longue liste (non-exhaustive) de réformes arrètées, il s’agit d’imaginer comment la mettre en place. Typiquement, cela devrait être le rôle de la prochaine présidentielle qui doit refonder la démocratie française.

Le programme des candidats à l’élection de 2017 sera primordial sur ce point. Qui osera s’atteler à ce chantier ? Qui de Sarkozy (qui a déjà annoncé vouloir revenir sur la loi sur le cumul !), Juppé, Fillon, Bayrou, Hollande ou Valls saura se jeter à l’eau et proposer un nouveau fonctionnement pour notre démocratie. Oser, encore oser, toujours oser !

A moins que cela ne soit Marine Le Pen qui, dans le rôle de l’homme providentiel, se contente simplement d’endosser l’uniforme du Général. Un vieux modèle datant des années trente…

Tout est ouvert et le pire probable. A nous citoyens, tout au long de 2016, de bousculer, sans ménagement et avec ténacité, nos « politicards » pour qu’ils se bougent. Tant qu’il n’est pas trop tard. Nous n’avons qu’une petite année devant nous. Comment s’y prendre ?

– par Bernard Boutin

Politique – Démocratie verticale ou démocratie horizontale : Que voulons-nous ?

imgdemocratie002Oui, la France est « en démocratie ». Nous élisons nos représentants. Mais notre démocratie fonctionne t-elle au mieux des intérêts de ses citoyens ? A voir tous les déficits qui courent, la très mauvaise perception du personnel politique par les électeurs français, l’étendue du chômage, on peut douter que les institutions correspondent à l’air du temps. 

Démocratie verticale : C’est celle qu’a voulu pour nous Charles De Gaulle. Une démocratie, certes élective, mais où le citoyen ne compte pas entre deux échéances. Cette démocratie-là ne fait pas le pari du citoyen mais d’un seul homme : le Président élu (et ses équipes). Ce phénomène a été renforcé depuis la mise en place du quinquénnat, suivi de l’élection des députés pour la même période de temps. Une assemblée gaudillot.

Beaucoup en France, reviennent vers les années De Gaulle : le sens de l’autorité et de l’Etat. Mais est-ce cela qui fait avancer un Nation ? N’est-ce pas plutôt de donner aux citoyens les moyens pour que, compte tenu de leurs capacités individuelles, chacun contribuent, dans son domaine de savoir, voire d’excellence, à l’évolution de notre société dans toute sa diversité économique, sociale, scientifique, culturelle, sportive… De Gaulle n’avait pas mis l’Homme au cœur de son projet mais la Nation. C’était une autre époque.

Oui, bien entendu, il nous faut un pays centralisé pour que l’ordre soit la règle et ainsi « éviter la chienlit ». Mais, cela crée une condition nécessaire mais pas suffisante. Non, il ne faut pas que le pouvoir tombe entre les mains de quelques uns. Pour une bonne pioche, combien de mauvaises ? Au vu de l’état actuel de notre pays, qui a été la « bonne pioche » de la Vème République ? Parmi les Présidents De Gaulle, Pompidou, Giscard d’Estaing, Mitterand, Chirac, Sarkozy, Hollande ? Parmi les Premiers Ministres ? Parmi les Parlementaires ? etc.

Cette démocratie verticale, ne fait pas le pari du citoyen. Elle part du principe qu’il n’est pas capable. L’Etat est là pour lui. L’Etat avec son élite, ses énarques, ses politiciens inamovibles. L’élite ! Quel horreur que cet attribut-là ?

L’élite de la France, se sont les Français eux-mêmes, leur savoir-faire, leur éducation, leur perception du monde, d’ici et d’ailleurs. Malheureusement, ils sont bridés, étouffés, freinés par l’impôt, les normes, les rigidités, les monopoles etc. Jamais ils ne sont consultés tant par référendum que par votation populaire. Notre démocratie française ne croit pas en ceux qui la composent : les Français.

Pourquoi tant de Français partent s’installer à l’étranger ? Beaucoup pourraient souvent trouver du travail en France. Ils partent parce qu’ils ont le sentiment qu’ailleurs les opportunités existent plus que dans leur propre nation.  Quel désastre ! A qui la faute ?

Démocratie horizontale : L‘élu n’est pas plus que le Français. Il est là pour créer les conditions de son épanouissement, de sa réussite « dans les domaines économiques, sociaux, scientifiques, culturels, sportifs ». Il doit s’assurer que les services (administration centrale, régionale, départementales, communales), à tous les niveaux n’entravent en rien l’initiative, la prise de risque des citoyens sans laquelle ceux-ci sont condamnés à être dans l’attente, en dépendance de l’Etat.

Pour cela, l’élu ne doit plus être au même poste qu’un nombre de mandatures très limité dans le temps. Il « tourne ». Monte de la vie civile, fait un temps « en politique » et reprend sa place parmi les Français.

Ces passages rapides permettront plus d’horizontalité, plus de « créativité citoyenne ». Notre démocratie, en finira avec les postures, les certitudes de trop nombreux élus en poste depuis si longtemps et qui n’ont plus qu’un seul objectif : le Pouvoir encore et toujours.

Disons le haut et fort, la Vè est aujourd’hui en situation d’échec. Un mode de « démocratie verticale » qui n’est plus de notre époque. La France s’enfonce dans les classements et la pauvreté. Rendons le pouvoir aux Français eux-mêmes. Ils ont beaucoup plus de capacités que les soit-disant « élites » du sérail. Finissons-en avec le cumul dans le temps ! Il y a urgence.

– par Bernard Boutin

Denys de Béchillon devant l’UDI.

imagesBien connu à Pau et sur le plan national, Denys de Béchillon que notre publication a eu l’honneur de rencontrer par le passé, est professeur à la faculté de droit de Pau et agrégé de droit public. Dans le domaine constitutionnel, par ses réflexions, il a acquis plus qu’une réputation, il est certainement une référence. Le mardi 25 novembre 2014, invité par l’UDI locale, il planchait sur les sujets suivants : réforme de nos institutions, non cumul des mandats, vote à la proportionnelle.

 En préliminaire, un certain nombre de constats s’imposent :

  • 82 % des personnes interrogées estiment que les politiques n’agissent pas dans l’intérêt des Français,
  • 96 % des Français sont contre le cumul des mandats,
  • La réforme des institutions ne réglera pas les problèmes actuels,
  • Il n’y a pas actuellement de majorité des 3/5ème au parlement pour engager une réforme de la constitution.
  • Le mode de scrutin pour l’élection des députés n’est pas inscrit dans la constitution mais relève du domaine de la loi.
  • Actuellement pour une réforme des institutions, nous ne disposons pas d’argent ni de consensus politique.

Sur les institutions en premier lieu.

On entend parler de la VIe République. La constitution de la Ve République ne mérite pas la critique qui lui est faite actuellement. Il s’agit de la meilleure constitution que nous n’ayons jamais eue. C’est sans doute la meilleure du monde. Grâce à elle nous sommes sortis d’un grand nombre de difficultés sans crise institutionnelle majeure. La guerre d’Algérie, mai 68 et plus récemment la crise que nous connaissons encore aujourd’hui. Elle permet un certain nombre d’adaptations dont la cohabitation. Cette cohabitation n’est d’ailleurs rien d’autre que la volonté des Français.

Quand on touche aux équilibres constitutionnels  on ne sait jamais à l’avance ce que l’on fait et où l’on va. En matière constitutionnelle il faut en faire le moins possible autrement nous risquons l’aventure constitutionnelle.

La réforme de 2008, voulue par Sarkozy, a eu comme objectif de renforcer le pouvoir parlementaire. Le projet de loi  porte sur le texte de la commission et plus sur le texte du gouvernement. Autrefois de Gaulle avait voulu qu’un projet de loi émanant du gouvernement soit discuté en commission et qu’ensuite ce soit le texte du gouvernement qui soit soumis au débat de l’Assemblée Nationale. Aujourd’hui, c’est le texte de la commission qui est soumis au vote des parlementaires. On s’aperçoit que c’est probablement une catastrophe. Le pilote ne peut pas être quelqu’un d’autre que le gouvernement. On a maintenant des textes qui sont mauvais, cela ne marche pas bien.

Enfin toujours sur la constitution, Denys de Béchillon considère que la réduction  du mandat présidentiel du septennat au quinquennat est une erreur. On ne reviendra pas en arrière par référendum; il n’est pas envisageable que les  électeurs veuillent augmenter la durée du mandat d’un président dont la cote de popularité est aussi faible.

Sur le cumul des mandats.

La règle du non cumul des mandats sera donc en vigueur en 2017. Elle présente certains avantages parmi lesquels, les parlementaires seront des spécialistes plus présents.  Mais elle présente aussi des effets pervers. Il y aura un découplage avec les sénateurs, sur le plan pratique cela ne peut pas bien marcher. Un député ne pourra pas avoir un autre métier ce qui interdira le cumul professionnel. Par contre s’il est fonctionnaire, il sera protégé car assuré de retrouver son emploi à la fin de son mandat. Autre conséquence un député soumis au non cumul aura comme préoccupation essentielle sa réélection, celle-ci deviendra vitale car sa seule source de revenus. Il lui faudra donc être soumis à son parti s’il veut obtenir son investiture. Le clientélisme apparaîtra. Egalement son temps de présence locale sera en concurrence avec sa présence nationale.

A terme nous risquons de voir apparaître une homogénéisation des parlementaires. Les origines professionnelles seront moins diversifiées, ce qui n’est pas bon. On trouvera principalement des fonctionnaires et d’anciens attachés parlementaires.

Alors on parle du statut de l’élu. Il s’agit dans le projet d’un statut protecteur mais on ignore son contenu. Les français se méfient à ce sujet surtout à une époque de défiance  vis-à-vis du monde politique.

Le scrutin proportionnel.

Denys de Béchillon l’affirme : «  J’aime le scrutin majoritaire, il permet stabilité et pérennité ». Il conçoit bien sûr que pour les centristes ce système soit pénalisant. Le scrutin majoritaire c’est très bien lorsqu’on a une majorité. Aujourd’hui, on constate qu’il n’y a pas de majorité. On peut imaginer une coalition comme en Allemagne et en Angleterre. Mais, il le redit, il ne croit pas que la constitution de la Vème république soit compatible avec la proportionnelle. Avec une proportionnelle à 50 % il est certain de ne pas disposer d’une majorité. Sous la troisième et  la quatrième République, l’instabilité gouvernementale tenait à la proportionnelle. Par ailleurs cette proportionnelle, n’est pas à son avis, compatible avec l’élection du Président de la République au suffrage universel.

                                                                                               Pau, le 29 novembre 2014

                                                                                               Par Joël BRAUD