La fille aînée de l’Eglise ?

Disons-le, la conduite des affaires par le « grand timonier » qui tient la barre de notre pays est bien difficile à suivre par les temps qui courent. Les annonces se succèdent dans tous les sens et on en a le tournis. Les chantiers de la « modernité » s’ouvrent à une vitesse accélérée et plus personne ne s’y retrouve. En est-il conscient ? Sans doute est-ce pour cela qu’il entame une session d’explication tortueuse dans sa forme puisqu’elle démarre par le 13 heures de l’inamovible Jean-Pierre Pernaut et se poursuit par un match de catch annoncé face son ennemi intime (quoique !) Edwy Plenel qui ne devait pas s’attendre à une telle promotion, en compagnie de Jean-Jacques Bourdin, phénix de RMC. Exit le Service Public de l’Audiovisuel cette « honte de la république ». C’est plus qu’un symbole : c’est une indication…

Nous sommes donc perplexes voir sidérés devant tant de précipitations dans les réformes mais, rassurons-nous, la fameuse « pédagogie » devrait remédier à nos états d’âme. Hélas ! Nous ne sommes plus des enfants, nous apprenons par nous-mêmes et les explications ne sont pas toujours convaincantes… le hiatus pourrait donc se prolonger. Une sorte de désamour si nous constations que derrière Bonaparte des débuts se cachait un nouvel empereur autocrate et loin des préoccupations populaires.

Personne ne doute de la nécessité de réformer la SNCF. Un service public est fait pour les usagers qui, avant d’avoir souffert des grèves, ont été les victimes des défaillances de notre transporteur numéro un. Et l’on apprend, faut non seulement arriver en retard mais aussi payer deux fois, car l’Etat injecte des milliards pour faire marcher les trains… Donc une réforme oui dans ce secteur elle s’impose et pourquoi pas l’ouverture à la concurrence si cela devrait dynamiser le secteur. Pour autant, faut-il entamer un bras de fer sanglant avec les syndicats ? Faut-il vraiment les abaisser ? Qui va remplacer ces corps intermédiaires qui mettent l’huile dans la machine et parfois sur le feu quand c’est nécessaire. Tous les grands pays modernes : l’Allemagne (référence obligée) ou les Etats-Unis ont des syndicats puissants et respectés. Il y aura du sang sur les murs à l’issue d’un mouvement nécessaire certes, mais qui aurait pu se faire avec plus de douceur…

Ne parlons pas des facs car c’est un épiphénomène et la véritable réforme, celle qui s’attaque aux privilèges du système et de ses agents bien réels pour le coup, reste à faire. « Nous demandons la démission du président » disent la poignée d’occupants ; ils peuvent toujours demander… qu’ils laissent la majorité des étudiants passer leurs partiels. Il en est de même des Zadistes : la légalité républicaine s’applique à tous… la Commune Libre de Notre- Dame-des-Landes ne peut pas imposer son diktat contre la loi. C’est la logique.

Plus surprenante est la récente visite du président à l’épiscopat français pour «réparer», dit-il, un «lien entre l’Église et l’État» qui s’est «abîmé». On ne voit pas en quoi il s’est abîmé si ce n’est dans les tentatives forcenées et soutenues par la hiérarchie catholique de s’opposer au mariage pour tous avec la création du collectif « La Manif pour tous », menée par la militante catholique Frigide Barjot. On a bien vu, avec ces manifs répétées, très typées socialement, qu’il s’agissait de revenir non seulement sur un acquis adopté par de nombreux pays –les plus modernes- mais surtout de montrer ses muscles pour mettre en cause les piliers de la laïcité. Dans un premier temps de revenir par exemple sur le droit à l’avortement. Même si cela reste dans le domaine du non-dit. C’était l’électorat de Fillon et de Marine Le Pen auxquels les Français dans leur majorité ont tourné le dos pourquoi leur repasser le plat une seconde fois ?

En ces temps troublés, Macron s’en prend donc aux corps intermédiaires, les syndicats, les journalistes, mais plus grave, à la colonne vertébrale de notre société : la laïcité. Que vont penser en effet les musulmans de cette reconnaissance en fanfare des « cathos », après tout, si «la sève catholique doit contribuer encore et toujours à faire vivre notre nation», qu’en est-il de la sève islamique ? Et celle surtout de la majorité des Français qui se disent et revendiquent athées. Pour ces derniers ce pas de clerc est pour le moins méprisant : ainsi la France serait à nouveau consacrée « fille aînée de l’Eglise » ? Non ! La réaction d’Emmanuel Valls en pointe sur ce sujet, désormais député apparenté la REM, est pleine de sagesse : «La laïcité c’est la France, et elle n’a qu’un seul fondement : la loi de 1905, celle de la séparation des Églises et de l’État. La loi de 1905, toute la loi, rien que la loi».

Bien sûr l’élection de Macron a déclenché un tel bing-bang politique faisant éclater les frontières, disparaître les clivages droite gauche dont les ultimes représentants se réfugient dans l’invective et l’excès qu’il ne peut y avoir de traduction politique à ces faux pas. Il en restera néanmoins des traces. Il faudrait donc se joindre au modèle anglo-saxon qui ne connaît pas la laïcité ? C’est faire fi de l’histoire de notre pays qui a eu ses Clemenceau, Gambetta et Combes et qui a su, par la fermeté, créer un modèle unique –ou presque- qui nous est envié partout dans le monde. Il place la religion dans le domaine de l’intime et laisse les prérogatives de l’État dans la neutralité. Cet acquis est un bien trop précieux pour le risquer dans un jeu politicien subtil : se mettre les cathos dans la poche –ce qui ne sera pas le cas- !

Pierre Vidal

Faiblesses étatiques

La préfète trinque avec les zadistes pour les remercier d’avoir réouvert une route départementale qu’ils avaient bloquée depuis des années.

Or, l’entrave à la circulation est punie par l’article L. 412-1 du code de la route

De 4500€ d’amende,
De 2 ans d’emprisonnement,
Du retrait de 6 points sur le permis.
Mais aussi :

De la peine complémentaire de suspension, pour une durée de trois ans au plus, du permis de conduire, cette suspension pouvant être limitée à la conduite en dehors de l’activité professionnelle.
Plus encore, si le délit d’entrave à la circulation est «commis à l’aide d’un véhicule, l’immobilisation et la mise en fourrière peuvent être prescrites.

Ce dialogue avec des délinquants est une démonstration de faiblesse pour ne pas dire de peur. Non seulement, ces anarchistes auraient dû et devraient être poursuivis pénalement, mais on trinque avec eux dont certains sont allés jusqu’à baisser leurs pantalons pour montrer leurs fesses nues à la préfète, c’est-à-dire à l’État. Au contraire, on discute avec eux en les remerciant d’avoir accepté de rendre à la circulation une route départementale dont les usagers et contribuables ont été privés pendant des années.

Mais ce n’est pas fini car il va falloir remettre cette route en état ! Et aux frais de qui ? De tous les silencieux qui respectent les lois et les décisions de justice.

L’autorité de l’État est bafouée gratuitement non seulement par les zadistes mais par tous ceux qui, un peu partout, ont créé des colonies où pompiers, policiers, culture et coutumes françaises n’ont plus droit de cité.  Le territoire est annexé ! Elle l’est aussi dans les prisons où le radicalisme n’est qu’une manifestation anti-française, dans les écoles, dans les hôpitaux dans tout ce qui permet de mépriser le pays et de mettre en évidence la lâcheté de nos responsables qui n’osent pas utiliser les forces de l’ordre. Pas étonnant que les statistiques sur la délinquance sont mauvaises.

Dernière trouvaille, l’amende pour consommation de cannabis. Un autre aveu de faiblesse car tout le monde sait fort bien premièrement qu’il sera quasiment impossible de verbaliser les contrevenants, deuxièmement qu’ils ne paieront jamais l’amende. Un effet d’une annonce sans effet. Tôt ou tard cette consommation sera dépénalisée. Il faudra alors communiquer sur ses dangers car il y a bien danger pour les consommateurs mais aussi pour tout citoyen susceptible d’être victime de leur dangerosité.

Que veulent nos gouvernants ? La mort de la France ou une révolution ? Il est difficile d’imaginer une autre issue.

 

Pierre ESPOSITO

Crédit photo : nantes.maville.com

La faillite démocratique ou  » la force prime le droit  » .

Alors que le droit est censé être le fondement de toute démocratie, la violence semble devenue une nouvelle source de légitimité et la décision du gouvernement concernant l’aéroport défunt de Notre Dame Des Landes en est la dernière illustration.

La dernière, parce que par deux fois au moins auparavant, dans une période récente, les gouvernements se sont assis sur des décisions légalement adoptées .

Ainsi en fut-il du référendum du 29 juin 2005 sur le projet de constitution européenne rejeté par 54,68 % des suffrages exprimés.

Comme la décision populaire ne fut pas ce que le gouvernement espérait alors que tous les sondages donnaient un grand avantage à une réponse positive, on tergiversa et par un tour de passe-passe ignoré bien sûr de la plus grande majorité des citoyens, le gouvernement fit adopter par la voie parlementaire, le traité de Lisbonne qui reprenait l’essentiel du projet rejeté par référendum.

Certes il ne s’agissait pas d’une violence de rues, mais elle en était moralement une à l’égard de ceux qui n’avait pas été favorables à une constitution européenne. C’était une violence étatique organisée, légalement inattaquable par le citoyen lambda.

Mais c’était un mauvais exemple car quand les gouvernants profitent de leurs pouvoirs pour contredire les vœux du peuple, tout le monde peut s’estimer fondé à s’opposer à une décision démocratiquement établie.

Et c’est ce qui arriva avec l’écotaxe contestée violemment par  » les bonnets rouges » à partir de 2013. Des occupations de ponts, des destructions de portiques, de radars routiers, ont eu raison de la taxe qui fut remplacée par une hausse du gazole de quatre centimes d’euro pour l’année 2015.

L’histoire a entraîné 190 licenciements de salariés d’Ecomouv, société qui devait collecter la taxe, 957,58 millions d’euros de résiliation du contrat passé par l’État avec cette dernière, sans compter 70 millions pour la mise en œuvre puis la suppression des équipements, bref une belle gabegie que supportent seuls ceux qui paient des impôts. Évidemment aucun responsable !

Et voilà que la violence vient de payer avec la suppression du projet d’aéroport de  NDDL, car c’est bien de cela qu’il s’agit puisque le projet qui date de 1973 n’a jamais été mis en œuvre. Les opposants ont utilisé toutes les manœuvres possibles !

Des recours judiciaires qui auraient conduit à 178 ou 180 décisions, on s’y perd tant elles sont nombreuses et variées, non exécutées par l’État tout simplement parce que les  » zadistes  » avaient une autre arme en réserve : la violence physique et armée car on a laissé à ces fauteurs de troubles le temps de s’organiser avec un arsenal qui peut faire craindre de grands tumultes quand le gouvernement envisagera l’usage de la force pour les déloger. Pauvres gendarmes mobiles !

Le Président de la République et le Premier Ministre qui, tous deux, étaient déterminés à faire respecter les décisions judiciaires et un référendum donnant 55% de votes favorables au projet afin de ne pas affaiblir l’autorité de l’État cherchaient en fait une porte de sortie pour éviter l’affrontement avec les  » zadistes « . Ils ont nommé des médiateurs qui avaient en fait pour mission de préparer l’opinion à l’abandon du projet en suggérant une alternative par l’augmentation de la capacité de l’aéroport existant .

Et maintenant quelles conséquences ? Des milliards d’euros avec l’indemnisation de VINCI qui devait exploiter l’aéroport défunt pendant 55 ans , des marchés de travaux abandonnés et une capitulation qui sera mal récompensée car les  » zadistes « , des citoyens sans foi ni loi qui n’apportent rien à la société, ont pour but final de faire plier l’État . Ils n’y parviendront sans doute pas , mais à quel prix ? L’État a perdu l’honneur, il ne peut pas perdre la guerre.

Et cette faiblesse encourage tous ceux qui s’opposent à un vivre ensemble, ceux qui agressent les forces de l’ordre, les pompiers, les gardiens de prison, les enseignants etc. Nos gouvernants ne voient ils pas que le tissu social se détricote ou sont-ils incapables d’enrayer l’hémorragie de l’autorité légitime ?

 

Pierre ESPOSITO